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Reportage Afrique

French, Political, 1 season, 562 episodes, 22 hours, 6 minutes
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Nos correspondants et envoyés spéciaux sur le continent africain vous proposent chaque jour en deux minutes une photographie sonore d'un événement d'actualité ou de la vie de tous les jours. Ils vous emmènent dans les quartiers ou dans les campagnes pour vous faire découvrir l'Afrique au jour le jour. Diffusions : Lu à Ve vers l'Afrique à 05h48, 07h51, 09h51. Vers le monde à 05h34, 06h34, 08h20, 20h18. Retrouvez les sujets traités par cette émission sur RFI SAVOIRS = http://savoirs.rfi.fr/
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Kadeux, le nouvel espoir de la musique tchadienne

Il a été propulsé sur le devant de la scène avec le succès de son premier titre Ayéhan sur le réseau social TikTok. Le jeune chanteur Kadeux confirme son statut de nouvel espoir de la musique tchadienne, tout en gardant les pieds sur terre. À lire aussiKadeux, la révélation de la musique tchadienne
10/23/20242 minutes, 28 seconds
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Centrafrique: à Bangassou, le vélo est un outil incontournable pour les femmes

En Centrafrique, l’usage du vélo est omniprésent chez les femmes de Bangassou à l'est dans la préfecture du Mbomou. Dans cette ville d'environ 30 000 habitants, la plupart des personnes du sexe féminin âgées entre 12 et 45 ans sont des utilisatrices de la petite reine. De l'aube au coucher du soleil, on ne s'étonne pas de les voir sur ces engins à deux roues portant de lourdes charges, allant aux champs ou aux marchés hebdomadaires. Les grandes artères de la ville et les pistes rurales offrent tous les jours des spectacles impressionnants de femmes qui se déplacent pour assumer leurs activités socioéconomiques. L’usage féminin du vélo est devenu une tradition locale, bien plus que dans le reste du pays. « Apprends à ta fille comment pédaler avant de marcher », voilà un chant et une chorégraphie qui font la particularité de Bangassou. Très tôt ce matin, après avoir enfilé une culotte en pagne, un look lui permettant de mieux pédaler, Pélagie roule sur cette piste en latérite qui relie Bangassou au village de Niakari.Grâce à son vélo, cette mère de huit enfants peut transporter plusieurs kilogrammes de marchandises. « Ce vélo me permet de ne pas trop sentir la distance de mon champ qui se trouve à 20 kilomètres. Au départ, je faisais les allers-retours à pied et je portais les produits champêtres sur la tête. C'est pour me faciliter la tâche que mon mari m’a offert ce vélo. Depuis dix ans, je transporte tous mes produits agricoles sur ce vélo », se réjouit-elle.La bicyclette pratique sur les routes accidentéesÀ Bangassou, depuis le début des années 60, le vélo s'impose dans toutes les activités socioéconomiques des femmes. Angela est une griotte. Ces 20 dernières, elle va de village en village avec son vélo pour véhiculer des messages : « C'est surtout le moyen le mieux adapté pour atteindre les zones reculées, dépourvues de routes. En deux ou trois jours, je peux faire le tour de plusieurs villages pour annoncer les prochaines campagnes de vaccination, la rentrée scolaire, les élections malgré l'insécurité ».À lire aussiQuels transports urbains pour des villes africaines de plus en plus étendues?La pratique du vélo est devenue une tradition pour les femmes de Bangassou. Parmi les utilisatrices, il y a également des vendeuses ambulantes et des élèves. Gaston est l'un des sages de Bangassou. « Le vélo permet aux femmes d'être aujourd'hui au cœur des activités socioéconomiques, explique-t-il. Chaque mari fait de son mieux pour offrir un vélo à son épouse. On préfère le vélo parce que ça coûte moins cher par rapport à un véhicule ou une motocyclette. »Une pratique non sans risques Cette valeur se transmet de génération en génération. Mais aujourd'hui, la pratique du vélo n'est pas sans conséquence chez certaines femmes. Ronelle en a fait les frais : « Parcourir des kilomètres à vélo augmente les douleurs musculaires. Une fois, je me suis fracturée la jambe gauche après un accident. C'est aussi pénible de faire du vélo... »Si le vélo occupe une place importante dans la vie des femmes, il n'y a pas une usine de montage ou de fabrication de vélo à Bangassou. Ces deux roues sont importés de l'autre côté de la rive en République démocratique du Congo.À lire aussiCyclisme: la Béninoise Hermione Ahouissou, du roller aux Mondiaux de cyclisme en trois ans
10/22/20242 minutes, 24 seconds
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Côte d'Ivoire: les alternatives testées par les parents pour réduire leur temps d'écran [2/2]

Second épisode de notre série sur les jeunes et les smartphones en Côte d’Ivoire. Nous parlions dans le premier volet de la dépendance aux écrans des adolescents. On s’intéresse aujourd’hui aux parents. Quelles consignes leur donnent-ils ? Trouvent-ils des astuces ou des alternatives pour réduire l’addiction aux tablettes et aux smartphones de leurs enfants ? Reportage dans le quartier Blockauss, dans la commune de Cocody, à Abidjan. À la maison, Jean-Michel fait tout pour distraire ses enfants. Les plus jeunes ont le droit de manipuler des tablettes éducatives. « Ce sont des petites tablettes où nous téléchargeons divers jeux de société, c'est plus pour se divertir », explique le père de famille installé à Cocody, en Côte d'Ivoire.Et ici, pas de smartphone pour les ados. Jean-Michel a opté pour l'ancêtre du téléphone portable, dont la seule fonction se limite aux messages et aux appels. « Ici, le contrôle parental sur internet n'est pas facile, déplore Jean-Michel. Il y a un téléphone de la maison qu'on peut utiliser pour appeler une grande personne en cas de besoin. Il n'y a qu'un seul numéro, le numéro du répertoire de la famille, c'est-à-dire la personne qu'ils doivent appeler. Ce n'est pas un smartphone, c'est un téléphone basique qui permet juste d'appeler. Ce n'est pas méchant, c'est juste que, s'ils ont un souci, ils peuvent appeler quelqu'un. » « Il faut avoir l'âge »Gérer les smartphones offerts à leurs enfants est une préoccupation. Le débat s'impose de temps à autre lorsque Jean-Michel retrouve ses amis au maquis, la nuit. Parmi eux, Odette est partisane de la rigueur la plus stricte. Tout est une question d'âge, dit-elle : « Il faut avoir l'âge. Si un enfant a un téléphone à partir de 14 ou 15 ans, ça ne me pose pas de problème. Tu ne peux pas offrir un téléphone à ton enfant à partir de 7 ans. Tu l'amènes à la débauche. Souvent, il y a des fesses, du porno, ou encore des trucs de marabouts. L'enfant va se demander : "Mais là, qu'est-ce que c'est ?" »Inculquer et informer avant de donner Au-delà de l'âge, c'est aussi la question du mode d'emploi des outils numériques qui est posée, selon Fréjus Zamblé, un coach parental, qui accompagne et conseille plusieurs dizaines de parents : « Le meilleur mode d'emploi, c'est inculquer et informer avant de donner. Une fois qu'on renseigne un enfant au fur et à mesure, on peut être sûr que c'est bon, on peut lui donner le téléphone, mais avec un contrat ! Tu dois étudier, tu n'étudies pas avec ton téléphone. Tu ne dors pas avec ton téléphone. Tu ne manges pas avec ton téléphone. Quand l'heure d'étude arrive, on dépose dans ce que j'appelle "Le panier à téléphone", et les parents et les enfants déposent leurs téléphones quand ils sont à table. »Pour ce professionnel, l'éducation au numérique est aujourd'hui indispensable, mais elle s'adresse, avant tout, aux parents eux-mêmes, déjà absorbés par ces nouvelles technologies.À lire aussiCôte d'Ivoire: l'usage excessif du smartphone comporte-t-il des risques sur la santé mentale des jeunes? [1/2]
10/21/20242 minutes, 27 seconds
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Côte d'Ivoire: l'usage excessif du smartphone comporte-t-il des risques sur la santé mentale des jeunes? [1/2]

Le débat fait rage en France, où près de 200 collèges expérimentent depuis la rentrée la « pause numérique », soit l'interdiction totale des smartphones. Qu'en est-il en Afrique, où la place des écrans et smartphones est de plus en plus importante chez les adolescents ? En Côte d’Ivoire, par exemple, la très large majorité des établissements scolaires les interdisent aussi, sans pour autant endiguer l'équipement des élèves. Vu d'Abidjan, cela suscite des inquiétudes sur la dépendance des adolescents au petit écran. À lire aussiLa surexposition aux écrans, un danger pour le développement des enfants
10/20/20242 minutes, 18 seconds
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Centrafrique: ils pêchent le sable de l'Oubangui au péril de leur vie pour nourrir leur famille

L'extraction de sable est devenue une activité à grande échelle pour de nombreux riverains. Des jeunes désœuvrés, des étudiants et même des élèves poussés par la pauvreté pratiquent ce travail pour gagner de l’argent. On les appelle les « pêcheurs de sable ». Mais en cette saison pluvieuse, la crue de la rivière Oubangui rend difficile cette activité. Conséquences : les cas de noyade sont fréquents et le sable devient de plus en plus rare face aux demandes d’un secteur immobilier en pleine expansion à Bangui. De notre correspondant à Bangui,Dans cette pirogue de douze mètres de long et un mètre de large, une équipe de trois pêcheurs de sable se dirige au milieu de la rivière Oubangui. Contrairement aux pêcheurs traditionnels, ils n'ont pas de filets, mais des seaux, des pelles et des cordes. Pagaie en main, Oscar, jeune piroguier de 12 ans, essaie de contourner les vagues et les courants d'eau. « L'eau est très agitée pendant cette saison pluvieuse. Beaucoup attendent la saison sèche pour revenir, mais comme nous sommes des guerriers, on n'a pas le choix. »Après 10 minutes de voyage, nous arrivons enfin dans la zone d'extraction du sable. Vêtu de culotte noire, torse nu, Arnaud saute dans l'eau sans perdre une seconde. Deux minutes plus tard, le jeune de 28 ans remonte à la surface avec son seau rempli de sable. « En tant que pécheur de sable, ma mission consiste à faire des plongées à trois mètres de profondeur. Une fois au fond, je remplis le seau avec le sable. Ensuite, je secoue la corde comme un signal pour permettre à mon coéquipier qui est dans la pirogue de remonter le seau par la force de ses bras. »Conséquences multiples sur la santéDans ces eaux troubles de l'Oubangui, les pêcheurs de sable effectuent une centaine de plongées chaque jour. C'est un travail pénible avec beaucoup de conséquences, selon Alphonse, l'un d'eux : « On a trop de soucis. À force de pratiquer ce métier, certains d'entre nous ont des problèmes de vue, d'autres des problèmes d'audition. Chaque soir, j'ai des maux de tête et des problèmes respiratoires. On n’y peut rien, car c'est notre seul moyen de vivre. »Une fois la pirogue remplie, l’équipe revient pour à la berge pour stocker le sable. Ici, 20 tonnes de sable coûtent 50 000 CFA, soit 77 euros. Cet argent est partagé entre les piroguiers, les plongeurs et remonteurs et les chargeurs de camions. Arnaud gagne chaque jour 15 000 francs CFA, l’équivalent de 24 euros. « On travaille entre 8 heures et 17 heures, personne n’a de gilet de sauvetage, ni de bouteille d’oxygène, explique le plongeur. C’est difficile de trouver du travail et c’est pour cela que l’on se concentre quand même sur cette activité pour s’occuper de nos familles. »Ces sables servent à construire des immeubles, des maisons et des routes. Mais l'augmentation du niveau de la rivière Oubangui provoque aujourd'hui la rareté et la hausse des prix du sable à Bangui.À lire aussiCentrafrique: au village Gaga, un paysage défiguré par l’exploitation aurifère 
10/19/20242 minutes, 19 seconds
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Madagascar: améliorer l'alimentation en enseignant d'autres techniques agricoles

Promouvoir les cultures alternatives de contre-saison, parfois plus rentables, mais surtout qui permettent de créer des revenus complémentaires pour les petits agriculteurs, c’est l’un des objectifs du Sanoi, le Programme régional d’appui à la sécurité alimentaire et nutritionnelle de l’océan Indien, financé par l’Union européenne. Et dans la région Bongolava, sur les Hautes Terres centrales de Madagascar, où les taux de malnutrition chronique des enfants dépassent les 50 %, des champs-écoles et des champs de démonstration ont été créés pour présenter aux agriculteurs d’autres techniques et d’autres variétés de semence que celles que tous ont l’habitude de planter. Deux années après le démarrage du projet, des changements concrets sont visibles. De notre envoyée spéciale à Ambararatabe,Accroupie les pieds dans la terre, Anja Rivonirina, 28 ans, arrache un à un les bulbes d’oignons de sa parcelle. Ce jour-là, sa voisine, Bakoly Raholiarisoa, l’accompagne pour l’aider à récolter, mais aussi pour se former. Les bruits ont couru que les oignons d’Anja étaient particulièrement gros. La jeune agricultrice a utilisé des techniques agroécologiques nouvellement apprises et le résultat semble être au rendez-vous.« C’est la première fois que je fais du maraîchage sur cette parcelle, raconte Anja. Récemment, j’ai reçu plusieurs formations sur les techniques de culture des oignons. Et j’ai décidé de me lancer cette année. Avant, moi, je ne faisais que du paillage, je plantais de manière anarchique et j’épandais des engrais chimiques partout. Les récoltes étaient très moyennes. Là, j’ai fabriqué mon propre compost et mon propre engrais naturel, comme on me l’a appris, et regardez le résultat : ils sont gros ! »Sur son terrain, elle donne un conseil à sa voisine : « Quand tu sais que tes oignons sont prêts à être récoltés, tu arrêtes d’arroser une semaine avant. » Un conseil utile, puisque sa voisine pensait qu’elle devait attendre que les feuilles sèchent avant de déterrer les oignons.À lire aussi Madagascar : des programmes pour changer les habitudes alimentaires des populations ruralesDes pratiques qui assainissent la terreUne fois tous les deux mois, pendant deux ans, Anja est venue volontairement se former auprès de techniciens agricoles sur les parcelles de démonstrations installées non loin de son village par différentes ONG. Aujourd’hui, la jeune femme a décidé d’appliquer certains des conseils, « pas tous », confie-t-elle.Après quelques mois de mise en pratique sur ses propres parcelles, elle ne regrette rien des changements opérés. « Le compost que je fabrique pour mes oignons assainit ma terre qui était pleine de pesticides, témoigne Anja. Autre avantage de l’oignon, c’est que c’est une plante que je peux cultiver en alternance avec le riz sur cette parcelle. Et économiquement, c’est intéressant : le prix des bulbes ne fait que grimper depuis ces deux dernières années. » Si, pour certains agriculteurs, les techniques utilisées par Anja sont déroutantes ; pour d’autres, elles suscitent l’envie de lui emboîter le pas.Prendre des décisions éclairées pour essayer d’obtenir de meilleurs rendements et des revenus plus élevés : une des nombreuses stratégies inculquées à ces agriculteurs, pour leur permettre, en parallèle, d’accéder à une alimentation plus variée et plus nutritive.À lire aussi Madagascar : réduire la malnutrition chronique dans les villes grâce à la farine fortifiée
10/18/20242 minutes, 17 seconds
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Gabon: ouverture d'un ancien parc animalier des Bongo transformé en zoo public

Le reportage du jour nous conduit au Gabon à la découverte du nouveau parc animalier ouvert au public il y a une semaine. Les Librevillois défilent pour aller découvrir des tigres, des lions, des panthères et autres crocodiles… Le parc existe depuis quelques années, sauf qu'il était une propriété privée de l'ancien président déchu. Ali Bongo aimait passer du beau temps dans le parc, souvent en compagnie de ses hôtes de marque. Les militaires ont décidé d'ouvrir le parc aux touristes et à monsieur tout le monde. Tarif d'entrée 2000 francs CFA  pour un adulte, 500 francs CFA  pour les enfants. Reportage depuis le palais Oyo appartenant à la famille Bongo de notre correspondant à Libreville, Yves Laurent Goma.
10/18/20242 minutes, 19 seconds
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En Côte d'Ivoire, le théâtre et la sensibilisation pour lutter contre les violences faites aux femmes

Le 11 septembre 2024, le corps sans vie d’une jeune femme de 19 ans était retrouvé dans une résidence meublée, assassinée. Son petit ami est le suspect numéro un. Rien qu’à Abidjan, en 2020, plus de 400 féminicides ont été recensés. Et selon le Programme national de lutte contre les violences basées sur le genre, c’est au moins une femme sur trois qui serait victime de violence physique ou sexuelle au cours de sa vie. De nombreuses ONG sur le terrain sensibilisent les populations pour dire non à toutes formes de violences faites aux femmes.  De notre correspondant à Abidjan,Georgette a épousé son premier amour, rencontré au lycée. À ce moment-là, elle était loin d’imaginer que cet homme si doux qu’elle avait tant aimé allait devenir son bourreau. « J’ai souffert. Pour un rien, il me frappait, jusqu’à me casser une dent, témoigne-t-elle. Mon visage était souvent enflé à cause des coups. Un jour, j’ai pris mes affaires et je suis partie.»Aujourd’hui quinquagénaire, Georgette est ce qu’on appelle une survivante des violences conjugales. Mais elle porte encore les stigmates de cette période sombre de sa vie, et la peur ne l’a jamais quittée. « J’ai peur de me remettre en couple. Je vis seule avec ma fille. Quand un homme me dit "je t’aime", j’ai peur. Quand on me parle de mariage, je refuse, parce que j’ai peur. Regarde mon corps, je me sens bien, je ne veux plus d’ennuis », affirme-t-elle.Sur plus de 8 700 cas de violences basées sur le genre répertoriés en Côte d’Ivoire l’année dernière, au moins 6 700 sont des violences domestiques. L'ONG Akwaba Mousso, en un peu plus d’un an d’existence, a pris en charge près de 400 victimes. Diana Toan, responsable du parcours violences au sein de l’organisation, explique les étapes d’un cycle infernal :« Au début, l’homme est gentil. Puis, il commence par la violence psychologique : des injures, des humiliations. Ensuite viennent les coups. Et il se montre doux à nouveau, en disant que ce n’est pas sa faute, que c’est à cause de ce que la femme a fait. C’est un cercle vicieux. »  À écouter dans 8 milliards de voisins Reportage à Abidjan : paroles de militantes en Côte d’IvoireLe théâtre pour ne pas être un « témoin passif »Et pour inverser la tendance, l’accent est mis sur la sensibilisation de proximité. Dans un quartier populaire de Yopougon, des riverains assistent à un sketch dénonçant le calvaire vécu par certaines femmes dans leur foyer. À tout moment, le public peut interrompre la scène pour signaler ce qui lui semble anormal, et proposer des solutions.Souleymane Diomandé est le chargé de projet prévention et de la mobilisation communautaire à l’ONG Akwaba Mousso. « Les communautés savent ce que ces femmes vivent. Avec leurs propres mots, ils peuvent dire ce qu’ils pensent pour que toute la communauté puisse savoir comment est-ce qu’on réagit face à telle ou telle situation », explique-t-il. La démarche vise aussi à amener les communautés à « repérer [les violences] et ne pas être des témoins passifs qui voient des violences, mais qui ne réagissent pas. »Face à l’ampleur de ces violences faites aux femmes, le gouvernement ivoirien a mis en place plusieurs mesures. Parmi celles-ci, la réactivation et l’installation de 87 plates-formes multisectorielles de lutte contre les violences basées sur le genre, ainsi que la création de 33 bureaux d’accueil dans les commissariats et brigades de gendarmerie pour les victimes.À écouter dans Priorité santé Prise en charge des violences faites aux femmes et aux enfants et lutte contre l’impunité
10/16/20242 minutes, 27 seconds
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Au Congo-Brazzaville, un an après les inondations, les défaillances sanitaires dans la Likouala

Il y a près d’un an, le Congo-Brazzaville subissait les pires inondations de son histoire récente. Les dégâts ont été considérables : 1,79 million de personnes ont été affectées et 525 400 personnes, soit un Congolais sur douze, ont eu besoin d’une assistance humanitaire. Alors que les pluies arrivent et que le risque de nouvelles inondations est réel, les habitants redoutent de revivre le cauchemar de l'an dernier, notamment sur le plan sanitaire. Dans la Likouala, département le plus touché et le plus éloigné de la capitale, les craintes sont fortes. De notre envoyée spéciale de retour de la Likouala, dans le nord-est du Congo,Dans le village de Boyélé-Port, la tonnelle qui abrite Ornella du soleil a servi de lit surélevé en début d'année, quand il a fallu accoucher de ses jumeaux. « Pendant les inondations, nous nous étions réfugiés sur une bande de terre avec nos sept autres enfants, témoigne-t-elle. Quand les douleurs ont commencé, mon mari m'a ramenée ici en pirogue. »Les difficultés ne se sont pas arrêtées là pour Ornella et ses nouveaux-nés : « Le premier enfant est sorti. Celui qui était venu m'aider ne savait pas qu'il y en avait un autre. Pendant qu'il prenait soin du premier, le deuxième est sorti et il est tombé dans l'eau, raconte Ornella. On a sorti le bébé de l'eau, on l'a réanimé. Dieu merci, les deux ont survécu. Mais nous souffrons toujours, nous manquons de nourriture. »À deux heures et demie de route, la directrice de l'hôpital de référence de Bétou, docteure Fanny Eteka, manque de moyens et de personnel pour assister les femmes dans les villages quand l'eau monte. « Quand il y a des inondations, les déplacements sont impossibles et les femmes sur le point d'accoucher se retrouvent coincées, constate la directrice d'hôpital. Elles n'ont pas d'aide de personnel médical. Si l'accouchement réussit, Dieu merci, s'il ne réussit pas, parfois, il y a des décès que nous n'enregistrons pas, car quand il y a des décès là-bas, on enterre directement et nous ne recevons pas l'information du décès. Donc, cela peut aussi fausser notre statistique. »À Ikpengbele, au moins sept enfants sont morts faute de soins suffisants lors des inondationsAutres conséquences sanitaires des inondations, les maladies liées à l'eau souillée, et la destruction des cultures qui aggrave le risque de malnutrition.  À Ikpengbele, village de 5 000 habitants, Gédéon Boazou, infirmier bénévole, gère le centre de santé intégré, où les médicaments et l'équipement médical ont manqué pour faire face aux besoins quand la rivière Oubangui a envahi le village.« Il y a beaucoup de problèmes, surtout la diarrhée, les dermatoses, la malnutrition, la vaginose, chez les femmes, liste l'infirmier. Il y a aussi beaucoup de cas de malnutrition chez les femmes et les enfants et si on n'intervient pas, la personne meurt. Nous avons eu des morts à cause de la malnutrition, surtout des enfants. »Selon Gédéon Bouazou, au moins sept enfants sont morts faute de soins suffisants lors des inondations. Pour faire face cette année, il a déjà reçu et stocké une aide du Programme alimentaire mondial, organisme de l'ONU. À lire aussiFace au risque de nouvelles inondations, le Congo-Brazzaville entre adaptation et résignation
10/15/20242 minutes, 18 seconds
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Inondations à Brazzaville: un an après, les sinistrés dans la crainte d'un nouveau désastre

Il y a près d’un an, fin 2023, le Congo-Brazzaville a subi les pires inondations de son histoire récente. Les cours d’eau sont sortis de leurs lits dans des proportions inédites, provoquant des dégâts considérables. La banlieue sud de Brazzaville a été touchée, sur les rives du fleuve Congo. Dans le quartier Tchouri et Mafouta dans le huitième arrondissement de la capitale, beaucoup d'habitants sinistrés à Noël dernier n'ont pas eu d'autre option que de retourner vivre dans leur maison malgré la nouvelle saison des pluies qui approche. « La hauteur, c'est à peu près là », indique Brian Honneur Wandete en montrant une trace sombre sur le mur en béton presque aussi haute que lui. Il venait d'avoir douze ans à Noël dernier quand l'eau du fleuve Congo a envahi le quartier Tchouri. « Cette eau nous a carrément gâché la vie, on a perdu beaucoup de nos effets personnels, le congélateur, mes cahiers, mon sac était tout mouillé, raconte le jeune garçon. Ça m'a fait peur, ça a même failli me faire pleurer. Mon année scolaire pour passer en sixième au collège, je l’ai ratée, j'ai raté mon CEPE, ça m'a carrément fait mal. Nous avons tous peur, car la première fois que nous avons vu ce genre de choses, tout le monde ici était surpris, c'était un désastre pour nous. »La scolarité de 43 000 élèves interrompueSelon l’Unicef, la scolarité de plus de 43 000 élèves a été interrompue dans tout le Congo pendant les inondations l’an dernier. Comme la famille de Brian Honneur, celle de Blaise Malonga, au coin de la rue, a dû quitter sa maison pendant trois mois. « Nous sommes allés vivre juste en face là-bas. Il y a une maison en hauteur, une de nos collègues et amies, voisine du quartier qui nous a repêchés. Mais moi par contre, je suis reparti à Bas-Congo. C'est là où je suis allé vivre. Ça m'a vraiment stressé. Avec les enfants, nous étions vraiment tous malheureux. »1,79 million de personnes ont été affectées. Un Congolais sur douze a eu besoin d’une assistance humanitaire, mais beaucoup, comme Blaise Malonga, n’ont presque rien reçus. « Rien… Rien… Un petit matelas, un bidon d’huile de 5 litres, plus un sac de sel qu'on se partageait à quatre. On se disait que par rapport à ce que nous avions perdu, on recevrait un peu d’argent, mais malheureusement, ce n’est pas ce qui est arrivé », regrette-t-il.Deux familles, comme beaucoup d'autres, appauvries par l'épisode des inondations de fin 2023, et qui un an plus tard, n'ont pas retrouvé leur niveau de vie d'avant. Et cette année, si l'eau monte encore, ce sera encore plus difficile de se reloger pour Dorcia Ntondele et ses cinq enfants, faute de moyens. « Quand les pluies vont commencer, on ne sait pas où on va aller. On a vraiment peur pour cette année. Nous sommes seulement en train de regarder si ça va recommencer ou pas. »Selon le 19e Forum des prévisions climatiques d’Afrique centrale, les précipitations cette année seront encore supérieures à la normale, avec un risque élevé d'inondations.
10/14/20242 minutes, 22 seconds
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Maroc: à Fnideq, la jeunesse marocaine désespérée tente de rejoindre Ceuta à la nage

Ils étaient venus de tout le pays et se sont donné rendez-vous à Fnideq, ville qui jouxte l’enclave espagnole de Ceuta. Objectif : déborder les gardes-frontières et atteindre le territoire espagnol à la nage ou par la terre. L'événement a suscité un vif débat dans le pays, illustrant le désarroi d'une partie de la jeunesse. L'événement a suscité un vif débat dans le pays, illustrant le désarroi d'une partie de la jeunesse. Cent cinquante-deux personnes ont été traduites en justice pour incitation à l'immigration clandestine collective. La présence des fourgons de police, et les barrières placées tout le long du front de mer rappelle que Fnideq et ses environs restent étroitement surveillée depuis le 15 septembre. Ce jour-là, près 3 000 personnes ont tenté de passer en force pour rejoindre l’enclave espagnol lors de six tentatives distinctes. Driss, était l’un d’entre eux. Il a répondu aux messages lancés sur les réseaux sociaux : « J’ai vu les appels sur tous les réseaux sociaux : Facebook, Instagram, des groupes WhatsApp, tout le monde parlait du 15 septembre, tout le monde s’est donné rendez-vous à Fnideq. »Avec ses maigres économies, il parcourt plus de 400 km pour rejoindre le nord du pays : « Je suis venu de Meknès jusqu’ici parce que je veux vivre une bonne vie, sauver ma mère de la pauvreté, et gagner de l’argent (…) Ici, il n’y a rien, pas d’argent, pas de travail. »L'éloignement ou le refoulementDans son survêtement de sport, le regard pointé sur la ville autonome de Ceuta, piton rocheux à quelques kilomètres de là, Driss se souvient de cette journée où les forces de police, présentes en nombre, ont stoppé les candidats au départ dont certains avaient revêtu une combinaison dans le but de se jeter à la mer pour rejoindre Ceuta à la nage. « La police avait mis des barrières partout, un soldat a reçu un violent coup, le chaos s’est installé. Les policiers ont commencé à frapper tout le monde, on m’a envoyé à Beni Mellel. On ne m’a pas enfermé, on m’a juste laissé à Beni Mellel et on m’a laissé là tout seul. »Beni Mellel se trouve à 500 kilomètres plus au sud. L’éloignement, ou le refoulement interne, est une méthode pour dissuader ces jeunes candidats à l’immigration régulière.« Des gens meurent »Mounir, un Algérien de 20 ans, est revenu quelques jours plus tard à Fnideq. Le jeune homme a déjà tenté sept fois la traversée à la nage : « Je suis rentré à Ceuta, j’ai nagé, 5 kilomètres, mais c’est trop dur, il faut gérer. Si tu nages bien et que tu as de la force dans les bras, tu peux le faire. »Arrêté et expulsé dès son arrivée sur le territoire espagnol, il pense déjà au prochain départ. Au mois d’août, ses exploits ont été filmés dans une vidéo qui a fait le tour du pays, donnant envie à d’autres, au Maroc, de passer par la mer malgré les risques. « Des gens meurent, frère, affirme Mounir. Moi, je connais des gens qui en sont morts. »Depuis le début de l’année, la police marocaine affirme avoir empêché plus de 45 000 entrées clandestines en Espagne. Une politique récemment saluée par le ministre espagnol des Affaires étrangères, José Manuel AlbaresÀ lire aussiMaroc: les autorités reviennent sur les échauffourées entre police et migrants à Fnideq
10/13/20242 minutes, 15 seconds
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Maroc: Mers Sultan, classé deuxième quartier «le plus cool au monde»

Il se trouve à Casablanca, plus exactement dans le centre-ville. Mers Sultan est sur la deuxième marche du podium, selon le magazine britannique Time Out, qui prodigue depuis les années 1960 ses conseils de sorties dans les villes du monde entier. Les critères de Time Out sont purement subjectifs. Le magazine a décidé de récompenser cette année l'authenticité. Visite avec notre correspondant de Mers Sultan. C’est Notre-Dame-du-Mont, à Marseille, en France, qui devance Mers Sultan en tête du classement des quartiers les plus cools du monde selon Time Out.
10/12/20242 minutes, 30 seconds
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Côte d’Ivoire: la nouvelle exposition personnelle d’Elladj Lincy Deloumeaux à Abidjan

Au-delà du jardin, il y a la mer est une exposition où les œuvres mixtes, entre le tableau et la sculpture, de l’artiste guadeloupéen de 29 ans sont à découvrir à la galerie Cécile Fakhoury.  De notre correspondante à Abidjan,L’exposition se veut d’abord immersive : les décors des toiles sont répliqués sur les murs, couverts d’argile ocre ou de carreaux de salle de bain. Elle est aussi interactive, puisque le visiteur est invité à manipuler les portraits sur un panneau coulissant, à s’observer dans une œuvre pourvue d’un miroir ou à marcher sur une sculpture en forme de puits.Toute cette scénographie soigneusement étudiée est le résultat d’un travail de famille, révèle Rosy Noah, manager à la galerie Cécile Fakhoury. « La scénographie a été pensée en grande partie par sa petite sœur qui est Orlane Lincy Deloumeaux, architecte d’intérieur. Ils ont pensé toute cette scénographie ensemble. Elle est construite en trois étapes, trois espaces. Le premier, c’est un espace intime qui parle un peu de scènes du quotidien. Le deuxième est un espace-tampon pour arriver au dernier espace, qui est un lieu plus spirituel, avec un dôme qui a été pensé par les deux [Lincy Deloumeaux] et qui donne une idée de recueillement. Du coup, il y a un peu cette idée de circularité aussi. On a cassé certains murs de la galerie pour créer des arrondis, pour casser vraiment la rectangularité. On a transformé la galerie. On n'a pas du tout l’habitude de le faire, c’est un gros travail, mais c’est vraiment magnifique. » Mêler les références culturelles de deux continentsLes matériaux utilisés sont guadeloupéens ou ivoiriens : du bronze, du bois, du rotin, du sable. Pour cette exposition, Elladj Lincy Deloumeaux a effectué une résidence artistique de quatre mois dans la ville côtière de Grand-Bassam. Il mêle les références culturelles des deux territoires à travers les motifs du littoral, de la mer et du jardin. « Le jardin, c’est un espace familier, connu, quelque chose de très intime. J’ai eu l’opportunité de rencontrer pas mal de personnes, d’accéder à leur jardin et de comprendre leur vie quotidienne. Ce sont en fait des personnes qui ont quitté leur pays d’origine, qui ont eu le courage de quitter le territoire connu, leur zone de confort familier, pour se diriger vers l’horizon en prenant la mer, explorer d’autres territoires. Et ce qui m’intéresse, c’est comment, malgré ces changements de territoires, de culture, d’ambiance, comment ils ont pu créer leur propre intimité et y apporter du "chez soi", par rapport à un territoire qu’ils ont quitté. Comment, sur ce nouveau territoire, ils ont pu créer quelque chose de nouveau. »C’est justement le thème de l’afro-descendance qui a séduit Abishag Voundi, peintre martiniquaise venue découvrir l’exposition. Elle suit le travail de l’artiste depuis ses débuts. « Il travaille la peau noire, il travaille d’une façon qui, moi, me plaît, parce qu'il y a un travail qui est un peu nostalgique. Et je suis très heureuse qu’il arrive ici à Abidjan pour cette exposition. Il crée un vrai ancrage. C’est cet aspect aussi que je trouve important en tant qu’afro-descendant, en tant que jeune artiste, qu’il puisse s’ancrer sur la terre-mère et qu’il soit accueilli de cette façon. »L’exposition Au-delà du jardin, il y a la mer restera visible à la galerie Cécile Fakhoury jusqu’au 28 décembre.À lire aussiArts: en Côte d’Ivoire, l’exposition «The Culture Shock» interroge le rapport entre tradition et modernitéÀ lire aussiCôte d’Ivoire : la dernière génération de griots ?
10/11/20242 minutes, 16 seconds
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Ghana: Accra la vibrante transformée en ville fantôme par le photographe Paul Addo

Elle est souvent présentée à travers un seul et même adjectif : vibrant. Une ville qui vibre, donc, au rythme de sa vie économique effrénée, ses routes, ses fêtes, ses couleurs. Que se passerait-il si cette capitale du Ghana se vidait de toute personne, pour ne laisser que ses bâtiments ? C’est ce qu’a choisi de montrer le photographe ghanéen Paul Addo dans une série de clichés qui montre Accra comme vous ne l’avez jamais vu. De notre correspondant au Ghana, Sur cette grosse artère de la capitale règne un calme étrange. Seulement perturbée par le passage de quelques passants et trotros. Une ambiance presque irréelle, que l’on peut uniquement observer à Accra le dimanche matin, jour d’église et de repos pour la plupart des Ghanéens. C’est ce moment que choisit Paul Addo, 34 ans, pour sortir avec son appareil photo : « On se trouve devant le théâtre national. Il a été construit vers 1990 environ. Je photographie ses lignes, ses designs, son marbre. Ce sont ces choses qui m’intéressent. »Voilà dix ans que Paul Addo sillonne le pays armé de son objectif. Une carrière débutée dans les mariages ou encore les festivals traditionnels, après avoir grandi dans une ferme de la région centrale, avec ses quatre frères et sœurs. Toujours, entouré d’un fourmillement humain, à l’image de sa ville d’adoption, Accra. Mais cet encombrement de personnes empêche d’apprécier la réelle beauté de la capitale.« Parce que l’on est toujours très occupé à se déplacer dans la ville, on ne pense parfois pas à faire une pause pour voir les petites beautés qu’elle a à nous offrir. Son architecture, qu’elle soit vieille ou moderne. Je pense que ce que je fais en sortant le dimanche, c’est de capturer ce qu’on néglige parfois. »Une architecture stupéfianteLe rendu est stupéfiant : sur ses photos, aucun humain à l’horizon. À travers son regard, Accra la vibrante se transforme donc en une sorte de ville fantôme, pourtant toujours multicolore et très vivante. « Quand vous faites attention à l’architecture uniquement, vous vous rendez compte que c’est très chargé. Parfois même plus qu’un endroit avec beaucoup de personnes dedans. Quand vous regardez un bâtiment, vous pouvez voir pourquoi l’architecte a décidé de mettre un escalier à cet endroit. Vous pouvez regarder le design des fenêtres, des portes, c’est très loin d’être ennuyant. Parfois, je peux m’asseoir devant un bâtiment pendant très longtemps. »À lire aussiNEWSLETTER RFI CULTURE : Ne manquez pas les meilleurs reportages et idées d’une actualité culturelle internationale qui n’oublie pas l’Afrique.Plus qu’un hommage au travail des architectes, les clichés de Paul Addo témoignent aussi de la transformation rapide de la capitale. « Ça va très vite, vous pouvez remarquer qu’il y a plein de nouveaux bâtiments qui sont construits. J’ai montré à mon père une photo d’un lieu très moderne à Accra, et il m’a dit : "Oh, c’est à ce qu’Accra ressemble aujourd’hui ?". Et je lui ai répondu : "Oui" c’est Accra !" »Prochain objectif pour le photographe : organiser sa première exposition en solo. Elle devrait se tenir en début d’année prochaine, à Accra. En attendant, vous pouvez retrouver le travail de Paul Addo sur son site internet pauladdo.com.
10/10/20242 minutes, 20 seconds
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À Antananarivo, une tour Eiffel de douze mètres de haut attire les curieux

Une Dame de fer un peu particulière est sortie de terre dans la capitale malgache, et les curieux viennent de tout Madagascar pour se prendre en photo devant. À Antananarivo, un artisan ferronnier s’est mis au défi de construire une tour Eiffel dans sa cour. Et il a réussi. L’immense sculpture surplombe depuis deux mois les toits de son quartier et fait la fierté de ses habitants. Cette tour Eiffel malgache est devenue une véritable attraction au point que les internautes ont renommé le quartier d’origine Ampasapito en « Parisapito ». Rencontre avec celui qui a rêvé d’avoir Paris à ses pieds et qui l’a fait. De notre correspondante à Antananarivo, La fierté se lit sur le visage de monsieur Ruffin lorsqu’il présente « sa » tour Eiffel « construite en 8 mois, [elle pèse] une tonne et demie pour 12 mètres de haut ! », s'exclame-t-il. Vêtu d’un t-shirt orange élimé sur lequel on distingue encore l’inscription « Oh oui Paris », le quinquagénaire a plaisir à raconter la genèse de son projet un peu fou. « L’idée m’est venue il y a 3 ans en regardant des dessins animés avec mes petits-enfants. Ce monument m’a beaucoup plu ! Et ça a fait germer quelque chose dans ma tête, explique-t-il. Alors je suis allé voir un ami qui tient le cyber d’à côté, et je lui ai demandé qu’il m’imprime des photos de la tour Eiffel. J’ai étudié sa structure et j’ai tout de suite commencé la découpe, sans être sûr que ça fonctionne. Et au fur et à mesure, ça a pris forme ! », sourit-il.Et il est vrai que la ressemblance est saisissante : arcs, entretoises, étages, l’architecture du monument a été fidèlement reproduite, à l’échelle. Tout en métal, peinte en doré, la Dame de fer de monsieur Ruffin semble transpercer les toits en tôle ondulée des maisonnettes du quartier. La sculpture détonne dans le paysage ambiant et force l’admiration.« Je suis fier de l’avoir finie ! En plus, tout le monde l’adore, se félicite l’artiste. En plus, ça nous a rapporté plus de commandes : “Ruffin, viens nous faire ça !”, “Tony [le fils de monsieur Ruffin] peux-tu bâtir ça ?” » Il rit avant de poursuivre : « On est devenus célèbres grâce à elle ! Et depuis que je l’éclaire la nuit, des gens de Tamatave ou de Diego viennent même la prendre en photo ! »Soudain, une voiture se gare devant l’atelier. Deux instagrameuses en sortent, téléphone à la main. « On est juste là pour prendre une photo, parce que c’est très populaire en ce moment sur les réseaux, s’extasient-elles. On a la tour Eiffel à Antananarivo ! » Lorsqu’elles apprennent que monsieur Ruffin est le constructeur de la Tour, elles prennent un selfie avec lui, ravies. « Comme on n’a pas les moyens d’aller à Paris, on a fabriqué Paris pour l’admirer dans notre cour ! »Flanqué d’une casquette à strass avec la tour Eiffel dessus, Tony débarque à l’atelier, les bras chargés de barres en aluminium. Il est le fils de Ruffin. Ferronnier métallier lui aussi, il a aidé son père dans sa grande entreprise, et c’est avec malice qu’il résume en une phrase l’aventure familiale : « Comme on n’a pas les moyens d’aller à Paris, on a fabriqué Paris pour l’admirer dans notre cour ! »Aussi, Ruffin prévient : sa tour Eiffel n’est pas à vendre. Avant de préciser, avec espièglerie : « Mais si quelqu’un veut l’acheter, comme je l’adore, il va falloir négocier dur… »À lire aussiMadagascar: à Antananarivo, une exposition et un festival pour permettre aux femmes de se raconter
10/9/20242 minutes, 17 seconds
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Côte d'Ivoire: une seconde chance pour les jeunes filles déscolarisées suite à une grossesse

En Côte d’Ivoire, le nombre de grossesses en milieu scolaire a augmenté de 26 % en un an. De septembre 2023 à juin 2024, pas moins de 4 600 cas ont été enregistrés chez des adolescentes âgées de 12 à 18 ans, selon le Conseil national des droits de l’Homme (CNDH). Derrière ces chiffres se cachent des drames humains : pour beaucoup de ces jeunes filles, la grossesse marque la fin de leur scolarité et l’abandon de leurs rêves. Pourtant, des initiatives locales émergent pour leur venir en aide et leur offrir une nouvelle chance.  De notre correspondant à Abidjan,C’est en classe de 4ᵉ, à peine un mois après le début des cours, que Phalène, alors âgée de 17 ans, tombe enceinte. « Quand j’ai contracté la grossesse, témoigne-t-elle, le [père] m’a dit que ce n’était pas lui. Il m’a demandé de chercher le père ailleurs. Je n’ai plus rien dit et j’ai coupé tout contact avec lui. Un jour, il m’a rappelée pour me dire de mettre fin à la grossesse, car il n’allait pas s’en occuper. Il m’a dit que si je décidais de la garder, il se désengagerait totalement. » Déterminée, elle essaie de continuer ses études, mais entre les difficultés de la grossesse, l’incompréhension de sa famille et les moqueries de ses camarades, elle est contrainte de quitter l’école. Pour subvenir aux besoins de son enfant, elle enchaîne les petits boulots. Quelques mois après la naissance de son fils, Phalène rencontre l’ONG Pro Kids. « Ils m’ont appris la coiffure, se rappelle la jeune fille. Après la formation, ils m’ont donné 100 000 francs et du matériel. Je me suis débrouillée avec ça pendant deux ans. En décembre, je vais ouvrir mon propre salon, car je suis en train d’épargner de l’argent. » À écouter dans Priorité santéLes grossesses précoces à Yamoussoukro en Côte d’IvoireFormer et accompagner les jeunes filles mèresComme Phalène, environ 1 000 jeunes filles mères à Abidjan et à l’intérieur du pays bénéficient du programme d’accompagnement de l’ONG Pro Kids, fondée en 2017. Cette initiative a valu à sa présidente, Traoré Aïcha, le prix national d’excellence. Son objectif principal : offrir une seconde chance à ces adolescentes qui quittent prématurément le système scolaire. « Tout commence avec la formation, juge-t-elle. Il faut d’abord que les filles prennent conscience de cette deuxième chance. Une fois cette étape franchie, nous les accompagnons dans le financement ou l’achat de matériel en fonction de leurs besoins. Nous continuons ensuite à les encadrer sur la gestion de leur commerce, comment épargner et voir comment on peut les aider davantage. » Cette initiative est saluée par le sociologue Bini Koffi Roland, spécialiste des questions éducatives. Selon lui, il faut agir en amont pour résoudre le problème. « Il ne faut pas attendre que les grossesses surviennent. Il faut intégrer des formations qualifiantes dans notre système éducatif, pour occuper ces filles et leur apprendre à gagner de l’argent. » Le gouvernement ivoirien a lancé en 2013 une vaste campagne de sensibilisation intitulée « Zéro grossesse à l’école en Côte d’Ivoire », ciblant à la fois les jeunes et leurs familles. L’Institut de formation et d’éducation féminine (IFEF) prend en charge notamment les jeunes filles déscolarisées. À lire aussi Côte d’Ivoire : comment lutter contre la recrudescence des grossesses précoces en milieu scolaire ?
10/8/20242 minutes, 25 seconds
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Madagascar: réduire la malnutrition chronique dans les villes grâce à la farine fortifiée

À Madagascar, 4 enfants sur 10 souffrent de malnutrition chronique, cette privation répétée de nutrition pendant les 1 000 premiers jours de leur vie affecte leur développement, les exposant à des conséquences cognitives et physiques irréversibles. Pour lutter contre ce fléau, une entreprise sociale malgache développe depuis 2013 une farine infantile fortifiée, préparée chaque jour par des animatrices et vendue à un coût abordable aux plus vulnérables, en porte-à-porte, dans les grandes villes du pays.  De notre correspondante à Antananarivo, Au cœur de 67 hectares, un quartier défavorisé de la capitale malgache, dès 6 h 30, on entend résonner « Koba Aina-oooooo ! » Ce cri, c’est celui très reconnaissable de la vendeuse de la bouillie nutritive du même nom. En malgache, « koba aina » signifie « farine de vie ».Chaque matin, six jours par semaine, Tantely arpente son quartier, ses deux thermos de cinq kilos pleins portés à bout de bras. « Ça me fait plaisir de nourrir des enfants. C’est un peu comme si c’étaient les miens », confie-t-elle. Au son de sa voix, des dizaines d’enfants surgissent des ruelles et accourent, gamelle en métal et cuillère à la main. La quadragénaire distribue une ration à chacun, contre 500 ariary (9 centimes d’euro). « Mon travail consiste à préparer la bouillie en mélangeant tous les ingrédients : cacahouète, maïs, riz, soja, sucre, sels minéraux, calcium, vitamine et du fer, explique Tantely. Il faut 45 minutes pour que tout cuise. Ensuite, je quitte ma maison à 6h15 dernier délai pour pouvoir vendre aux travailleurs et aux enfants avant qu’ils ne partent à l’école. »À lire aussi Objectif « zéro faim dans le monde » : les Nations unies innovent pour trouver de nouveaux financementsPour beaucoup de clients, il s’agit du seul repas nutritif de la journée. Pieds nus, vêtus sommairement, Suzanne et son petit-fils s’insèrent dans la queue devant le thermos fumant de Tantely. « C’est bon. Ça fait 9 ans qu’on en consomme, c’est devenu notre petit déjeuner. Ça évite de cuisiner… mais surtout, ça tient bien au ventre jusqu’à midi et ça évite d’avoir à donner un goûter. »D’autres, comme pour Hasina qui attend sur le pas de sa porte le passage de la vendeuse, le Koba Aina est devenu le rituel pour bien démarrer la journée. Chaque jour, elle achète huit portions pour les cinq membres de son foyer. « J’en mange depuis toujours, bien avant d’être mariée. Et maintenant que j’ai des enfants, j’en mange encore plus, tous les jours !, témoigne-t-elle. Les seules fois où on n’en mange pas, c’est parce que la vendeuse ne passe pas devant chez nous. » Et la farine n'a pas seulement des vertus nutritives : « Franchement, c’est bon, ça permet à la famille d’être en bonne santé. Il y a des jours où mes enfants ne veulent rien manger d’autre… », assure Hasina.À écouter dans Priorité santé Améliorer l’alimentation des enfants : les solutions des jeunes de l’Hackathon« On a fait le pari de monétiser un service de santé publique »L’adoption du Koba Aina par les ménages des quartiers défavorisés ne s’est pas faite du jour au lendemain. Il a fallu au moins cinq années pour que les vendeuses comme Tantely, à force de sensibilisation, arrivent à changer les habitudes alimentaires de ces populations et rompent les idées reçues sur les prétendus bienfaits nutritifs de la soupe de riz.Mandresy Randriamiharisoa, le directeur général de Nutri’zaza, la société qui distribue le Koba Aina, estime que sa farine infantile fortifiée répond à une problématique de santé publique. « La population a été beaucoup habituée aux politiques d’assistanat. Or nous, on a pris le contre-pied », assure Mandresy Randriamiharisoa. « On a fait le pari de monétiser un service de santé publique. Si on explique aux gens le bienfait du produit, qu’ils sont responsables de leur destin, qu’ils sont capables de se prendre en main, d’investir en eux, en leurs enfants, en un avenir, ça pourrait marcher, juge le directeur général. Et ça fonctionne jusqu’à maintenant. Et d’ailleurs, c’est un de nos réseaux qui se développe le plus actuellement. »Si la situation nutritionnelle en milieu rural fait l’objet de beaucoup d’études sur l’île, celle en zone urbaine est beaucoup moins documentée. Pourtant, la malnutrition chronique frappe sévèrement les villes du centre du pays, à commencer par la capitale. En proposant massivement cette farine nutritive à un prix abordable, Nutri’Zaza ambitionne de réduire les retards de croissance des enfants dans les villes.À lire aussiVers une amélioration de la situation alimentaire dans le Grand Sud malgache ?
10/7/20242 minutes, 26 seconds
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RDC: les dangers de la traversée du fleuve Congo par pirogue à Kisangani

Dans le nord-est de la RDC, à Kisangani, plus de 20 000 personnes traversent chaque jour le fleuve Congo sur des pirogues. Une traversée de 800 mètres de distance qui ne manque pas de dangers : elle s’effectue à moins de cinq kilomètres des célèbres chutes Wagenia, ce qui peut entraîner des naufrages à cause du fort courant. Une autre raison explique ce danger : la surcharge des pirogues, qui a amené à la limitation du nombre de passagers à 15. Même si le nombre d'accidents a sensiblement diminué grâce à cette mesure initiée par l’Association des navigateurs fluviaux de Kisangani, la population continue d'espérer la construction d’un pont pour rendre moins dangereuse la traversée du fleuve Congo. De notre correspondant à Kisangani,À côté du vieux port de Kisangani, sur la rive droite du fleuve Congo, les pirogues remplies de passagers accostent ou s’éloignent du rivage à tour de rôle. À l'appel d'un conducteur de pirogues, 15 passagers se précipitent vers un engin construit par un assemblage de troncs d’arbres et équipé d’un moteur. La pirogue tangue à la montée, il faut s’accrocher au bord pour ne pas finir dans le fleuve. Après trois essais infructueux, le moteur démarre enfin. La traversée commence.« La traversée n’est plus si dangereuse avec 15 personnes à bord qui paient 1 000 francs chacun ; c'était plus dangereux avant, quand on prenait 30 personnes à 500 francs chacun », tient à rassurer le conducteur de la pirogue, le gouvernail bien en main. À lire aussiRDC: le port de Kisangani au ralenti faute d'entretien des voies navigables et des routesMalgré les risques, les passagers n'ont souvent pas le choix d'effectuer ce trajet de dix minutes. Des traversées bien souvent quotidiennes. « Je vais rive gauche pour écouler mes marchandises, ce sont des habits d'élèves, témoigne Pélagie, une commerçante. J’habite rive droite ; la traversée sur le fleuve est dangereuse, il y a beaucoup de risques, mais on n’a pas de choix. » Et ce trajet, elle le fait chaque jour, comme Willy Baraka, étudiant. « On a surtout peur de ce grand fleuve. Il arrive parfois que le moteur s’arrête au milieu du fleuve. Les pirogues ne sont pas rassurantes, confie-t-il, alors je vais demander au gouvernement de construire un pont, de mettre en place des mécanismes pour assurer la sécurité de la population, de mettre de vrais moyens de transport, comme de vraies pirogues. »En attendant la construction d'un pont, le nombre de passagers limité à 15 personnesL'association des conducteurs de pirogues tente de faire respecter la mesure limitant le nombre des passagers à quinze personnes, afin de réduire le nombre d'accidents. Et contrairement à ce que l'on pourrait penser, les piroguiers ne sont pas nécessairement contre la construction d'un pont, même si cela pourrait réduire le trafic des pirogues. « Le pont, c’est une urbanisation, nous n’avons pas de problèmes avec ça. Dès lors que ça va relier les deux bords du fleuve, pourquoi refuser ?, argumente Feli Lokato, un des responsables de l'association des conducteurs de pirogue. On ne va pas rester dans l’ancien système pour toujours. Peut-être que ça va urbaniser la commune de Lubunga, qui est aujourd’hui qualifiée d'urbano-rurale. »En attendant, les pirogues de fortune continueront à aider les habitants de Kisangani à relier les deux rives du fleuve Congo. À lire aussiRDC: «S’il y a autant de naufrages d’embarcations, c'est dû à l'irresponsabilité du gouvernement»
10/6/20242 minutes, 9 seconds
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Cameroun : les femmes productrices de riz à Yagoua

À Yagoua, dans l’extrême nord du Cameroun, plusieurs habitants vivent de la culture et la transformation du riz local qui se pratique dans la région depuis les années 1960. À côté de la société publique qui gère la riziculture, plusieurs petites unités de transformation ont vu le jour dans la ville. Elles survivent souvent grâce au travail des femmes qui s'occupent du tri et du vannage et parfois de l’empaquetage pour une faible rémunération. Reportage dans une petite unité de production au quartier administratif de Yagoua.
10/5/20242 minutes, 13 seconds
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RDC: briser les tabous autour des menstruations des jeunes filles grâce à une BD

En RDC, une femme sur deux n’a pas accès à des protections hygiéniques. Une situation qui pousse certaines jeunes filles à manquer l’école en période de menstruations. L’ONG Mouvement Alerte part à la rencontre des écolières pour briser les tabous autour des règles. Et pour cela, l’ONG utilise la BD pour faire passer ses messages.  Pour Télécharger la Bande dessiniée Kantu, fierté pour les jeunes cliquer ici
10/4/20242 minutes, 13 seconds
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Côte d'Ivoire: comment le nouchi et la musique remixent le français

Le sommet de la Francophonie se tient en France jusqu’au 5 octobre. Il y a un peu plus de dix ans, à Abidjan, l’ancien patron de l’OIF, Abdou Diouf, avait ainsi salué la créativité des Ivoiriens pour réinventer la langue française. Elle se retrouve dans la musique populaire qui intègre de plus en plus le nouchi, l'argot de la rue. Pas facile à comprendre pour les « gaous » (« nigauds ») qui débarquent à Abidjan. Sous-titrage avec notre correspondant dans la région. À lire aussiPourquoi la Francophonie continue-t-elle de s'étendre à des pays non francophones?
10/3/20244 minutes, 2 seconds
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Gabon: Libreville peine à s'adapter au nouveau plan de collecte des ordures

Au Gabon, depuis un mois, les Librevillois sont invités à ne sortir les ordures ménagères que trois fois par semaine et à les trier avant de les déposer dans les bacs à ordures. L’ordre est de la société Clean Africa, l’entreprise chargée de collecter les ordures dans la capitale. Objectif : rendre Libreville propre et réduire la facture de la collecte qui plafonne jusqu’à 7 milliards de FCFA par an. Beaucoup de Gabonais appliquent les nouvelles consignes, mais d’autres brillent encore par leur incivisme. De notre correspondant à Libreville, 
10/2/20242 minutes, 14 seconds
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RDC: la route des esclaves de Kamelie, une histoire congolaise à faire connaître

Quand on évoque « les routes des esclaves » en RDC, on pense principalement au réseau nord qui partait de Kinshasa vers l'Angola en passant par le Congo central et le port de Moanda. Pourtant, il y a un autre réseau, celui du sud est utilisé essentiellement fin XVIIIe et début XIXe siècle par les Arabes, dont Mohamed Ahmed, connu sous le nom de Tipo Tip. Ses captifs, qui provenaient de la région du Maniema et des environs de Kalemie au sud est de la RDC, étaient ensuite exposés pour la vente au village Kasenga, à plus de 30 km, avant d'être embarqués vers l'île de Zanzibar en Tanzanie. Aujourd'hui, le Musée national à Kalemie tente de faire resurgir cette partie de l'histoire congolaise oubliée. Les Routes des esclaves est un site perdu entre des collines à près de 500 mètres du rivage du lac Tanganyika au nord de Kalemie, en RDC. Pour l’atteindre, il faut passer par le village Kasenga construit sur du sable fin de la plage. Portace Sungura, âgé de 79 ans, a vécu dans cette bourgade toute sa vie et raconte : « Ici était le marché des esclaves. Ils venaient de partout, et puis ils étaient embarqués vers d’autres pays. C’était le commerce des blancs et nous Congolais, on était vendu comme de la marchandise. »Le lieu qui servait justement de marché des esclaves est à environ 400 mètres. Ici, 22 manguiers vieux de plus d'un siècle forment deux rangées. La bande de Tipo Tip utilisait ces arbres pour attacher les esclaves avant l’échange. Mais, cet espace chargé d’histoire ne porte aucune inscription, regrette Kaskile, notre guide : « Ces arbres ne sont plus au nombre complet. Il y a celui-là qui est à côté, des jeunes l’avaient abattu pour produire du charbon. Et ce cet autre manguier du milieu, on l’avait coupé et déterré, espérant y trouver de l’or, mais il n’y avait rien… Et tout ça, c'est parce qu’il n’y a pas de plaque qui identifie le lieu. »La rivière Rugo sépare le site du village. Robert Sulubika, un jeune d’une vingtaine d’années, assure la traversée en pirogue des quelques rares visiteurs. « Les marchands d’esclaves passaient par cette voie. À l’époque, il n’y avait pas d’eau. Ils les conduisaient vers cette plage du lac Tanganyika qui est juste à côté, ensuite, ils les embarquaient pour la Tanzanie », explique-t-il.La Tanzanie, où vivent aujourd’hui les descendants de Naebeka, le grand-père d'Hubert Mbangwanguma, âgé de 89 ans, que nous avons rencontré un peu plus loin du site. Naeba était fait esclave par le groupe de Tipo Tip alors que la traite était déjà abolie, se souvient même en chanson son petit-fils Hubert : « Mon grand-père a été capturé et il est parti. Mais, il avait réussi à s’en fuir, car à ce moment-là, les Belges faisaient pression sur les Arabes. Et mon grand-père s’est installé à Iragana (en Tanzanie) où il est enterré. »Le site La Route des esclaves, au nord de Kalemie, est à ce jour menacé par les inondations. Certains manguiers ont séché. Le Musée national, antenne de Kalemie quant à lui, mène une campagne de promotion de cet espace afin de mobiliser des ressources pour le protéger.À écouter aussiSociété arabo-musulmane et esclavage
10/2/20242 minutes, 19 seconds
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Mawlid, ce qui se joue derrière la fête religieuse aux Comores

Aux Comores, c’est le Mawlid, une fête lors de laquelle est célébrée la naissance du prophète Mohamed, le dernier prophète de l’islam. Cet événement rassemble fidèles et personnalités publiques dans une ambiance festive. Une fête qui, au-delà de son caractère spirituel, est un moment culturel de partage social majeur.  De notre envoyé spécial à Mvouni, sur les hauteurs de Moroni,Lecture de versets du Coran, textes à la gloire du prophète, prêches : les villages vibrent au rythme des fêtes du Mawlid pendant tout un mois. Tour à tour, les localités accueillent et offrent des repas copieux aux visiteurs venus parfois de loin pour participer à cette célébration. « Le Mawlid Nabawi donne un espace de consolidation de la cohésion sociale, tout le monde y participe, c’est un moment de rassemblement, un moment aussi de convivialité, explique Msa Ali Djamal, sociologue. Les gens se retrouvent à table, les clivages sociaux sont gommés pendant ce moment. »Les personnalités publiques se doivent également d’être présentes et c’est l’occasion pour les hommes politiques de renforcer leurs positions. Mais lors de ces cérémonies, les divergences d’opinions n’ont guère de place. « On ne cherche pas à savoir qui est opposant, qui est au gouvernement, souligne Abderemane Wadjih, docteur en anthropologie, tous ces gens-là se côtoient. De la même manière, dans les Mawlid, on peut retrouver des gens venus de localités qui ne s’entendent pas forcément, mais pour une fois, on enterre la hache de guerre. »« Garder cet islam traditionnel est un acte de résistance culturelle »Plus qu’une simple fête, le Mawlid est aussi une forme de résistance culturelle face aux influences extérieures. Le docteur en anthropologie Abderemane Wadjih souligne l’importance de préserver cet islam local traditionnel, ancré dans les pratiques ancestrales : « On le sait, certains courants religieux qui s’implantent aux Comores ne veulent plus entendre parler de Mawlid. Conserver cette pratique relève d’une résistance. Garder cet islam traditionnel est un acte de résistance culturelle, ce n’est pas seulement religieux. »  Lors du Mawlid, un sachet contenant deux biscuits comoriens et une boisson est offert à chaque participant, un geste symbolique, selon Abdou, participant au Mawlid de Mvouni. « Ce n’est pas qu’on ne peut pas acheter le sachet, sourit-il, mais c’est une fierté, car les enfants seront contents que leur père soit allé à un Mawlid et revienne avec un sachet. »À la fin de chaque Mawlid, un notable de la localité d’accueil remercie les participants et leur souhaite bon retour chez eux. Le lendemain, dans un autre village, le même rituel recommencera.À écouter dans Religions du mondeLe Mawlid, Maouloud, Mevlit ou Gamou : l’anniversaire de la naissance du Prophète
10/1/20242 minutes, 15 seconds
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Au Congo-Brazzaville, les mariages civils attirent de plus en plus les jeunes couples

Ces cinq dernières années, chaque week-end, les salles de mariage de Brazzaville sont remplies : l’état civil estime à 30 %, voire 35 %, le taux d’augmentation de ces unions dans la capitale congolaise entre 2020 et 2024. De plus en plus de jeunes choisissent d'officialiser leur union via un mariage civil.  De notre correspondant à Brazzaville, C’est un samedi après-midi et la salle des mariages du rez-de-chaussée de l’hôtel de ville de Brazzaville est pleine, prise d’assaut par une foule bigarrée et multicolore. Les cris de joie sont assourdissants. Soudain, la maîtresse de cérémonie annonce l’arrivée du maire du cinquième arrondissement : « Veuillez vous lever pour l’entrée en salle de l’officier d’état civil, sous vos applaudissements », lance-t-elle.Pendant ce temps, quatre couples, ainsi que leurs parrains, ont déjà pris place. Parmi les couples à marier, il y a celui de Lucie Hortense et Guy-Gervais, journaliste de son état : « Le mariage, c’est la consécration d’une union en couple. Après 26 ans d’une vie commune avec ma femme, il fallait quand même se faire plaisir soi-même et honorer ma femme devant l’autorité d’état civil », affirme Guy-Gervais.À lire aussiLe mariage civil interdit... ou obligatoireDe nombreuses raisons expliquent cet attrait croissant pour le mariage civilNombreux sont les Congolais, comme Guy-Gervais, qui honorent de plus en plus leurs âmes sœurs ces derniers temps. Maire du cinquième arrondissement, Marcel Nganongo en évoque quelques raisons : « Le mariage est une fête. On ne peut pas fêter cet évènement grandiose si le climat de paix ne règne pas dans le pays. C’est d’abord ça, le départ. De deux, il y a des jeunes gens qui ont une petite embellie financière, énumère-t-il. Ils ont compris qu’il va de soi qu’ils peuvent s’acquitter d’un devoir : celui d’honorer leurs épouses devant l’officier d’état civil. Enfin, il y a le fait qu’il y a quelques Églises de réveil qui ont pour fondement le mariage. C’est-à-dire, pour être apôtre ou évangéliste, il faut être stable », explique le maire.Le désir de conformité à la norme sociale peut aussi expliquer ce regain d’intérêt pour le mariage à l’état civil, selon le sociologue Éric Aimé Kouizoulou. « Et puis il y a un effet de mode maintenant, il y a un snobisme, analyse-t-il, il faut être à jour et ne pas faire les choses comme le faisaient les anciens, qui restaient d’abord ensemble pendant des années, faisaient des enfants et c’est au crépuscule de leur vie qu’ils trouvaient l’utilité de se marier ».Pour le sociologue, les jeunes ont décidé de changer les choses. Mais la fidélité dans le mariage est une autre paire de manches, relève-t-il. À écouter dans 8 milliards de voisins Quel sens donner au mariage dans nos sociétés actuelles?
9/29/20242 minutes, 30 seconds
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Des rues des États-Unis à une galerie d'Abidjan, les photos de l'Éthiopienne Aida Muluneh s'exposent

This is where I am, c'est le titre de l'exposition de la photographe Aida Muluneh à la galerie LouiSimone Guirandou, à Abidjan. Les photographies éclatantes de cette artiste éthiopienne sont à découvrir jusqu'au 9 novembre 2024. De notre correspondante à Abidjan,La photographe Aida Muluneh travaille sur les couleurs primaires et pour mettre en valeur ses œuvres, les murs de la galerie LouiSimone Guirandou ont été repeints en bleu, rouge et jaune. Et sur ces murs, les portraits surréalistes de femmes en majesté, riches en symboles et en référence à son pays, l’Éthiopie, sont encadrés. On observe aussi d’autres photos qui elles sont directement collées au mur, comme des affiches publicitaires. « C’est comme du papier peint… Dès qu’il sèche, ça devient comme une photo posée au mur », selon un admirateur de ces œuvres. Pour découvrir les œuvres exposées, cliquez ici.« Je suis très intéressée par une exposition publique de mon travail »Les photos collées au mur ne sont pas des œuvres d’art, mais montrent la série telle qu’elle a d’abord été dévoilée au public. Commandée par Public Art Fund, une organisation new-yorkaise à but non lucratif, celle-ci a été placardée sur 330 arrêts de bus à New York, Boston et Chicago, mais aussi à Abidjan, conformément à la volonté d’Aida Muluneh. « Je suis très intéressée par une exposition publique de mon travail, car je crois qu’il faut aussi impliquer des communautés qui ne se rendent pas dans les galeries ou les musées, explique l’artiste, c’était pour moi une expérience très intéressante de recevoir des messages et des photos de la part de gens de toutes ces villes lorsqu’elles ont vu ces images. Et aussi, en tant qu’Africaine, le fait de pouvoir exposer dans l’espace public aux États-Unis, c’est un dialogue différent que nous engageons pour montrer la portée de l’art contemporain du continent. »L’exposition en galerie permet aux spectateurs et aux collectionneurs de découvrir l’ensemble de la série, avec les douze photographies regroupées au même endroit. Gazelle Guirandou, qui dirige la galerie du même nom, dit avoir été séduite par le caractère personnel de l’œuvre : « J’adore son travail, je lui ai déjà acheté deux photos. Là, elle voulait être en galerie, donc, je lui ai fait une proposition, et elle a accepté. » Ces photos font écho à son passé : « Elle reste Éthiopienne, de toutes les façons, dans son travail. J’ai vécu en Éthiopie, donc, je ne suis peut-être pas très objective, mais ce sont des images, de la photo qui me parle énormément. Ce sont toujours des femmes, elle a toujours des accessoires et des tenues éthiopiennes. Et j’avoue que moi, ça me rappelle un peu mon enfance passée en Éthiopie. Ça peut ne pas plaire à tout le monde, mais à partir du moment où moi, ça me touche et ça m’émeut, j’ai envie de partager cette émotion-là avec d’autres. »En plus de son travail personnel, Aida Muluneh fait émerger les talents du continent à l’Africa Photo Fair, la foire annuelle de la photographie africaine à Abidjan. La troisième édition aura lieu du 31 octobre au 30 novembre 2024 au MuCAT, le musée d’art contemporain d’Abobo.À lire aussi Aïda Muluneh, l’initiatrice d’Africa Foto Fair
9/28/20242 minutes, 23 seconds
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Les Rencontres cinématographiques de Béjaia, le seul festival indépendant de cinéma en Algérie

A Béjaia, à 250 km à l'est d'Alger, les Rencontres cinématographiques, annuellement organisées en début d'automne, ont rassemblé des dizaines de cinéastes, producteurs et comédiens. 35 films ont été programmés par une association locale qui organise le seul festival indépendant de cinéma en Algérie.  De notre envoyé spécial à Béjaia, Les artistes franco-algériens Amazigh Kateb et Camélia Jordana ont animé l'ouverture des 19e Rencontres cinématographiques de Béjaia (RCB), un festival indépendant organisé par l'association Project'heurts.Hakim Abdelfettah, directeur artistique de ces Rencontres, évoque des projections en avant-première. « Le film Ce n'est rien, de Merzak Allouache. Taghezout Ghezali présentera Des hommes libres, projeté en présence de Kateb Amazigh, protagoniste du film. Le film parle de l'illustre écrivain Kateb Yacine. Il y aura aussi le film La Promesse d'Imane, de Nadia Zouaoui qui nous vient du Canada... », se réjouit le directeur artistique.Le rappeur Fianso s'implique dans la création cinématographique en AlgérieCette année, le rappeur franco-algérien Fianso, ou Sofiane Zermani, a créé une bourse pour financer un projet d'écriture d'un scénario. « Il avait pendant très longtemps ce laboratoire de création et d'accompagnement de jeunes artistes, notamment de scénaristes, de réalisateurs sur des premiers projets, explique-t-il. J'ai demandé humblement comment on pouvait mettre notre pierre à cet édifice-là. On s'est mis d'accord sur un accompagnement, il y a un côté un peu pseudo-financier, mais c'est beaucoup plus en termes de partenaires que de financement autour de potentiels accompagnements sur des premiers projets de jeunes scénaristes. »Des débats et un public curieuxUn débat sur les créateurs de contenus sur internet et la critique cinématographique a été organisé, modéré par Aissam Nacereddine, membre de l'association Project'heurts. « On a l'aspect classique du métier de critique de cinéma qui obéit à un certain mode de fonctionnement, un certain nombre de codes et de règles. Depuis l'émergence des plates-formes digitales, il y a beaucoup de jeunes et beaucoup de gens qui vont vers ce média et créent un contenu. » Ce constat amène une réflexion, comme il l'explique : « On s'est dit à un moment donné, est-ce qu'il n'y a pas un gap, il n'y a pas un écart entre ce qui est fait en termes plus académiques et ce qui est fait en termes de création de contenus ? Mon ambition, c'est de porter une réflexion sur ça, de dire quels sont les codes, quels sont les fondamentaux. »Aux Rencontres cinématographiques de Béjaia, la star, c'est le public. Latéfa Lafer, une enseignante universitaire, est une habituée de l'événement : « Les Rencontres, c'est un public d'abord, un public en formation et un public qui demande des choses, qui sait réclamer des choses. »Lors des Rencontres de Béjaia, des dizaines de jeunes ont assisté à un atelier sur l'adaptation des romans au cinéma.À lire aussi«Rentrons», en Algérie ou en France, questionne le cinéaste franco-algérien Nasser Bessalah au Festival de Clermont-Ferrand 2024
9/27/20242 minutes, 19 seconds
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À Madagascar, Angélique Razafindrazoary se bat pour défendre «sa» forêt de Vohibola

2 000 hectares de forêt primaire, refuge d’une flore et d’une faune unique, sont en danger d'extinction sur la côte est de Madagascar, aux abords du canal des Pangalanes. En cinquante ans, ce territoire a perdu l’essentiel de son couvert forestier, les arbres y sont extrêmement convoités. Cette forêt, appelée Vohibola, ne doit sa survie qu’à une femme : Angélique Razafindrazoary, qui, depuis huit ans, se bat au péril de sa vie contre des trafiquants. De notre correspondante à Madagascar,Des sentiers sableux entourés d'essences d’arbres endémiques et, soudain, un « carnage », comme le nomme Angélique Razafindrazoary. Ce sont des centaines de débris de bois aux couleurs chatoyantes qui jonchent le sol. « C’est vraiment très dur, se désole la défenseuse de la forêt, ce sont des copeaux de bois qui ont été coupés par les braconniers. » Au sol, il y a du nanto, un bois rouge, et aussi du bois jaune, qui appartient à la famille de l'acajou. « Ils ne prennent que le cœur, poursuit Angélique Razafindrazoary, c’est triste quand même, il n’y a pas grand-chose... Deux centimètres, c’est tout. » Et de conclure : « Je ne comprends pas pourquoi ce n’est toujours pas protégé… »Nanto, intsia, ébène, tous ces bois précieux ou semi-précieux sont taillés et débités directement dans la forêt puis transportés de nuit, malgré l’interdiction de naviguer, sur des barques à fond plat par les canaux qui serpentent au milieu de la forêt. Quelques heures plus tard, ils sont  revendus à Tamatave, la grande ville côtière, comme bois de construction ou sous forme de charbon.À lire aussiMadagascar en passe de récupérer une cargaison de bois de rose de haute valeur, après 10 ans de procédure pour traficDes défenseurs de la forêt harcelés, piégés et menacés de mortFace à ces coupes répétées dans Vohibola, Angélique a créé l’association communautaire Razan'ny Vohibola en 2016, avec les Tangalamena, les sages des villages, des environs, afin de protéger la forêt. L’association emploie une dizaine d’agents de patrouille. Mais le système a ses limites.« On n’ose pas aller sans [Angélique] dans la forêt, parce que si on y va seuls, on nous tue, dénonce Justin, l'un des agents de patrouille. Personne n’a peur de nous. Ils nous courent après avec une machette et nous, on n’a pas d’arme. Madame Angélique non plus n’est pas armée, mais les trafiquants ont peur d’elle et ils s’enfuient. »Pourtant, malgré son aura, la protectrice de la forêt n’est pas épargnée par les menaces de mort ni les arrestations qui rythment sa vie depuis bientôt une décennie. « Les gardes à vue, on ne les compte même plus, c’est récurrent. C’est notre quotidien. Le souci, c’est qu’il y a vraiment une minorité qui est protégée, au niveau du tribunal. On est tous menacés de mort en permanence. Mes agents ont été tabassés plusieurs fois… » Comme Justin, qui raconte comment plusieurs de ses collègues ont été rudement blessés, par les coups, mais aussi par les pièges qui leur sont tendus régulièrement : « Les braconniers plantent des pics, des espèces de bouts de bois qui dépassent à peine du sol, décrit-il, ils l’enduisent de poison et s’il nous arrive de mettre notre pied dessus, on ne peut plus marcher pendant plusieurs mois tellement la pointe a transpercé notre voute plantaire… »Angélique Razafindrazoary vient d’être sélectionnée pour représenter les lanceurs d’alerte environnementaux par Front Line Defenders, la fondation pour la protection des défenseurs des droits humains. Elle prendra la parole fin octobre prochain à Dublin pour présenter son combat et le contexte peu favorable aux lanceurs d’alerte à Madagascar.À lire aussi«On a voulu me tuer»: à Madagascar, comment défendre les militants de l'environnementUne forêt qui a perdu la moitié de sa superficie en 50 ansTout à coup, en plein enregistrement du reportage, Angélique entend des coups de hache. Elle chuchote, c'est un braconnier en train de couper du bois, elle va essayer de l'intercepter. Ce jour-là, le malfaiteur aura réussi à fuir avant de croiser la Combattante. Celle qui ne se tait pas et ne s’avoue jamais vaincue veut croire qu’elle arrivera à faire classer « sa » forêt primaire en aire protégée en 2025, ce qui représenterait une reconnaissance mondiale de la valeur de Vohibola et du travail accompli. Et ce qui serait également une manière d’obtenir plus de fonds pour conserver une forêt qui a perdu la moitié de sa superficie ces 50 dernières années. Tout un espoir.
9/26/20242 minutes, 24 seconds
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Centrafrique: à Kaga-Bandoro, polygamie et fuite des responsabilités masculines [4/4]

Dans le village Goddo, comme dans toutes les localités environnantes, si les hommes prennent souvent quatre ou cinq femmes, ce sont elles qui prennent seules en charge le foyer tandis que les hommes préfèrent boire du vin de palme ou jouer aux dames. Ce phénomène prend de l'ampleur ces dernières années, ce qui inquiète des acteurs des droits de l'homme. De notre correspondant de retour de Kaga-Bandoro, L'air fébrile, Mireille revient du marigot avec son bébé au dos et un bidon de 25 litres d'eau sur la tête. Après avoir rempli les jarres, elle sort un mortier et se met à piler des feuilles de manioc pour préparer le repas du jour. « Le marigot se trouve à trois kilomètres du village. Je fais des allers-retours depuis le matin pour remplir nos jarres. J'ai cinq enfants dont l'âge varie de 1 à 10 ans et je suis actuellement enceinte de sept mois. Je fais à moi seule tous les travaux ménagers de la maison », fait-elle savoir.Sa voisine Ruth revient du champ avec un pousse-pousse contenant des sacs de tapiocas, de maïs, d'arachides et des fagots de bois. Âgée de 25 ans, la jeune femme transpire dans un t-shirt noir. Elle rattache son pagne déchiré. Elle ne porte pas de chaussures. « Mon champ est à 10 kilomètres dans la forêt. Les pistes sont impraticables avec des trous profonds, des mares. Il y a des collines. Je dois vendre ces marchandises pour m'occuper de mes neuf enfants et prendre en charge mon mari. »À écoutez aussiCentrafrique: au village Gaga, un paysage défiguré par l’exploitation aurifère [3/4]Pendant que les femmes se battent, les hommes, eux, partagent le vin de palme autour d'un jeu de dames. « J'ai quatre femmes, explique Francis, le mari de Mireille Chacune d'elles a un champ. Chaque année, pendant la période de semis, je m'arrange pour cultiver deux hectares sur chacun de ces champs. Après cela, elles ont la responsabilité d'entretenir ces champs jusqu'à la récolte. Elles vont commercialiser ces produits pour s'occuper de la famille. »Si les femmes refusent de se soumettre, elles sont menacées, battues ou renvoyées de la maison par leur époux. L'ONG Droit pour tous veut changer les choses. « Nous faisons des sensibilisations de masse et des porte-à-porte pour enseigner aux hommes l'importance des droits de l'homme et le respect de l'autre. Certains comprennent l'enjeu, mais d'autres sont résistants, constate Josiane Makala, coordonnatrice de l'ONG. La lutte continue, mais en cas de besoin, nous allons recourir aux appareils répressifs de l'État qui se trouvent dans les grandes villes. »Entre 2022 et 2024, selon les chiffres présentés par l'ONG Droit pour tous, au moins 11 500 femmes ont été violentées dans la Nana-Gribizi. L’agression physique conjugale représente un quart de ces violences. À écouter aussiCentrafrique: à Kaga-Bandoro, la formation professionnelle pour se reconstruire [2/4]
9/25/20242 minutes, 17 seconds
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Centrafrique: au village Gaga, un paysage défiguré par l’exploitation aurifère [3/4]

Les habitants du village Gaga, l’une des zones minières de la République centrafricaine située au nord-ouest du pays, déplorent la dégradation de l’environnement suite à l’exploitation anarchique de l’or. Dans cette localité, les cours d'eau ont tari, les forêts sont détruites... Difficile de trouver du poisson, des produits champêtres et même du gibier. Les autorités locales pointent du doigt les sociétés minières, les accusant de ne pas respecter leur cahier des charges. Alors que la situation perdure, le gouvernement centrafricain a pris des mesures. De notre correspondant de retour de Kaga-Bandoro, Au sommet de la colline de Gaga, à 500 mètres d’altitude, on peut admirer une vue panoramique sur le village. Vers le sud, on voit également les fosses du chantier minier, qui défigurent le paysage. Ici, l’ambiance est toute particulière. Le grincement des machines qui font d'interminables va-et-vient se mêle aux bruits des pelles, des houes et des pioches. Dans cet espace à ciel ouvert de 3 km2, Channel, un habitant de Gaga, ne reconnaît plus son village : « J'ai l'impression d'être dans un désert. Pourtant, il y avait une succession de montagnes et de forêts. Les artisans miniers détruisent l'environnement avec leurs machines. Aujourd'hui, il est difficile de trouver du gibier et le sol n'est plus fertile pour l'agriculture. »À quelques jets de pierres de là, au cœur même de cette exploitation semi-industrielle, les ouvriers descendent dans des galeries souterraines d'environ 20 mètres de profondeur et remontent avec des cuvettes remplies de graviers.À écouter aussiCentrafrique: à Kaga-Bandoro, la formation professionnelle pour se reconstruire [2/4]Ici, nous sommes sur un terrain alluvionnaire, couvert en partie de latérites et de sables. C'est une rivière qui a complètement disparu à cause de la surexploitation. Le visage couvert de poussière, Nathan, un ouvrier de 28 ans, trime tous les jours dans cette mine : « C'était l'endroit par excellence de la pêche. Maintenant, la rivière s'est asséchée et les pêcheurs n'ont plus d'activités. Il faut aller dans d'autres villages qui sont beaucoup plus loin pour trouver du poisson. »Face à la dégradation avancée de l’environnement, le gouvernement a pris des mesures. Rufin Benam Beltoungou, ministre centrafricain des Mines : « Sur cette question, nous sommes très rigoureux. Nous avons infligé non seulement des amendes, mais beaucoup de sociétés ont vu leur licence d'exploitation retirée. Dernièrement, nous avons suspendu les activités d'une société à Nola, nous avons retiré des permis à deux sociétés à Mingala, pour manquement des obligations liées à l'environnement. Aujourd'hui, si une société sollicite un permis d'exploitation artisanal ou semi-mécanisé, elle a l'obligation de réaliser une étude d'impact environnemental. Et nous sommes tenus de pouvoir contrôler la conformité des activités de la société à cette étude d'impact environnemental. »La société aurifère chinoise HW Lepo et les exploitants artisanaux se sont engagés à réparer les dégâts avant la fin de l'année 2024. Pour les défenseurs de l’environnement, de telles pratiques vont accélérer le changement climatique déjà visible dans le pays. Il est important, selon eux, que les inspecteurs de mines suivent de bout en bout l'évolution de cette opération. À écouter aussiCentrafrique: à Kaga-Bandoro, des personnes handicapées s'émancipent grâce à l'agriculture [1/4]
9/24/20242 minutes, 21 seconds
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Centrafrique: à Kaga-Bandoro, la formation professionnelle pour se reconstruire [2/4]

À Kaga-Bandoro, à 380 km au centre du pays, de nombreux centres de formations professionnelles ont été créés pour soutenir la réinsertion socio-économique des jeunes. Fondé en 2021 après des années de conflits, le Centre des jeunes pour la renaissance donne aujourd'hui la possibilité à ceux qui ont été directement affectés par le conflit d'apprendre de petits métiers pour non seulement gagner leur vie, mais aussi oublier les traumatismes du passé. De notre correspondant de retour de Kaga-Bandoro, Ambiance conviviale, ce matin, dans le Centre de formation des jeunes pour la renaissance de Kaga-Bandoro. Dans des combinaisons bleues, une quarantaine de stagiaires sont réunis par groupe de quinze pour assister aux différents cours.Le centre possède une concession d'environ deux hectares pour l'agriculture, des salles de classes pour les cours théoriques et des ateliers bien équipés pour la pratique. « Je vais passer neuf mois ici pour apprendre différents métiers, dont la menuiserie. Pendant la crise, j'ai vu ma grande sœur se faire violer et mon grand frère assassiner. Cette formation va m'aider à oublier ces traumatismes », espère Gabriel.Arrosoir dans une main, sachet d'engrais dans l'autre, Fatima et ses amies se faufilent dans les allées du jardin, entre les choux et les carottes. Il est l'heure d'arroser les plantes. « J'ai une grande passion pour le jardinage, c'est pourquoi je suis là, explique-t-elle. Mon mari a été tué et j'ai l'entière responsabilité de nos quatre enfants. Je dois me battre pour m'occuper de ma famille. »À écouter aussiCentrafrique: à Kaga-Bandoro, des personnes handicapées s'émancipent grâce à l'agriculture [1/4]À Kaga-Bandoro, un nombre important de jeunes avait été enrôlé dans des groupes armés entre 2013 et 2016. Dans cette ville d'environ 30 000 habitants, l'apprentissage d'un nouveau métier permet la réinsertion de ces jeunes. « Cette formation arrive à point nommé pour me permettre d'oublier les scènes macabres qui hantaient mon esprit, confie Moustapha, 15 ans. Pendant la crise, mon quotidien se résumait à l'alcool, la cigarette et le banditisme. J'étais tombé dans la dépression. Aujourd'hui, je suis content, car ce centre me redonne de l'espoir. »L'accès au centre est gratuit et prend actuellement en charge 40 jeunes, en majorité des garçons. Les apprenants ont deux semaines de théorie et trois mois de pratique. « Nous formons chaque année une centaine de jeunes dans le domaine de la mécanique, de l'agriculture, de l'élevage et de la menuiserie afin de susciter en eux des vocations. Nous avons compris que si ces jeunes gagnent dignement leur vie, ils ne pourront pas rentrer dans la brousse pour rejoindre la rébellion », remarque Serge Bagaza, le coordonnateur du centre.Le Centre des jeunes pour la renaissance souhaite ouvrir dans les prochains mois des filières dans les domaines de la couture, de la saponification et de l'alphabétisation. L'ensemble de ces programmes est financé par l'Église catholique. 
9/23/20242 minutes, 21 seconds
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Centrafrique: à Kaga-Bandoro, des personnes handicapées s'émancipent grâce à l'agriculture [1/4]

En Centrafrique, certains handicapés de Kaga-Bandoro, au centre du pays, pratiquent l'agriculture. Ils ont créé il y a trois ans le groupement Wanzin en langue locale qui signifie « handicapé ». Ces personnes ont perdu un membre suite à une maladie, un accident ou une blessure de guerre. Même si c'est un travail difficile, ce n'est pas impossible pour ces hommes et femmes qui cultivent avec des béquilles ou dans des fauteuils roulants.  De notre correspondant de retour de Kaga-Bandoro,C'est avec son vélo à trois roues qu'Aboubacar sillonne les couloirs étroits de son champ de manioc. Le dos courbé, il se penche sur le côté et laboure le sol avec la houe. Avec fierté, Aboubacar utilise sa main droite pour conduire son vélo et l'autre pour labourer : « J'ai été victime de la poliomyélite à l'âge de 4 ans et je n'ai pas eu la chance d'aller loin dans les études. Aujourd'hui, j'ai 28 ans et je pratique l'agriculture pour gagner ma vie. Le travail est pénible sur un tricycle. Mais avec le courage et la détermination, on avance. »Le groupement Wanzin produit du maïs, du manioc, du sésame et de l'arachide. Dans les différents couloirs de la plantation, chacun dans son tricycle, les agriculteurs désherbent la terre pour débarrasser le champ de ses plantes indésirables. Marius se sent épanoui, dit-il, en faisant ce travail : « Certains d'entre nous ont été amputés à la suite à un accident et d'autres ont perdu une jambe lors du dernier conflit armé. Ce sont des choses qui arrivent, mais régulièrement, nous sommes stigmatisés et marginalisés. Nous voulons, à travers ce groupement, être enfin libres et indépendants. » Mais pour ces personnes handicapées, se procurer un tricycle reste un véritable challenge. À Kaga-Bandoro, il faut débourser entre 180 000 et 200 000 francs CFA, près de 300 euros. Ce bijou n’est pas à la portée de tous les agriculteurs handicapés. Accroupie dans un champ de carottes, Marie-Claire travaille depuis l’aube en rampant : « Comme vous voyez, je n'ai ni tricycle, ni prothèses. J'ai des béquilles, mais pour cultiver aisément, je dois ramper dans le champ. Je suis passionnée par l'agriculture et c'est ce qui me permet de vivre. »Cultiver avec un vélo à trois roues demande beaucoup d'efforts. Ali, par exemple, a quitté son travail d'agent de sécurité après un accident de la route pour se reconvertir dans l'agriculture : « Chaque année, on cultive environ cinq hectares. J'ai un handicap, mais ce n'est pas la fin du monde. L'année dernière, nous avons cultivé cinq tonnes de produits alimentaires. Ce qui nous a rapporté 4 millions de francs CFA. Cet argent nous permet d'acheter des tricycles à ceux qui n'en ont pas et de payer les salaires de nos membres. »Le groupement Wanzin commercialise également ses marchandises dans d'autres régions de la République centrafricaine et même dans la sous-région, notamment au Tchad et au Soudan.
9/22/20242 minutes, 23 seconds
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Guinée: des victimes de déguerpissements de Kaporo-rails enfin indemnisées

En Guinée, en 1998, des larmes et du sang avaient coulé à Kaporo-rails, un quartier chic de la banlieue de Conakry où le régime d’alors avait déguerpi de force les habitants sous prétexte que cette terre appartenait à l’État. Vingt-six ans plus tard, les nouvelles autorités guinéennes ont donné des terres aux milliers de victimes d'évictions forcées menées par les gouvernements précédents, du général Lansana Conté en 1998 et celui d’Alpha Condé en 2019. De notre correspondant à Conakry,Wonkifong, sur les hauteurs du Grand Conakry, a vécu le 14 septembre une grande scène de liesse populaire. Des victimes de déguerpissements menés sous le régime du général Lansana Conté et d'Alpha Condé ont reçu un titre foncier de 258 hectares en guise de compensation offerte par le gouvernement. Ce recasement n'est que justice, estime Maïmouna Laure Mah Barry, la directrice générale de la Société nationale de promotion immobilière, chargée d'aménager le site : « Cette cérémonie n'est pas simplement un acte administratif. Elle est le symbole vivant d'une justice rendue, d'une réconciliation en marche et surtout de la volonté indéfectible de l'État guinéen de garantir à chaque citoyen la jouissance de ses droits les plus fondamentaux. »Plus de 2 600 ménages avaient été chassés, certains nuitamment, sans savoir où aller. C'est une reconnaissance du droit des victimes qu'on est en train de rétablir, selon la directrice de la Sonapi, Maïmouna Laure Mah Barry : « Cette compensation foncière est une reconnaissance solennelle de la dignité humaine et un acte fort de justice sociale. » Samba Sow, le porte-parole des victimes, plaide pour que les autorités aillent plus loin. « Le plus important est franchi, estime-t-il. Nous demandons humblement au président Doumbouya de continuer à nous assister pour la mise en place du fonds d'indemnisation des victimes. » Pour le général Amara Camara, le représentant du chef de l'État, une plaie béante va se cicatriser. Il invite les victimes à soutenir les nouvelles autorités : « La solution à tous nos problèmes se trouve dans la paix, dans la stabilité, mais surtout, et j'insiste, dans la continuité. Je voudrais donc inviter chacun et tous à vous inscrire dans cette dynamique de continuité qui nous permettra ensemble d'atteindre les objectifs de la refondation. »  Plus de 20 000 personnes avaient été déplacées de force lorsque les gouvernements de Lansana Conté et d'Alpha Condé avaient fait démolir le quartier de Kaporo-rails, dans la banlieue de la capitale guinéenne.
9/21/20242 minutes, 15 seconds
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Maurice: l’hibiscus genevii réapparait plus d’un siècle après sa disparition présumée

On le croyait à jamais disparu. L'Hibiscus genevii, une fleur endémique de Maurice, a été donné pour éteint pendant plus d'un siècle. Et pourtant, grâce à un tableau peint au XIXème siècle, la plante a été redécouverte dans une réserve en altitude. Reportage sur les traces de cette plante unique à Maurice, selon les botanistes de l’île. De notre correspondant à Port-Louis,À 550 mètres d'altitude, sur la crête de la ville de Vacoas, à Maurice, la Réserve de Mondrain dévoile un vaste horizon sur l'ouest de Maurice, avec ses grands reliefs et un immense décor maritime en arrière-plan.Cependant, le véritable trésor se trouve ici, nous rappelle immédiatement Giani Abajee, biologiste de la conservation de l’ONG Mauritian Wildlife Foundation : « Ici, on a la réserve de Mondrain, une petite réserve de cinq hectares, mais une petite pépite ». Ce lieu héberge plusieurs espèces rares, mais une fleur y tient la vedette : l’Hibiscus genevii, un arbuste exclusif à la Réserve de Mondrain que les botanistes ont cru éteint depuis plus de 100 ans.C'est une aquarelle, peinte sur place au XIXème siècle, entre 1812 et 1845, par Malcy de Chazal Moon, qui a permis sa redécouverte. Le tableau a été retrouvé dans les années 1960 à l'Herbier de Maurice.Cette espèce est l'une des grandes réussites des efforts de conservation de la Mauritian Wildlife Foundation. Son directeur général, Dr Vikash Tatayah, se montre contemplatif : « C'est magnifique, regarde. Toutes ses fleurs sur l’hibiscus genevii. Regarde cette floraison magnifique. On voit des boutons qui sortent. Surtout pour une plante que l’on croyait disparu depuis plus de 130 ans », s'émerveille-t-il.Louée par le domaine sucrier Médine, à la Société Royale des Arts et des Sciences de Maurice, la réserve de Mondrain est la dernière forêt indigène sur les hauteurs de Vacoas. Sa préservation est assurée par la Mauritian Wildlife Foundation grâce à un financement de l'Union européenne. Mondrain est un exemple de conservation de la flore indigène. La visite de la réserve est possible uniquement sur autorisation.À lire aussiMaurice: la Vallée de Ferney, illustration de la restauration de la biodiversité dans l'océan Indien
9/20/20242 minutes, 5 seconds
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Côte d'Ivoire: vers une mercantilisation de la tradition des pleureuses Bété?

Les pleureuses Bété participent aux funérailles pour dresser les louanges du défunt, honorer sa mémoire et pleurer sa mort par des chants, des lamentations et des danses traditionnelles. Tout comme certaines pratiques ou chants de griots, certains groupes de pleureuses Bété vendent aujourd'hui leurs services pour gagner leur vie, mais également pour que ces us traditionnels ne disparaissent pas. Il y a quelques années, Jérôme Koko a œuvré à reconstituer un groupe de pleureuses Bété dans le village de Zépréguhé, un village de Côte d'Ivoire qui fut longtemps connu pour la qualité de ses pleureuses.« Moi, je veux perdurer la tradition, sinon c’est en voie de disparition, regrette-t-il. Zéprégué est un village de guerrier, ils ont combattu. À Zéprégué, nous avons une grande superficie, nos parents ont lutté pour ça, donc nos guerriers qui ont disparu, il faut les pleurer, on les regrette jusqu’à aujourd’hui. C’est pour cela, pour maintenir leur savoir-faire, pour que chaque fois, on se rappelle d’eux. C’est pour cette raison que je maintiens ce groupe-là. »Autour de lui, une dizaine de femmes qui maîtrisent la technique des louanges et subliment les funérailles, à travers leurs larmes et leurs lamentations, pour accompagner le défunt vers son dernier voyage. Des femmes qui ont appris ces techniques particulières en observant leur mère ou leur tante, qui elles-mêmes ont reçu cet apprentissage en héritage. « Ma maman chante, donc quand je chante, je suis à côté d’elle, c’est là-bas que j’ai appris, confie Antoinette Zoko. J’ai appris à chanter dans la bouche de ma maman. »Tantôt jalousées, tantôt décriées par les religions monothéistes qui considèrent ces chants comme des pratiques démoniaques, les pleureuses Bété essuient de nombreuses critiques. Mais, elles aussi, comptent faire perdurer ce patrimoine culturel. « Je ne veux pas arrêter, clame-t-elle. Peut-être, si je meurs, c’est autre chose. Sinon, tant que je vis, je vais toujours chanter. Notre groupe, je veux qu'il continue à évoluer, mais les gens d’ici, là, n’aiment pas cela. »Paradoxalement, les pleureuses Bété sont de plus en plus demandées dans la région. Elles refusent désormais de se déplacer sans fixer un prix pour la prestation, ouvrant la voie à une mercantilisation des pratiques traditionnelles. « Pour ceux qui vont m’appeler à deux jours de distance, je leur dis que cela coûte 20 000 francs CFA. S’ils sont d’accord, on bouge, explique Anne-Marie Bouabré, selon qui ces tarifs sont indispensables à la survie financière du groupe. Là où l'on va, c'est pour être payées. Si ce n'est pas le cas, je reste là, je n'y vais pas. »En effet, ces femmes ruminent le sentiment d’avoir été trop souvent utilisées et peu rétribuées pour leurs efforts. Aujourd’hui, elles vivent dans le dénuement. Anne-Marie Bouabré ne souhaite pas que sa fille devienne pleureuse à son tour. Sans soutien financier, la culture musicale des pleureuses Bété pourrait disparaître.À lire aussiCôte d’Ivoire : la dernière génération de griots ?
9/19/20243 minutes, 3 seconds
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Soudan du Sud: Pita, le rocher sacré qui raconte les origines de la ville de Juba [4/4]

La fin de notre série sur les « objets d’histoire » en Afrique. À Juba, la capitale du Soudan du Sud, ville fondée au début des années 1920 par les autorités coloniales britanniques, l'ethnie autochtone des Bari essaye de protéger une pièce unique de son patrimoine, la pierre sacrée du nom de Pita. Celle-ci incarne leur mémoire et celle des origines de la ville. De notre correspondante au Soudan du Sud,Juba, la capitale du Soudan du Sud, a été fondée au tout début des années 1920 par les autorités coloniales britanniques sur les terres ancestrales d’une ethnie autochtone, les Bari. Depuis, la ville s’est développée, grossissant toujours plus vite, notamment depuis l’indépendance du pays en 2011. Son expansion conduit à la disparition progressive du patrimoine historique de la ville, avec, par exemple, la destruction de bâtiments datant de l’époque coloniale.Pour les Bari originaires de Juba, préserver, sinon leurs terres, au moins leur patrimoine culturel est un défi indispensable face aux grands changements en cours. Parmi les sites Bari traditionnels préservés, il y a une pierre sacrée du nom de Pita qui incarne la mémoire des Bari de Juba, et avec elle, celle des origines de la ville.Dans cet endroit protégé des regards par un haut mur d’enceinte, situé à l’arrière d’un grand supermarché de la capitale sud-soudanaise, à proximité du Nil, une porte cadenassée permet d’accéder à une sorte de terrain vague. Ce dernier est parsemé de rochers de toutes tailles, sombres et arrondis, assez typiques à Juba. « Regardez, nous nous approchons de la pierre, nous avertit Stanslaus Tombe, porte-parole du Conseil de la communauté Bari, C’est là que se trouve notre ancêtre. L’origine de cette ville, c’est la base de cette pierre que nous appelons Pita. Pita, c’est le nom d’une personne, c’est celui que nous donnons à la quatrième fille qui naît dans une famille Bari. »Selon la croyance, Pita aurait été enterrée ici, sous cette pierre, après avoir été sacrifiée par les siens, il y a très longtemps, comme l’explique Lino Loro Gore, chef traditionnel du quartier où nous nous trouvons, Juba Nabari : « C’était une période de crise. Les villageois se sont réunis et se sont demandé : comment allons-nous y mettre fin ? Ils ont décidé que Pita devait être enterrée vivante. Pita était une jeune vierge. Elle a dû être sacrifiée pour que la crise s’arrête. »Le chef pense que cet épisode a pu avoir lieu du temps des premières invasions coloniales et des raids d’esclaves qui ont ravagé cette région à partir du XVIIIème siècle. Depuis, Pita s’est inscrite dans la mythologie Bari, dans les contes et l'histoire orale, où elle apparaît comme une figure protectrice, dotée de pouvoirs surnaturels. C’est la défenseuse de la terre.À plus de 80 ans, Prudencio Legge Lodu continue d’assurer les rituels auprès de Pita, il est le chef spirituel qui en a la charge. Il a hérité de ce rôle lorsqu’il avait 20 ans : « Il y a beaucoup de problèmes dans la communauté et dans le pays, donc les gens viennent me voir pour que je fasse des rituels, afin que ces choses-là s'améliorent. »Le chef spirituel s’inquiète puisque l’expansion de la ville a conduit son clan à être déplacé et repoussé toujours plus loin de ses terres, au fil des ans : « Nous n’avons aucun pouvoir sur ce qui se passe, et le gouvernement ne fait rien pour préserver la mémoire. Pour ma part, je fais en sorte d’apprendre à mes enfants à maintenir notre patrimoine culturel. »L'attachement des autorités sud-soudanaises à Pita a été révélé lors des deux épisodes de conflit dans la capitale sud-soudanaise, en 2013 et 2016. Des officiels très haut placés avaient en effet demandé au chef Prudencio Legge Lodu d’effectuer des rituels afin de demander l’aide de Pita, et que la ville de Juba soit protégée.À lire aussiSoudan du Sud: un recueil de poésie en bari pour mettre en lumière des langues locales
9/18/20242 minutes, 30 seconds
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Objets d'histoire au Cameroun: la cuillère «Tok» des Ekangs, un peuple de la forêt [3/4]

Chez les Ekangs, un peuple de la forêt au Cameroun, la cuillère « Tok » en langue ewondo, a occupé une place importante dans la vie quotidienne des ancêtres qui s'en servaient pour manger et boire les différentes soupes et autres bouillies traditionnelles. De rares cuillères ancestrales sont exposées au musée ethnologique de Yaoundé. À lire aussiObjets d'histoire en Tunisie: la statue de Bourguiba retrouve sa place d'origine en 2016 [2/4]À lire aussiObjets d'histoire en RDC: Mwana Po, masque mythique du patrimoine congolais [1/4]
9/18/20242 minutes, 31 seconds
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Objets d'histoire en Tunisie: la statue de Bourguiba retrouve sa place d'origine en 2016 [2/4]

En pleine avenue Bourguiba, au cœur de la capitale tunisienne, trône une statue du père de l'indépendance qui a connu de nombreux soubresauts. La statue équestre a été inaugurée, déboulonnée, réinstallée. Notre correspondante à Tunis nous raconte l’histoire de cette statue qui ne tient pas en place. À lire aussi1er juin 1955: Bourguiba rentre d’exil - 1er juin 2016: le retour de sa statue
9/16/20242 minutes, 23 seconds
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Objets d'histoire en RDC: Mwana Po, masque mythique du patrimoine congolais [1/4]

Le masque Mwana Po de la tribu Tshokwe signifie « Belle jeune fille ». Ce masque est présent dans tous les grands musées, tant en République démocratique du Congo (RDC) qu’à l’étranger. Il représente à la fois l'esprit ancestral et la figuration de la beauté. Il symbolise également la fertilité et la sagesse de la femme. Dans la communauté Tshokwe, le masque Mwana Po était utilisé notamment lors des cérémonies d’initiation qui marquent le passage de la vie de jeune fille à celle d’adulte. À lire aussiLa RDC lance une commission nationale sur le rapatriement du patrimoine culturel congolais
9/15/20242 minutes, 22 seconds
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Côte d’Ivoire: quelles solutions face au déclin de la maîtrise des langues locales?

De plus en plus de jeunes, en particulier à Abidjan, ne parlent plus la langue maternelle de leurs parents. Si le malinké, le baoulé et le bêté restent des langues vivantes, d’autres langues locales en Côte d’Ivoire sont directement menacées de disparition, comme l'avikam, le kroumen ou encore le gnanboua. Reportage au Musée des civilisations de Côte d’Ivoire, à Abidjan, pour savoir comment préserver cet héritage culturel. De notre correspondant à Abidjan,« Ma mère parle guéré, mon père parle yacouba et je n'ai appris aucune des langues. » Chris Douti est en visite au Musée des civilisations de Côte d'Ivoire. Il se dit passionné de culture et s'intéresse à l'histoire de son pays. Mais Chris constate qu'il ne maîtrise pas la langue de ses parents : « Peut-être qu'on ne connaît deux-trois mots, mais on n'a pas eu l'habitude de parler souvent. En Côte d'Ivoire, il y a vraiment beaucoup d'ethnies, jusqu'à plus de 60 ethnies, et il y a eu beaucoup de mélanges aussi. Du coup, la mère peut parler une langue et le père une autre langue,  pour apprendre c'est un peu compliqué. Il va falloir faire un choix ou ne pas faire de choix du tout. »Pour embrasser la modernité et avoir des atouts sur le marché du travail, le jeune homme admet vouloir apprendre l'anglais ou l'espagnol comme deuxième langue. Une situation qui n'est pas sans créer quelques conflits dans la famille : « Surtout avec les grands-parents, parce que eux, ils savent qu'on ne parle pas la langue traditionnelle. Mais ils nous parlent quand même, pour nous chahuter un peu. Je pense qu'ils ne sont pas trop d'accord avec le fait que l'on ne parle que la langue principale du pays. »Dans de nombreuses familles, une configuration semble se répéter. Les grands-parents parlent uniquement une langue africaine, les parents maîtrisent la langue locale et le français, puis les enfants ne parlent plus que le français. Une situation qui inquiète les dirigeants du musée : « On va progressivement vers une perte totale. »Parmi les inquiets, il y a Brice Moyé, qui invite les autorités à prendre la question à bras-le-corps, en développant notamment les événements culturels dans les régions : « S'il n'y a pas d'événements, il n'y a pas de motifs qui nous attirent au village. C'est sûr que nous nous éloignons de notre culture, mais il faut aussi développer des programmes, des programmes d'apprentissage des langues maternelles. Ça peut aussi se faire avec des radios de proximité (…) »En wé ou en malinké, les deux conservateurs invitent les Ivoiriens à œuvrer pour la préservation des richesses linguistiques ivoiriennes.
9/14/20242 minutes, 13 seconds
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Sénégal: la consternation et la tristesse de Mbour après le nouveau naufrage d'une embarcation

Que faire pour empêcher des personnes de monter à bord de pirogues au Sénégal afin de tenter de gagner illégalement l'Europe ? C'est souvent au péril de leur vie, comme dimanche 8 septembre 2024, après le chavirement d’une embarcation avec à bord plus d'une centaine de Sénégalais. Bilan : au moins 39 morts et de nombreux disparus. Tous étaient originaires de la ville de Mbour, d’où est partie la pirogue. Notre correspondant s’est rendu dans les quartiers de la ville qui ont payé le plus lourd tribut. Thiocé est à environ 2 kilomètres de la plage où les corps repêchés en mer ces derniers jours ont été ramenés. La vie de quartier y reprend progressivement. À côté d'une route fréquentée, une quinzaine de jeunes discutent. Certains portent des lunettes de soleil, afin de cacher leurs yeux rougis par les larmes.Dans le chavirement de la pirogue, Serigne Man Daow a perdu son frère, qui n'avait prévenu personne de son départ. Mais le jeune homme n'a aucune peine à expliquer ce qui a motivé son frère : « Les jeunes partent parce qu'ils n'ont pas ce qu'ils veulent ici, dans leur propre pays. Tu te lèves chaque jour et affrontes des situations où tu ne peux pas trouver de solution. Ton travail, quand tu en as un, ne te permet pas de soutenir ta famille. Les jeunes qui meurent sont de braves personnes. Leur seul tort, c'est de vouloir trouver des solutions. Ils voulaient réussir, mais le destin est trop difficile. »À Guinaw Rail, l'autre quartier de Mbour dont étaient originaires de nombreuses victimes, les familles aussi se rassemblent pour prier. Khady Bébé a perdu deux petits neveux : « C'est très dur, tous les espoirs de leur mère sont brisés. En tant que parents et grands-parents, notre souhait était d'assister à leur mariage, pas à leur enterrement. Nous souffrons tous. »À lire aussiSénégal: bilan humain incertain après le naufrage d'une pirogue avec au moins 150 passagers au large de MbourEmpêcher les départs « Toute la ville est en deuil », affirme Mamadou Thiam, qui regrette le peu d'action des autorités sur le sujet : « L'État n'a jamais réagi, on est abandonnés et impuissants la situation. Il n'y a pas de travail. En attendant, il faut bloquer les départs de ces jeunes. »À ses côtés, Baba Diop, dont plusieurs membres de la famille étaient à bord de la pirogue. Pour lui, la responsabilité vient aussi des pays qui donnent des visas au compte-goutte aux jeunes : « Les ambassades ne délivrent pas de visas. Il faut que les pays d'Europe délivrent un certain nombre de visas pour donner un peu d'espoir à ceux qui s'y rendent. »À Mbour, mercredi 11 septembre, le président Bassirou Diomaye Faye a assuré que le gouvernement travaille d'arrache-pied contre le chômage et a promis d'accentuer la lutte contre les passeurs. Les habitants, ici, attendent de voir les résultats.À lire aussiÀ la Une: le drame de Mbour au Sénégal, un scénario qui se répète encore et encore
9/13/20242 minutes, 11 seconds
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En Afrique du Sud, l’histoire de Patrice Lumumba mise en scène au théâtre

Le Market Theater de Johannesburg présente, jusqu’au 22 septembre, Katanga, January 17. Cette pièce revient sur l’assassinat en 1961 de Patrice Lumumba en République démocratique du Congo, sur ses idéaux et sur l’état du pays aujourd’hui. La pièce n’a été dévoilée qu’en Afrique du Sud, mais ses créateurs souhaitent pouvoir organiser une tournée, notamment au Congo. En attendant, l’ensemble de la troupe espère qu’elle pourra peut-être renforcer le sentiment panafricain au sein de la nation arc-en-ciel. De notre correspondante à Johannesburg, Le spectateur est accueilli dans une pièce au décor sombre, recréant l'ambiance sordide qui a entouré les derniers jours de la vie de Patrice Lumumba et de ses deux co-détenus, Maurice Mpolo et Joseph Okito.Pour Khutjo Green, metteuse en scène et actrice, il est vital de rappeler ce moment de l'histoire au public local : « En tant que Sud-Africains, on connait très mal l'histoire du continent. À l'école, on en apprend surtout sur notre pays, et un peu sur les pays occidentaux, mais pas vraiment sur l'histoire africaine. Et quand on nous l'enseigne, c'est surtout sur son côté sombre. Je connais par exemple Idi Amin Dada, ou encore Joseph Kony. Il faut que nous rendions davantage hommage aux grands révolutionnaires et visionnaires d'Afrique. »Le bourreau dans la pièce est joué par Alain Nji, acteur originaire du Cameroun et installé en Afrique du Sud : « Ce qui m'a d'abord plu, avec la pièce, c'est le simple fait qu'en tant qu'étranger en Afrique du Sud, il y a la haine qui existe dans ce pays, la xénophobie, et comme on le sait très bien, ce sont les Noirs contre les Noirs. Et ça me fait du mal, car du temps de l'assassinat de Lumumba, la Belgique a vu qu'il y avait des ruptures de relations entre nous les Noirs. Ils ont instrumentalisé notre haine pour nous diviser. Il a été tué à cause de ces divisions, et c'était facile. »Le théâtre, « la plus belle façon de raconter l'Histoire »Le texte entremêle des passages poétiques avec des témoignages des descendants de Patrice Lumumba et Joseph Okito, ainsi que d'un ancien enfant soldat. Bobby Rodwell, qui a co-écrit la pièce, considère que l'outil du théâtre était le plus adapté pour partager ce récit :« Je dis toujours que le pouvoir du théâtre, c'est d'avoir l'air réel, sans l'être complètement. Donc les gens ne se sentent pas menacés, mais ils peuvent s'identifier à des personnages. C'est la plus belle façon de raconter des choses. Nous avons fait attention à ce que le cours de l'Histoire y soit bien représenté, mais en même temps, le théâtre, ce n'est pas une leçon d'histoire. Et nous sommes conscients que cet équilibre entre les témoignages, la partie plus artistique et l'Histoire, est un équilibre délicat. »  Et preuve que les échanges panafricains sont encore compliqués, un des acteurs congolais initialement retenus pour jouer la pièce n'a pas pu se rendre en Afrique du Sud, faute de visa. À lire aussiPatrice Lumumba, une indépendance assassinée
9/12/20242 minutes, 15 seconds
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En Éthiopie, le prince Beedemariam Mekkonen se souvient de sa détention, 50 ans après le coup d'État

Il y a 50 ans, l’empereur éthiopien Hailé Selassié était détrôné par l’armée à la suite d’un mouvement de contestation populaire dans tout le pays contre le système féodal. Les militaires confisquent alors le pouvoir et mettent en place une dictature communiste avec à sa tête Mengistu Haile Mariam. Après 44 ans de règne, la fin du « Rois des Rois » est tragique. Nous revenons sur cet épisode de l'histoire avec le témoignage du prince Beedemariam Mekkonen, le petit-fils de l’empereur. Très tôt orphelin de père, son grand-père l'avait pris sous son aile. Il a vécu à ses côtés jusqu’au coup d'État militaire qui a mis fin au règne sans partage du négus. De notre correspondante à Addis-Abeba, Entre les murs blancs et gris des sous-sols de l’ancien palais des empereurs d'Éthiopie, Beedemariam Mekkonen, se souvient de sa détention. « Moi, mon endroit, c'était juste là, pointe le septuagénaire. Au début, il y avait un lit et puis, après, c'est devenu par terre. » En 1974, il est emprisonné ici par le nouveau gouvernement communiste, appelé le Derg, et y reste deux ans avec sa famille et les membres du cabinet.« Beaucoup de ministères étaient là… Il y a eu 60 qui sont morts avant qu’on ne vienne et une douzaine qui sont morts après, qu’on est allés à la prison centrale. Tout le temps, on ne savait jamais ce qui allait venir. Et le Derg tenait ses réunions, le comité du régime militaire, ils avaient leur réunion juste en haut », raconte-t-il.L’empereur, lui, est enfermé dans un autre bâtiment du palais, à quelques centaines de mètres, où il passe les dix derniers mois de sa vie avant d’être exécuté. Le prince, quant à lui, est emprisonné 12 années à la prison centrale, durant lesquelles il se lie d’amitié avec ses codétenus, dont des révolutionnaires intellectuels, considérés comme des « traitres » selon le Derg, à l'image de Tadelech Hailemichael, alors militante du Parti révolutionnaire, aujourd’hui diplomate. « Cela fait 40 ans qu’on se connait et qu’on est amis », plaisante-t-il à ce sujet.Influencée par les idées marxistes-léninistes en vogue à l’époque, la militante réclamait plus de justice et de pouvoir pour le prolétariat. « Les élites demandaient qu’il y ait un gouvernement de transition dans lequel tout le monde puisse être représenté, tous ceux qui sont sortis pour demander leurs droits, pour écrire la constitution. Moi, personnellement, je pense que ça a été le point où l'on a échoué », regrette-t-elle.Le régime autocrate a brisé les idéaux révolutionnaires, réprimant violemment les oppositions durant ce qui fut appelé la Terreur Rouge. Le pouvoir dictatorial du Derg a duré jusqu’en 1991, date à laquelle le gouvernement est renversé par une rébellion. En 2019, les résidences impériales sont entièrement rénovées au sein du parc de l’Unité ouvert aux touristes. « Quand j’ai vu ça pour la première fois, j'étais content, se félicite le prince. Ils l’ont renouvelé de manière même plus jolie, on peut dire cela. Durant le Derg, c'était très abîmé... »Aujourd’hui, le prince est en pleine rénovation de l’hôtel Wabe Shebelle, construit par le négus, afin de préserver son héritage et, plus encore, le souvenir de l’Empire éthiopien.À lire aussiN comme Négus: Haïlé Sélassié, dernier empereur d’Éthiopie
9/11/20242 minutes, 23 seconds
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Bénin: le retour en vogue du kanvo, le pagne traditionnel des souverains d'Abomey [3/3]

Le kanvo, un pagne tissé introduit au Bénin par le roi Agonglo, un des souverains d'Abomey ayant régné au XIXe siècle, est de plus en plus prisé par les couturiers béninois dans leurs collections. Un tissu prestigieux, labellisé en 2020, que les créateurs intègrent désormais pour apporter une touche d’authenticité et d’originalité à leurs pièces. Le kanvo est ainsi au cœur de la création des couturiers béninois comme Mondoukpè et Lolo Andoche. Ce pagne tissé traditionnel est riche en couleurs et en motifs, il vient du royaume Dahomey, situé dans l'actuel du Bénin, et est porté par le souverain pour les grandes occasions. C’est un vêtement d’apparat qui « n'est pas un pagne ordinaire. C'est d'abord un pagne de prestige, un pagne noble », selon la créatrice Faridatou Modukpè Yekini, qui a fondé en 2017 la marque Modukpè.Il incarne « la richesse béninoise, l’identité béninoise », estime Charlemagne Amoussou, un des vétérans de la mode béninoise, plus connu sous le nom de sa ligne de vêtements, Lolo Andoch. Le kanvo a une particularité : dans sa version brute, il est très lourd et pas toujours simple à manier sur les tables de coupe. Au fil des années, les couturiers ont trouvé la solution pour le rendre plus maniable : « On l’a retravaillé pour avoir quelque chose de très fin, qui est portable, qui est consommable, du coup, on a obtenu du kanvo assez léger », explique-t-il.Mais cela ne suffit pas pour conquérir totalement la clientèle, souligne Lolo Andoch, qui explique utiliser aussi « du kanvo mixé avec du lin, mixé avec un autre coton, mixé avec de la soie, mixé avec tout ce qu’on veut. Parce que, quand c’est uniquement du kanvo, certains sont parfois un peu réticents. Le mettre en motifs décoratifs sur des vêtements ou en mixage avec un autre coton qu’ils connaissent, ça passe très bien ! »Modukpè, qui réalise des robes de soirées, des chemises, des pantalons, des t-shirts et des accessoires, fait remarquer que le pagne tissé est sa matière de prédilection. Sa dernière collection en date, baptisée « collection Ola », a eu beaucoup de succès, elle qui contenait une pièce coup-de-cœur, « une robe en total kanvo pour toutes les occasions ; l’idée m’est venue comme ça de fusionner le Agbada classique, trois pièces de vêtements en une seule pièce. Il y a de la broderie, qu’est-ce qui nous distingue des autres, c’est notre broderie. C’est très agréable, je me sens toujours mieux quand je porte du kanvo et je le porte tous les jours ».Lolo Andoch, pionnier et chantre dans l’utilisation du kanvo, a même ouvert un showroom à Cotonou. « Par an, nous sommes autour de 2000 - 3000 mètres [de tissu vendu, NDLR], ce qui est bien, on l’utilise beaucoup aujourd’hui pour les mariages en tenue moderne », s'enthousiasme-t-il, observant un engouement des béninois pour ce tissu emblématique.Plusieurs évènements nationaux célèbrent le kanvo, qui sera à l’honneur en octobre dans le cadre du mois « Tu consommes local » organisé par le ministère du Commerce. Mais celui-ci s’exporte également : Lolo Andoch a en effet remporté un prix au Mali et Mondukpè a présenté un défilé à Lomé le 24 août 2024.À écouter aussiUn road trip pour les artisans du Bénin
9/10/20242 minutes, 15 seconds
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Ghana: le Kenté, un vêtement traditionnel transmis de génération en génération [2/3]

Cet habit traditionnel, apparu vers le XVIIe siècle au Ghana, et ses motifs colorés, sont devenus un des symboles majeurs de l’artisanat africain, s’exportant aujourd’hui dans le monde entier. Mais, plus qu’un vêtement, le Kenté porte en lui une histoire, celle Ghana, mais aussi des tisserands qui se transmettent ce savoir-faire de génération en génération. Un fil pourpre, un fil vert, un fil orange, et on recommence… Assis face à son métier à tisser, Emmanuel Osei, 39 ans, s’évertue à réaliser l’un des Kenté les plus complexes. « On appelle celui-ci Asasia, ce qui signifie "Sept mains", parce que l’on tire sa main sept fois, détaille-t-il. À chaque fois que la navette arrive dans ma main droite, j’appuierai en même temps avec ma jambe droite. Et à mesure qu’on avance, on voit apparaître le motif. » Ce Kenté sera terminé dans cinq mois environ, toujours fabriqué selon cette technique immuable, vieille de plusieurs siècles. Un art qu’Emmanuel a appris ici, à Bonwire, par son oncle, il y a maintenant 25 ans. « Quand je tisse ce Kenté, je maintiens le travail de mes ancêtres en vie. Si nous arrêtons tous de tisser, qui va le faire ? », s'inquiète-t-il.Pour perpétuer l’artisanat du Kenté, plusieurs centres d’apprentissage ont fleuri au Ghana, principalement dans les régions Ashanti et Ewe. Celui de Bonwire a été créé en 1995 ; Eric Kwarteng en est aujourd’hui le président. Et ce qui est sûr, c’est qu’il ne prend pas sa mission à la légère. « Je me fie toujours à la tradition, affirme-t-il. Avant que l’on puisse t’appeler Maître-tisserand, tu dois connaître toutes les différentes techniques : le tissage unique, le tissage double, le tissage triple, mais aussi les couleurs, les motifs, etc. »Vêtement dédié aux rois Ashanti à sa création au XVIIe siècle, le Kenté se porte aujourd’hui à même le corps, mais aussi en chemise ou en robe. Ses motifs géométriques toujours chargés en symbole. Exemple au musée du Kenté de Bonwire, avec une photo du premier président du Ghana, Kwame Nkrumah. Les explications du guide, Nana Akwasi.« Il porte un magnifique Kenté, que l’on appelle Sika Futoro, ce qui signifie poussière d’or, explique la guide du musée, Nana Akwasi. La couleur rouge y représente la passion, mais aussi le sang de nos pères lointains ; nous avons aussi le vert qui représente le renouveau et la croissance ; puis nous avons le jaune qui représente la fertilité ; et nous avons le noir qui représente la maturité, la spiritualité et l’unité entre nos ancêtres. »Aujourd’hui, le Kenté a largement dépassé les frontières du Ghana. Un pays qui, selon Nana Akwasi, ne pourrait rêver de meilleurs ambassadeurs. « Quand vous voyez le Kenté, vous voyez une représentation iconique de notre histoire, philosophie, tradition orale, religions, croyances, même de notre pensée politique, selon elle. Le Kenté s’exporte aussi comme un des symboles majeurs de notre héritage africain, à travers sa diaspora. Il n’y a donc aucune chance que le Kenté ne perde de son authenticité. »À lire aussiGhana: les fabricants de Kenté, célèbre tissu traditionnel, confrontés à des imitations venues de l'étranger
9/9/20242 minutes, 36 seconds
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Au Sénégal, le pagne tissé se transmet de génération en génération [1/3]

À Dakar, les pagnes tissés sont présents dans les maisons de tous les Sénégalais. Les tisserands manuels tissent ces riches étoffes qui accompagnent tous les moments clé de la vie : baptême, puis mariage et décès. Ces pagnes se transmettent dans les familles, comme un fil entre les générations. Dans une petite maison du quartier de la médina, à Dakar, au Sénégal, Marème Sow vit avec sa mère Binta. Cette quinquagénaire pleine d’énergie ouvre les placards et sort des valises cachées sous des lits pour nous faire découvrir sa collection de pagnes tissés. Les précieuses étoffes sont enroulées avec soin et protégées du soleil qui peut abîmer les couleurs vives.Ces pagnes tissés et brillants, aux motifs géométriques, sont des trésors de familles, dont certains ont été offerts pour les baptêmes de ses quatre enfants. « À chaque personne, on offre un pagne pour lui porter bonne chance, réussite », explique Marème Sow. D’autres sont encore neufs et seront offerts pour les naissances à venir dans la famille. Les bandes de tissus d’une vingtaine de centimètres seront alors assemblées pour faire un grand pagne.À lire aussiLes pagnes en Afrique: «Ces tissus qui parlent et font parler»Tissu cérémoniel« J'ai acheté ces tissus il y a longtemps, raconte-t-elle. J’ai l’habitude d’en acheter quand j’ai de l’argent et de les garder où j’appelle un ndiago pour qu’il m’en tisse un que je conserve. » Les pagnes réalisés par des ndiagos, des tisserands mandjak installés dans le quartier de Fass, accompagnent toutes les célébrations. Ils sont aussi utilisés au moment du mariage.Ou encore aux décès, pour recouvrir le mort, comme l’explique Binta Ndoye, la mère de Marème, qui a 87 ans. « Le reste des pagnes, je les garde. Je ne le souhaite pas, mais en cas de décès, cela va servir à couvrir le corps jusqu’au cimetière. Ensuite, on me ramènera le tissu, que je conserverai. » Un beau pagne brillant, noir et orange, est déjà destiné à un futur défuntCes traditions sont aussi une richesse qui se transmet. Les petits enfants de Marème conserveront, eux aussi, les étoffes chez eux. Certains des pagnes tissés qu’elle nous présente étaient déjà à la grand-mère de Marème et chaque pagne que Marème range dans son armoire est une pièce et une histoire unique.
9/8/20242 minutes, 13 seconds
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Au Maroc, un centre pour les orphelins du séisme a ouvert un an après la catastrophe

Il y a un an, le Maroc était secoué par l'un des séismes les plus meurtriers de son histoire. La catastrophe a fait près de 3 000 morts et endeuillé des centaines de villages du Haut Atlas, laissant derrière elle de nombreux orphelins. Des enfants dont l'avenir était soudain devenu incertain. Une association a décidé de tout faire pour qu'ils puissent mener une vie normale. À 50 kilomètres au sud de Marrakech, elle a créé un centre. Les orphelins du séisme y sont encadrés par des éducateurs spécialisés. Le concept de ce lieu : les enfants doivent s'y sentir comme à la maison.  De notre correspondant au Maroc,C'est un endroit qui ressemble à un village berbère, avec ses petites maisons ocre au pied des montagnes de l'Atlas.  Accompagnés de Touraya Jaïdi Bouabid, présidente de l’Association marocaine d’aide aux enfants en situation précaire, nous passons devant la salle de musique où des jeunes filles improvisent une chorale : « Aujourd'hui, nous sommes à Amizmiz, au Maroc, dans un douar qu'on a prénommé "Douar Shems'y", ce qui veut dire "Village Shems'y". Un lieu pour que les enfants victimes du séisme du 8 septembre 2023 puissent converger et vivre en paix et en sérénité et en toute sécurité. »L'idée de douar Shems’y lui est venue au lendemain du séisme. « C'était juste évident, pour nous, de réagir au plus vite et de mettre en place ce douar, explique-t-elle. Sans les autorités locales, cela n'aurait pas pu être possible parce qu'ils nous ont aidés rapidement pour démarrer les travaux. Tout le monde s'est mobilisé. » C'est l’État qui a mis à disposition le terrain. De généreux mécènes ont apporté les financements : plus de 3 millions d’euros. Après seulement huit mois de travaux, le centre de deux hectares a été inauguré il y a quelques semaines. « Le challenge, c'est qu'on voudrait former l'élite du Maroc », espère-t-elle.« Le sport, ça les calme »Ils sont 64 orphelins, de 3 à 18 ans. Tout a été pensé ici pour limiter le sentiment de déracinement. Les éducateurs et éducatrices viennent de la région, parlent le tachelhit, la langue berbère locale. Youssef Serbib, 32 ans, est l’un d'entre eux. Cet après-midi, il supervise un moment dédié à la lecture. « Il y a des enfants qui sont restés bloqués sous les décombres, à attendre les secours, raconte-t-il. Il y en a même un qui était avec sa maman décédée… Les enfants ressassent, ils font des cauchemars, crient pendant leur sommeil. »Ces séquelles psychologiques du séisme, Youssef tente de les soigner.  « Il y a des enfants qui souffrent d’hyperactivité avec lesquels je pratique le sport, selon lui. Le sport, ça les calme, ça réduit leur agressivité. »À écouter aussiSéisme au Maroc :« Il est parfois difficile de faire son métier de journaliste quand on a juste envie d’aider les sinistrés »
9/7/20242 minutes, 19 seconds
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Sénégal: les tambours de Doudou Ndiaye Rose, patrimoine de l'histoire de l'indépendance

Au Sénégal, dans le musée Théodore Monod d’art africain, sont exposés trois tambours en bois. Des tambours sabar utilisés pendant la fête de l’indépendance du Sénégal en 1960 et qui appartenaient à Doudou Ndiaye Rose, légende du sabar, musique traditionnelle sénégalaise, décédé en 2015.  À lire aussiDoudou Ndiaye Rose, le maître-tambour du Sénégal
9/6/20242 minutes, 28 seconds
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Côte d’Ivoire: le griotisme à l’épreuve des évolutions de la société

À la fois porte-paroles et réconciliateurs, dépositaires de la tradition orale, souvent artisans, et parfois poètes ou musiciens, les griots ont longtemps été un élément clef de la structuration des villages du nord de la Côte d’Ivoire d’influence mandingue. En raison des évolutions rapides de la société, le rôle social du griot, qui se transmet de génération en génération, tend à disparaitre. Dans de nombreux villages, les enfants de griots, désireux de gagner leur vie ou de poursuivre leurs études, délaisse la fonction. De notre correspondant de retour d'Odienné,Mamadou Diarassouba, le griot de la petite ville de N'GoloBlasso au nord-est d'Odienné, se déplace avec un bois précieux. Selon le chef du village, un octogénaire qui s'exprime en malinké, son travail est indispensable au bien-être du village :« Nous travaillons main dans la main. Nous rendons grâce à Dieu pour le travail qu'il fait. S'il n'est plus, il faudra toujours que le village ait un griot. Le travail qu'il fait protège tout le monde, c'est un bon travail. Il a pris le flambeau de son père. Toutes les missions que je lui donne, il les accomplit parfaitement. Il œuvre à parvenir à une paix entre les habitants, il protège notre village. Il a beaucoup de pouvoir. Je ne pourrais pas être chef sans lui. »En plus de son travail de tanneur, le griot intervient pour régler les conflits entre les habitants, annoncer les baptêmes et les décès. Son père et son grand-père occupaient déjà la même fonction. « J'aimerais qu'après ma mort, un de mes enfants reprenne ce métier et cette fonction. Il ne faut pas que ce savoir-faire soit perdu, j'aimerais qu'ils puissent continuer mon activité », dit-il.Traditions perduesSes trois enfants ont pourtant quitté le village. Un de ses fils réside à Bouaké, l'autre est mécanicien-taulier dans la commune d'Abobo à Abidjan, tandis que la dernière est doctorante en espagnol. Nous l'avons rencontré dans l'enceinte l'université de Cocody :« Avec notre génération, ça sera très compliqué de rester focalisé sur ce même métier. Le monde évolue, et nous aussi, on essaye d'évoluer et d'apporter un plus pour le village. Avant, les parents le faisaient pour pouvoir subvenir à leurs besoins, mais maintenant, ils font ce métier et après, ils vont au champ. Bon, il y a trop de choses, ça veut dire que le métier n'est pas suffisant. Il faut apporter autre chose pour pouvoir survivre. »S'il est difficile d'obtenir des chiffres précis, les habitants de la région d'Odienné affirment que de très nombreux villages ont perdu leurs griots ces dernières années. Dans le village de Tiémé, Ousmane Doumbia, âgé de 36 ans, a bien voulu reprendre une partie du rôle du griot, les activités d'artisan de son père notamment. Il confectionne des fourreaux et emballe les gris-gris avec de la peau de bête : « Je n'ai pas abandonné l'artisanat et le travail du cuir, mais pour ce qui est du rôle d'orateur, je ne peux pas. Je n'en suis pas un, je ne suis pas capable de m'adresser à une foule. Les villageois m'ont poussé à reprendre le flambeau, mais s'occuper des problèmes de tout le monde n'est plus possible aujourd'hui. »Traditionnellement, les griots sont issus de quatre grandes familles – Mabala, Kenibala, Kouyaté, et Kamara – et ont pour rôle de chanter les louanges du roi et des grandes personnalités qui ont jalonné l'histoire de la région.
9/5/20242 minutes, 37 seconds
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Le cinéma, «la meilleure façon de communiquer» pour la réalisatrice zambienne Rungano Nyoni [4/4]

Rungano Nyoni est née en Zambie en 1982. Ses parents émigrent au Pays de Galles quand elle a 9 ans. Elle s’essaie très tôt aux court-métrages, puis réalise son premier long métrage en 2017, quand elle braque sa caméra sur une fillette accusée de sorcellerie dans son village. Dans son second film, il est encore question de rites et traditions. Pour la première fois, un film zambien a été présenté au Festival de Cannes en 2024. En compétition dans la section «Un certain regard», On Becoming a Guinea Fowl est couronné du prix de la meilleure réalisation. Dans son second film On Becoming a Guinea Fowl (« Je pourrais devenir une pintade »), la cinéaste Rungano Nyoni évoque tour à tour le deuil, le mutisme, le doute, le remord, le secret, la famille, la détresse des femmes et les ravages des hommes disparus. Une sorte de cinéma-réalité :« Je pense qu'il est très difficile de définir le rôle du cinéma. Mais je sais ce que j'essaie d'accomplir avec le cinéma. Je suis toujours à la recherche de quelque chose de véridique que j’essaie de raconter. Je ne sais pas pourquoi je mène cette recherche ainsi, alors qu’il y a d’autres manières de faire du cinéma, j’en suis sûre. Et parfois, aussi curieusement, la vérité peut aussi paraître fausse. Ainsi, tu peux avoir un moment véridique qui s'est réellement produit. Mais quand tu le transfères au cinéma, cela ne semble pas réel. Alors, il faut falsifier la vérité pour qu’elle paraisse véridique. »Toujours à la recherche de cette justesse de traitement, son film est d’une grande intelligence, conscient que la réalité n’a souvent pas besoin d’artifices. « Je pense, en ce qui me concerne, que le cinéma est une expression, un point de vue et un moyen de communiquer. Cela pourrait sembler très ringard, mais pour moi, c'est la meilleure façon de communiquer, parce que dans la vraie vie, je trouve cela assez difficile. C'est donc ma façon de compléter une conversation, je suppose. »« Je dénonce les traditions »Cette comédie dramatique, dont l’histoire se déroule en Zambie, exprimant un féminisme sombre et désabusé, porte un regard inédit sur les abus, les traumatismes, les secrets enfouis et les mensonges au sein d’une famille. « Je dénonce les traditions, mais je ne pense pas qu'elles posent problème. Je pense que c'est de la misogynie sous forme de traditions. La victimisation des femmes, c'est ce que j'essaie de combattre », développe Rungano Nyoni.Elle effleure le non-dit, le rendant visible tout en s’appuyant sur les rêves et les hallucinations : « Je suppose que les fantasmes et les rêves que j'utilise beaucoup sont des éléments qui montrent quelque chose qui est ressenti, mais qui n’est pas dit explicitement. C’est probablement pour cela que je choisis davantage les rêves, parce qu’ils expriment les sentiments beaucoup plus qu’ailleurs. C'est toujours quelque chose que j'essaie d'exploiter et de découvrir, mais c'est une sorte d’exploit, je pense. C'est essayer d'exprimer quelque chose sans l'exprimer. »Rungano Nyoni est un talent confirmé du cinéma africain. Ce cinéma qui montre depuis plusieurs années sa puissance, avec un nouveau dynamisme qui s’ouvre sur l’avenir.À lire aussiCannes 2024: la réalisatrice Rungano Nyoni, exploratrice des réalités sociales de la Zambie
9/4/20243 minutes, 25 seconds
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La réalisatrice camerounaise Cyrielle Raingou: «Le cinéma est une magnifique manière de se réinventer» [3/4]

Née à Koutaba, région de l’ouest du Cameroun, Cyrielle Raingou se déplace à Yaoundé pour ses études universitaires. Elle choisit le droit pour devenir avocate, ce qui allait faire la fierté de sa famille. Mais après sa maîtrise, elle commence à travailler dans une société de production de cinéma et s’occupe des contrats d’auteurs. Sa découverte de l’envers du décor de l’usine à rêves la transporte vers un autre monde, celui du cinéma. Elle reprend ses études à zéro, au grand dam de ses proches. Après une dizaine de courts métrages, Cyrielle Raingou commence en 2016 le travail sur son premier documentaire, Le spectre de Boko Haram, tourné à hauteur d’enfants dans le Grand Nord du Cameroun, dans un univers menacé par le terrorisme. Une révélation qui lui rapporte 16 prix, dont le Tigre d’or, la plus grande distinction au festival du film de Rotterdam en 2023 :« J’étais animée par cette passion, cette envie folle de raconter cette histoire, l’histoire des gens que j’avais appris à connaître et que j’aimais. J’ai essayé de raconter la vie à travers mes images et mon son. Dans mon rêve, c’était par exemple d’avoir une première mondiale au festival Vision du réel, un festival très important pour le documentaire en Suisse. C’était mon rêve et je ne pensais pas au-delà. J’étais, pendant longtemps, sur un petit nuage… Et là, c’est une autre pression. C‘est ça qui m’anime jusqu’à maintenant. »« Derrière ma caméra, je vois un autre monde »La cinéaste, qui tourne actuellement son premier long métrage de fiction, sent le poids des responsabilités après son grand succès. Pour elle, le rôle de cinéaste revient à réécrire à sa manière et selon sa vision les règles de sa société :« Pour moi, le cinéma est une magnifique manière de se réinventer, chaque jour, de ne pas être limité à ce que la réalité dans un espace donné nous offre. Quand je suis derrière ma caméra, ou quand je suis en train d’écrire, ou en train de réaliser, je vois un autre monde avec plus de subtilité, plus de complexité, mais toujours coloré. Parce que la vie en Afrique, c’est toujours l’espace que j’aime représenter, que je voudrais continuer à représenter. La vie en Afrique est très nuancée. Il n’y a pas qu’un seul côté, qu’une seule version de l’histoire, et c’est cette nuance, cette complexité qui fait la beauté très colorée de mon Afrique. »Quant à son prochain film, sa première fiction Pour toi je reviendrai, s’inscrit dans le prolongement de son documentaire : « La fiction résume si parfaitement la pensée que je développe au cinéma, ou ma vision, ou le monde dans lequel j’ai grandi, que j’adore. Mon prochain film, c’est la suite logique du Spectre de Boko Haram, parce que l’histoire prend place dans le même univers, mais du point de vue de femmes. »Enfin, Cyrielle Raingou adresse un message aux jeunes cinéastes africaines : « Leurs voix comptent, on a besoin d’elles pour mieux raconter nos histoires et nos réalités. »
9/3/20242 minutes, 50 seconds
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Kaouther Ben Hania, réalisatrice tunisienne: «Grâce au cinéma, on peut donner un sens au monde» [2/4]

Elle est la première en Tunisie à avoir été nommée deux fois aux Oscars. D’abord en 2021, pour son film, L’homme qui a vendu sa peau, puis cette année pour le meilleur documentaire étranger pour Les filles d’Olfa, qui a reçu plus de 22 prix, dont le César du meilleur documentaire. Le cinéma de la réalisatrice tunisienne Kaouther Ben Hania s’intéresse beaucoup aux sujets féminins : « je parle des sujets que je connais le mieux », explique celle qui a écrit et réalisé une dizaine de films. Deuxième épisode de notre série de portraits sur des cinéastes africaines.Passionnée depuis toute jeune par la littérature, Kaouther Ben Hania rêvait de devenir romancière. Le cinéma, elle l’a découvert sur le tard. La lauréate du César du meilleur documentaire s’ennuyait en faisant des études de commerce à Tunis, elle s’inscrit donc à un atelier où étudiants et travailleurs viennent s’essayer à faire des films les weekends. Il s’agit de la Fédération tunisienne des cinéastes amateurs : « Quand j’ai rejoint cette Fédération, je me suis dit : c’est ce que j’ai envie de faire en réalité. Pas juste le weekend, mais toute la vie. » Puis elle étudie le cinéma à Paris, à la Fémis et à la Sorbonne Nouvelle.Étudiante déjà, elle rêvait de le rester éternellement : « Je suis extrêmement intéressée par les choses que je ne comprends pas. D’ailleurs, quand je fais un film, c'est pour comprendre. J’adore apprendre et je pense que ce n’est pas par hasard que j’ai choisi ce métier. Parce qu’avec la réalisation, chaque nouveau projet est un terrain de recherche, de construction, de réflexion, et d’apprentissage, explique-t-elle. Donc mon regard est à la fois construit, mais à la fois très naïf. J’ai besoin de cette fraicheur et de cette naïveté pour recevoir le monde, le comprendre et ensuite le structurer. »Une réalisatrice de films non conventionnelsKaouthar Ben Hania s’est attaquée au documentaire, au faux documentaire et à la fiction. Elle prépare actuellement son prochain film : « En traversant ces genres et ces sous-genres, en arrivant à la fabrication des Filles d’Olfa, j’ai pu en fait bénéficier d’une certaine expérience, d’une certaine maturité qui m’a permise de me lancer dans ce projet qui est assez complexe. » Pourtant, le succès de son film ne signifie pas moins de pression pour le suivant, c’est même le contraire : « Ce succès en réalité me met la pression, ce n’est jamais facile, à chaque fois, on a l’impression que l’on recommence de zéro, on reprend tout, c’est une autre histoire, un autre univers. Il faut convaincre, même au niveau du financement. Cela ne suit pas forcément, parce que je fais des films non conventionnels. » Faire des films, pour elle, c’est donner un sens à ce monde : « Ce que j’ai découvert avec le documentaire au début, et ensuite avec la fiction, c’est qu’on peut donner un sens à ce monde. Je pense qu’on fait des films, parce qu’on vit dans un monde chaotique où on est tout le temps à la recherche d’un sens, on peut faire une proposition qui dit : "Voilà comment je regarde les choses", cela nous donne cette possibilité de mettre de l’ordre dans le monde et de lui donner du sens. Et de partager cette proposition avec le spectateur. » Plus que de donner un sens au monde, tourner Les filles d’Olfa était, pour Kaouther Ben Hania, une thérapie. À lire aussiLa réalisatrice Maïmouna Doucouré : « Passer par le cœur, pour atteindre l’esprit » [1/4]
9/2/20242 minutes, 29 seconds
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La réalisatrice Maïmouna Doucouré: «Passer par le cœur, pour atteindre l’esprit» [1/4]

Série de portraits sur des cinéastes africaines. La première, c'est Maïmouna Doucouré. Après des études de biologie, elle n'imaginait pas être destinée au cinéma. Née en France au sein d’une famille nombreuse originaire du Sénégal, elle grandit dans un quartier populaire et c'est en 2013 que sa carrière de réalisatrice est lancée, lorsqu'elle gagne un prix pour Cache-cache, son premier court métrage amateur, au Festival Génération Court d’Aubervilliers. Par la suite, elle réalise son premier court métrage professionnel, Maman(s), sorti en 2015, et inspiré de sa propre vie. Devenue cinéaste reconnue, elle a fait partie, en mai dernier, du jury « Un certain regard » au 77ème festival de Cannes. Quand Maïmouna Doucouré se lance dans le cinéma, elle découvre que sa voix compte et qu’avec son art, elle peut changer le monde : « Étant une réalisatrice, j’utilise ce vecteur-là pour pouvoir exprimer des choses, et surtout pour avoir un impact dans la société qui permet de faire réfléchir, qui permet, en quelque sorte, de passer par le cœur pour atteindre l’esprit. » À l’époque, elle n’imaginait pas qu’elle deviendrait une grande réalisatrice :  « Je me sens vraiment reconnaissante d’avoir osé, d’avoir sauté le pas, parce qu’au début, moi, je ne pensais pas que le cinéma m’était destiné », se rappelle-t-elle.Son premier court métrage professionnel, inspiré de sa propre vie, a tourné dans plus de 200 festivals. Il a gagné des prix, y compris en Chine et en Irak, après avoir récolté le César du meilleur court métrage : « Ce qui est intéressant, c’est qu’au départ, quand je me suis lancée dans le cinéma, je ne pensais pas que m’inspirer de ce que j’ai pu vivre pouvait être suffisamment intéressant, je me disais : qui ça va intéresser de partir sur une histoire qui m’appartient — donc l’histoire de ma famille ? » Dans Maman(s), elle raconte l’histoire de la jeune Aida, qui cherche à se débarrasser de la femme que son père ramène à la maison à son retour du Sénégal « J'ai vraiment eu la preuve du contraire en réalisant mon premier court métrage professionnel, Maman(s), poursuit la réalisatrice, et c’est là où j’ai compris finalement qu’en étant intime, quelque part, ça nous permettait d’être universel. Et c’est ça que je trouve beau avec le cinéma. » « Mettre en avant des histoires de femmes dans mes films m’importe beaucoup »Puis Maïmouna Doucouré passe à un format plus long. Pour Mignonnes, son premier long métrage, le propos s’inscrit dans la continuité des deux précédents films. Hawa, son second long métrage, tourne autour du féminin et dénonce l’injustice : « Quand j’étais plus jeune, c’est vrai que j’étais témoin de beaucoup d’injustices que vivaient les femmes, et c’est quelque chose qui m’a beaucoup révoltée. Ce sentiment, j’ai grandi avec. Donc aujourd’hui, j’ai ce moyen d’expression, je suis vraiment partie de mon vécu, ma double culture, les injustices que j’ai pu observer par rapport aux femmes, mon rapport avec ma mère, parce qu’on n’a pas la même vision sur ce qu’être une femme, témoigne-t-elle. C’est vrai que mettre en avant des histoires de femmes dans mes films, c’est quelque chose qui m’importe beaucoup, de par mon histoire, de par mon parcours. » Maïmouna Doucouré se penche actuellement sur son prochain film, et c’est encore d’une figure féminine qu’il s’agit : la légendaire Joséphine Baker. « Cela fait sens parce que, quand on voit les combats qu’elle a menés, on se sent investi d’une mission. Raconter Joséphine, ou en tout cas être un témoin de sa vie, ne peut que nous donner envie de reprendre le flambeau de tous les combats qu’elle a pu mener contre l’injustice, contre le racisme, contre la ségrégation, pour justement l’égalité et l’unité entre les peuples. » Un film qui sera co-écrit avec le scénariste Olivier Lorelle, auteur du film Indigènes.À lire sur Joséphine Baker La joie de vivre
9/1/20242 minutes, 34 seconds
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RCA: à Kaga-Bandoro, l'humanitaire laisse la place au développement

La paix est revenue à Kaga-Bandoro, dans la Nana-Gribizi, cette région située au centre de la Centrafrique, après plusieurs années de crise sécuritaire. Les principaux camps de personnes déplacées internes sont fermés et les occupants regagnent progressivement leurs quartiers, villages et villes respectives. Alors que les besoins humanitaires sont en baisse, le Bureau de la coordination des affaires humanitaires des Nations unies (Ocha) et le gouvernement centrafricain ont effectué une mission dans cette localité pour évaluer la situation et poser les bases d'un développement durable.  De notre envoyé spécial à Kaga-Bandoro,À perte de vue, des abris de fortune : le camp de Lazaret est l'un des plus importants de Kaga-Bandoro. Plus de 8 000 personnes y vivaient au temps fort de la crise et, aujourd'hui, le site abrite plus de 5 600 âmes. Julienne, 37 ans, revient du forage avec un bidon d'eau sur la tête : « Cela fait sept ans que je vis dans ce camp de fortune. Mon village a été incendié par des hommes armés, explique cette mère de six enfants qui porte une cicatrice sur la joue gauche. Celle-ci lui fait encore mal. Nous avions fui à travers la brousse, à pied, pendant deux semaines pour arriver ici. Dieu merci, nous sommes en sécurité dans ce camp et nos besoins essentiels sont pris en compte. »Au quartier Abaka, dans le 5ème arrondissement de Kaga-Bandoro, Célestin et ses neuf enfants mangent la feuille de manioc préparée dans le salon de leur nouvelle maison. « Ce sont les humanitaires qui ont réhabilité ma maison. Ma petite case en paille a été brûlée par des rebelles. Maintenant, j'ai une grande maison de trois chambres construite en brique cuite et en tôle, se réjouit-il. Mes besoins humanitaires ont diminué, je cherche à créer une activité génératrice de revenus pour aller vers le développement. »À lire aussiCentrafrique: réactions partagées après la levée par les Nations unies de l'embargo sur les armes« 46 % de la population centrafricaine a encore des besoins humanitaires »L'Organisation internationale des migrations (OIM) et le Haut commissariat des Nations unies pour les réfugiés  (HCR) ont facilité le retour des personnes déplacées internes en construisant un millier de maisons dans la préfecture. « En tant qu'humanitaires, notre souhait, c'est que la population et le gouvernement aient moins besoin de nous, explique Mohamed Ayoya, coordonnateur humanitaire. Nous voyons les besoins humanitaires qui baissent, nous allons continuer à faire ce travail de résilience, de relèvement, pour faire en sorte que le pays transite de l'humanitaire vers le développement. Mais [les besoins] restent encore importants, car on parle de 46 % de la population centrafricaine qui a encore des besoins humanitaires. »Et pour soutenir ces personnes, le gouvernement centrafricain a mis en place un plan de développement durable. « La vision du chef de l'État, c'est le développement, et c'est pour cela qu'avec la Minusca [Mission des Nations unies en RCA], le Pnud [Programme des Nations unies pour le développement], le HCR et les autres partenaires, nous avons validé la Stratégie nationale des solutions durables, qui prend en compte les personnes vulnérables, indique Josiane Bemaka-Soui, la ministre de l'Action humanitaire. C'est la même vision dans l'humanitaire, d'aller vers le développement. »Presque tous les habitants rencontrés ne souhaitent plus revivre les atrocités du passé.À lire aussiÀ Kaga-Bandoro, en Centrafrique, musulmans et chrétiens cohabitent de nouveau
8/29/20242 minutes, 20 seconds
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Mpox: l'Institut Pasteur de Dakar mobilise ses chercheurs pour éviter la propagation de la maladie

Tenter de garder une longueur d’avance dans la détection de la maladie. Alors que les nombres de cas de mpox explosent en Afrique centrale, les autres pays du continent, notamment en Afrique de l’Ouest, veulent éviter que l’épidémie se propage chez eux. Pour leur permettre d’être plus efficaces dans la détection des cas, l’Institut Pasteur de Dakar organise toute la semaine des ateliers théoriques et pratiques avec des virologues et biologistes de 17 pays de la zone. De notre correspondant à Dakar,En blouse bleue, charlotte sur la tête, masqués et gantés, seize professionnels anglophones s’activent par groupes de quatre : « Bon alors pour commencer, que dit le protocole ? groupe 6, que fait-on ? Nous devons quantifier l’ADN. »Ce matin-là, ils découvrent une nouvelle méthode de travail avec l’analyse de ce qui compose précisément l’échantillon du virus. Le Dr Moussa Moïse Diagne, chercheur au pôle de virologie de l’Institut Pasteur de Dakar, est leur formateur : « Dans cette session, ils sont dans une phase de séquençage du virus, donc pour mieux appréhender les mutations et les différents variants qui peuvent émerger dans une population. Ainsi, ils peuvent mieux répondre aux différentes questions de recherche, mais également les questions qui pourraient être liées à la thérapeutique et aux interventions vaccinales. »Penchée au-dessus de plusieurs petits flacons, Dre Emma Ituru, de l’hôpital universitaire de l’État de Rivers, au Nigeria, prend toutes les étapes en notes : « Je n’ai jamais vraiment expérimenté le séquençage. C’est la première fois que j’y suis confrontée, donc je suis très heureuse d’être ici. À mon retour, je parlerai à mes collègues de ce que j’ai appris sur ce nouveau diagnostic. »À lire aussiMpox: pourquoi l'accès aux vaccins est problématique en Afrique?Une démarche en temps de crise sanitaire qui résonne particulièrement dans les murs du laboratoire et fait la fierté des équipes comme le rappelle le Dr Moussa Diagne : « C’est une des missions pasteuriennes, comme on dit, où on a comme credo d’intervenir, d’appuyer les populations, mais aussi de former. Ce qui va permettre de mieux encore démocratiser tous ces outils de diagnostic, de séquençage. Oui, une fierté, mais également la conscience que c’est absolument fondamental pour une meilleure réponse aux épidémies. »Dans un autre bâtiment de l’Institut, les échanges sont en français. Comme au temps du Covid, on évoque ici les prélèvements et les tests PCR. Dans cet atelier, il est davantage question de se remettre en jambe : indispensable pour Pépé Toguo Namou, biologiste venue de Guinée Conakry : « Oui, c'est important, ici on parle du monkeypox : nous sommes conviés ici pour essayer de réveiller un peu nos capacités afin de s’adapter par rapport au diagnostic du monkeypox. »Les quelque 30 professionnels participant aux ateliers regagneront ensuite leur établissement avec de nouvelles connaissances, mais aussi du matériel et des produits plus adaptés au nouveau combat contre la variole du singe qui s’annonce.À lire aussiMpox: l'Institut Pasteur de Dakar veut faire front commun contre la maladie
8/28/20242 minutes, 27 seconds
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Ouganda: le basket fauteuil pour gagner en autonomie

Jeux paralympiques de Paris 2024, jour J ! C’est ce soir du 28 août 2024 à partir de 20 heures qu’aura lieu la cérémonie d’ouverture. Quarante-quatre délégations africaines et plus de 300 athlètes du continent sont attendus pour ces Jeux. Parmi les handisports les plus connus, il y a le basket fauteuil (l'une des plus anciennes disciplines des Jeux paralympiques). En Ouganda, la pratique du sport a permis à de nombreuses personnes en situation de handicap d'améliorer leur condition physique, tout en créant une nouvelle communauté. Reportage. De notre correspondante à Kigali, Coup de sifflet pour marquer le début de match, et les joueurs rwandais et ougandais se précipitent sur le ballon… Parmi eux, Mark Kalibbala Giggs, l’un des basketteurs les plus expérimentés de l’équipe de Kampala. Engagé depuis plus de dix ans dans le handisport, d’abord pour améliorer sa santé :Étant blessé à la moelle épinière, je voulais être indépendant. Parce qu’au début, je ne faisais que rester chez moi, mais maintenant, après dix ans, je peux me pousser tout seul, je me sens en forme, et je suis toujours heureux, je n’ai plus de sautes d’humeur comme avant... C’est la santé mentale !À plus de 500 km de la capitale Kampala, Kevin Mubiru, 27 ans, participe pour la première fois à une rencontre amicale à l’extérieur du pays. Étudiant à l’université où s’entraîne l’équipe ougandaise, le sport fait depuis plusieurs années partie de son quotidien :Je me sens en vie… Et parfois, je prends même du temps le soir, j’ai un fauteuil de course que j’utilise et je vais courir pour que mon corps soit encore plus en forme. Donc quand je ne viens pas la journée sur le terrain, je vais m’entraîner, je vais courir ou je vais à la salle.À lire aussiParalympiques 2024: immersion du centre de réparation du matériel des para-athlètesUne communauté solidaireDans l’équipe, beaucoup s’entraînent ensemble depuis de nombreuses années. Kevin est l’un des joueurs les plus jeunes. Selon lui, le sport lui a permis de se rapprocher d’autres personnes en situation de handicap.C’est plus que du sport, c’est une communauté, une famille. On partage des idées, on est tous amis, si quelqu’un ne va pas bien, quand on est ensemble, on s’assure qu’il se sente comme à la maison. C’est comme ça qu’on se pousse vers le meilleur.Sans ligue nationale, avec seulement huit équipes dans le pays, les joueurs ougandais restent parfois plusieurs mois sans compétition. Sulaiman Mayanja, président de la fédération de basket fauteuil, reste optimiste sur le développement de la discipline :Dans ce pays, les gens ne reconnaissent pas encore vraiment le handisport. Il nous faut faire plus pour être visibles. Mais à travers les épreuves, nous ne sommes pas limités, nous ne sommes pas soumis à quoi que ce soit, nous voulons juste réussir et avancer.Fin du match amical… Dans le gymnase, les joueurs rwandais et ougandais se serrent la main. Le 28 août, les basketteurs suivront à la télévision le début des Jeux paralympiques, en espérant pouvoir, un jour, y représenter leur pays.À lire aussiParalympiques 2024: Jeanne Le Pêcheur, paracycliste, porte la flamme► Tous nos articles sur les Jeux paralympiques sont à retrouver ici.► Le programme et le calendrier des Jeux paralympiques est à consulter ici.
8/27/20242 minutes, 17 seconds
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Portrait de Mike Sylla, créateur de mode qui habille stars et politiques

Il a habillé des artistes (Carlos Santana, Yannick Noah, MC Solaar, Princess Erika…), mais aussi des personnalités politiques (Hassan II et l'actuel roi du Maroc Mohammed VI) : Mike Sylla a également organisé des défilés à travers le monde, y compris dans son pays d’origine, le Sénégal. Ce styliste amateur de la mode ethnique est également compositeur, musicien et slameur. Ce Franco-Sénégalais a passé plus de 30 ans à rassembler couleurs, signes et matières, en hommage à l’Afrique et à son quartier de naissance. Portrait. Né dans la Médina de Dakar, cet artiste global, aux multiples influences, est installé à Paris depuis 30 ans, mais ses œuvres demeurent imprégnées par ses origines et surtout ce quartier populaire où s’exprime la culture profonde de l’Afrique de l’Ouest.Je suis de ce milieu à Dakar, le quartier où je suis né, un quartier d’artisans artistes où la création est au centre de toutes les activités… J’avais toujours eu l’inspiration par mes parents, surtout mon père qui était forgeron, donc alchimiste. Il m’a toujours initié dans l’idée de l'art, de la création, et ça m’a aidé à m’ouvrir sur tout ce qui est style, tout ce qui est design, ça m’a ouvert aussi la porte à aller vers la couleur de l’art. Et tout ça m'a permis de vraiment approfondir mon sens de la créativité.Total artDepuis le début, il était évident pour Mike Sylla que la mode était une attitude, une tendance, de mettre donc l’Afrique au cœur de ses créations.L'Afrique est au centre de ma façon de créer un dialogue, une communication directe avec les gens. J'ai voulu symboliser tout ce qui est image et de le valoriser à travers l'art, donc pour moi, c'était aussi de donner la mode au sens art plastique, au sens d'anoblir cette matière qui est la peau. J’utilise beaucoup le cuir et les daims, qui sont des matières difficiles, de le prendre comme si c’était une toile, de pouvoir faire de l’art porté, de l’art libéré, qui est aussi démocrate parce qu’on fait véhiculer l’art dans la rue. Cet artiste multidisciplinaire défend l’idée du « Total art ». Sa ligne Baifall Dream, ou « rêve des couleurs », est l’expression de tous ces arts dont il est le concepteur. Une façon de magnifier la créativité, en donnant une autre dimension à la vie :L'idée du « Total art », c'est aussi de dire aux gens que l'art pourrait aussi soigner, aider. Ça peut aussi développer des émotions sur lesquelles on peut s'appuyer pour le mieux vivre. C’est ce que j’appelle le « Baifall Dream », qui est une façon en fait d’emmener à faire en sorte que la créativité soit au service de l’humain.Mike Sylla combine toujours le savoir à la mémoire pour créer des couleurs et des motifs assurant la singularité de chaque œuvre.À lire aussiMode: le Soudan du Sud organise sa Fashion Week pour stimuler le potentiel du pays et de ses mannequins
8/26/20242 minutes, 38 seconds
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RDC: à Lubumbashi, visite sonore du musée familial avec Marcel Yabili

Il y a dix ans que la ville de Lubumbashi en RDC a vu naître une initiative privée de mémoire, c’est le musée familial Yabili, situé dans la commune populaire de Kamalondo, au sud-est de la ville. Ce lieu de mémoire propose aux visiteurs non seulement un voyage à travers les cinq générations de cette famille modeste, mais aussi quelques faits marquant de l’histoire de la RDC depuis l’époque d’avant la colonisation. Il est aussi un espace de recherche. De notre correspondante à Lubumbashi,Au numéro 1 de l’avenue Basanga de la commune Kamalondo, Marcel Yabili a transformé la maison familiale vieille de plus d’un demi-siècle en un lieu de mémoire.J’ai fait le musée, il montre le parcours de ma famille. Un parcours difficile à faire parce que vous racontez les secrets de la famille... Sans limite.L’exposition commence par des cartes de l’Afrique d’avant la colonisation. Une histoire qui rime avec celle de la famille de Marcel :Coté paternel, j’ai un grand-père qui est né en 1873. Il grandit et on arrive dans les années 1880, il avait environ sept ans et, à ce moment-là, il y a la pénétration arabe et l’esclavagisme.Une histoire de famille liée au prince AlbertEt puis, il y a cette carte du Congo belge de 1909, année de la première visite au Congo du prince Albert.Sur le tronçon entre Lubumbashi et Kilwa, il avait un cheval et le grand-père Léonard travaillait dans les fermes. Et il était pris comme palefrenier pour brosser le cheval du prince Albert.Sur une autre façade sont affichées une dizaine des photos en noir et blanc des parents, enfants et petits-enfants. Victor, le papa Yabili et Albert, l’oncle maternel, sont posés côte à côte. Marcel explique l'origine du prénom de ce dernier :Victor et Albert ont un lien avec la guerre. Victor est né en 1916. C’était l’année de la victoire sur les Allemands et on a pu prendre le Rwanda, le Burundi jusqu'à la ville de Tabora. Et les enfants qui sont nés en 1916, on les a appelés Victor. Maintenant, en 1919, c’était l’armistice. Et c’est l’année où Léonard a son premier garçon. Il pensait toujours au prince dont il avait brossé les poils de son cheval, donc il l’appelle Albert.Des timbres sur la conquête spatialeEn face de la maison familiale est construite une salle ouverte au public. Marcel Yabili poursuit la visite...Nous sommes à Audeta, c’est la deuxième partie du musée. Ici, c’est pour les autres familles et les expositions.Et en dix années d’existence, le musée a organisé plusieurs expositions dont on retrouve encore des extraits. Marcel se souvient des plus inédites :Je vous montre ici. Le Congo avait des timbres-poste et on avait fait des timbres sur la conquête spatiale en 1969. Il y avait donc ce certificat comme quoi le drapeau du Congo flotte sur la lune. Aussi, on a fait une exposition sur la filière du coton, parce que le Congo était le plus grand producteur du Coton, avec plus de 150 000 tonnes par an. Et là, on montre les journaux de 1919, etc.Ce musée familial regorge aussi bien des textes, des cartes que des éléments sonores, tant sur la ville que sur le pays.À lire aussiÀ Lubumbashi, le musée des gens ordinaires de Mr Yabili
8/25/20242 minutes, 20 seconds
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Au Tigré, les vétérans souffrent des séquelles de la guerre et manquent de soins [5/5]

En Éthiopie, presque deux ans après la fin de la guerre civile, le Tigré fait toujours face à d’immenses défis. Le conflit, qui avait opposé les Tigréens au pouvoir central éthiopien, allié de l’Érythrée voisine et d’autres régions comme la région Amhara, a causé 600 000 morts, selon l'Union africaine, et des dizaines de milliers d’anciens combattants ont été gravement blessés. Vingt mois après l’accord de paix de Pretoria, leur sort constitue un vrai défi.  De notre envoyé spécial, de retour de Mekele,Ce sont les éclopés, les handicapés, les gueules cassées du Tigré. Dans un hôpital de Mekele, Berhane Gebreselassie attend un médecin assis sur une chaise. À seulement 24 ans, il portera pour toujours, au plus profond de lui-même, les séquelles de la balle qu’il a reçue sur le front ouest. « J’ai été touché par un tir de l’armée fédérale ou des Amharas. On m’a amputé des deux testicules pour me sauver la vie. Maintenant, j’ai des problèmes d’incontinence, souvent, j'urine du sang. Parfois l’urine s’échappe dans l’intestin, causant de terribles douleurs, les médecins d’ici sont impuissants. Je dois aller à l’étranger. » Sans ressources, le jeune homme lance un appel à l’aide à quiconque l’entendra. Il a besoin d’argent pour se faire opérer à l’étranger. Cependant, il confie n'avoir aucun regret : « J’ai combattu pour mon peuple. Peut-être que j’aurai des enfants ou pas, ça ne m’inquiète pas. D’abord, je dois me faire soigner. »D’autres vétérans ont eu plus de chance. Après l’accord de paix, Berhan Atsmaa a déposé les armes. Ce pointeur-tireur sur mortier a ensuite retrouvé son poste de fonctionnaire aux douanes. Pour autant, la non-application de l’accord de paix entretient son amertume. « J’ai des regrets concernant l’accord de paix. Après tout ce que nous avons enduré, je vois que les déplacés ne sont toujours pas rentrés et le Tigré est en partie occupé par les Amharas et les Érythréens. Si notre terre n’est pas libérée, je suis prêt à me battre de nouveau. Même si je suis handicapé. » Ce vétéran souffre encore de séquelles de la guerre : « Je me suis battu pour la survie du Tigré. J’ai encore des éclats d’obus dans le corps. Lorsqu’il fait froid, mes muscles se contractent et j’ai très mal. Quand il fait chaud, le métal me brûle. »Les vétérans attendent de l'aide de la communauté internationaleMalgré ces difficultés, les anciens combattant tigréens n'attendent pas pour autant l'heure de la revanche, explique Mééraf Kassah, lui-même vétéran : « Nous n’avons pas besoin de revanche. Sinon ce sera un cycle sans fin. Ce qu’il nous faut, c'est la paix, pour revenir à notre ancienne vie. » Mais selon lui, la communauté internationale doit aider les anciens combattants à reprendre une vie normale : « Beaucoup de gens sont encore affectés et traumatisés. Or, ils ne reçoivent rien en échange de leur engagement. C’est vraiment triste. La communauté internationale devrait nous apporter une aide médicale. Notre gouvernement régional n’a pas assez d’argent. Tout ce qu’il peut faire, c’est alerter les partenaires étrangers. »À cela s’ajoute le fait que 250 000 anciens combattants détiennent encore des armes et les autorités tigréennes ont averti qu’il n’y aurait pas de désarmement tant qu’Amharas et Érythréens n’auront pas quitté le Tigré. Retrouvez les autres épisodes de notre série sur le Tigré ci-dessous :► Éthiopie: au Tigré dans un camp de Shire, les déplacés attendent de rentrer chez eux [1/5]► Éthiopie: au Tigré, l'économie est toujours à genoux [2/5]► Éthiopie: deux ans après la guerre civile, le Tigré a faim [3/5]► Éthiopie: à Mekele, la vie revient malgré les horreurs de la guerre [4/5]    
8/22/20242 minutes, 29 seconds
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Éthiopie: à Mekele, la vie revient malgré les horreurs de la guerre [4/5]

Au Tigré, la guerre aurait provoqué 600 000 décès, selon l'Union africaine, dont un grand nombre durant ce que l’OMS avait dénoncé comme « un blocus de fait » de la région. Aucune aide n’était autorisée à entrer, médicaments, nourriture, et autres produits vitaux n'accédaient quasiment plus à la zone. Des milliers de personnes seraient mortes à cause des pénuries. Certains experts parlent même d’un possible génocide. Dans la capitale Mekele, deux ans après la signature de l'accord de paix, la situation s’est améliorée même si le quotidien des habitants reste très difficile.  De notre envoyé spécial de retour à Mekele,Au marché Adi-ha, les camions arrivent chargés pour alimenter les étals. Même si on est loin du niveau d’avant-guerre, les clients comme Fetsum Hayilu sont soulagés que le blocus cauchemardesque appartienne au passé. « J’ai ressuscité. Durant le siège, il n’y avait pas de nourriture, pas d’école. J’ai pris du poids, mais à l’époque, vous ne m’auriez pas reconnu. Des gens amenaient des denrées jusqu’aux barrages et soudoyaient les soldats pour les faire entrer », témoigne-t-il. « Il m’arrivait de ne pas manger pendant 5 ou 6 jours. Ma femme est morte faute de médicaments. » Il constate un changement depuis la levée du blocus : « Aujourd’hui, il y a une petite amélioration. Mais l’inflation et le chômage sont très élevés. La vraie différence, c'est que je n’entends plus de combats. »  Algaore Chmelku descend de son poids lourd. Il vient de faire cinq heures de route pour apporter son chargement d’oignons. Durant la guerre, venir jusqu’ici était impensable : « Aucune marchandise ne passait. Mais la situation s’est améliorée. Le transport est possible même si les ventes ne sont pas encore au niveau d’avant-guerre. »  À lire aussiÉthiopie: au Tigré, l'économie est toujours à genoux [2/5]Réparer la villeTrottoirs, maisons, routes, en de multiples endroits, les ouvriers s’activent pour reconstruire, rénover, réparer la ville. Yohannes Ataralti collecte des pierres sur un chantier. Pour lui, Mekele change, même si les progrès sont lents : « Les constructions sont surtout dans le privé. Ce ne sont pas encore des infrastructures. Mais j’espère que le Tigré redeviendra ce qu’il était. En tout cas, je donne toute mon énergie pour qu’on y arrive. »« Les gens recommencent un peu à s’amuser, même si les horreurs de la guerre les hantent encore »Ce soir, au Black Lion, les clients trinquent à leur vie retrouvée. La musique de ce bar populaire a remplacé le bruit des bombes. Dans un semblant de vie nocturne, Dessalegn Zeroa, musicien, s’apprête à donner un concert : « Pendant le siège, il n’y avait plus de vie nocturne. Je n’avais plus de revenus. Aujourd’hui, nous organisons des concerts payants et j’espère sortir un disque. Les gens recommencent un peu à s’amuser, même si les horreurs de la guerre les hantent encore. » Ainsi, il constate que l’ambiance de fête n’est pas totalement retrouvée.    Si Mekele revit peu à peu, la situation sociale n’en est pas moins difficile. Les fonctionnaires n’ont, par exemple, pas été payés depuis 17 mois. « C’est une nouvelle punition contre les Tigréens. Nous avons fait des pétitions, une grève. Mais le gouvernement fédéral a menacé de nous licencier, dénonce Weldu Abraha, professeur d’histoire à l’université. Il craint une fuite des cerveaux, lui-même cherche à quitter le pays : « 220 enseignants sont déjà partis. On constate une hausse des vols, viols et kidnappings. On voit déjà des actes d’anarchie. » Inflation, chômage, l’accord de paix a fait taire les armes, mais la tension sociale risque de monter, sans réaction rapide des autorités.À lire aussiÉthiopie: deux ans après la guerre civile, le Tigré a faim [3/5]
8/21/20242 minutes, 46 seconds
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Éthiopie: deux ans après la guerre civile, le Tigré a faim [3/5]

Presque deux ans après la signature d'un accord de paix en Éthiopie, le Tigré, dans le nord du pays, fait toujours face à d’immenses défis. Selon l'Union africaine, la guerre aurait provoqué 600 000 morts, sans compter un très grand nombre de destructions. Il y a plusieurs mois, les autorités tigréennes ont déclaré l’état de famine avec plusieurs centaines de morts. Une situation jamais reconnue par l’État central, à Addis-Abeba.  De notre envoyé spécial de retour du sud de la province du Tigré,Les pluies arrivent et, dans leurs champs, les agriculteurs du village de Gurubera, dans le sud de la province du Tigré, poussent leur bétail afin de planter. Mais beaucoup doivent utiliser des ânes pour tirer la charrue. « La sécheresse a fait baisser le niveau de la rivière et des pâturages. On ne pouvait plus nourrir nos animaux, les personnes âgées ont commencé à mourir de faim. Nous avons dû vendre le bétail ou le remplacer par des ânes, explique Tekle Buru, cultivateur de 76 ans. Aujourd’hui, la terre est très sèche et la guerre a aggravé la situation. J’ai l’impression que Dieu nous punit à nouveau. » Tekle Buru a vu une dizaine de personnes mourir de faim et d’autres partir chercher du travail à Yechila, la ville voisine. À lire aussiÉthiopie: au Tigré dans un camp de Shire, les déplacés attendent de rentrer chez eux [1/5]« Près de 300 enfants en malnutrition sévère »L’aide qui arrive est très faible : un peu de nourriture du district ou d’Action contre la faim, ou de l’argent de la diaspora. Rien d’autre. « La situation est critique. Les femmes enceintes ne mangent pas assez. Donc les nouveau-nés sont déjà très faibles et elles ne peuvent pas les nourrir, témoigne Gemaresh Amara, la responsable du centre de santé du village qui s’alarme de la situation. Près de 300 enfants sont en malnutrition sévère. Beaucoup sont envoyés à l’hôpital de Yechila. Mais là-bas non plus il n’y pas assez de médicaments, donc ils nous les renvoient. C’est un cycle de souffrances », se désole-t-elle.   À plusieurs dizaines de kilomètres, des dizaines de patients attendent à l’hôpital de Yechila. Workit Alla est venu faire examiner sa petite-fille Mereseit, un an seulement et très amaigrie : « Le bébé est tombé malade. J’ai essayé la soupe, mais elle n’en veut pas. Elle avait une diarrhée avec du sang. Donc j’ai dû venir ici, confie-t-elle, nous avons très peu de nourriture. Les terres ne produisent pas assez et la guerre n’a fait qu’empirer les choses avec la mort de nos animaux. »Face à une telle situation, l’administration locale est impuissante. À Yechila, l’immeuble du district porte encore des traces de balles et d’explosions. « Le bâtiment a été bombardé. Nous sommes incapables de fournir des services de qualité. Nous dépendons des humanitaires, alerte Deseseu Tadessa, responsable des affaires sociales de la ville. Le système de transport s’est écroulé, entraînant une pénurie des livraisons de denrées et de médicaments. Puis s’est ajoutée la sécheresse. »Il pointe aussi du doigt le pouvoir fédéral d’Addis-Abeba : « Le gouvernement fédéral est censé gérer l’aide. Mais il ne fait rien. Je ne sais pas si c’est intentionnel. En tout cas, il ne répond pas à nos demandes de soutien. » Et il révèle que 13 villages aux alentours sont en situation de malnutrition. Or les récoltes n’auront pas lieu avant octobre, les prochains mois pourraient donc conduire au désastre.À lire aussiÉthiopie: au Tigré, l'économie est toujours à genoux [2/5]
8/20/20242 minutes, 28 seconds
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Éthiopie: au Tigré, l'économie est toujours à genoux

Presque deux ans après la fin de la guerre, le Tigré, dans le nord de l’Éthiopie, est toujours face à d’immenses défis. Le conflit avait opposé les Tigréens au pouvoir central éthiopien, allié de l’Érythrée voisine et d’autres régions comme la région Amhara. La guerre de 2020 à 2022 pourrait avoir fait 600 000 morts selon l’Union africaine. Des milliers d’entreprises et infrastructures ont été pillées, saccagées ou encore détruites. Malgré l’accord de paix, une très grande partie n’ont pas pu reprendre leurs activités. De notre envoyé spécial de retour de Hawzen,Jemal Abdelkadir jette avec dépit des morceaux de dalles brisées dans le sinistre hangar de Semayata Dimansional Stones. L’entreprise produisait du granit et employait 600 personnes. Presque trois ans plus tard, le site n’est toujours qu’un tas de gravats : « Les Érythréens ont emporté tout ce qu’ils pouvaient sur des camions. Ils ont dynamité une soixantaine de machines. Leur slogan, c’était : "Faire revenir le Tigré 100 ans en arrière". Aujourd’hui, je dirige une entreprise morte ou un musée. Mais nous allons relancer le site. Ils n’ont pas détruit nos esprits. »L’entreprise négocie avec une banque pour un prêt de 8 millions afin de relancer l’activité. Un vrai défi, d’autant que les taux d’intérêt sont passés de 9 à 13%.À écouter aussiÉthiopie : les agriculteurs du Tigré peinent à se remettre de la guerreÀ 50 kilomètres vers l’ouest, le collège technique Hawzen accueillait avant le conflit 280 étudiants. Certains cours ont pu reprendre, mais pour seulement 80 d’entre eux. Teklu Gebreyesus, chef des ressources humaines : « Les Érythréens ont tout volé. Nous avons repris les activités sans machine comme la comptabilité. Nous essayons de rattraper le retard en étudiant durant le week-end et les vacances. Mais les élèves ont des problèmes de dépression, ils n’ont plus d’espoir, c’est vraiment triste. »Hawzen est aussi connue pour Gheralta Lodge, haut lieu du tourisme de luxe, face aux montagnes où avait séjourné l’ancien président américain George Walker Bush. Mais le site n’est plus que l’ombre de lui-même, explique Zeray Gebregiorgis, l’un des gardiens : « Les Érythréens utilisaient le lodge comme un camp et un hôpital. Ils n’ont rien laissé. Nous avons essayé de nettoyer, d’amener des meubles. Mais les rénovations coûtent 2 millions d’euros. Ça prendra du temps. Mais nous y arriverons. »Soudain, une famille d’Américains de la diaspora passe le portail. Aujourd’hui jeune femme, Naomie Assefa était venue ici durant son enfance. Voir le lodge dans cet état lui brise le cœur : « C’est fou de voir à quel point il a été détruit. Cet endroit était plein de joie et de vie. Tout cela a disparu. »Horrifié par la guerre, son père, Getachu, s’est alors lancé dans un pari fou. Investir 10 millions d’euros pour construire un parc d’attraction et un hôtel 5 étoiles à Mekelle, la capitale : « Les gens sont traumatisés. Je devais faire quelque chose d’important. Le projet apportera des emplois, des touristes. Ça aidera ces gens à guérir. »Ouverture prévue, début 2025. Getachu Assefa espère que la population pourra s’amuser et oublier, ne serait-ce qu’un temps, les horreurs du passé.À lire aussiÉthiopie : rétablissement progressif à Kukufto après l'accord de paix dans le Tigré
8/19/20242 minutes, 31 seconds
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Éthiopie: au Tigré dans un camp de Shire, les déplacés attendent de rentrer chez eux

Presque deux ans après la fin de la guerre, le Tigré, dans le nord de l’Éthiopie, est toujours face à d’immenses défis. Le conflit avait opposé les Tigréens au pouvoir central éthiopien, allié de l’Érythrée voisine et d’autres régions comme la région Amhara. La guerre pourrait avoir fait 600 000 morts, selon l’Union africaine, sans compter un très grand nombre de pillages et destructions. Des centaines de milliers de personnes sont encore déplacées, car malgré l’accord de paix, le nord du Tigré reste occupé par l’Érythrée. L’ouest a lui été en partie conquis par les Amharas. De notre envoyé spécial de retour de Shire,Il est neuf heures au camp Preparatory. Des déplacés passent le temps en jouant au baby-foot. Ils attendent chaque jour un retour sur leur terre dans l’ouest, occupée par les Amharas.« Le problème, c’est la sécurité. Les Érythréens et les Amharas ont tué nos familles, violé nos femmes. On ne peut pas rentrer comme ça. Les forces du Tigré doivent les refouler. Car la tension est encore forte entre nous. Nous voulons des garanties et qu’ils soient partis. Nous sommes prêts à pardonner. Mais nous voulons rentrer chez nous », déplore leur représentant, Debrewahit Hagos Yohannes.À lire aussiSur les routes d'un Tigré ravagé« J'ai perdu tout espoir de rentrer »Les déplacés de Shire subissent un quotidien claustrophobe, avec la frontière érythréenne toute proche, beaucoup se disent cernés par l’ennemi. Amanuel Debrekiros Gebremedin demande qu’on le protège.« J’ai vu les miliciens Amharas abattre trois jeunes devant moi. Alors, j'ai fui, témoigne-t-il. Mais aujourd’hui, j'ai perdu tout espoir de rentrer. Tant que les Amharas seront là-bas, pas question de revenir. Et les Érythréens tout proches, ça ne me rassure pas. Les Tigréens doivent garantir notre sécurité, pas le gouvernement fédéral qui nous a fait la guerre. »Les autorités avaient annoncé un retour au 7 juillet. Certains ont pu rentrer chez eux, mais ils sont encore des milliers dans le camp, comme Berhane Belay, qui évoque avec nostalgie Humera, sa ville natale, à 300 km.« Ma maison me manque. Sentir le sable sous mes pieds me manque. Mon travail me manque. Je vendais du lait, des papayes, des mangues. J’aidais les plus pauvres. Notre communauté était soudée. Mais ici, je ne peux plus rien faire, tout le monde est démuni », confie-t-elle.Une situation critiqueLe besoin de rentrer est d’autant plus fort que l’aide humanitaire est faible. De nombreux déplacés partent le matin chercher du travail en ville ou mendier. Terhassa Dissu a été réfugiée au Soudan, aujourd’hui en pleine guerre civile, et a dû rentrer au Tigré, non sans un certain regret.« Il y avait tellement de bombardements. Les soldats tiraient dans la foule. Donc, on a fui. Nous vivions en paix au Soudan. Mais une nouvelle guerre a éclaté là-bas. Nous nous sommes dits que si nous devons mourir, autant mourir sur notre terre, donc nous sommes revenus au Tigré, explique Terhassa Dissu. Sauf qu’au Soudan, au moins, on recevait beaucoup d’aide. Ici, il n’y a rien. Je regrette même d’être revenue au Tigré. »Les autorités tigréennes demandent à la communauté internationale de ne pas détourner le regard et d’augmenter l’aide humanitaire. Car malgré l’accord de paix, la situation reste critique.À lire aussiÉthiopie: des déplacés du Tigré, entre traumatisme et rage après les exactions des miliciens Amharas
8/18/20242 minutes, 39 seconds
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RDC: les alternatives se développent pour pallier les lacunes de la société nationale d'électricité

Dans le nord de RDC, la ville de Kisangani, chef-lieu de la province de la Tshopo, connait depuis des années des problèmes d’électricité. Le barrage électrique Tshopo 1 tourne au ralenti. La population se débrouille pour avoir des solutions, les panneaux électriques sont notamment utilisés par les ménages pour avoir de l’électricité. Les soudeurs et certaines structures sanitaires, comme les morgues, n’hésitent pas à déployer des moyens importants pour fonctionner. Au centre-ville de Kisangani, au RDC, sous un soleil de plomb, les bruits assourdissants du générateur nous accueillent dans l'atelier de soudure de Michel Ngando. Disqueuse en main, ce vieil homme, la soixantaine révolue, nous explique pourquoi il ne fait plus totale confiance en la Snel, la société nationale d'électricité. « Nous avons un grave problème de courant, déplore-t-il. La ville de Kisangani semble avoir une plus grande charge que l’énergie fournie. Nous utilisons quatre à cinq fois par jour ce générateur. Par semaine, nous pouvons acheter entre 40 et 50 litres de mazout. »Les soudeurs ne sont pas les seuls à chercher des solutions pour pallier les soucis d'approvisionnement en énergie électrique dans la ville de Kisangani. Dans la commune Kabondo, l’hôpital Rekapi n'est pas du reste. Joseph Lomenga, gérant du frigo mortuaire, nous fait visiter les installations qui fonctionnent partiellement avec les panneaux solaires et un générateur.« Nous nous débrouillons avec ce système solaire et de générateur pour avoir l’énergie 24 heures sur 24, explique-t-il. La morgue demande la permanence de l’énergie, contrairement à d’autres structures. C'est vraiment la grande difficulté que nous avons ici, parce que c’est vraiment un coût, ça demande beaucoup de gazole, pas moins de deux fus par semaine. C'est la raison pour laquelle nous n’arrivons pas à rabattre le prix. »Kisangani est alimenté par le barrage Tshopo. Une seule turbine fonctionne sur les trois potentiellement disponibles. Certains quartiers, comme Sayon, dans la commune Makison, ne reçoivent parfois du courant que la nuit, de 23 heures jusqu'au matin. Rebecca Muhegi, femme au foyer, nous accueille dans sa cuisine, une marmite bouillonne sur le foyer alimenté par le charbon de bois. « Nous utilisons le charbon de bois parce que le courant électrique n’est pas stable, décrit-elle. Si le courant était stable, nous aurions utilisé le réchaud. Cette instabilité ne nous permet pas de conserver même les aliments dans le réfrigérateur. »La réhabilitation complète de la centrale de la Tshopo 1 est promise par la Snel, la société nationale d’électricité, tout comme la construction d’une nouvelle centrale Tshopo 2. Une délégation des experts de l’entreprise allemande Fichtner, envoyée par l’Agence française de développement, effectue une étude de faisabilité de ces travaux. Les résultats sont très attendus. En attendant, la majorité de la population de Kisangani, troisième ville de la RDC, continue à s’alimenter en énergie électrique avec des solutions alternatives.À lire aussiLa RDC se dote d’un département d’intelligence économique pour la surveillance de secteurs stratégiques
8/15/20242 minutes, 4 seconds
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Débarquement de Provence: une exposition pour mettre en lumière le rôle des soldats africains

Il y a 80 ans aujourd’hui, deux mois après le débarquement de Normandie, les troupes américaines, françaises et coloniales débarquaient en Provence. Objectif : la libération de la France et de l’Europe du nazisme. L’évènement est commémoré aujourd’hui dans le Var. C’est sur les plages de ce département qu’ont débarqué 100 000 soldats, le 15 août 1944. Une cérémonie internationale à laquelle sont conviés plusieurs chefs d’États africains a lieu aujourd’hui à Saint-Raphaël. À quelques kilomètres de là, à Fréjus, un musée des Troupes de Marine accueille une exposition temporaire qui retrace l’histoire de ce débarquement et qui met notamment en lumière le rôle joué par les soldats africains. Uniformes, armes, véhicules... L’exposition du musée des Troupes de Marine de Fréjus, au sud de la France, retrace, à travers des objets authentiques, photos, cartes et diagrammes, l’histoire du débarquement de Provence, un évènement dont de nombreux chiffres viennent d’abord rappeler l’ampleur : 2 000 bombardiers lâchèrent 8 000 tonnes de bombes. Près de 400 000 soldats débarquèrent dont 100 000 pour la seule journée du 15 août. Des militaires qui arrivèrent à bord de centaines de bateaux dont plus de 130 bâtiments de combats et neuf porte-avions en appui.« Les témoins de l'époque disent qu'ils se sont réveillés le matin et que la mer était noire de bateau, raconte le médecin général inspecteur Marc Morillon, le président du conseil scientifique du musée. C'est pour cela qu'on a un peu de mal à comprendre qu'il passe un peu inaperçu, par rapport au débarquement de Normandie. C'est quand même une très grosse opération ! »Les moyens matériels acheminés furent également colossaux. « 500 chars de combats et 11 000 véhicules, énumère-t-il. Avec des problèmes techniques : débarquer un char de trente tonnes sur une plage, ce n'est pas quelque chose de très évident... »Parmi les soldats qui débarquèrent, 260 000 étaient issus de l’armée B, l’armée française reconstituée. Une force composée en grande partie de troupes coloniales, un point que l’exposition met largement en avant.« On a pris le parti de faire une exposition à hauteur d'homme, explique Marc Morillon. C'est-à-dire qu'on vous présente les combattants, avec des portraits. » Des portraits, réels ou fictifs, de soldats des différentes unités sont ainsi présentés. Exemple, avec Issa, soldat du quatrième régiment de tirailleurs sénégalais, qui débarqua le 17 août 1944 à La Nartelle, à côté de Sainte-Maxime…« Il a été équipé à l'américaine, décrit-il. C'est la première fois qu'il voit la France. Donc, il est surpris de découvrir ce pays et ce sol. Et puis, bien-sûr, les premiers combats, aux abords de Toulon, où ils sont obligés de déloger des positions allemandes avec des mitrailleuses. Ce tirailleur n'a pas existé. On a pris un prénom répandu chez les Sénégalais, puis l'historique du quatrième régiment des tirailleurs sénégalais. On sait ce qu'ils ont fait comme combats, donc il est facile d'imaginer l'histoire d'un soldat après. »Également présenté, le parcours des tirailleurs nord-africain. « Là, vous avez le goumier marocain, montre Marc Morillon, bien reconnaissable à sa djellaba et son casque américain de 1917, dont on dit qu'ils étaient la terreur des allemands. C'étaient des guerriers très durs, originaires du Rif ou de l'Atlas. Les allemands étaient terrorisés de tomber entre leurs mains. »Des dessins et des photos d’époques reviennent aussi sur le rôle central joué par les tirailleurs africains. Avec notamment la libération de Marseille et la prise de Notre-Dame de La Garde. Cette basilique qui surplombe la ville a été libérée grâce au rôle déterminant des tirailleurs algériens.À lire aussiTirailleurs: «Ils avaient l'aura de ceux qui ont vu d'autres horizons»
8/14/20242 minutes, 19 seconds
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Débarquement de Provence: les préparatifs d'anciens combattants marocains, invités aux commémorations

La France commémore, jeudi 15 août, les 80 ans du débarquement de Provence. Moins connue que sa déclinaison normande, c’est pourtant l’une des opérations majeures menées par les Alliés durant la Seconde Guerre mondiale qui contribuera à la chute de l'Allemagne nazie et à ramener la paix en Europe. L’armée française est alors une armée en pleine recomposition, constituée en grande partie de soldats venus des colonies, notamment 90 000 Marocains. Des vétérans ont été invités aux commémorations, en France, par le président Emmanuel Macron. Spontanément, il se dirige vers l’escalier. Les marches ne lui font pas peur… À 98 ans, Larbi Jawa déambule, sans canne, dans les couloirs de l'office national des combattants et victimes de guerre de Casablanca, au Maroc. Ce vétéran de 39-45 salue tout le monde. Le moment devient d’un coup plus solennel. Le directeur de l'office, Patrick Barré, prend la parole.« J'ai quelque chose à vous annoncer, annonce-t-il. Vous allez en France, où l'on va vous remettre la Légion d'honneur ! » « Je suis très content pour ce cadeau que la France va nous donner, s'exclame Larbi Jawa avec émotion. « Ce n'est pas un cadeau, c'est une reconnaissance méritée... Quoique tardive, mais c'est une belle reconnaissance ! » lui répond Patrick Barré.  Ils sont un peu moins de 200 à être toujours en vie, ces Marocains qui ont combattu dans l'armée française pendant la Seconde Guerre mondiale. Larbi Jawa s’apprête à rejoindre le sud de la France pour les commémorations du 80e anniversaire du Débarquement de Provence. Il sera accompagné de deux frères d’armes, Abdellah Jaber, 103 ans, et Mohamed Touba, 102 ans…« Quand je regarde mon père, que je vois son doigt, je me dis que ce doigt-là, il y a un certain temps, a appuyé sur une gâchette. Quand il enlève ses vêtements, je vois ses blessures... Ce sont de vrais sacrifices. Il considérait la France comme son pays, il défendait une cause », raconte le fils de Mohamed Touba, auquel il a transmis son nom. Trente ans de moins, c’est ce dernier qui raconte comment son père s’est engagé volontairement à l’époque - le Maroc est alors sous protectorat. Les Algériens, eux, subissent la conscription.« Vu la pauvreté dans laquelle il vivait, quand l'occasion s'est présentée, il s'est engagé. S'il n'était pas allé à la guerre, il aurait été, comment dire... perdu ! », estime son fils.Pour les commémorations du 15 août, les anciens combattants seront tirés à quatre épingles. Avec le directeur de l’office, Patrick Barré, ils partent acheter les vêtements qu'ils porteront ce jour-là.« Nos anciens combattants marocains se font de plus en plus rares. Dans dix ans, ils ne seront plus là, malheureusement. Si on ne leur rend pas hommage aujourd'hui, on ne pourra jamais corriger cette erreur ! C'était important de pouvoir les honorer », estime-t-il.À lire aussiProvence: en août 1944, l'autre Débarquement qui libéra la France de l'occupation nazie
8/13/20242 minutes, 26 seconds
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Côte d'Ivoire: sur Instagram, le compte «Archives Ivoire» ressuscite les années 1990 et 2000

Suite de notre série d’été sur les initiatives locales de préservation de la mémoire. En Côte d’Ivoire, un compte Instagram recense des extraits de films, de séries et d'émissions des années 1980, 1990 et 2010. Créé en 2020, « Archives Ivoire » compte désormais près de 90 000 abonnés. Aux plus anciens, il offre un voyage nostalgique vers l’enfance, mais il propose aussi aux plus jeunes de découvrir une époque et une esthétique qu’ils n’ont pas connue. Avec notre correspondante à Abidjan, Marine JeanninSur la page se succèdent les images de femmes : des femmes célèbres ou des inconnues, actrices, chanteuses ou journalistes… Le compte Instagram d’Archives Ivoire est une ode à la beauté féminine d’une époque révolue, explique sa fondatrice Marie-Hélène Banimbadio Tusiama, celle des années 1980 jusqu’aux années 2000. « Pendant la période de confinement, j’ai commencé à m’intéresser à l’audiovisuel en Côte d’Ivoire, se rappelle la jeune femme. Le cinéma, les séries télé, les clips vidéo dont je me souvenais parce que j’ai grandi en Côte d’Ivoire avant de partir en France. Donc, j’ai commencé à tout mettre sur ce compte Instagram, qui s’appelle Archives Ivoire. »L’objectif de ce compte est de rendre ces archives accessibles aux jeunes générations, qui n’ont pas connu ces séries, mais sont sensibles à leur esthétique… « C’est vraiment une accessibilité aux jeunes, explique-t-elle. Surtout la génération juste après moi, des 16-18 ans, qui n’a pas connu le coupé-décalé comme on l’a connu, ou les séries plus anciennes comme “Qui fait ça ?” ou “Comment ça va ?” de Léonard Groguhet. Donc, c’est vraiment leur amener ça dans un espace qu’ils maîtrisent déjà, qui est Instagram, et leur partager le plus de contenus vraiment ivoiriens de la manière dont on les a construits dans ces années-là, avec toutes les particularités socio-économiques de ces années-là. »Aux followers plus âgés, d’une vingtaine ou trentaine d’années, le compte offre un retour nostalgique vers l’enfance. C’est le cas de l’artiste peintre ivoirien Carl-Edouard Keita, l’un des tout premiers followers d’Archives Ivoire. « Quand je suis tombé sur la page d’Archives Ivoire, ça m’a fait quelque chose, parce que je retombais sur plein de choses de mon enfance, des vidéos, des personnages qui m’avaient marqué. »Il salue une initiative qui vient pallier l’absence de centres publics d’archives audiovisuelles. « On est un pays assez jeune, la mémoire collective de la Côte d’Ivoire est très récente, rappelle-t-il. Donc, avoir une page qui essaie de montrer toutes ces différentes périodes, c’est très, très intéressant. En Côte d’Ivoire, très souvent, toutes les références qu’on avait étaient des références extérieures, en fait. C'est rare pour beaucoup de gens de trouver des références ivoiriennes. Parce que soit on ne gardait pas les archives, soit les gens ne prêtaient pas vraiment attention à ce genre de choses. Le travail d’archives ici, c’est tellement… Il y a tellement peu de gens qui le font, ou bien qui le font mais qui ne vont pas en profondeur. Moi, je me dis, c’est très important d’avoir ce genre de page. »En plus de sa fonction commémorative, ce compte est aussi l’un des piliers du renouveau de l’esthétique vintage, indique Marie-Céline Agossa, fondatrice de la plateforme et agence Yua Hair, qui a collaboré avec Archives Ivoire sur plusieurs projets. Les jeunes Ivoiriens sont particulièrement séduits par l’esthétique des années 2000, appelées en anglais « Y2k», avec ses pantalons taille basse, ses colliers au ras du cou et ses sourcils dessinés au crayon…« Le Y2k a eu un gros renouveau au cours, je dirais, des trois dernières années, estime-t-elle. Les années 1970 également. Les années 1970 sont revenues en force à partir de 2019-2020. Je pense que ce sont deux périodes qui sont particulièrement intéressantes. Mais le Y2k est particulièrement intéressant parce qu’il y a eu un renouveau, je pense, occasionné par la technologie et la montée de la mondialisation. Et c’est très intéressant de voir comment ces références ou ces tendances des années 1970 et Y2k sont réinterprétées aujourd’hui en 2024. »Fort de son succès sur Instagram, Archives Ivoire est sortie du cadre numérique. Désormais, Marie-Hélène Banimbadio Tusiama organise également un ciné-club du même nom, entre les villes d’Abidjan et de Grand-Bassam, pour faire découvrir au public les films à succès de la fin du XXe siècle, comme les comédies de Henri Duparc.À écouter aussiCôte d'Ivoire: les commerçantes des marchés traditionnels initiées à la vente en ligne
8/12/20242 minutes, 17 seconds
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Comment les Kényans voient les performances de leurs athlètes

Onze médailles pour le Kenya : quatre médailles d'or, deux d'argent et cinq de bronze. Toutes gagnées en athlétisme. Les coureurs olympiques de ce pays d'Afrique de l'Est repartent de Paris victorieux. Sur place, les Kényans ont suivi leur performance avec fierté, malgré quelques déceptions. De notre correspondante à Nairobi, Des cris de joie dans ce bar de Nairobi. Benson Kipruto vient de finir le marathon en troisième position. Une médaille de bronze acclamée par les Kényans rassemblés pour suivre l’épreuve olympique. Wevin est venue avec son club de course à pied. « C’est sympa de le regarder avec d’autres coureurs et aussi de reconnaître la difficulté de l’épreuve, raconte-t-il. Je viens de courir 10 kilomètres, c’était fatigant, je ne me vois pas en faire 42 ! Pour moi, chaque Kényan qui participe aux JO est une superstar. Qu’ils gagnent une médaille ou non, ils font de leur mieux ! »Parmi les fiertés pour le Kenya : Faith Kipyegon qui a remporté sa troisième médaille d’or sur le 1 500 mètres. Ou Beatrice Chebet qui a fait un doublé en or sur le 5 000 et le 10 000m. Mais pour beaucoup, comme Georgette, il y a une déception sur le marathon. « J’espérais que Kipchoge puisse gagner, déplore-t-elle. Le marathon pour nous Kényans, c’est notre épreuve. On repart avec le bronze, c’est mieux que rien. »Eliud Kipchoge, double champion olympique du marathon à Rio et Tokyo, espérait remporter sa troisième médaille d’or. Il a finalement abandonné au trentième kilomètre, citant une douleur dans le dos. Njeri Wangari comprend : le parcours était difficile...  Pour ces jeux, elle a un autre regret. « Ce que je trouve dommage, c'est que nous avons des athlètes qui ont les capacités de représenter le Kenya dans des compétitions internationales, mais à qui on ne donne pas une chance, regrette-t-elle. Un bon exemple, c'est l’athlète, Winfred Mutile Yavi. Elle est Kényane, mais elle n’a jamais été sélectionnée pour l’équipe nationale, ce qui l’a poussé à obtenir la nationalité de Bahreïn. Et elle a gagné une médaille d’or. C’était douloureux de regarder une compatriote kényane monter sur le podium pour un autre pays. »En cause : une rude compétition pour l’athlétisme au Kenya. D’autres ont tenté leur chance ailleurs. En escrime, rugby, volleyball ou encore lancer de javelot. Anthony a suivi les épreuves de près : « C’était la première fois que le Kenya était représenté en escrime, il y a des enfants qui voient ça, ça leur donne envie. Il y a aussi Julius Yego qui a très bien performé et est arrivé cinquième sur le lancer de javelot. Voir ces sports sur lesquels nous n’avions pas forcément misé avant être représenté, nous prouve que nous pouvons évoluer. Nous aurons plus de diversité aux prochains Jeux olympiques. »Pour le moment, sur les réseaux sociaux, les messages de félicitations affluent pour les médaillés.À lire aussiJO 2024: la Kényane Faith Kipyegon entre dans l'histoire avec une 3e médaille d'or sur 1 500m
8/11/20242 minutes, 20 seconds
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En Tunisie, le crabe bleu est devenu une manne économique pour le pays

Le crabe bleu, c’est cette espèce invasive qui s’est répandue depuis 2015, détestée des pêcheurs, car elle cause la destruction des filets et de la faune marine. Mais ce crabe est désormais surnommé « l’or bleu », depuis que certains le pêchent et le vendent à des usines exportatrices, pour être consommé à l’étranger. Si la filière est encore en cours de structuration, et que certains pêcheurs n’y voient pas vraiment leur avantage pour le moment, le potentiel économique, lui, est bien là. De notre correspondante à Tunis, Au port de pêche de Radès, en banlieue sud de Tunis, les pêcheurs séparent les bancs de sardines accrochées à leurs filets. Pour beaucoup, comme Saïd Hassan, le portunus pelagicus, le crabe bleu, est encore considéré comme un fléau : « Ils détruisent nos filets. Parfois, on part en mer et on revient avec un filet qui coûte plus de 2 000 dinars (592 euros) entièrement détruits. Comment fait-on pour travailler après ? »Il sait que ce crabe est devenu une opportunité économique dans le sud tunisien et à l’est du pays, où il proliférait depuis 2014. Un retournement de situation après que plusieurs entreprises étrangères se sont installées pour l’exporter. Mais à Radès, les investissements tardent. « Il n’y a pas vraiment de solution pour le moment. On n’arrive pas à vendre le kilo à plus de 3 ou 4 dinars, donc même si on en ramène 20 kilos, c’est beaucoup moins rentable que le reste des poissons. »Au groupement interprofessionnel des produits de la pêche, Karim Hammami est chargé d’assister le secteur et son développement. Il explique comment la Tunisie a pu créer une chaîne d’approvisionnement autour de l’espèce, notamment au sud tunisien : « On a pris l’initiative d’innover et de concevoir des nasses de pêche sélective, des petites cages où le crabe entre par une porte et ne peut plus revenir, avec un appât là-dedans. »Valoriser la filièreAujourd’hui, le crabe bleu représente près de 25% des exportations de poisson dans le pays, selon un rapport du Fond mondial pour la nature. Il rapporte à la Tunisie près de 50 millions de dinars (NDLR, près de 15 millions d'euros), mais cette économie doit encore se structurer. « On aimerait bien que les investisseurs internationaux viennent s’installer en Tunisie et aient une vision stratégique sur une dizaine, une vingtaine d’années. »Autre priorité, valoriser la filière avec une labellisation tunisienne. À la plage de la Goulette, Omar Lasram entrepreneur et producteur de Boutargue a commencé à concevoir un plan pour faire du crabe bleu un produit de terroir : « Pour le mettre sur le marché en bonne et due forme et de bonne qualité, il fallait le labelliser. Un label de pêche artisanale, ça veut dire une traçabilité, une garantie d’hygiène, etc. »Omar cherche encore à convaincre les autorités de sa démarche qui pourrait aussi éviter aux pêcheurs de devoir revendre aux mareyeurs, à bas prix, les produits de leur pêche, dont le crabe bleu.À lire aussiLe chalutage de fond, une technique de pêche destructrice à bannir
8/8/20242 minutes, 21 seconds
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RDC: quel avenir pour le transport en taxi-vélo? [4/4]

Autrefois, ils étaient plusieurs centaines de taxis-vélos dans les rues de Kisangani, mais on estime qu’il y en aurait désormais moins de 100 à se cramponner au métier. Les tolekistes – comme on les appelle dans le chef-lieu de la province de la Tshopo, dans le nord-est de la RDC – sont voués à disparaître. La rude concurrence des motos-taxis semble en effet les contraindre à changer de métier, voire à devenir eux-mêmes motos-taxis. Mais qu’en pensent les usagers et les conducteurs de ce moyen de transport atypique ? Les rayons du soleil levant percent à peine le quartier Kabondo. Les deux mains posées sur son vélo, Augustin Fataki sort de sa maison en terre battue avant de dire au revoir à sa maman. Direction le grand marché de Kisangani, lieu de parking de vélos Toleka, l’emblématique deux-roues du chef-lieu de la province de la Tshopo. Arrivée au parking après une bonne demi-heure d'attente, un premier client repère Fataki.Atout, 50 ans révolus, visage ridé, grimpe sur le siège arrière du Toleka garni d'un coussin et décoré de broderie jaune, vert, rouge, cousu à la main. Sur le trajet vers la destination commandée, un échange est lancé entre les deux hommes : la survie des Toleka face à la farouche concurrence des taxis motos.« Je constate que les motos deviennent plus nombreuses et ils sont plus rapides, peux-tu les concurrencer ? », demande Atout. « Ils ont de meilleures recettes parce qu’ils ont des moteurs, ils peuvent faire un aller-retour alors que moi, je suis encore sur ma première course, le temps de la course est vraiment différent », répond Fataki.Aux inquiétudes se mêlent la crainte de l'abandon de ce métier historique. « Si tu n’abandonnes pas et que tu vois que la tendance est plutôt vers la disparition de Toleka, comment vas-tu te sentir ? », questionne Atout. « Si ce transport disparait, il n’y a pas de problème, c’est Dieu qui donne et j’ai beaucoup trainé dans ce métier, j’ai envie de faire autre chose », répond Fataki.« Nous sommes amenés à disparaitre »Arrivé à destination, la course est payée en espèces. Les jours des vélos-taxis à Kisangani semblent désormais comptés, comme le constate aussi cet autre Tolekiste : « Nous ne sommes plus qu’une quarantaine alors qu’avant, nous étions plus de 10 000. Nous sommes amenés à disparaitre. »Le vélo-taxi n’a plus beaucoup d’avenir à Kisangani, pense cet autre client : « S’il y a une hausse du prix de l’essence, nous prenons souvent les Toleka, les vélos étaient là avant les motos. Je vois que les motos augmentent en nombre, et la ville s’agrandit, le vélo va rester pour d'autres types de courses, mais pas pour le transport de personnes. »En attendant l’abandon total du vélo-taxi Toleka, quelques amoureux du deux-roues continuent à se mouvoir avec, à Kisangani.
8/7/20242 minutes, 16 seconds
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Côte d’Ivoire: «Les films, la musique» pour divertir les passagers pendant leur long voyage [3/4]

Sur les 82 000 km de réseau routier que compte la Côte d’Ivoire, le temps peut être long entre deux grandes villes. Depuis Abidjan, il faut compter cinq heures pour relier San Pedro, ville côtière de l’ouest, et huit pour Korhogo, la capitale régionale du nord. Alors pour distraire les passagers, les compagnies de cars longue distance ont pris l’habitude de diffuser des films et des séries sur des écrans. Rencontre avec ces passagers-spectateur à bord d’un bus pour San Pedro. De notre correspondante à Abidjan,Après le vacarme de la gare d’Adjamé, on goûte un bref instant de calme en entrant dans le car. Mais le silence est vite effacé par un nouveau fond sonore, celui des films, sketchs ou séries que le chauffeur diffuse sur les petits écrans, disposés au plafond toutes les deux ou trois rangées. Un divertissement bienvenu pour les passagers, qui permet d’oublier la longueur et l’inconfort du trajet. M. Camara est captivé par ce téléfilm du comédien guinéen Moussa Koffoé. « Les films, la musique, ça fait passer le temps… Comme le trajet est long, à force de regarder, on ne sent pas le temps passer, quoi. Moi, je ne dors pas dans le car. Donc je passe tout mon temps à regarder [la télévision] jusqu’à destination. »Les plus populaires sont généralement les clips musicaux, les téléfilms d’action ou les comédies. Avec une intrigue légère, facile à suivre même en cas d’assoupissement, Donald Assi, un autre passager, est devenu un grand amateur de ces comédies routières, avec des préférences bien marquées. « Ça nous permet de déstresser, de voyager en toute tranquillité, passer un bon moment en regardant ces séries-là, surtout les séries africaines, particulièrement Michel Gohou. J’aime bien ces séries parce que ça détend, ça fait rire. Ou bien ce qu’on est en train de voir, Moussa Koffoe, ça relate un peu les histoires de nos cultures. »L’importance de la programmationRire ensemble permet aussi de rapprocher les passagers souvent excédés par les longs trajets, et de calmer les tensions naissantes. Pour les conducteurs, le choix de la programmation est donc devenu une compétence à part entière, presque aussi importante que l’habileté au volant. Un art dans lequel M. Tapsoba, conducteur professionnel de la compagnie SBTA, est passé maître.« Il n’y a pas de télévision nationale dans les cars. Ce sont les clefs USB que l’on utilise comme support. Ce que les passages aiment, c’est ce que l’on préfère mettre aussi. Quand un passager est content du voyage, il reviendra. Certains arrivent même à destination et restent assis pour que le film finisse devant eux ! Ça m’est arrivé encore hier : "Chauffeur, le film n’est pas fini !" Et j’ai dit : "Mais on est arrivés !" Ça arrive souvent. »Avec un inconvénient : tous les passagers se voient imposer la même bande-son, qu’ils le veuillent ou non. Seules échappatoires : mettre une paire d’écouteurs avec sa propre musique, ou privilégier les voyages en voiture privée, plus calmes, mais bien plus onéreux.
8/6/20242 minutes, 13 seconds
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Centrafrique: dans les bus, les conducteurs diffusent des spectacles d'humour [2/4]

À Bangui, capitale de la République centrafricaine, le transport en commun reste un moyen de déplacement efficace. La majorité des habitants se déplacent avec des taxis, des minibus, des moto-taxis et des taxis-brousse. Ces moyens de transport desservent la capitale et les localités environnantes. Il suffit de se positionner au bord de la route ou dans un carrefour pour se faire embarquer. Et dans ces transports, les passagers sont accompagnés par des programmes radio, des musiques et même des sketches proposés par le conducteur pour divertir les usagers.  De notre correspondant à Bangui,Le soir, à l'heure de la sortie des bureaux, des centaines de Centrafricains, salariés ou étudiants, se bousculent au terminal nord de Bangui pour avoir une place dans un minibus ou un taxi. Le minibus « Dieu est Grand », de couleur verte, est vite bondé. Sans perdre une seconde, Davy, le conducteur, se met route. Selon Davy, le client est roi : « Les clients sont satisfaits lorsqu'il y a une bonne ambiance dans le bus. Les sketches leur font oublier leurs difficultés. Je fais la ligne qui relie le centre-ville au PK12. Avec mon lecteur audio, je joue les sketches centrafricains en complicité avec mon receveur [celui qui perçoit l’argent du voyage], pour distraire nos clients. » Davy prend son métier à cœur : « Les clients ont souvent beaucoup de problèmes. Il est de notre devoir de les mettre à l'aise. » Pour commencer, il met un spectacle audio du groupe Linga Théâtre.« Ce groupe théâtral fait rire le pays depuis plusieurs décennies. Ils sensibilisent le public sur un ton comique tout en dénonçant les mauvaises pratiques qui montent en puissance dans notre pays. »Assis sur la banquette arrière gauche, Jethro, un maçon, n'arrête pas de rire depuis 2 km. « Je suis très malheureux parce que j'ai perdu mon père. Le chagrin m'emporte et je réfléchis beaucoup depuis deux jours, se confie-t-il. Ils ont réussi à m'arracher un sourire avec ce spectacle. Il suffit d'un instant dans un bus pour oublier ma douleur. »À lire aussiL'humour africain sous les projecteursAlléger des journées bien chargées grâce à l'humourAu croisement du quatrième arrondissement, quatre passagers descendent. Agrippé d'une main à la portière latérale du minibus, le receveur, qui perçoit l’argent du voyage, cherche activement d'autres passagers. « Comme vous le voyez, le trajet est long, témoigne-t-il. Ces dizaines de passagers que nous transportons rentrent après une journée bien chargée. C'est aussi notre devoir de les divertir jusqu'à l'arrivée. »La distance et même les secousses n'ont plus d'effet sur Mamadou, l'un des passagers qui avale une gorgée d'eau glacée en rigolant : « Actuellement, ils ont décidé de jouer un sketch qui prodigue des conseils. Mais dans d'autres occasions, ça pourraient être des programmes radio, de la musique et même des prédications religieuses pour conscientiser les jeunes. »Arrivés au PK12, les passagers descendent tout contents d’avoir passé un voyage agréable. Le conducteur prépare d'autres sketches et le receveur cherche de nouveaux clients pour repartir au centre-ville.À lire aussiKenya: les matatus de Nairobi, une plate-forme pour les DJ débutants [1/4]
8/5/20242 minutes, 24 seconds
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Kenya: les matatus de Nairobi, une plate-forme pour les DJ débutants [1/4]

Les matatus sont devenus un symbole des rues de Nairobi. Les matatus, ce sont des bus privés de transport en commun bon marché, très populaires au Kenya. Étant très utilisés par les jeunes, ils déroulent une bande-son choisie et ils représentent une opportunité pour les DJ de promouvoir leurs mix musicaux.  De notre correspondante à Nairobi,De la musique qui s’échappe des matatus et des conducteurs qui ameutent les passants, le terminal de bus du centre-ville de Nairobi est animé. Déjà à bord d’un matatu, Brian attend qu’il se remplisse pour partir. Direction le bidonville de Kibera pour ce jeune de 23 ans :« C’est un moyen de transport que je trouve cool. Grâce à la musique et aux télévisions que l’on y trouve, ça permet de se détendre après une journée de travail. Que ce soit du hip-hop, de l'afrobeat, du reggae ou de la pop, j’adore la musique qui y est diffusée. »À lire aussiCentrafrique: dans les bus, les conducteurs diffusent des spectacles d'humour [2/4]Les playlists diffusées en continu ne sont pas choisies au hasard. C’est ce qu’explique David Kassano, au volant de son matatu. « Je passe tous les genres musicaux, en fonction de l’heure de la journée ou de l’ambiance des passagers, explique le conducteur. Je commence toujours par du gospel. L’après-midi, les passagers ont besoin de se détendre, donc je mets de la musique qui divertit, comme le dancehall. Le soir, selon mon humeur, je mets du reggae ou de la rumba. Le dernier trajet de la journée, je remets du gospel. On commence la journée avec Dieu et on la finit avec Dieu ! »À lire aussiLes capitales africaines veulent rouler à l’électriqueDes mix achetés quelques centimes d'euros qui ne font pas la fortune des DJDavid Kassano dit changer ses playlists chaque semaine et les acheter pour quelques centimes d’euros auprès de DJ de la capitale. Les habitués des matatus connaissent bien leurs noms. Parmi les plus populaires : DJ Demakufu, de son vrai nom Martin Owaka. Il a commencé il y a plus de dix ans en diffusant ses mix dans les bus. Dans son studio du centre-ville, il raconte ses débuts : « Les deux premiers mix ont eu un succès fou sur une route. Deux, trois mois plus tard, j’ai commencé à entendre mes mix sur de plus en plus d’itinéraires et c’est comme ça que le nom Demakufu est devenu populaire. Un matatu transporte une quarantaine de personnes par trajet. C’est un bon moyen de se faire un nom. »Pourtant, Demakufu le reconnaît, cette popularité ne se traduit pas toujours par des revenus : « J’ai eu du mal à convertir le nom Demakufu en véritable business. Je me rappelle qu’à l’époque, je peinais à obtenir 25 euros par mois, mais quand je sortais, les gens m’interpellaient, ils pensaient que j’étais riche. » Cette image est fausse, explique-t-il : « Ces personnes pensent que nous gagnons de l’argent avec nos mix. Ce n’est pas le cas. Elles servent à nous faire un nom dans l’espoir d’obtenir des contrats par la suite. Mais le défi est là, réussir à en tirer profit financièrement. » Aujourd’hui, Demakufu a un contrat régulier dans une radio de divertissement kényane. Il a aussi lancé sa propre académie de DJ. Dans le but, dit-il, d’assurer la relève.À lire aussiKenya: les Buruklyn Boyz, le groupe qui enflamme la scène musicale drill et séduit la jeunesse
8/4/20242 minutes, 13 seconds
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Sénégal: l'escrime aide à la réinsertion de mineurs emprisonnés

Au Sénégal, un projet inédit s'est emparé de l’escrime comme moteur de transformation positive. Depuis 9 ans, l'association Pour le sourire d’un enfant, à Thiès, à 70 km au sud de Dakar, pratique l’escrime avec des mineurs détenus en prison pour les aider à retrouver le chemin du respect d’eux-mêmes et des autres et de la réinsertion en société.  De notre envoyée spéciale à Thiès,Le fleuret pointé vers le ciel, devant le visage puis en direction du sol, en pantalon de jogging et bustier blanc, à première vue, rien ne distingue les sept jeunes qui participent à l’atelier d’escrime ce jour-là. Et pourtant, il a fallu leur apprendre plus qu’à d’autres, à commencer par leur faire prendre conscience de leur corps.« Il faut leur apprendre comment se positionner, il y en a beaucoup qui ne savent pas utiliser leur corps, car ce sont des gosses qui ne sont jamais allés à l’école », explique Jacques Faye, maître d’armes et animateur de l’atelier d’escrime pour l'association Pour le sourire d'un enfant. « Ils n’ont jamais fait de sport, donc du coup, ce n'est pas facile et à la fin, il y a un produit fini qui est vraiment prêt à faire de l’escrime, c'est extraordinaire ! »Car les mineurs qui sont là sont tous détenus à la Maison d’arrêt et de correction (MAC) de Thiès, au Sénégal, accusés de crimes plus ou moins graves, comme le rappelle la présence de deux agents pénitentiaires à l’entrée de la salle. Chaque semaine, pendant 2 heures, ils sont autorisés à venir pratiquer ce sport pas comme les autres.À écouter dans 8 milliards de voisinsLe rôle social du sport Échauffement, fente, combats avec le fleuret pour Kaïs, 17 ans. En détention préventive depuis trois ans, il mesure sa chance : « Ça me fait plaisir de jouer ici avec des gens qui sont en dehors, car moi, je suis en prison. C’est bon car là-bas, tu t’assois seulement, tu dors seulement, il n'y a pas de basket et le foot, c'est rare. »L’escrime comme médiateur de changementNelly Robin, chercheuse à l’IRD et fondatrice de l'association Pour le sourire d'un enfant, a co-cré la méthode « escrime et justice réparatrice ». Elle a très vite pris conscience des avantages de ce sport très complet quand les méthodes classiques échouaient à faire sortir les jeunes de la délinquance. « L’escrime, c'est l’arme, l’arme, c'est un médiateur, c'est une manière de comprendre que l'on peut avoir une arme dans les mains, mais que l'on peut exprimer autre chose que de la violence, on peut se contrôler et on peut dialoguer avec l’autre. » Explique la chercheuse. Elle poursuit : « Ensuite, il y a la tenue blanche, on sait combien ici ce n'est pas n’importe qui, à n’importe quel moment qui porte une tenue blanche, ça participe énormément à la réhabilitation du corps, et notamment des jeunes filles ».À lire aussiEscrime: trois choses à savoir sur Manon Apithy-Brunet, championne olympique de sabreLa fondatrice de l'association détaille l'aide que peut apporter l'escrime aux jeunes filles : « Elles arrivent souvent en prison accusées d’infanticide ou d’avortement, pour la plupart, il s’agit plutôt de grossesses précoces non désirées suivies d’accouchements solitaires dramatiques et elles sont dénoncées. Et donc elles abandonnent leur corps. Or, avec l’escrime, on voit qu’il y a une réconciliation peu à peu entre leur esprit et leur corps. »Une méthode efficace qui pourrait s'exporter dans d'autres paysHabib Georges Badji est éducateur à la méthode escrime et justice. Il explique que tous les enfants qui ont fait de l'escrime n'ont pas récidivé, ils ne sont pas retournés en prison. Qui plus est : « Au sortir de prison, ils reviennent, pour refaire de l'escrime ici. »Associé au masque, le respect mutuel, le contrôle de soi et la responsabilité que l’escrime véhicule, (tout comme l'identité et la cognition), ce sport invite à un jeu de rôle positif aux résultats concrets. Serigne Fallou Diagne Gueye, ancien détenu, se rappelle des bienfaits de l’escrime : « J'ai commencé à voir des petits changements seulement grâce à l'escrime. Je me concentre, j'ai du respect envers moi même, envers les autres. C'est pourquoi je me suis dit que ce sport, dans la vie, peut beaucoup aider. »Aujourd’hui, Serigne Fallou Diagne Gueye, devenu formateur à son tour, continue à pratiquer l’escrime et rêve à terme de devenir un champion.Depuis 2015, parmi les 600 mineurs formés à cette méthode, aucun n’a récidivé, au point que du personnel pénitentiaire venu du Rwanda, de Côte d’Ivoire et du Maroc va commencer à être formé à l’académie Escrime et justice réparatrice que Nelly Robin a créé. ► Suivez toute l'actualité des JO 2024 sur RFI et rfi.fr► Retrouvez le programme complet (calendrier, résultats,...) sur rfi.fr
8/1/20242 minutes, 31 seconds
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Au Cap-Vert, le défi des archéologues africains de rendre accessible à tous le patrimoine sous-marin [3/3]

Après avoir fouillé les sites au fond de l'océan se pose la question de la transmission de cet héritage marin, qui de facto est invisible et peu accessible. Plusieurs pistes sont explorées par les archéologues, entre numérisation des sites et des objets collectés, la création de musées, l'intégration de cette discipline dans l'éducation ou la création de circuits accessibles aux touristes. De notre envoyée spéciale à Praia,Dans la réserve du musée d’archéologie de Praia, une poterie africaine est prise en photo sous toutes ses coutures sur un fond noir, à la lumière de deux grands projecteurs. Un travail de numérisation de cet objet rare récupéré dans les fonds marins qui se fait sous la supervision de Patricia Carvalho, archéologue portugaise. « C’est important d’avoir une version digitale des céramiques pour pouvoir les observer, voir toutes les fonctionnalités et prendre des mesures. Et si l’objet est intéressant, il pourra être montré en ligne. Les gens peuvent le voir et interagir. »D’autres objets sont accessibles au public physiquement, au musée d’archéologie sous-marine de l’île de Boavista. Abraão Vicente, ministre cap-verdien de la Culture, est fier de l’avoir inauguré l’année passée : « Nous avons intérêt à la préservation, la recherche scientifique ne doit pas avoir qu'un but universitaire. Le plus important est de tirer les connaissances et de les partager avec le public pour qu'ils prennent conscience de ce que nous possédons et participent à la préservation. »Intégrer le patrimoine dans le programme scolaireD’autres objets sont laissés sous l’eau in situ, comme le recommande la convention de l’Unesco de 2001. Pour y avoir accès, le Cap-Vert a lancé deux circuits archéologiques sous-marins, ouverts aux touristes. Le plongeur Emanuel Charles d’Oliveira a travaillé sur ce projet avec l’Institut du patrimoine culturel du Cap-Vert. « C’est une façon de contribuer à l’économie nationale. Avant de choisir une épave, il faut s’assurer que toutes les informations ont été prélevées, ou que tous les objets ont été récupérés, si ce n’est pas le cas on les laisse de côté. »Pour qu’un maximum de personnes soient touchées et sensibilisées, la doctorante en archéologie Khadija Diop fait une thèse sur le patrimoine culturel subaquatique et l’éducation au Sénégal. « Notre objectif final, c’est de pouvoir intégrer le patrimoine dans le programme scolaire, au Sénégal. On a déjà commencé à produire des documents pédagogiques qui permettent aux enfants de comprendre le concept de patrimoine culturel subaquatique et de constater également que cet important héritage leur appartient. »Tout le défi des archéologues est donc de rendre visible l’invisible, ce patrimoine qu’il est impossible de voir à l’œil nu.À lire aussiAu Cap-Vert, les archéologues africains se forment pour diriger les recherches sous-marines du continent [2/3]
7/31/20242 minutes, 19 seconds
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JO 2024-Basket-ball: duel fraternel entre le Soudan du Sud et les États-Unis

En basket-ball, après sa victoire historique pour ses grands débuts aux Jeux olympiques dimanche contre Porto Rico, le Soudan du Sud dispute ce mercredi soir son deuxième match face aux États-Unis. Nouveau grand défi pour les Bright Stars, qui avaient échoué à 1 point de l’ogre américain en match de préparation. De quoi susciter le respect de la « Team USA », qui connait déjà très bien cette équipe et son jeune entraîneur Royal Ivey, 42 ans, ancien joueur de NBA.  Le match de basket ball qui oppose l'équipe du Soudan du Sud à celle des États-Unis c'est ce mercredi 31 juillet à 19heures Temps Universel.► Suivez toute l'actualité des JO 2024 sur RFI et rfi.fr► Retrouvez le programme complet (calendrier, résultats,...) sur rfi.fr
7/30/20242 minutes, 14 seconds
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Au Cap-Vert, les archéologues africains se forment pour diriger les recherches sous-marines du continent [2/3]

L'archéologie sous-marine, une pratique encore nouvelle se développe depuis près de dix ans Afrique. L'Unesco organise régulièrement des programmes de formation et la discipline commence à être intégrée dans certaines universités. Rencontre avec une équipe de jeunes formés dans le cadre d’un « chantier-école » au Cap Vert. De notre envoyée spéciale à Praia,Avec son matériel rangé dans un petit filet, Jentrix Chochy Sakwa, jeune anthropologue kényane, plonge à plus de quinze mètres de profondeur au niveau d’une épave qui daterait du 16e siècle. C’est la deuxième fois qu’elle participe à une formation de l’Unesco : « La première chose que nous avons faite, c’est d’analyser le site car nous devions en faire un croquis. Après cela, nous avons installé une ligne de fond pour que la prochaine équipe comprenne le site et puisse faire la photogrammétrie ».À bord du bateau, l’archéologue portugais José Bettencourt donne des conseils aux prochains plongeurs sur sa technique de photogrammétrie, qui consiste à prendre des images des fonds marins grâce à trois appareils photos alignés sur une barre des données qui seront ensuite traitées par un logiciel pour faire une représentation 3D de l’épave. Pour ce professeur, transmettre son expérience aux jeunes Africains est une nécessité. « Jusqu’à maintenant, la plupart des recherches effectuées en Afrique étaient faites par des équipes américaines ou européennes avec une faible participation des archéologues africains. Je pense qu’ils doivent prendre en main l’archéologie et les programmes parce qu’ils ont probablement des manières différentes d’aborder la signification de ces sites. »Développer les compétences Une fois sortis de l’eau, les 15 jeunes en formation se rendent au musée d’archéologie de Praia. Ici, José Bettencourt analyse les images prises la veille par Pierre-Antoine Sambou, archéologue sénégalais : « Dans l’ensemble, les images sont bonnes, il y a juste quelques détails à régler et je suis motivé.  À l’université, il n’y a pas ce genre de formation et de temps en temps, on a besoin de participer à ces cessions. »Le Cap-Vert a été choisi pour organiser le premier chantier-école en Afrique de l’Ouest, indique Moussa Wele, du bureau régional de l’Unesco à Dakar : « Nous en avons profité pour inviter d’autres jeunes de la région qui veulent protéger ce patrimoine. Ces jeunes ont déjà participé à des programmes de formations organisés par l’Unesco dans le but notamment de renforcer l’équipe locale. »Sur le long terme, la priorité de l’Unesco est d’accompagner les pays africains à intégrer l’archéologie sous-marine dans les programmes universitaires.À lire aussiAu Cap-Vert, des archéologues explorent le patrimoine sous-marin en Afrique [1/3]
7/29/20242 minutes, 25 seconds
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Au Cap-Vert, des archéologues explorent le patrimoine sous-marin en Afrique [1/3]

Dans les fonds marins au large du continent africain, une partie du patrimoine historique est encore invisible et inexploité. Épaves de bateaux de différentes époques, villages préhistoriques enfouis sous l’eau, objets du quotidien tombés de navires. Quelques archéologues ou professionnels du patrimoine commencent depuis une dizaine d’années à s’intéresser à ce qui se cache sous l’eau. Certains se sont retrouvés en juin au Cap Vert dans le cadre d’un chantier-école de l’Unesco pour renforcer leurs capacités. De notre envoyée spéciale à Praia,Au large de Cidade Velha, première ville coloniale duCap-Vert, Cezar Mahumane remonte sur le bateau, une bouteille d’oxygène dans le dos. Il vient d’explorer à vingt mètres de profondeur un site où sont concentrés des poteries, des céramiques et des ancres.L’archéologue, qui plonge depuis dix ans, est venu du Mozambique pour renforcer ses compétences au Cap-Vert. « C’est très intéressant de faire la comparaison entre ce que nous avons ici et là-bas. À cause des distances, vous pouvez avoir une idée de l'ampleur des contacts et comprendre que la mondialisation dont nous parlons aujourd'hui n'est pas nouvelle. Et heureusement, le matériel archéologique peut le prouver », dit-il.« Ce sont des sites liés à la préhistoire »Au Mozambique, les archéologues fouillent les fonds marins depuis 2014, tout comme auSénégal. Moussa Wele, l’un des premiers archéologues sous-marins sénégalais, a fait une thèse sur le potentiel subaquatique de son pays : « Ce sont des sites liés à la préhistoire, surtout avec la période néolithique. Nous pouvons remonter jusqu'à des phases historiques comme les deux guerres mondiales, mais aussi des périodes plus récentes ».D’autres pays, comme la Gambie, ont encore des vestiges subaquatiques inexploités. Musa Foon travaille au centre national des arts et de la culture de la Gambie. Il est le premier à avoir été formé à l’archéologie sous-marine dans son pays : « Nous avons beaucoup d’épaves et des artefacts qui sont encore actuellement sous l’eau. Deux grands bateaux ont coulé dans le fleuve Gambie autour du 18e siècle mais personne ne les a jamais explorés pour voir dans quelles conditions ils se trouvent. ».Pour l’historien portugais João Paulo Oliveira e Costa, qui dirige la chaire de l’Unesco sur le patrimoine des océans, l’archéologie sous-marine est importante sur le continent car elle permet de remonter à plus de 10 000 ans. « Les matériaux les plus anciens qu’un archéologue subaquatique travaille, ne sont pas des navires mais des villages néolithiques submergés dans la Méditerranée ou la Mer noire. Il y a des villes avec des statuts et des bâtiments plus développés qu’un village néolithique », explique-t-il. La convention de 2001 de l’Unesco pousse à connaître, documenter et protéger le patrimoine culturel subaquatique.
7/28/20242 minutes, 17 seconds
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JO 2024: la judokate Nadia Guimendego, très émue de représenter la Centrafrique

À la veille de la cérémonie d'ouverture des Jeux olympiques 2024, les athlètes continuent de s'installer et de se préparer en vue de leur entrée en compétition. C'est notamment le cas de la judokate Nadia Guimendego qui va représenter la Centrafrique sur le tatami et comme porte-drapeau, vendredi 26 juillet sur la Seine. Vice-championne d’Afrique des moins de 63 kilos, elle est née, vit et s'entraîne à Nantes, dans l'ouest de la France. Portrait.  À lire aussiJO 2024: Noah Lyles, d'une enfance difficile à un «showman» de l'athlétisme
7/24/20242 minutes, 42 seconds
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JO 2024: l'équipe de rugby à 7 du Kenya espère gagner une médaille pour se professionnaliser

Ce mercredi 24 juillet, c'est l’ouverture de la compétition de rugby à 7 aux Jeux olympiques de Paris. L’un des espoirs africains chez les hommes est l’équipe kényane, Kenya Shujaa. Elle revient de loin : sortie du Circuit mondial Elite l’année dernière, elle vient tout juste de le réintégrer. C’est avec beaucoup d’espoirs que l’équipe kényane de rugby à 7 joue à Paris. Pour elle, l’enjeu est grand : une possible professionnalisation. Dans le stade Kasarani, en banlieue de Nairobi, les rugbymen de Kenya Shujaa s'entraînent. Ils frappent fort et les boucliers encaissent les chocs. « Aujourd’hui, c’était un entraînement défensif, explique Louis Kisia, co-entraîneur de l’équipe, c’est pour cela que vous voyez beaucoup de sacs et de boucliers. On fait beaucoup de conditionnement lent. Nos points forts, ce sont les coups d’envoi, nos renvois sont très bons. Nos phases statiques aussi. Nos récupérations sont presque parfaites. »Le co-entraîneur a de l'ambition pour son équipe : « [Nous sommes] debout et prêts ! Clairement, nous ambitionnons un podium. Or, argent ou bronze. Le Kenya est connu pour ses coureurs et nous en sommes fiers. Nous voulons faire la même chose. Je suis sûr qu’on va en surprendre plus d’un. »Des joueurs qui doivent multiplier les emplois pour gagner leur vieAu Kenya, le rugby à 7 reste encore amateur ou semi-professionnel. Vincent Onyala est capitaine de l’équipe nationale, et encore bien d’autres choses : « Je suis étudiant, commerçant et coach sportif… C’est ce que je fais pour gagner ma vie quand je ne joue pas au rugby. »Et pour le capitaine, son entraînement n'est pas forcément suffisant : « Je pourrais améliorer mon entraînement, mais compte tenu de toutes les autres choses que je dois faire pour vivre décemment, c’est là que ça coince, car je ne peux pas m’entraîner quotidiennement. Mais une fois qu’on aura gagné une médaille, on pourra rediscuter de certains sujets. »L’enjeu des olympiades est donc grand pour Kenya Shujaa. Après sa relégation l’année dernière, l’équipe a perdu ses sponsors. Aujourd’hui, de retour en Elite et qualifiée aux Jeux olympiques, elle voit grand. « Après les Jeux olympiques, on travaillera à une nouvelle équipe avec tous les joueurs sous contrat jusqu’en 2026, pour qu’ils jouent à temps plein », confie le manager de l'équipe, Steven Sewe. Concernant la question du financement, il explique avoir reçu « quelques promesses » : «​​​​ Jusqu’ici, c’est le gouvernement qui a soutenu cette équipe, avec des allocations de jeu ou encore des billets d’avion. Et ce ne sont pas des petites sommes. Mais il faut maintenant que l’on diminue ce soutien du gouvernement, ce qui sera possible quand on aura un sponsor officiel qui pourra prendre en charge les salaires de l’équipe. C’est ça le plus important aujourd’hui. » Pour l’heure, les Kényans se concentrent sur la compétition. Première rencontre ce mercredi avec un adversaire de taille : l’Argentine.À lire aussiJO 2024: Ferdinand Omanyala, un Kényan à fond la caisse
7/23/20242 minutes, 15 seconds
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Tchad: les éléphants du parc Zah Soo (2/2)

C’est le dernier-né des parcs nationaux tchadiens. Géré par l’ONG française Noé conservation, Zah Soo, situé dans la province du Mayo Kebbi ouest, vient de fêter son deuxième anniversaire. Le travail de ses équipes anti-braconnage porte déjà ses fruits malgré le manque de moyens, notamment en armes, mais les relations sont particulièrement tendues avec les éleveurs dont les troupeaux ont désormais interdiction de traverser ce couloir de transhumance.  De notre correspondant de retour de Zah Soo,Pour approcher les pachydermes suivis par les gardes forestiers, il faut savoir se faire discret. « Leur odorat est très développé. Si on ne prend pas la bonne direction par rapport au vent, ils vont sentir notre odeur et se déplacer », prévient Lambert Wogue, le directeur adjoint du parc de Zah Soo. Il faut surtout être très prudent. « Ils ne sont pas loin, à moins de 30 mètre de nous et c’est très dangereux (...) Le risque, c’est que si tu cours et que tu tombes, ils peuvent facilement venir t’écraser », poursuit-il.Le troupeau cherche à protéger les éléphanteaux. Leur présence est un très bon signe, car l’espèce ne se reproduit que lorsqu’elle se sent en sécurité. « Le résultat est là, quand on voit les éléphants à 20-30 mètres de nous, c’est une fierté quand même », vante Lambert Wogue. L’éléphant est l’emblème de Zah Soo, créé suite au massacre de près de 120 pachydermes par des braconniers dans les années 2010. « 1 715 kilomètres carrés à couvrir avec 35 bonhommes, ça ne marche pas. Ils devraient en principe être bien outillés, mais nous avons des armes fatiguées et peu de munitions », déplore le directeur adjoint.Toute activité humaine est interdite dans le parc. Pour éviter qu’ils piétinent et ravagent la flore, les troupeaux de bétail qui le traversent sont mis en fourrière et libérés contre une amende. Au grand dam des éleveurs, comme Seydou Alioum, représentant des éleveurs du département de Mayo Binder : « Aujourd’hui, vous entrez dans le parc, on vous pénalise. Et de l’autre côté, au nord, nous sommes au Cameroun. Où est l’espace pour les bœufs ?  On risque d’entrer dans les conflits entre éleveurs et agriculteurs. »En compensation, l’ONG compte installer des points d’eau pour le bétail en bordure. Mais concilier croissance économique et conservation de la nature n’est pas tâche aisée dans l’une des régions les plus densément peuplées du pays. À lire aussiTchad: le sud-ouest se mobilise pour créer un tourisme responsable
7/22/20242 minutes, 22 seconds
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Tchad: le sud-ouest se mobilise pour créer un tourisme responsable

Changer l’image du Tchad en communiquant sur son patrimoine naturel, c’est l’ambition de « Chad Volunteers Organization », une association qui sillonne le pays à la recherche des plus beaux sites. Pour les faire connaître, d’abord, aux Tchadiens eux-mêmes. Puis, au-delà des frontières, dans l’espoir qu’un jour puisse naître une filière tourisme au Tchad, même si beaucoup reste à faire. De notre correspondant de retour du parc national de Zah Soo,Au terme d’une longue randonnée, Kendy Ali Nassour, coordinateur de l’ONG Chad Volunteers, déploie l’étendard tchadien sur la falaise qui surplombe les chutes Gauthiot, au cœur du parc Zah Soo, dans la province du Mayo Kebbi ouest : « On a tout : le désert, les oasis, l’eau, les montagnes, la verdure, les animaux, la forêt... Ce qui rend ce pays-là beau. Malheureusement, cette beauté n’est pas connue, c'est pourquoi on se bat depuis sept ans pour montrer la beauté du Tchad ».Une armée d'influenceursPour changer la réputation du Tchad - souvent associé au désert et à la guerre - et en faire une destination touristique. À l’image du Kenya ou de l’Afrique du Sud. L’association s’est entourée d’une équipe d’influenceurs pour inonder leurs réseaux d’images positives.Mahamat Soukaya, influenceur et militant écologiste, est l'un de ceux-là. Il est à la tête d'une page de 4 000 abonnés : « TikTok, YouTube, Facebook, Instagram... j'emmagasine. Sur mes réseaux, j’ai annoncé mon départ, j’enregistre dans ma galerie et je vais bombarder d'images à mon retour ». Mais l’insécurité persistante ou l’état des routes représentent autant d’obstacles au développement du tourisme. Un secteur presque inexistant dans ce pays pétrolier. Mahamat Touka Hassama, secrétaire général adjoint de l’ONG Chad Volunteers, voit des perspectives dans ce secteur prometteur : « Il faut diversifier l’économie. Tôt ou tard, le pétrole sera épuisé... Mais cette nature que Dieu nous a offerte va rester pour toujours, c'est infini. Si on se développe, ça va rester pour longtemps ».Une vision solidaire du tourismeRien ne semble pourtant pouvoir entamer l’optimisme des volontaires qui, sur leur chemin, distribuent des dons pour poser les bases d’un tourisme solidaire. Kendy Ali Nassour ambitionne un tourisme solidaire pour les Tchadiens : « Le tourisme responsable, ce n'est pas juste faire des photos et partir. On veut aussi aider les gens qui vivent autour des sites touristiques du Tchad ».L’association veut provoquer une prise de conscience des autorités pour enfin concrétiser les promesses d’investissement dans les infrastructures touristiques.À lire aussi«Chad Volunteers»: promouvoir le tourisme au Tchad
7/21/20242 minutes, 18 seconds
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«La montagne était pleine de cadavres»: en Éthiopie, le massacre de 2022 à Mariam Shewito hante encore les habitants

C’est un crime atroce, mais méconnu. Entre octobre et novembre 2022, des soldats érythréens ont commis un bain de sang à Mariam Shewito et ses alentours, dans la province du Tigré, au nord de l’Éthiopie. La guerre entre les forces tigréennes et le pouvoir fédéral éthiopien allié de l’Érythrée pourrait avoir causé jusqu'à 600 000 morts, selon l’Union africaine. L’accès à la presse a longtemps été interdit. Dans une enquête à distance, le Washington Post avait révélé qu’environ 140 personnes avaient été tuées à Mariam Shewito. Le chiffre atteignait 300 en comptant les victimes alentours. Premier à se rendre sur place depuis la fin de la guerre, notre envoyé spécial a rencontré des habitants et des survivants du massacre. De notre envoyé spécial à Mariam Shewito,« C’est là… Ça s’est passé ici. Ils nous ont attachés les mains, nous ont mis en rang, à genou, et ont abattu les 23 autres personnes d’une balle dans la tête. » Aregawi Giday se souviendra toujours de ce jour d’octobre 2022 où il a par miracle échappé au peloton d’exécution. Un moment qui le hante encore aujourd’hui. « Ils m’ont raté et j’ai fait semblant d’être mort. Les cadavres m’ont recouvert. Je peux encore entendre les cris des gens. Tout le monde suppliait les Érythréens de les épargner. En revenant ici, je sais que je ne vais pas dormir pendant deux jours. »Le massacre a été perpétré alors que des négociations étaient en cours, quelques jours avant l’accord de paix. Une unité de l’armée érythréenne est arrivée à Mariam Shewito après une défaite sur le champ de bataille. Ivres de vengeance, les soldats auraient massacré la population. Tuant les habitants dans un porte-à-porte macabre.La montagne était pleine de cadavresLa gorge serrée, Gebre Anenia Aberha raconte comment il a échappé à la mort : « Ouvrez, ouvrez la porte !”. C’est comme ça qu’ils ont demandé qu’on sorte. Ils nous ont attaché les mains et nous ont ordonné de coller nos têtes pour économiser leurs balles. Ils m’ont raté et je me suis enfui. Trois jours après, la montagne était pleine de cadavres. Certains avaient les intestins et les poumons par terre, l’odeur était insoutenable. L’image de tout ce sang, me donne encore des cauchemars. Mais il faut accepter de pardonner. Sinon un autre carnage pourrait survenir. »Un crime encore impuni. Negusa Gebrehet Meret a eu l’œil transpercé par une balle érythréenne tirée à bout portant. Le vieil homme veut encore croire que justice sera un jour rendue. « Même si ça ne ramènera pas à la vie les victimes, je demande simplement justice. Je ne leur pardonnerai jamais. Mais les voir juger me soulagerait. »« Même Dieu ne peut leur pardonner »À l’église Enda Mariam Shewito, les religieux prient pour les victimes du carnage. 106 victimes ont été enterrées dans l’enceinte. Malgré son statut, cette fois-ci, le prêtre Kashi Gebrehiwot s’emporte et laisse de côté les messages de paix.« Dans notre religion, nous essayons de pardonner, mais ce qui s’est passé est tellement grave. J’ai dit aux Érythréens lorsqu’ils me frappaient que si j’avais une arme, je me battrais avec eux. Ces gens ne croient en rien. Ils sont sans pitié. Même Dieu ne peut leur pardonner. Donc je sais que c’est mal, mais j’aimerais que les Tigréens se vengent. » Une commission sur le génocide est en train d’enquêter, mais les obstacles techniques sont énormes dans un Tigré encore ravagé par la guerre. Les victimes devront encore attendre avant la moindre justice.À lire aussiEn Éthiopie, la difficile reconstruction de milliers de femmes victimes de viols au Tigré: «Je n’ai plus rien pour vivre»
7/18/20242 minutes, 45 seconds
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Éthiopie: des déplacés du Tigré, entre traumatisme et rage après les exactions des miliciens Amharas

Au Tigré, dans le nord de l’Éthiopie, bientôt deux ans après la fin de la guerre civile, des centaines de milliers de déplacés attendent de rentrer dans l’ouest de la région, conquise par la province voisine Amhara durant le conflit. Les déplacés révèlent des atrocités encore inconnues, commises par les miliciens amharas durant le conflit. Un reportage exclusif pour RFI. De notre envoyé spécial à Sheraro, dans le Tigré, en Éthiopie, Avec sa lyre faite de bouts de bois, un enfant déplacé tente, avec sa musique, d’alléger le lourd quotidien des Tigréens chassés de leurs terres. Beaucoup sont encore traumatisés par ce qu’ils ont subi dans l’Ouest. Murut Tfesah, originaire de Humera, liste les noms de ses neuf amis exécutés devant ses yeux début 2021. « Nous étions avec notre bétail. Des miliciens amharas sont arrivés. Ils nous ont attachés, agenouillés et nous ont tiré dans le dos, témoigne Murut Tfesah, moi, ils m’ont tabassé à coup de crosses, mais ils m’ont laissé vivre car ils voulaient que j’emmène les animaux à la prochaine ville. J’ai perdu tellement de proches. J’aurais préféré mourir ce jour-là car, aujourd’hui, je n’ai plus personne. »L’homme a ensuite été incarcéré à la sinistre prison de Humera où de nombreuses exactions auraient été perpétrées. Gebriyewot Abraha y a été détenu pendant deux ans. Ce qu’il a vu a décuplé sa haine. « Un soir, des miliciens ont sorti 62 prisonniers. Tous des intellectuels, enseignants, fonctionnaires. On ne les a jamais revus. Une autre fois, ils ont pris huit détenus. Tous des professeurs d’université. Ils leur ont mis une balle dans la tête. » Il poursuit, en colère : « J’ai vu leurs cadavres. Ils ont fait ça pour anéantir les personnes éduquées et nous faire revenir en arrière. Je ne pardonnerai jamais et un jour, nous nous vengerons. »Dans le camp, les déplacés partagent leurs souvenirs de la guerre comme pour mieux exorciser le passé. Tous se souviennent de la violence quotidienne des geôliers, prêts à tout pour débusquer les rebelles tigréens. « Un prisonnier a été abattu, car les Amharas le soupçonnaient de partager des photos sur Internet. Un soir, ils nous ont emmenés en brousse. Je pensais que mon heure était venue. Ils m’ont accusé d’avoir appelé mes proches dans la capitale, se souvient Tesfaye Tsegabe, détenu pendant deux ans, ils m’ont frappé si fort qu’ils m’ont cassé la main. Ils nous torturaient, nous ordonnant d’avouer, sinon ils allaient nous abattre. »Parmi les déplacés, Alem Geretzer est un miraculé, il a échappé au peloton d’exécution à trois reprises. Ironiquement, l’ennemi Érythréen lui a quelque part sauvé la vie. « Ils m’ont sorti trois fois de ma cellule pour m’exécuter près de la rivière. Deux fois, les Érythréens sont intervenus car ils ne voulaient pas de ça près de leur frontière. La troisième fois, un officier amhara m’a fait transférer. Je suis chanceux, j’ai échappé à la mort. »Les déplacés espèrent qu’un jour ces crimes seront connus. Mais pour l’instant, l’impunité est totale. La commission génocide sur le Tigré ne peut même pas enquêter dans la zone ouest faute d’accès.À lire aussiÉthiopie: à Adiaser, dans le Tigré, les habitants se sentent cernés par l'ennemi
7/17/20242 minutes, 40 seconds
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Éthiopie: à Adiaser, dans le Tigré, les habitants se sentent cernés par l'ennemi

Un an et demi après la fin de la guerre et un accord de paix, le Tigré, dans le Nord de l’Éthiopie, est toujours face à d’immenses défis. Le conflit avait opposé les Tigréens au pouvoir central éthiopien, allié de l’Érythrée voisine et d’autres régions comme les Amharas. La guerre de 2020 à 2022 aurait fait au moins 600 000 morts, selon l’Union africaine, avec des soupçons de génocide. Aujourd’hui encore, le Tigré est en partie occupé par les Amharas et les Érythréens. Un reportage exclusif RFI. De notre envoyé spécial à Adiaser, Adiaser se trouve dans l’Ouest du Tigré, à quelques kilomètres de la zone conquise par les Amharas et de la frontière Erythréenne. En ce jour de marché, les étals sont là, mais les marchandises ont changé. La plupart viennent de l’Est du Tigré, car les échanges avec l’Ouest sont impossibles.À quelques kilomètres, la rivière Tekeze sert de frontière naturelle avec la zone occupée par les Amharas. Brago Brazgi vend du sésame et se sent totalement cernée : « Nous sommes entourés d’ennemis. À l’Ouest, les miliciens Amharas, au Nord, les Érythréens. Nous dormons mal. Nous avons peur qu’ils nous attaquent de nouveau. » Elle poursuit : « Avant la guerre, les Tigréens vivaient à l’ouest de la rivière, ils cultivaient leur terre, maintenant ce n’est plus possible. On nous a pris notre territoire par la force. J’avais d’ailleurs beaucoup de clients de l’Ouest. Maintenant, ils sont tous dans des camps de déplacés. » Les autorités tigréennes avaient annoncé un retour des déplacés pour le 7 juillet. Mais ils sont encore des centaines de milliers dans des camps.Des habitants terrifiés qui demandent un retour aux frontières d'avant-guerreLa défiance vis-à-vis des voisins se mêle à la terreur pour certains. Dans son atelier de couture, Beriu Futuwin raconte les crimes des Érythréens et sa peur quotidienne depuis lors : « Les Érythréens ont tué un de mes oncles, sa femme et leurs enfants. Ils ont pris toutes mes machines et mes tissus. J’avais fui dans la brousse et je suis revenu après l’accord de Pretoria. Mais pour l’instant, j'ai peur chaque jour. Je ne serai en confiance que quand nous récupérerons l’Ouest. »À lire aussiGuerre civile au Tigré: à Bora, un massacre qui aurait été perpétré par l'armée éthiopienneDans sa boutique, Kashi Alam raconte comment les Érythréens ont tué neuf de ses voisins pendant la guerre, comment il a fui en brousse pendant deux mois. Aujourd’hui, il demande qu’on chasse les envahisseurs pour que le Tigré retrouve ses frontières d’avant-guerre : « J’ai entendu des rumeurs sur un éloignement des Amharas. Mais pour l’instant, tout reste fermé. L’ouest de la rivière Tekeze, c’est le Tigré. Jusqu’à Bahre Selam, Tsegede, Armacheho, Humera, tout cela nous appartient. En attendant que cette terre soit libérée, on ne s’éloigne pas d’ici. »À l’Ouest et au Nord d’Adiaser, l’armée fédérale a dressé des barrages. Quasi rien ne transite et les soldats servent de tampon entre les forces tigréennes et leurs voisins. Selon les autorités du Tigré, l’accord de paix prévoit un retour aux frontières d’avant-guerre. Elles accusent le pouvoir fédéral de manquer de volonté politique pour dire à ses alliés et leurs troupes de rentrer chez eux. À lire aussiÉthiopie: malgré l'accord de paix, «les souffrances des Tigréens continuent», affirme Debretsion Gebremichael
7/16/20242 minutes, 25 seconds
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Guerre civile au Tigré: à Bora, un massacre qui aurait été perpétré par l'armée éthiopienne

C’est un massacre dont peu de gens ont entendu parler. Début 2021, au Tigré, dans le nord de l’Éthiopie, l’armée fédérale aurait commis un massacre à Bora. Située au sud de la province, la ville aurait été attaquée par des soldats fédéraux qui auraient exécuté des dizaines d’habitants, possiblement de 170 à 180 morts.  De notre envoyé spécial à Bora, dans le Tigré,Yirga Adom refuse de retourner à Bora depuis qu’il a fui la ville pour Mekele, la capitale du Tigré. C’était le 8 janvier 2021, un jour sombre gravé dans sa mémoire : « Une milice a affronté les soldats fédéraux et l’a emporté. Ensuite, l’armée est arrivée avec 40 camions et a tiré sur les civils. Les militaires ont ordonné de tuer tous les hommes de plus de 7 ans. » Il se rappelle : « J’en ai entendu crier : "Tuez-les ! Abattez-les sans pitié !" J’entends encore le bruit des tirs. J’essaie d’oublier en buvant, en allant à l’église, mais l’image de ces gens est encore dans ma tête. »120 km au Sud, Bora est toujours hantée par la tuerie. Responsable local, Asseo Tefere s’arrête sur une place de terre au pied d’un arbre. Les soldats y auraient exécuté 30 personnes le jour du massacre : « Ils ont pris des jeunes, des fermiers, des enseignants, les accusant d’être des rebelles. Ils les ont amenés ici et les ont tués. » Et l'horreur continue : « Les militaires nous ont interdit d’enterrer les corps pendant des jours. Les cadavres pourrissaient et les charognards venaient les manger. Ces criminels devraient être jugés et condamnés pour génocide. »À lire aussiEthiopie: au Tigré, les violences faites aux femmes explosent, la guerre mise en causeMais au détour de la conversation, l’homme révèle qu’il appartenait à la milice ayant combattu les soldats la veille du massacre et qui serait l’élément déclencheur du bain de sang :« Les soldats voulaient savoir qui étaient les miliciens. Personne n’a révélé les noms, alors ils ont enfermé des femmes et des enfants dans une maison. Nous avons décidé de nous battre et nous avons pris le dessus. Mais je ne regrette rien. Dès le début, en prenant nos familles, nous savions ce qui allait se passer. Il fallait qu’on se batte. »   À Bora, un porte-à-porte macabre et des demandes de justiceDans leur folie meurtrière, les soldats auraient pratiqué un porte-à-porte macabre, abattant des habitants maison après maison. Burho Mogus a le visage marqué après avoir vu son frère exécuté devant chez elle : « Il s’appelait Kal Ayu. Trois soldats sont venus chez nous et l’ont accusé d’être un rebelle. Ils l’ont sorti et l’ont abattu à l'AK47. Après, ils nous ont dit que nous n’avions pas le droit de pleurer… » Elle poursuit, en colère : « Ce sont les gens les plus cruels qui soient. S’ils étaient en face de moi, je les tuerais tous. Ma mère continue de pleurer la mort de son fils. » Negus Mara Berhe est enseignant. Il se trouvait dans la boutique de son frère lorsque l’attaque a commencé : « Les soldats étaient basés dans le lycée. Ils sont arrivés très en colère et ont tué mon frère d’une balle dans la poitrine tirée par un fusil sniper. Alors que c’était un simple marchand. J’attends maintenant une justice et des compensations. »   À lire aussiÉthiopie: les habitants de Dowhan, au Tigré, sous la menace constante de l'armée érythréenne 
7/15/20242 minutes, 34 seconds
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Éthiopie: les habitants de Dowhan, au Tigré, sous la menace constante de l'armée érythréenne

Au Tigré, région du nord de l’Éthiopie, une guerre civile dévastatrice a opposé les autorités régionales et le pouvoir fédéral allié de l’Érythrée voisine entre 2020 et 2022. Une guerre qui a causé au moins 600 000 morts, selon l'Union africaine. Aux confins du Tigré, dans l'extrême-nord, malgré l’accord de paix signé fin 2022, les forces érythréennes occupent toujours une dizaine de districts. Un reportage exclusif RFI. De notre envoyé spécial dans l'extrême-nord du Tigré, à Dowhan,Dans les rues de Dowhan, en Éthiopie, dernière ville avant la zone sous contrôle érythréen, l’ambiance est beaucoup trop calme. Les routes vers le Nord sont coupées, car les Érythréens sont à moins de cinq kilomètres. Pour Eyasu Misgina, responsable administratif, la menace plane sur la ville : « La route est ouverte, les Érythréens pourraient venir à tout moment. Nous avons quelques policiers et miliciens, mais c’est tout. » Il confie : « On sait qu’ils envoient des espions infiltrés parmi les déplacés, pour voir s’il y a des marchandises à emporter. »Les échanges commerciaux avec le Nord ont cessé et l’activité économique a chuté. Desbele Gebremedhin vend des téléphones et ne s’aventure plus dans la zone rouge : « Il ne faut pas y aller. Vous pouvez être tué, kidnappé. Nous n’envoyons plus de marchandises là-bas. Je veux que les Érythréens partent pour qu’on puisse reprendre une vie normale », se désole-t-il.Aujourd’hui, les banques de Dowhan ont fermé, les transports en commun sont à l'arrêt et les habitants se déplacent avec des ânes.Des crimes commis par l'armée érythréenne aux abords de DowhanPourtant, la population de la ville a presque doublé avec l’afflux de 7 500 déplacés. Mehdi Kahsay vient d’Adi Dega. Il a vécu six mois sous le joug érythréen. Aujourd’hui, il est prêt à en découdre : « Chaque fois que les soldats venaient chez moi, je devais m’enfuir et dormir dans la brousse. On ne s’approchait jamais. Mais j’ai décidé de partir. J’en avais assez. » Il poursuit, en colère : « Je suis venu m’engager avec les forces tigréennes. Si les Érythréens refusent de partir, je suis prêt à mourir pour récupérer ma terre. »À lire aussiÉthiopie: dans le camp d’Endabaguna, le flux de réfugiés du Tigré se poursuit un an et demi après le traité de paixUne crainte généralisée qui semble justifiée vu les atrocités dont certains déplacés, comme Fetuwi Tensahe, ont été témoins : « Ils nous ont accusés d’être des miliciens et ont tiré dans la foule. Des gens ont aussi été jetés vivants du haut de la montagne. J’ai vu plus de 60 corps. Donc, on a fui pour sauver nos vies. » Près de lui, une jeune femme frêle se présente. Son cas est exceptionnel. Arberet Tohoum vit toujours côté érythréen. Elle donne un aperçu rarissime du quotidien de l’autre côté : « Ils ont des camions, leurs armes et uniformes. Ils sont dangereux et j’ai très peur d’eux. Pour partir, je leur montre ma carte d’identité. Comme ma maison est excentrée, ils m’autorisent à sortir. Mais ceux qui vivent en plein village n’ont pas le droit de s’en aller. Les Érythréens disent que ce territoire leur appartient.À lire aussiEn Éthiopie, la difficile reconstruction de milliers de femmes victimes de viols au Tigré: «je n’ai plus rien pour vivre»À la sortie de la ville, une voie de rocailles monte vers les hauteurs. Les Érythréens sont en face. Et malgré le danger, Tareku Neguse s’engage sur le chemin avec ses ânes et des sacs :  « Je sais que s’ils m’attrapent, ils peuvent me tuer. Mais je n’ai pas le choix, je dois apporter cette nourriture chez moi. Donc, j’essaie de trouver des chemins plus sûrs. » Le jeune homme disparaît au-delà du chemin. Beaucoup, comme lui, ont emprunté la même voie, mais ne sont jamais revenus.
7/14/20242 minutes, 50 seconds
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En Éthiopie, la difficile reconstruction de milliers de femmes victimes de viols au Tigré: «je n’ai plus rien pour vivre»

Pendant deux ans, de nombreuses femmes ont vécu l’horreur des viols collectifs et des mutilations génitales durant la guerre au Tigré, en Éthiopie. Certaines ont été réduites en esclavage sexuel pendant des jours par les troupes érythréennes et éthiopiennes occupantes. Aujourd’hui rejetées par leur famille, elles ont besoin d’une prise en charge médicale physique et psychologique en urgence pour soigner les nombreuses pathologies dont elles souffrent, conséquences des agressions. Mais les moyens manquent pour faire face à ce désastre social tabou.  De notre correspondante de retour de Mekele,Assises sur la terrasse du jardin verdoyant de l’association Hywiet, la fondatrice Meseret Hadush écoute une jeune femme lui parler, puis la serre dans ses bras. C’est une survivante comme on les appelle au Tigré. Il y a trois ans, pendant la guerre, sept soldats érythréens sont entrés chez elle, ont tué son mari sous ses yeux avant de la violer : « Ils ont introduit du métal dans mon utérus et cela a créé une infection. Des médecins me l’ont enlevé, mais je continue de saigner, et psychologiquement ça ne va pas. Je n’ai plus rien pour vivre. C’est pour ça que je suis venue ici. »Son récit ressemble à des milliers d’autres : Meseret en a recueilli près de 5 000. Mais la stigmatisation empêche les victimes de se manifester. « Le plus gros problème, c’est que leur état empire, car elles n’osent pas sortir pour aller chercher leur traitement et pour avoir de l’aide. Elles ont peur qu’on les repère, car si ça se sait, elles seront maltraitées par les gens. »Près de 15 % d'entre elles infectées par le VIHLes ONG sensibilisent les communautés et les leaders religieux pour permettre aux victimes de réintégrer la société. Il y a urgence à les prendre en charge. Le nombre de victimes de viols pendant la guerre au Tigré est estimé à plus de 120 000 par les hôpitaux tigréens. Selon les chiffres de Meseret, 15 % d’entre elles ont été infectées par le VIH. « Elles ont besoin d’un accompagnement spécial. Car quand elles prennent leurs médicaments elles doivent manger pour avoir quelque chose dans l’estomac. Je leur donne de la nourriture, autant que je peux. »Environ 70 % des établissements de santé ont été endommagés pendant la guerre. Dans toute la région, un seul centre spécialisé dans les violences faites aux femmes est en service à Mekele. C’est un petit bâtiment vétuste, aux pièces étroites, dirigé par le docteur Sœur Mulu : « La majorité des traitements dont elles ont besoin en priorité, sont achetés dans le privé, nous ne les avons pas dans notre centre. La demande et l’offre de médicaments disponibles ici ne sont pas comparables. »Priorité à « obtenir justice », avant même de « recevoir de la nourriture »Chaque jour, 50 femmes viennent ici pour être soignées. Yirgelem s’y rend souvent pour échanger avec Sœur Mulu. Experte pour la Commission d’enquête sur le génocide au Tigré, elle répertorie tous les témoignages. « Nous leur avons demandé ce qu’elles choisiraient en premier entre recevoir de la nourriture, une assistance médicale ou obtenir justice. Et la majorité d’entre elles ont répondu qu’elles avaient besoin de justice en premier. »Les récits recueillis sont authentifiés et conservés pour appliquer la justice transitionnelle. Menée officiellement par le gouvernement fédéral depuis un an et demi, aucune procédure n’a pour l’instant été rendue publique.À lire aussiÉthiopie: des milliers de déplacés du Tigré manifestent pour rentrer, un an après la fin du conflit
7/11/20242 minutes, 22 seconds
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RDC: un collectif militant organise des visites pour se réapproprier l’histoire du Congo

En République démocratique du Congo (RDC), l’échangeur de Limete, le mausolée de Laurent Désiré Kabila ou encore le stade des martyrs constituent des lieux emblématiques de la capitale congolaise. Mais pour les amateurs d’histoire, il y a aussi des visites moins connues et tout aussi intéressantes à Kinshasa. Le collectif Ekolo organise depuis 2020 des visites guidées pour découvrir d’autres facettes de l’histoire congolaises à travers de lieux parfois oubliés en plein cœur de la capitale et qui peuvent aider les Congolais à se réapproprier leur propre histoire, notamment de la période coloniale À lire aussiLes chutes de Kiubo, cas d'école pour repenser le tourisme en RDC  À lire aussiRDC: la forêt du Kahuzi Biega, objet de convoitises et de potentiels Pour en savoir plus: Facebook collectif Ekolo
7/10/20242 minutes, 17 seconds
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JO 2024: l'équipe kényane de l'athlétisme se dit «100% propre» après plusieurs cas de dopage [3/3]

En 2024, le Kenya a suspendu 33 athlètes pour dopage, dont 26 sont des coureurs de fond et demi-fond. C’est un record. Depuis une dizaine d’années, la réputation de l’athlétisme kényan est ternie par des scandales de dopage. En cette année olympique, la fédération entend redorer son blason et l’Agence kényane anti-dopage (Adak) n’a autant testé d’athlètes. Reportage de notre correspondante à Nairobi. À lire aussiKenya: le tabou de l'excision dans le monde de la course à pied [1/3] À lire aussiJO 2024: Au Kenya, les coureurs font appel à des «lièvres» pour s'entraîner [2/3]
7/9/20242 minutes, 15 seconds
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JO 2024: Au Kenya, les coureurs font appel à des «lièvres» pour s'entraîner [2/3]

En quinze éditions des Jeux olympiques, le Kenya a remporté 69 médailles pour des courses de fond et 28 de demi-fond. Pour obtenir de tels résultats, les athlètes kényans courent sans relâche. Ils avalent parfois jusqu’à 200 kilomètres par semaine. Mais ils ne sont pas seuls : à leurs côtés, les « lièvres », d’autres coureurs, partenaires d’entraînement. Au Kenya, les lièvres courent plus vite que les athlètes européens qualifiés aux Jeux olympiques. Reportage dans la vallée du Rift, le berceau des champions. De notre envoyée spéciale à Iten, Sur la piste du stade Kipchoge à Eldoret, Lilian Kasait s’entraîne. Qualifiée pour le 10 km, elle s’envolera bientôt pour les Jeux de Paris. À une allure vertigineuse, Lilian emboîte le pas d’un autre coureur. C’est Elkan Abet, son lièvre : « Mon travail, c’est juste l’athlétisme. J’aime courir. Moi, je n’ai jamais fait de marathon. J’entraîne juste les femmes. Je les aide toujours. J’aime bien ça, parce qu’on m’a employé pour ça. J’ai commencé en 2012 et ils me paient 150 dollars par mois. Ce n’est pas mal. Ça m’aide beaucoup. »Joseph Chiromei est l'un des entraîneurs de l’équipe nationale kényane. À l’entraînement, il utilise systématiquement des lièvres, notamment avec les femmes : « J'ai six lièvres et sept coureuses ce matin. Le lièvre est là pour conserver une allure régulière et motiver les coureurs. »L'entraîneur explique pourquoi il pense que les lièvres sont essentiels : « Quand les coureuses courent avec un lièvre, une fois qu’elles se sont habituées à l’allure des hommes, quand elles sont seules durant les courses, elles font des temps fantastiques. Par exemple, Ann Rose Mary Wanjiru que j’entraîne, elle a déjà couru un marathon en 2h16, deux fois. » Des lièvres qui peuvent gagner plus que les coureurs eux-mêmes2h16, c’est 10 minutes en dessous du minimum olympique pour se qualifier au marathon féminin. Les lièvres sont aussi utilisés par les hommes. Ils peuvent également être embauchés par une course qui désire imposer une allure. La rémunération est intéressante. Julien Di Maria est entraîneur de l’équipe Kechei : « Dans un marathon d'envergure, on peut être entre 2 500 jusqu'à 10 000 euros en fonction des chronos nécessaires, de l'allure et de la distance que va parcourir le lièvre. Il signe des contrats, tout est indiqué dedans. »Selon l'entraîneur, ce peut être intéressant d'être lièvre, mais c'est parfois difficile mentalement : « Il y en a qui se disent : "Moi, de faire lièvre à des femmes toute ma carrière, c'est moyen, surtout dans une société patriarcale comme la société kényane." Mais, s'ils gèrent bien leur carrière, ils peuvent faire ça pendant dix-quinze ans et gagner plus d'argent que des coureurs qui vont juste terminer des courses et ne pas être dans le top du top. »Le minimum olympique pour les hommes au marathon est de 2h08. Selon la Fédération, au Kenya, une centaine d’athlètes courent en dessous de ce chronomètre.À lire aussiKenya: le tabou de l'excision dans le monde de la course à pied [1/3]
7/8/20242 minutes, 23 seconds
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Kenya: le tabou de l'excision dans le monde de la course à pied [1/3]

Au Kenya, 4 millions de jeunes filles sont excisées chaque année, selon une étude de l’Unicef publiée en 2021. Cela représente une jeune fille sur cinq. Cette pratique est particulièrement forte dans la province du Nord-Est, vers la Somalie, le comté de Samburu, dans le nord du pays, mais aussi dans la vallée du Rift. Le Rift, c’est le pays des coureurs. On dit d’Iten, petite ville perchée à 2 400 mètres d’altitude, qu’elle est la maison des champions. Là-bas, les coureuses excisées portent ce secret en silence. De notre envoyée spéciale à Iten, Depuis 2011, l’excision est interdite par la loi kényane. Malgré cela, la pratique perdure, notamment dans les zones rurales, comme le comté de Marakwet. Magini Serem est directrice des affaires sociales du comté d’Elgeyo-Marakwet. Elle témoigne : « L'année dernière, dans le district de Marakwet-Est seulement, 27 000 filles ont été excisées. Le pourcentage pour tous les districts de Elgeyo-Marakwet s'élève à 21 %. » La directrice des affaires sociales du comté explique : « Ils suivent les étoiles, le conseil des sages en suit deux, mâle et femelle. Quand la femelle est très productive, c'est là qu'ils excisent. Puis, ils bénissent les moissons, car l'excision s'accompagne de célébrations. Les excisions se font dans la forêt qui n'est pas accessible à l'administration. »L'excision a un impact dévastateur sur le corps et le mental des femmesLes conséquences de l’excision sont lourdes : infections chroniques, difficultés à uriner, douleurs durant l’acte sexuel, risque de mortalité accru durant l’accouchement. Dans le comté d’Elgeyo-Marakwet, c’est l’excision type 3 qui est pratiquée. Jonathan Tanui, responsable de la santé de la reproduction du comté : « Dans ces communautés, quand ils excisent, ils enlèvent tout : les lèvres supérieures et inférieures et le clitoris. C'est dévastateur. » À écouter aussiJournée mondiale de lutte contre les mutilations génitales fémininesJonathan Tanui détaille les conséquences de l'excision sur les performances sportives : « Les muscles, les nerfs sont affectés. Les filles sont excisées très jeunes et le traumatisme cause aussi des problèmes comme la dépression, l'esprit est affecté. Sachant tout cela, si nos athlètes, nos championnes pouvaient s'exprimer là-dessus, cela réduirait le nombre d'excisions dans le comté. »Ida Jerotich s’entraîne pour devenir coureuse professionnelle, malgré son excision. À 25 ans, elle court 30 kilomètres par jour, puis fait des ménages en ville, pour gagner sa vie. Elle vient du district de Marakwet-Est. À 20 ans, sa mère a décidé qu’il était temps pour elle d’être excisée : « Je me suis enfuie. Je suis allée dans un autre village, puis je suis tombée enceinte. Alors, je suis rentrée chez moi », témoigne-t-elle. C'est alors qu'elle est excisée : « Pendant l'accouchement, je ne sais pas ce qui s'est passé, mais elle m'a excisée. Après l'excision, j'ai pleuré longtemps parce qu'elle m'a forcée. Je souffre encore. »Entre 1998 et 2022, le taux d’excision au Kenya est passé de 38 à 15%, mais les chiffres remontent, car de plus en plus, des familles ont recours à l’excision médicalisée. À écouter aussiLa vallée du Nil, aux origines de l’excision
7/7/20242 minutes, 17 seconds
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Rwanda: les agriculteurs s'inquiètent de l'accès aux terres agricoles [3/3]

Au Rwanda, l'agriculture est le principal secteur économique. Pourtant, les villes empiètent de plus en plus sur la ruralité et dans ce pays, le plus densément peuplé de l’Afrique continentale, la démographie devrait continuer de croître ces prochaines années. La question de l'accès aux terres agricoles est donc un enjeu majeur alors que le 15 juillet prochain se tiendront les élections présidentielle et législatives. Élection présidentielle à laquelle Paul Kagame, président depuis 24 ans, est candidat à sa réélection pour un quatrième mandat. De notre envoyée spéciale à Runda, à une dizaine de kilomètres de Kigali,  À Runda, plusieurs centaines d’agriculteurs sont rassemblés dans une coopérative pour cultiver ensemble du maïs, des haricots ou des légumes, selon la saison. Accroupie dans un champ de carottes, Marie-Claire Numukobwa travaille depuis l’aube dans les parcelles de la vallée marécageuse : « Ce matin, j’ai commencé par l’irrigation des cultures et maintenant, nous sommes en train de désherber. »Autour de la vallée, les collines désormais couvertes d’habitations abritaient auparavant de nombreuses terres agricoles : « Je louais une parcelle que les propriétaires ont vendue avant de déménager. Leur terre est désormais occupée par des maisons modernes à étage. Les parcelles sont de plus en plus petites et les constructions prennent de plus en plus de place. » Marie-Claire Numukobwa poursuit : « On pratique maintenant l’agriculture uniquement dans ces zones marécageuses et on est tous regroupés ici. Je ne sais pas ce que l’avenir donnera. C’est difficile pour les agriculteurs. »À lire aussiRéussite économique du Rwanda: un succès trop inégalAu Rwanda, pays le plus densément peuplé d'Afrique, l'économie est majoritairement agricoleAvec une densité moyenne de 503 habitants par kilomètre carré, le Rwanda est le pays le plus densément peuplé d’Afrique continentale. Dans son champ de concombres, Ali Mohamed Kwizera, agriculteur de 35 ans, s’inquiète de l’urbanisation du secteur de Runda : « Depuis huit mois que je suis ici, j’ai déjà vu des maisons se construire sur d'anciennes parcelles agricoles. Cela veut dire que pour les fermiers qui n’ont pas de terres, c’est très difficile. »Les terres sont de plus en plus limitées, alors que près de deux tiers de la population rwandaise vit de l’agriculture : « Où est-ce qu’ils vont pouvoir cultiver ? », s'interroge Oswald Mudenge, inquiet pour la coopérative, dont il est le président. « ​​​​​​ Il n’y aura plus de terres. Je ne peux pas dire que les jeunes pourront vivre de l’agriculture, sauf s’ils cultivent sur les toits des maisons ! C’est impossible. Peut-être qu’ils chercheront des terres dans d’autres pays. »Selon les projections des autorités, la population rwandaise doit augmenter de 13 à 23 millions d’habitants d'ici à 30 ans. Ambition du gouvernement pour 2050 : le passage d’une économie majoritairement agricole au développement du secteur tertiaire, avec 70% de la population vivant en zone urbaine.À lire aussiRwanda: à Rubavu, l'impact économique de la crise avec la RDC [1/3]
7/6/20242 minutes, 17 seconds
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Rwanda: à Kigali, les jeunes peinent à trouver un emploi [2/3]

Les Rwandais s’apprêtent à se rendre aux urnes le 15 juillet prochain pour les élections présidentielle et législatives, où le chef d’État depuis 24 ans, Paul Kagame, est candidat à sa réélection pour un quatrième mandat. Parmi les attentes de la population au cours du prochain mandat, la lutte contre le chômage, notamment des plus jeunes.  De notre correspondante à Kigali,Dans le quartier d’affaires de Kiyovu, Kevin Shema Habimana, assis sur un banc, profite du wifi gratuit installé dans la rue piétonne pour consulter les sites de recherche d’emploi sur son téléphone. Il se désole : « Vous voyez, la première opportunité : le niveau d’entrée est à trois à cinq ans d’expérience. Nous, on commence, et on ne nous donne pas notre chance parce qu’on n’a pas cette expérience ! J’ai postulé dans près de 30 entreprises et je n’ai même pas été rappelé une seule fois. »À 25 ans, diplômé en 2021 en génie civil de l’École polytechnique de Kigali, le jeune homme ne pensait pas, trois ans après la fin de ses études, être encore à la recherche d’un emploi. Pour finir les fins de mois, pas d’autre choix que d’accepter des missions ponctuelles dans le secteur informel : « La vie est chère à Kigali, on ne peut survivre sans un travail, alors parfois, je fais le service dans un mariage ou une cérémonie. Parfois, on va sur des sites de construction pour voir si on peut travailler comme main d’œuvre. C’est difficile ! »Au Rwanda, deux fois plus de jeunes diplômés qu'il y a dix ansÀ Kiyovu, de nouveaux immeubles sortent régulièrement de terre pour abriter les sièges des plus grandes entreprises installées au Rwanda. Un espoir d’emploi pour les jeunes diplômés, dont le nombre a doublé en une décennie dans le pays. Mais après deux ans de chômage, Yves Ndagijimana, ancien étudiant en gestion foncière, n’y croit plus : « Je postule maintenant à n’importe quel poste, je ne prends pas en compte mon diplôme... Je postule dans des boutiques, et tu survis par toi-même, pour gagner un peu d’argent. »Selon la Banque mondiale, le taux de chômage chez les jeunes était de 18% en 2023. Un chômage que subit le diplômé qui appelle à plus d’aides de la part des autorités pour créer sa propre entreprise : « Dans d’autres pays, il y a des institutions qui aident les jeunes à gagner de l’argent et à créer des entreprises. Moi, je voudrais monter un commerce de vente en ligne, mais je n’ai pas l’argent pour le faire. J’espère que d'ici à l'année prochaine, je vais y arriver. »En attendant, impossible pour Yves de se loger sans l’aide de ses proches. Une situation rendue d’autant plus difficile par l’inflation, de près de 20% l’année dernière au niveau national.À lire aussiRéussite économique du Rwanda: un succès trop inégal
7/5/20242 minutes, 16 seconds
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Rwanda: à Rubavu, l'impact économique de la crise avec la RDC

Les Rwandais s’apprêtent à se rendre aux urnes le 15 juillet prochain pour les élections présidentielle et législatives, où le chef d’État depuis 24 ans, Paul Kagame, est candidat à sa réélection pour un quatrième mandat… À Rubavu, ville rwandaise frontalière de Goma, en République démocratique du Congo, les tensions diplomatiques entre les deux pays liées à la rébellion du M23 ont largement impacté l’économie. Depuis deux ans, la frontière entre les deux villes, l’une des plus empruntées du continent, ferme dès le milieu d’après-midi. Les habitants appellent à un retour à la normale. De notre envoyée spéciale de retour de Rubavu, En cette fin de matinée, les clients congolais se dépêchent de retourner à la Petite Barrière, poste frontalier entre Rubavu et Goma. Avant 2020, 50 000 passages journaliers y étaient enregistrés. Mais depuis deux ans et la fermeture à 15 heures de la frontière en raison des tensions entre le Rwanda et la RDC, la rue marchande, à quelques centaines de mètres de là, tourne au ralenti.Au cœur de la rue marchande de Rubavu, Gorette Uwineza organise les grands sacs de marchandises installés à l’entrée de sa boutique, elle vend des graines de maïs, du sorgho, du soja et des haricots : « On avait des clients même au dépôt, il y avait beaucoup de mouvement. Au marché, en combinant les vendeurs, on pouvait vendre à nous tous une demi-tonne de sacs par jour. Maintenant, même vendre 100 kilos, c’est difficile. »Un commerce transfrontalier indispensable pour l’économie de la ville. Trois étals plus loin, Moussa Babonampoze ouvre les portes de son entrepôt. Président d’une coopérative, l’homme d’affaires doit souvent aider les commerçants bloqués la nuit de l’autre côté de la frontière. Les limites d’horaires compliquent les échanges et ont réduit ses revenus de près de 30% : « Nous voulons la paix entre les deux pays, le Rwanda et le Congo. Que Dieu fasse que nos dirigeants s’entendent et que les commerçants profitent du retour au calme et que cela redevienne comme avant. »La fermeture de la frontière a aussi des conséquences sur le secteur éducatifUne volonté pour les habitants : le retour de la fermeture à 18 heures de la frontière. Dans les écoles de la ville, l’impact économique se fait aussi ressentir. Jocelyne Murekatete, directrice d’un établissement primaire de Rubavu, explique les conséquences de cette fermeture : « La grande majorité des parents travaille au Congo, donc, ça a été un peu difficile financièrement. Avant, il y avait des parents qui arrivaient à payer tout un trimestre ou bien toute une année, mais aujourd'hui, on doit les forcer, les appeler... » La directrice demande : « On souhaite vraiment que la situation redevienne comme avant, cela nous aiderait beaucoup. »La fermeture quotidienne anticipée de la frontière a chamboulé depuis deux ans la fréquentation de l’école : élèves et professeurs congolais ont, pour beaucoup, quitté l’établissement, d’autres ont dû déménager au Rwanda pour continuer à suivre leurs classes.
7/4/20242 minutes, 15 seconds
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La Tunisie, terre d'inspiration pour des écrivains en devenir: «l'angoisse est un moteur de créativité»

Alors que la Tunisie traverse une période mouvementée, des écrivains observent et croquent leur pays. Ces derniers jours, des auteurs de renom comme le Congolais Alain Mabanckou et Mabrouck Rachedi étaient justement en Tunisie, où ils ont animé des ateliers d’écriture. Notre correspondante à Tunis a pu participer à un de ces ateliers pour tenter de comprendre ce qui inspire actuellement les auteurs tunisiens. À lire aussiL'écrivaine Faten Fazaa fait venir les femmes à la lecture avec ses histoires en dialecte tunisien  À lire aussiUne terre, une auteure: en Tunisie avec Fawzia Zouari
7/3/20242 minutes, 32 seconds
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Comores: les clientes des salons de beauté d’Anjouan exigeantes jusqu'aux bout des ongles [3/3]

À Mutsamudu, la deuxième capitale des Comores, il y a peu de salons de beauté. Pourtant, il existe une forte demande et les femmes n’hésitent pas à faire appel à des coiffeuses et des maquilleuses qui font le déplacement à domicile. De notre correspondant à Mutsamudu,C’est chez elle, dans une pièce de sa maison, située au cœur de la Médina de Mutsamudu, que Fairouze s’occupe de ses clientes. Ce matin, elles sont trois. La mère de famille coiffe Yousrine, pendant que ses autres clientes, confortablement installées sur le canapé, discutent entourées de produits de beauté. « J’ai commencé ce travail en 2021. Dans mon salon, je maquille des mariées, mais pas uniquement. Je coiffe, je pose de faux ongles. C’est surtout pendant les vacances que l’activité est intense, Dieu soit loué. »Fairouze est mère de deux enfants. Elle se déplace souvent pour satisfaire ses clientes. Le prix de ses services varie : une simple coiffure coûte 5 000 francs, tandis qu’un mariage traditionnel, qui nécessite plusieurs jours d’un travail minutieux, peut atteindre les 200 000 francs.des tatouages au hennéÀ Mutsamudu, la beauté féminine ne se limite pas à la coiffure et au maquillage. À 19 ans, Riyana Issouf Bacar, est étudiante en gestion. Mais elle a surtout une passion depuis 11 ans : le henné. Ces dessins éphémères tatoués à même la peau sont très prisés des femmes de Mutsamudu. Riyana souhaite en faire son métier à plein temps : « Grâce à cette activité, je peux me payer le taxi pour la fac ou acheter des choses sans avoir à le demander à ma mère ou mon père. J’aimerais un jour ouvrir un salon pour le henné, mais je n’ai pas encore trouvé l’endroit et surtout le financement. »Parmi ses clientes fidèles, Haida, une jeune mariée de 22 ans : « Je mets du henné pour n’importe quelle occasion. Pour l’Aïd, pour un mariage, ou juste pour faire plaisir à mon mari. C’est surtout quelque chose qui me fait plaisir, à moi en premier lieu. »À lire aussiComores: la longue restauration du palais Ujumbe, l'ex-palais des Sultans [1/3]Les colliers de fleurs, une traditionLa beauté aux Comores, ce sont aussi les fleurs. Une tradition ancestrale que Mariama Mikitadi perpétue grâce aux colliers qu’elle crée. Chez elle, le parfum suave des fleurs envahit l’espace, mêlant les notes enivrantes du jasmin, du patchouli et du basilic sacré. Chaque collier est une création unique, un bouquet parfumé porté à même la peau lors de multiples cérémonies, comme les mariages.« On a hérité cette pratique de nos ancêtres. Et quand on a grandi, on a pris la relève. Pendant les vacances, louange à Dieu, je vends beaucoup de mes créations, car les mariages sont nombreux, explique Mariama Mikitadi. Ça fait plus de 15 ans que je suis dans le métier ».À lire aussiComores: la gestion impossible des déchets à Mutsamudu écœure le maire [2/3]
7/2/20242 minutes, 23 seconds
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Comores: la gestion impossible des déchets à Mutsamudu écœure le maire [2/3]

À Mutsamudu, sur l'île comorienne d’Anjouan, la gestion des déchets reste un défi majeur. Malgré la création d'une agence nationale chargée de la gestion des déchets et les efforts de la mairie, les résultats ne sont pas toujours au rendez-vous en raison du manque de moyens, d’une mentalité réticente au changement et d'une répartition inéquitable des ressources. Le maire et une association communautaire luttent pourtant contre l'insalubrité, mais les obstacles rencontrés semblent insurmontables. Signe de ce climat délétère, le maire de la commune Zarouki Bouchrane a décidé à un an des prochaines élections qu’il ne se représentera pas. De notre correspondant à Mutsamudu,À Mutsamudu, la mairie a une mission, mais c’est la communauté qui a les moyens. Ici, la gestion des déchets occupe une place centrale. Pendant des années, les déchets étaient jetés à la mer, mais grâce à l’Afam, l’Association des femmes actives de Mutsamudu, cette pratique a désormais cessé. Pour autant, les initiatives du maire Zarouki Bouchrane sont entravées par la réticence des habitants et un manque de moyens logistiques.« Nous avons une parcelle de trois hectares qui nous avait été donné par l’Afam. Ensemble, on a voulu construire un hangar qui permettait de traiter d’un côté le plastique et de l’autre faire des supports, des œufs, mais tout ça n'a pas été possible parce qu’il nous manque des moyens », déplore le maire. Une ville laissée pour compte Hadidja Abdou Saïd, présidente de l'Afam, insiste sur le besoin de financements : « Nous avons présenté des projets auprès des organismes et espérons une suite, parce qu’on sait que le site ne peut pas être une déchèterie. »Le maire de Mutsamudu critique l'absence de fonds de l'État, qui soutient seulement Moroni, selon lui : « Je trouve qu’en fait, ce n’est pas normal, puisque les lois de financement concernent Moroni, Fomboni et Mutsamudu. J'ai du mal à comprendre que par mois, aujourd'hui, Moroni perçoit 19 millions de francs, 16 pour les déchets et 3 pour le carburant ; et qu’à Mutsamudu et Fomboni, zéro, zéro, zéro. C'est une irresponsabilité de la part des dirigeants. »À lire aussiComores: la longue restauration du palais Ujumbe, l'ex-palais des Sultans [1/3]En plus du manque de budget, il n’y a pas de loi sur la gestion des déchets. L’Afam se focalise sur des comités de jeunes de quartiers. « Nous espérons que les comités prennent en charge chaque quartier, pour aboutir à cette gestion-là, parce qu’en fait, on s'est rendu compte que la mairie a des problèmes. Il y a des problèmes de communication, ils n'y arrivent pas », pointe Hadidja Abdou Saïd.Des administrés peu impliquésPour Zarouki Bouchrane, il y a une volonté manifeste de saboter ses initiatives :« Nous avons eu l'aide des poubelles de 1 300 litres, qui nous ont été données par l’Afam. On a essayé ce système de poubelles qui n'a pas été positif parce que la mentalité des administrés n'était pas à la hauteur des évènements. Au lieu de mettre les déchets dans les poubelles, ils les posaient par terre ».Une enquête locale montre que les habitants jettent leurs ordures six fois par jour, mais le camion de la mairie lui passe une fois par semaine. En 2023, la gestion des déchets a coûté 80 millions de francs. Bayard Issiaka Soilihi, de l’Agence régionale de gestion des déchets, explique que l'agence se concentre sur les trois capitales, bien qu'il y ait 54 communes. Pour la mairie, cette agence est inefficace.À lire aussiLa gestion des déchets, un véritable enjeu pour l’Afrique
7/1/20242 minutes, 48 seconds
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Comores: la longue restauration du palais Ujumbe, l'ex-palais des Sultans [1/3]

Aux Comores, le palais Ujumbe à Anjouan est un monument historique du XVIᵉ siècle, siège du pouvoir des sultans jusqu'à la tutelle française au début du XXᵉ. Des traités importants, dont certains abolissant l'esclavage, y ont été signés. En restauration depuis plusieurs années grâce au Collectif du patrimoine des Comores, le projet fait face à des difficultés, notamment l'importation de la chaux corallienne, des poutres et le manque de financement. Les autorités nationales sont critiquées pour leur absence de soutien. La restauration a débuté en 2011. De notre correspondant à Mutsamudu,Situé au cœur de la médina de Mutsamudu, le palais Ujumbe est un témoin silencieux de l'histoire des Comores. Construit par le sultan Abdallah, le palais des sultans de l’île, aujourd’hui en restauration, a eu plusieurs vies depuis maintenant un peu plus de six siècles.Résidence temporaire des sultans puis résidence permanente, lieu de prestige et bureau administratif, le palais Ujumbe a ensuite été une école, un dispensaire ou encore le bureau du cadi, qui est un juge religieux et un guide moral. Farid Rachad, directeur régional de la culture à Anjouan, rappelle l'illustre passé du bâtiment : « Ce palais a une histoire, il y a même eu des signatures de protectorat entre pays et pays ».Une rénovation indispensableMarqué par le temps, le palais Ujumbe de Mutsamudu, à la fois austère et élégant, témoigne de l'architecture comorienne. La bâtisse est un des rares palais à avoir conservé ses plafonds et poutres peints, ainsi que ses niches en stuc. Avec le temps, il a subi d’importants dégâts à la fin des années 2000. Musbahoudine Ben Ahmed, spécialiste en patrimoine et directeur régional du Centre national de documentation et de recherche scientifique (CNDRS) évoque les travaux indispensables : « On s’est donné pour priorité de travailler sur la sécurisation de la dalle à l'intérieur, au premier niveau ».Depuis, une ONG, le Collectif du patrimoine des Comores, est à pied d’œuvre pour sauver ce pan de l’histoire nationale. Mais, malgré l'intérêt et la motivation des jeunes, les financements pour la restauration sont limités, rendant les travaux difficiles. Comme le déplore Oumratti Anli Oicheikh, ingénieure en génie civile : « Vous savez, s’il y avait les financements nécessaires, je pense que ce chantier serait fini depuis fort longtemps. Mais, on fait en fonction de ce qu'on obtient ».En 2011, une équipe d’experts de Zanzibar est venue en secours pour former et reconstruire le mur cassé. Depuis, une équipe locale a pris le relais. « Les étrangers sont partis, mais des fois, ils peuvent venir lorsqu'on se heurte à une difficulté ou on a besoin d'eux, rappelle l'ingénieure. La première difficulté au niveau du point technique, c'est le remplacement des poutres, lorsqu’il s’agit de faire un greffage, ça veut dire lier une poutre ancienne ou une nouvelle poutre ».« Ce palais nous tient à cœur »Le palais Ujumbe est aujourd’hui restauré à hauteur de 40 %. Le budget nécessaire jusqu’à l’achèvement des travaux est lui estimé à 200 000 euros et Musbahou Ben Ahmed ne manque pas de pointer du doigt l’absence de l’État : « Vous savez que l'État, c'est toute une volonté collective. Il est vrai que nous avons un ministère chargé de la Culture et du Patrimoine, mais il est absent en termes de financement. Parce que jusqu'à aujourd'hui, il faut le dire, dans les lignes budgétaires du ministère, il n'y a presque pas de ligne pour prendre en charge les monuments historiques ».Les restaurations sont progressives, financées par des associations et des soutiens internationaux, mais les fonds limités retardent l'achèvement.Le Collectif du patrimoine des Comores espère que ces efforts permettront de transformer le palais en un lieu d’activité lucrative, garantissant ainsi sa préservation pour les générations futures. « Ce palais d’Ujumbe nous tient à cœur, résume Farid Rachad. Pas pour le restaurer et rester là, mais qu’il y ait une activité lucrative qui puisse aider son entretien. C’est intéressant que la génération future le voit et l'entretienne jusque dans longtemps. »À lire aussiAux Comores, les investissements dans le secteur touristique progressent
6/30/20242 minutes, 15 seconds
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Lybie: le camp Haftar investit la ville de Derna avec son indispensable mais opaque politique du béton [3/3]

Le Fonds libyen de développement et de reconstruction est devenu depuis janvier dernier la principale arme politique des autorités de l’est libyen. La stratégie du fonds dirigé par un fils de Khalifa Haftar, le maréchal et homme fort du Cyrénaïque, est de moderniser et remodeler entièrement la région. Mais si les chantiers sont visibles sur le terrain, la pérennité et le fonctionnement de ce fonds interroge. Dans la rue de Cyrénaïque, les panneaux de chantiers siglés du Fonds de reconstruction et de développement sont presque aussi nombreux que les affiches à la gloire du maréchal Khalifa Haftar.Le fonds est dirigé par son fils, Belkasem Haftar, qui a une obsession, prouver aux Libyens et aux étrangers que son organisation travaille : « Depuis 2006, les maintenances des écoles, des hôpitaux et des routes ont été négligées. Nous les réparons parce que ces bâtiments fournissent un service quotidien pour les citoyens. Nous refaisons aussi le réseau routier qui est en ruine, le réseau électrique et le réseau d’assainissement. Tout a été négligé depuis 20 ans. »Une reconstruction concrète aux détails flousSur le terrain, les progrès sont indéniables. 2 000 logements flambants neufs seront remis aux familles sinistrées en septembre 2024. La vie se modernise au rythme des pelleteuses, selon la stratégie de Belkasem Haftar. À Derna, les cafés mixtes ont fait leur apparition. À Benghazi, des espaces piétons sont aménagés.Mais le fonctionnement du Fonds demeure opaque. Les contrats ne respectent ni les règles de l’appel d’offres, ni celle du gré à gré. Belkasem Haftar explique que le financement provient d’une partie du budget de l’État alloué à l’investissement.Claudia Gazzini, chercheuse à l’ONG internationale Crisis group, pointe, elle, des zones d’ombre : « Le Parlement a crédité le fonds de 10 milliards de dinars. Mais au-delà de ce chiffre, la modalité de financement, sur quels chapitres, sur quels articles s’inscrit le fonds, rien n’est clair. »À lire aussiLibye: à Derna, suite aux inondations, un nouvel urbanisme pour faire renaître la ville [1/3]« Tous les regards se focalisent sur Derna »Pour la population, seul le résultat compte. À l’image de Najib Souaissi : « La vie à Derna était difficile avant. Il n’y avait pas de projets avant l’inondation. Même le commerce n’était pas très actif. La situation était très difficile. Mais depuis l’inondation, on est au centre des projecteurs, tous les regards se focalisent sur Derna. Les autorités essayent d’aider au maximum la reconstruction de la cité de Derna. »Au lendemain de l’inondation, le jeune homme de 22 ans était parti refaire sa vie à Benghazi. Six mois après, celui qui a perdu toute sa famille dans la catastrophe était de retour, impressionné par le nouveau visage de sa ville.À lire aussiLibye: comment Derna tente de se reconstruire neuf mois après avoir été ravagée par les flots
6/29/20242 minutes, 8 seconds
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Libye: la ville de Benghazi s'embellit après la tempête Daniel de septembre 2023 [2/3]

Neuf mois après la tempête Daniel en septembre, la Cyrénaïque, région Est de la Libye, est en plein chantier. Le Parlement reconnu par la communauté internationale a alloué deux milliards d’euros pour la reconstruction de Derna. Le fonds en charge de cette manne financière est dirigé par Belkasem Haftar, le fils de Khalifa Haftar, l’homme fort de l’Est. Il a décidé d’utiliser une partie de cet argent pour moderniser la capitale régionale, Benghazi. Cette politique du béton doit montrer le dynamisme de Benghazi, face à la sclérose de la capitale libyenne Tripoli contrôlée par un gouvernement rival. Chaque jour depuis décembre, les familles se pressent pour arpenter les 5,3 kilomètres de piste piétonne et cyclable qui encourent le lac au centre de Benghazi, à l'est de la Libye. Ce sont des petits pas pour Ayman et Mohamed, mais c’est un pas de géant pour Benghazi. Ayman raconte : « Je viens chaque jour, ou presque, pour faire du sport. Certes, c’est un grand sentiment de satisfaction et de joie. Souvent, je suis accompagné de ma femme et de ma fille. » Quant à Mohamed, il confie : « J’ai 40 ans, et c’est la première fois que j’assiste à un tel progrès. Je suis triste parce que je n’ai pas connu ça avant. »La capitale de l’Est n’a pas souffert de la tempête Daniel en septembre, mais le Fonds en charge du développement et de la reconstruction a profité de la manne financière après la catastrophe pour refaire une beauté à Benghazi. Ageila Elabbar, le responsable de la coopération internationale du Fonds, aime se promener sur ces chantiers et constater leurs avancées : « Chaque quartier de la ville de Benghazi sera concerné par cette reconstruction. Par exemple, cette place, c’est là où a été proclamée l’indépendance libyenne. Le bâtiment ici était de style colonial italien. Nous allons le reconstruire à l’identique. »La population se réjouit des travaux dans la villeDe nombreux travaux suspendus du temps de Kadhafi ont repris. Des cinémas devraient également ouvrir. Ce serait une première depuis 1969 et l’arrivée au pouvoir de l’ancien Guide.Cette politique du béton fonctionne auprès de la population, car elle concerne aussi des infrastructures du quotidien. Abdelkader a redécouvert son quartier, al-Mashir, au nord de la ville, depuis qu’un parc y a fait son apparition : « Avant, le jardin n’était pas en bon état, il y avait des poubelles et des égouts, c’était presque une décharge. Maintenant, c’est mieux qu’avant. D’ailleurs, je viens tous les jours. Avec la famille, on reste parfois dîner là. »Même le centre-ville renaît timidement. Ses immeubles éventrés forment une balafre urbaine au cœur de Benghazi depuis 2017 et la victoire des forces de Khalifa Haftar contre des groupes jihadistes.Ramadan tient une bijouterie dans un souk fraîchement réhabilité. Le quadragénaire se félicite que les habitants puissent de nouveau avoir accès au centre-ville : « La fermeture de la route, c’est elle qui a causé des embouteillages. Les ponts sont en cours de construction, une fois terminés, il y aura un retour à la normale. »Pour les autorités de Benghazi, ces chantiers permettent aussi de distribuer des contrats à de grandes multinationales. À lire aussiLibye: à Derna, les habitants vivent toujours avec leurs traumatismes des inondations de 2023
6/28/20242 minutes, 21 seconds
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Libye: à Derna, suite aux inondations, un nouvel urbanisme pour faire renaître la ville [1/3]

La tempête Daniel s’est abattue sur Derna, il y a neuf mois, faisant une dizaine de milliers de morts et de disparus. Sous les pluies diluviennes, deux barrages vétustes avaient cédé, rasant la partie est de la ville. Aujourd’hui, les autorités de l’Est libyen, dirigées par le maréchal Khalifa Haftar, mettent les bouchées doubles pour reconstruire la ville. Avec ses chantiers gigantesques, le militaire autoritaire veut gagner les cœurs des habitants et une reconnaissance internationale, qu’il cherche depuis 2014. La perle de la Méditerranée vit au rythme des bruits des machines. 155 chantiers sont en cours dans la ville ravagée par la tempête Daniel. La société égyptienne de l’ingénieur Mohamed Soliman reconstruit un pont reliant Derna au principal axe routier de Cyrénaïque, la région Est de la Libye. Il témoigne : « Il y avait un pont à poutres ici. Ça demande un plan de reconstruction spécifique, un peu spécial, parce qu’il y a une distance de 120 mètres entre les deux extrémités du pont. » L'ingénieur poursuit : « Parmi les difficultés rencontrées, le pont est situé entre deux montagnes. Les manœuvres et les accès vers les extrémités du pont sont difficiles. »Le Fonds de développement et de construction, chargé entre autres de rebâtir Derna, a reçu une enveloppe de 10 milliards de dinars, environ 2 milliards d’euros. Ageila Elabbar, l’un des cadres du Fonds, veut montrer que l’argent n’est pas gaspillé : « Certains chantiers seront finis en août, d’autres finiront en septembre. Mais tous les aménagements doivent être finis en décembre. C’est pour ça qu’ils sont forcés, encouragés plutôt à travailler nuit et jour, 24h/24, 7 jours sur 7. Comme vous le voyez vous-même, il y a de nombreux ouvriers sur les chantiers. »Belkasem Haftar, fil de Khalifa Haftar, cherche à moderniser la villeLe Fonds est dirigé par Belkasem Haftar, l’un des fils de Khalifa Haftar, l’homme fort de l’Est. L’ingénieur de formation a pour but de moderniser la ville, il veut aussi transformer les mentalités. Derna est une ville conservatrice, les femmes et les enfants n’avaient pas l’habitude de sortir dehors. Les autorités ont donc multiplié les jardins publics. Islam Montasser s’en réjouit, sa bijouterie donne sur un parc. « Honnêtement, le business après l’inondation s’est amélioré. » Le bijoutier salue les changements : « Ce jardin était à l’époque un terrain abandonné. Grâce au Fonds de reconstruction et à l’ingénieur Belkacem, Belkacem Khalifa, que Dieu le bénisse, la situation a changé à 180 degrés. »Le chantier des barrages est l’un des rares à ne pas avoir encore commencé. Quatre sociétés internationales ont soumis leur offre, Belkasem Haftar sait qu'il joue sa crédibilité sur cette décision finale.À écouter aussiLibye: comment la ville de Derna se relève-t-elle des inondations de 2023 ?
6/27/20241 minute, 56 seconds
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Bénin: l'interdiction de traversée du fleuve Niger pèse sur Malanville

En février, le Bénin rouvrait sa frontière avec le Niger, fermée dans la foulée du coup d'État du 26 juillet à Niamey. Mais, à ce jour, le Niger la maintient fermée, des containers bloquent toujours le pont qui relie les deux voisins. La ville béninoise de Malanville, frontalière du Niger dont elle n'est séparée que par le fleuve du même nom, subit de plein fouet les conséquences de cette fermeture. Encore plus depuis que le Bénin a décidé, le mois dernier, d'interdire la traversée du fleuve. De notre envoyée spéciale à Malanville,Afin de contourner la fermeture de la frontière entre le Niger et le Bénin, passagers et marchandises traversaient le fleuve Niger en pirogue depuis Malanville, au Bénin, pour gagner la rive nigérienne, et ce, jusqu'au mois dernier. Alors, l'embarcadère était aussi animée qu'un marché et Ismaël, un zemidjan - un taxi-moto - à Malanville, venait souvent près du fleuve pour déposer des passagers. « Quand le fleuve travaille, le bus vient et s'arrête, il décharge les gens, les zemidjans prennent 500 par tête pour les amener au bord du fleuve. Arrivé là-bas, tu discutes avec le piroguier, il te dépose du côté Niger et vous partez. » Ismaël se désole : « Maintenant, ce n'est plus comme ça. Même pour aller au fleuve, c'est difficile. »Depuis plus d'un mois, la traversée du fleuve est interdite, ses rives sont surveillées et le brouhaha des passagers a laissé place aux seuls bruits des oiseaux. Ismaël a donc changé ses habitudes : « Je suis venu rendre visite à mes parents qui sont au bord du fleuve, je vais voir comment ils vont. » Le zemidjan explique qu'il a dû changer ses habitudes : « Souvent, je venais la nuit, tant que la frontière n'était pas fermée. Maintenant, il y a des militaires, la police est là la nuit, donc je préfère venir dans la journée. La nuit, ils vont te demander où tu vas. »Des activités économiques entravéesDix mois après la fermeture de la frontière, l'interdiction de la traversée du fleuve est vécue comme un vrai coup dur par les habitants de Malanville. Dans sa petite boutique, Abdou Yayi vend un peu de tout, le commerçant fait venir certains produits du Niger et de la ville de Gaya, les yaourts, le couscous... Cette interdiction complique grandement ses activités : « La fermeture de [la traversée du fleuve] amène beaucoup de problèmes. Ce qui arrive de Gaya est bloqué ou sinon, c'est cher. » Le commerçant ajoute que, même pendant la période du Covid, il n'a jamais vécu une telle situation.À lire aussiBénin: le marché de Malanville asphyxié par la fermeture de la frontière avec le NigerCes difficultés, les autorités locales en sont conscientes, mais Moussa Sambo Nouhoum, deuxième adjoint au maire de Malanville, justifie la décision d'interdire la traversée du fleuve, alors que le Niger bloque toujours le pont qui relie les deux pays : « Le Bénin avait fait le choix de ''fermer les yeux'', le passage sur l'eau était extrêmement dangereux compte tenu de la question sécuritaire. Et le passage sur l'eau n'était pas du tout aisé et était donc extrêmement dangereux. Le Bénin, après avoir ouvert sa frontière, a donc décidé d'interdire le passage sur l'eau. »Un enfant, un parent, une épouse au Niger, nombreux sont les habitants de Malanville à raconter leurs liens avec le pays voisin. À Malanville et à Gaya, nous sommes les mêmes, disent-ils, « on n'a pas envie de conflits, il faut qu'on s'entende. »
6/26/20242 minutes, 26 seconds
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Gabon: Libreville rationne l'électricité à cause de la sécheresse

Libreville, la capitale du Gabon, fait face à des délestages récurrents d’électricité depuis le mois d'avril dernier. La faute à une sécheresse sévère qui a provoqué une pénurie d’eau pour faire tourner les turbines des deux principales usines de Tchimbelé et Kinguélé. Ces deux sites produisent à eux seuls plus de 40 % de l’électricité consommée à Libreville. Les populations, qui suffoquent, sont en colère. Un reportage de notre correspondant à Libreville. À lire aussiGabon: les fortes chaleurs entraînent des délestages et exaspèrent les habitants de Libreville
6/26/20242 minutes, 19 seconds
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RDC: la recherche artisanale d'or continue dans l'Ituri, malgré les promesses de développement industriel [2/2]

La province de l’Ituri dans l’est de la RDC est connue pour ses richesses aurifères. Des ressources convoitées par les groupes armés locaux et exploitées quasi exclusivement par des chercheurs d’or artisanaux. À Nizi, à une trentaine de kilomètres de Bunia est basée la Sokimo, l’entreprise publique congolaise de l’or. Début 2023, la société avait annoncé la relance de ses activités, à l’arrêt depuis une dizaine d’années, faute de moyens financiers. Mais la reprise de la production se fait attendre. De notre envoyée spéciale à Nizi,À droite de l’école construite par la Sokimo, l’entreprise publique congolaise aurifère de l’Ituri, des orpailleurs creusent au bord de la rivière. Sur la concession de la société, l’exploitation artisanale est tolérée. Celui que l’on surnomme « pasteur » tend une pépite grisâtre qu’il ira vendre dans le village voisin. « Son prix est variable en fonction de ce que les acheteurs voudront bien me donner. Tout ne sera pas pour moi, nous travaillons en groupe, il faudra que je partage avec mes coéquipiers et il faudra aussi payer les dépenses. »En moyenne, les chercheurs d’or gagnent moins de 10 000 francs congolais par jour, soit moins de 3 euros. Ici tout se fait à la pioche. Puis le minerai est lavé au mercure, un métal liquide qui permet à l’or de s’agglomérer. L'exploitation polluante a perturbé l’écosystème de la zone et provoqué des inondations, comme l’explique Francine Ouechi, une activiste de la société civile. « Il n’y avait pas de rivière ici, elle était de l’autre côté. Ces bâtiments inondés appartenaient à la Sokimo, c’est là qu’elle avait son activité. »L'insécurité perturbe la production La Sokimo, à l’arrêt depuis une dizaine d’années, avait annoncé la reprise de ses activités début 2023. L’usine de traitement des rejets des minerais a bien rouvert, selon les syndicalistes, mais le reste des objectifs tardent à se concrétiser.Au-delà des difficultés financières, l’insécurité perturbe l’entreprise et plus largement le secteur, explique Christophe Mukwa, le président de la Fédération des entreprises de l’Ituri : « Les activités aurifères fonctionnent au ralenti et pas comme ça le devrait. Pour normaliser la filière, nous allons demander au gouvernement de faire un effort pour éradiquer ce phénomène des groupes armés. Et les activités reviendront comme c’était avant. »Pour l’heure, l’objectif de la fonte de l’or pour obtenir des lingots n’est pas encore rempli. Tout comme le projet de l’exploitation du gisement du Mont Baluma qui n’a pas commencé. Aucune date n’a été annoncée, les dirigeants de la Sokimo n’ont pas donné suite à nos demandes d’entretien.À lire aussiRDC: à Bunia, certains quartiers restent épargnés par le conflit communautaire en Ituri [1/2]
6/24/20242 minutes, 17 seconds
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RDC: à Bunia, certains quartiers restent épargnés par le conflit communautaire en Ituri [1/2]

Dans l’est de la RDC, l’Ituri est toujours en proie à des violences. Le conflit entre Hema et Lendu a repris en 2017 après une quinzaine d’années de paix relative. Les antagonismes sont anciens et les deux ethnies s’étaient déjà entretuées pendant la seconde guerre du Congo. Alors que l'Ituri semble submergé par le conflit, à Bunia, le chef-lieu de la province, certains quartiers mixtes résistent aux tensions communautaires.  De notre envoyée spéciale à Bunia,Autour de la table de billard, une petite dizaine de jeunes hommes entament une partie. Hema, Lendu, Alur ou encore Bira, toutes les communautés se retrouvent à Bankoko, un quartier de Bunia, la capitale de l’Ituri. Jérémy, la vingtaine, y habite depuis toujours. À ses côtés, Gloire Abasi, le président provincial du Parlement des jeunes et résidents de Bankoko : « J’aime aussi le billard, parce que le billard permet à tout le monde de se rassembler, pour qu’il y ait le vivre ensemble, ici en Ituri. »Car le conflit communautaire entre Hema et Lendu - qui s’affrontent par milices interposées depuis 2017 dans le reste de la province - déteint dans certaines zones de la ville de Bunia. Celle-ci est peuplée par une population traumatisée par ces violences qui durent depuis des décennies. « Il y a par exemple certains quartiers de Bunia où les Lendu ne peuvent pas habiter à cause de conflits qui ont eu lieu de 1998 à 2003 », explique Gloire Abasi.Historiquement, le quartier Bankoko (« les anciens » ou « les ancêtres » en lingala, l’une des langues locales) devait recevoir les militaires retraités. Il est aujourd’hui l’un des quartiers résidentiels des hauts fonctionnaires de la région. Ses quelques rues commerçantes sont traversées par des chars de l’armée congolaise et des casques bleus de l’ONU en raison de la proximité de leur caserne.Ce quartier est réputé calme et sécurisé... sauf lorsque les tensions surgissent dans les territoires limitrophes. François Kasereka est le coordinateur provincial des jeunes intercommunautaire de l’Ituri : « Chacun s’occupe de ses affaires. Il y a surtout des tensions entre jeunes qui n’essaient pas de comprendre la situation générale qui génère ce conflit. »Le 26 avril dernier, les principaux groupes armés ont signé un nouvel accord de paix. Depuis, les violences ont diminué, mais n’ont pas pour autant disparu, notamment dans les sites miniers.À lire aussiRDC: en Ituri, les signataires d’un accord de paix sceptiques malgré une baisse des violences intercommunautaires
6/23/20242 minutes, 18 seconds
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Côte d’Ivoire: Taekwondo, boom ivoirien et génération dorée [3/3]

Nous poursuivons notre petite série sur le taekwondo en Côte d’Ivoire. Ces derniers jours vous avez pu entendre un Grand reportage dédié au parcours des champions ivoiriens Cheick Cissé et Ruth Gbagbi. Nous vous avons parlé de l’importance de ce sport dans la société ivoirienne, de l’étonnante greffe de ce sport sud-coréen en Côte d’Ivoire et ce matin notre correspondant à Abidjan, Youenn Gourlay, nous parle de l’important vivier de futurs champions qui existe aujourd’hui dans le pays…  À lire aussiCôte d’Ivoire: les enfants séduits par les vertus du taekwondo [1/3]À lire aussiCôte d'Ivoire: comment le taekwondo est devenu l'art martial préféré des Ivoiriens [2/3]À lire aussiJO 2024: la Côte d’Ivoire et le taekwondo, une histoire d’amour olympique
6/23/20242 minutes, 14 seconds
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Côte d'Ivoire: comment le taekwondo est devenu l'art martial préféré des Ivoiriens [2/3]

Depuis les premiers succès des champions ivoiriens de taekwondo, Cheick Cissé, médaillé d'or à Rio en 2016, et Ruth Gbagbi, médaillé de bronze à Rio puis à Tokyo en 2021, le nombre de licenciés ne cesse d’augmenter en Côte d’Ivoire. L’un des plus grands connaisseurs de taekwondo du pays, l’ancien président de la fédération ivoirienne, Daniel Cheick Bamba raconte comment ce sport est devenu un phénomène social en Côte d’Ivoire. À lire aussiCôte d’Ivoire: les enfants séduits par les vertus du taekwondo [1/3] À lire aussiJO 2024: la Côte d’Ivoire et le taekwondo, une histoire d’amour olympique  
6/21/20242 minutes, 25 seconds
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Côte d’Ivoire: les enfants séduits par les vertus du taekwondo [1/3]

Depuis les premiers succès des champions ivoiriens de taekwondo, Cheick Cissé, médaillé d'or à Rio en 2016 et Ruth Gbagbi, médaillé de bronze à Rio puis à Tokyo en 2021, le nombre de licenciés ne cesse d’augmenter en Côte d’Ivoire. Ce sport sud-coréen est devenu un phénomène social et des milliers d’enfants s’inscrivent dès leur plus jeune âge. À lire aussiJO 2024: la Côte d’Ivoire et le taekwondo, une histoire d’amour olympique
6/20/20242 minutes, 18 seconds
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Tunisie: une association dans les écoles pour éduquer les jeunes au cinéma

En Tunisie, il n’existe qu’une trentaine de salles de cinémas dont la majorité se trouve dans la capitale. Depuis 2017, l’association Sentiers-Massarib, éduque à l’image et à la culture cinématographique enfants et adolescents. Elle travaille en partenariat avec une autre association, l’Art Rue, et des écoles de quartiers populaires, où les projections de films sont devenues un rituel hebdomadaire. Cette découverte du 7ᵉ art est aussi l’occasion d’ouvrir les enfants à l’art du débat et la prise de parole en public. De notre correspondante à Tunis,C’est dans une école primaire, nichée dans une ruelle du centre-ville de Tunis, que résonne la voix d’Antoine Doinel, héros des Quatre Cents Coups de François Truffaut. Devant le mur où est projeté ce classique du cinéma, un groupe d’enfants suit l’action et les bêtises du jeune Antoine.Pour Insaf Machta, enseignante universitaire et cofondatrice de l’association Sentiers, le choix du film n’est pas juste destiné au divertissement. « La représentation de l’enfance revient souvent dans notre programmation, et puis, c’est un film aussi où il y a une représentation de l’institution scolaire. Et c’est aussi pour amener les élèves à réfléchir sur l’école, sur la représentation de l’école dans le film, explique-t-elle. C’est l’occasion aussi de réfléchir sur la question de la discipline et également sur tout ce qui est considéré comme une délinquance dans le film et qui est à relativiser. »Autant de pistes de réflexion qui servent ensuite à alimenter un débat entre cinéphiles novices après la projection.Démocratiser le cinéma chez les jeunesOutre la compréhension du film, Insaf tente aussi d’amener les enfants à s’interroger sur les thématiques de la liberté, de l’enfance, dans un cadre de prise de parole égalitaire. À rebours du côté encore très scolaire des écoles.« À partir des réponses, on apporte des précisions. D’abord, on leur demande de répondre à la question d’un camarade. Ce n'est pas nous qui répondons en premier lieu pour ne pas être justement la seule source du savoir et de la connaissance », poursuit l'enseignante.Si les enfants échangent facilement après une année de projection, les débuts n’ont pas toujours été faciles pour des petits, qui, pour la plupart, ne sont jamais allés dans une salle de cinéma.« L’expérience a montré qu’au tout début de l’année, les élèves sont incapables de regarder un film sans chahuter et on travaille sur ça, justement, sur l’intériorisation progressive du rituel d’une projection », témoigne Insaf Machta.Malgré l’ouverture de multiplexes après la révolution, le cinéma n’est pas une pratique culturelle très répandue. L’association Sentiers aide à sa démocratisation en offrant aussi des ateliers d’introduction à l’analyse de film pour les adolescents, l’accompagnement de la création de ciné-clubs et une ouverture sur les cinémas d’Afrique.À lire aussiComment réduire l’impact environnemental de la production d’un film ?
6/19/20242 minutes, 32 seconds
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Burkina Faso: la solidarité des familles hôtes en Côte d'Ivoire avec les réfugiés [3/3]

Suite et fin de notre série consacrée aux Burkinabè qui fuient les violences dans leur pays. Depuis 2021, la Côte d’Ivoire accueille de nombreux Burkinabè, qui fuient les violences dans leur pays. Il y a à ce stade 59 136 arrivées estimées par le HCR. Près de 12 000 sont actuellement pris en charge dans deux sites d’accueil, construit par le gouvernement ivoirien dans le nord, dans les régions du Bounkani et du Tchologo. Mais la majorité des Burkinabè trouve refuge dans des familles ivoiriennes, qui n’hésitent pas à les intégrer à leur quotidien. Reportage dans le village de Ouangolodougou, situé à moins d’une trentaine de kilomètres de la frontière. De notre envoyée spéciale de retour de Ouangolodougou,« Les hommes dorment ici et les femmes dans l’autre bâtiment au fond. » Demba accueille actuellement 34 demandeurs d’asile. Avec ses deux co-épouses, il a totalement réaménagé sa concession pour faire de la place aussi aux moutons que ses hôtes ont réussi à préserver en fuyant les violences dans leur pays.« J’ai d’abord hébergé une grande sœur éloignée du Burkina Faso, qui était en difficulté. Elle est venue avec beaucoup de monde. Rapidement, d’autres gens, que je ne connaissais pas, ont emboîté le pas. J’ai pu accueillir jusqu’à 100 personnes l’année dernière, témoigne-t-il. Parmi eux, 70 ont été admis dans le site accueil de Niornigué. J’ai bénéficié d’un soutien de l’État : cela m’a permis de tenir. Mais sinon, je m’occupe de tout financer à la maison pour aider les réfugiés. »Plusieurs habitants du quartier Koko ont également poussé les murs pour faire de la place aux demandeurs d’asile burkinabè.À lire aussiBurkina Faso: Témoignages de victimes de violences par des jihadistes [1/3]Deux sites d'accueilIbrahima Touré est agriculteur. Il partage tout : son logement, ses deux magasins et ses récoltes. « Si tu vois quelqu'un en difficulté, il faut l'aider. » Pourtant, Ibrahima Touré, n’avait aucun lien de parenté avec ces personnes. Mais son geste lui a permis de tisser de nouvelles amitiés. « Aujourd'hui, on est devenus une famille. Ils m'ont pris comme leur frère. On cause bien, on s'appelle. »Bien avant l’ouverture des deux sites d’accueil, les familles ont été les premières à recevoir les demandeurs d’asile. Chaque foyer a contribué, dans la mesure du possible, à recenser ces arrivées. Ces flux varient, constate Siaka Ouattara, le chef du village de Ouangolodougou.« Il y en a qui viennent, il y en a qui repartent. Jusqu'à hier, on me faisait comprendre qu'il y a des nouveaux qui sont arrivés, mais par contre, il y en a d'autres qui étaient dans les familles ici et qui sont repartis dans leur village au Burkina. Donc, il y a des nouveaux arrivants, mais il y en a qui repartent aussi », explique Siaka Ouattara.La plupart des demandeurs d’asile tentent de poursuivre des activités, notamment dans les domaines de l’agriculture ou du commerce.À lire aussiBurkina Faso: témoignages de victimes de violences des Volontaires pour la Défense de la Patrie [2/3]
6/18/20242 minutes, 28 seconds
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Burkina Faso: témoignages de victimes de violences des Volontaires pour la Défense de la Patrie [2/3]

La situation sécuritaire pousse plus de deux millions de Burkinabè à quitter leurs foyers. Bon nombre sont des déplacés internes, et d’autres se retrouvent dans les pays voisins, comme le Mali, le Ghana ou la Côte d’Ivoire. Plusieurs personnes affirment avoir été victimes de violences commises par des supplétifs de l’armée burkinabè, les Volontaires pour la Défense de la Patrie. Bon nombre de personnes fuient par anticipation, à cause d’un climat marqué, selon elles, par la suspicion d’appartenir ou non aux groupes armés terroristes. Ramata* est originaire d’un village proche de Ouahigouyia. Sa localité a été attaquée il y a plus d’un an, dit-elle, par des Volontaires pour la Défense de la Patrie (VDP). Avec sa co-épouse, son mari et leurs dix enfants, Ramata fuit de village en village. Et à chaque étape, cette femme d’âge mûr décrit un climat de suspicion et de violence, entretenu, notamment, par ceux-là mêmes censés protéger les populations.« À notre arrivée à Tanlili, on a découvert que des Volontaires pour la Défense de la Patrie venaient de tuer neuf hommes. Les corps gisaient par terre. Ma co-épouse s’est mise à hurler en voyant ces corps. Puis les VDP ont arrêté quatre de nos villageois. Ils nous ont fouillé et ont pris nos téléphones. On a préféré partir », témoigne-t-elle.Ramata et sa famille marchent pendant plusieurs jours. Au fil du temps, le groupe de villageois, en quête d’un lieu sûr, s’amenuise. « Au village de Bissiga, les VDP nous ont arrêtés, comptés et gardés jusqu’au crépuscule. Le chef de la localité a refusé qu’on dorme sur place. Nous avons marché, campé ailleurs et là encore, les villageois se sont opposés à notre présence. On les a suppliés et nous avons pu dormir dehors. Nous étions tous très fatigués. »« Sur la route, nous avons perdu 19 villageois... »Après plusieurs mois de marche, Ramata trouve refuge en Côte d’Ivoire. Mais des proches manquent à l’appel, dont son mari. Ramata peine encore à évoquer sa disparition.« Sur la route, au total, nous avons perdu 19 villageois : deux ont été tués sous notre nez par les VDP. Et les 17 autres ont été arrêtés à divers endroits. Ils sont portés disparus jusqu’à présent. Mon mari est parmi eux », déplore Ramata.Plusieurs personnes décrivent des arrestations qui leur paraissent sans fondement. À l’image de Samira*, une jeune originaire de Gorom-Gorom. Cette femme a perdu son cousin, décapité par de présumés terroristes. Apeurée, elle fuit, avec son père âgé de 91 ans. Mais à leur tour, ils font l’objet de contrôles musclés.« On a quitté les mains vides. Le VDP ont arrêté nos hommes. Ils les ont ligotés et déshabillés. Ils voulaient les décapiter. Et nous, on leur a expliqué de ne pas les tuer parce que les djihadistes ont déjà tué une tante, explique-t-elle. Les VDP nous accusent d’être de connivence avec les groupes armés, mais on n’a rien à voir avec eux. Les VDP utilisent des détecteurs de métaux pour contrôler les gens : l’engin a sonné et ils ont arrêté mon père, pensant qu’il est un jihadiste. Mon papa a été enfermé pendant trois jours. »À sa libération, le vieil homme raconte être pris entre deux réalités : d'un côté, la peur de nouvelles agressions par des groupes armés terroristes. De l'autre, la contrainte de collaborer avec l'armée... Le vieil homme a choisi de fuir cette situation.* Pour des raisons de sécurité, les prénoms ont été modifiésÀ lire aussiBurkina Faso: Témoignages de victimes de violences par des jihadistes [1/3]
6/17/20242 minutes, 39 seconds
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Burkina Faso: Témoignages de victimes de violences par des jihadistes [1/3]

RFI vous propose une série de reportages sur la situation des Burkinabè qui fuient les violences dans leur pays. La situation sécuritaire pousse plus de deux millions de personnes à quitter leurs foyers. Bon nombre sont des déplacés internes et d’autres se retrouvent dans les pays voisins, comme le Mali, le Ghana ou la Côte d’Ivoire. Parmi ces personnes figurent de nombreuses victimes des violences perpétrées par les groupes armés terroristes. Pour Mariam*, tout a basculé peu avant la période de récolte de l’arachide l’année dernière. Cette femme d’âge mûr habite la région de Bittou, dans le centre-est, près de la frontière avec le Ghana. Ce jour-là, dit-elle, des hommes armés, se déplaçant à moto, pénètrent dans son village avec une requête non négociable.« Ces gens ont dit qu’ils étaient là pour instaurer l’islam. Ils nous ont donné sept jours pour quitter le village, parce que selon eux, seuls des musulmans peuvent occuper cette terre. Nous n’avions même pas encore récolté nos cultures : il y avait encore de l’arachide, du maïs, du soja et du fonio. Ils ont brûlé nos hangars. Ils sont restés jusqu'à minuit. Ils affirmaient être là, soi-disant, pour prêcher l’islam », explique-t-elle22 personnes tuéesSur le coup, les groupes armés tuent 22 personnes. Informés par les villageois, les militaires arrivent et restent 22 jours sur place pour sécuriser le village. Quelques instants après leur départ, les groupes armés reviennent et attaquent la localité.« Ils ont égorgé quatre de mes garçons devant moi. Ils les ont jetés comme des ânes. Regardez les cicatrices sur mon épaule et mon front : ils m’ont frappée avec des machettes, témoigne Mariam. Je criais, je pleurais sur le corps de mes enfants et c’est pour cela qu’ils m’ont frappée. Ils m’ont jetée dans leur pick-up. Ils m’ont emmenée très loin dans une forêt. J’avais des blessures sur tout le corps. »Même mode opératoire raconté par Fatim*, originaire de Titao, dans le nord du Burkina. Cette femme a perdu son mari.« J’étais dans mon jardin, j’arrosais les oignons. Mon mari faisait partie des VDP. Il a été attaqué par des groupes armés. Trois de ses frères ont aussi été tués. Après l’assassinat des membres de ma famille, nous avons reçu un ultimatum de sept jours pour quitter le village. »Fatim est partie les mains vides dans la précipitation. Elle a parcouru un long périple avec ses sept enfants, fuyant de village en village, pour enfin trouver refuge en Côte d’Ivoire. * Pour des raisons de sécurité, les prénoms ont été modifiésÀ lire aussiBurkina Faso: l'ONU demande des enquêtes sur les exactions et massacres contre des civils
6/16/20242 minutes
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RCA: à Bangui, le retour de l'eau potable soulage enfin le quotidien des habitants

Le Reportage Afrique nous amène aujourd'hui à Bouar, au nord-ouest de la République Centrafricaine. Dans cette ville, les habitants renouent avec de l'eau courante après une décennie d'interruption. Les installations de la Société de distribution d'eau en Centrafrique (Sodeca) ont été détruites pendant la crise militaro-politique de 2013. Ces dix dernières années, les populations ont été condamnées à utiliser l'eau des puits, des cours d'eau ou encore des forages. Alors que le taux des maladies d'origine hydriques ne cesse de grimper dans la ville, le Comité international de la Croix-Rouge (CICR) a entrepris un accord avec la Sodeca, ce qui a permis aujourd'hui de redonner de l’eau potable aux habitants. De notre correspondant à Bouar, Tout au long de la route qui mène au quartier Zari Herman, des femmes et enfants parcourent des kilomètres avec des bidons à la recherche de l’eau potable. Depuis 10 ans, l'eau potable ne coule pas dans ce quartier populaire. Comme les autres habitants, Nicette et sa famille utilisent l'eau des puits : « Il faut se réveiller très tôt le matin avec les enfants pour faire la queue devant les puits ou les forages, explique la mère de famille. Parfois, je suis obligée d'utiliser les cours d'eau pour répondre aux besoins de mon foyer. Tous les jours, on transporte des bidons dans des pousse-pousse ou sur la tête et c'est très pénible ».Créée en 1983, la Sodeca de Bouar a été vandalisée pendant la crise militaro-politique de 2013. Après 10 ans d'inactivité, elle a repris service en avril 2023 grâce aux soutiens des partenaires. Christian Feï-Ngan Youwana est son chef de centre et en détaille ses nouveautés : « Tous les bâtiments de l'usine saccagés ont été réhabilités. Les installations de l'usine ont été dotées de nouvelles machines. Nous avons désormais tous les produits chimiques pour le traitement et la production de l'eau potable dans la ville. Nous avons aussi deux groupes électrogènes pour travailler à plein temps ».À lire aussiCentrafrique: opération désensablement à Bangui pour accéder à l’eau courante« Un ouf de soulagement »Malgré ces efforts, le chantier reste énorme. Aujourd'hui, 15 quartiers sur 58 bénéficient de l'eau potable distribuée par la Sodeca. Ici, au quartier Haoussa, à l'autre bout de la ville, Ousseni a un robinet installé devant sa maison : « C'est un ouf de soulagement parce que l'eau potable est à nouveau disponible dans mon quartier. J'ai de l'eau courante à la maison, donc je n'ai plus à me réveiller très tôt pour parcourir des kilomètres pour aller chercher de l'eau potable. Après l'installation de mon compteur, je constate que mes enfants ne souffrent plus de maladies d'origine hydriques ».Le prochain objectif est d'étendre le réseau de distribution dans tous les quartiers. Yves Van Loo est le chef adjoint de la délégation CICR : « Le résultat est encourageant, mais nous sommes encore très loin des attentes de la population. La station de pompage est terminée. Elle a une capacité de produire 250 000 litres d'eau potable par jour. La station fonctionne avec du carburant. Le CICR fournit 1 250 litres par mois pour la faire tourner. On va augmenter la capacité au fur et à mesure que l'extension du réseau de distribution se fera dans les quartiers ».Il est prévu dans les prochains mois l'installation de l'énergie solaire en plus de l'énergie thermique pour donner un maximum d'autonomie à la Sodeca, afin de fournir de l'eau potable aux 60 000 habitants de Bouar.À lire aussiCoronavirus: à Bangui, l'accès à l'eau devient prioritaire
6/15/20242 minutes, 26 seconds
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«Mon mari me faisait subir viols et violences»: en Centrafrique, le mariage forcé est une pratique courante

Le mariage forcé est une pratique courante. À Kpockté, un village au nord-ouest de la Centrafrique, ce type d’union sans consentement est organisé par certaines familles sans tenir compte de l’avis des jeunes filles dont l’âge varie de 14 à 17 ans. Elles sont parfois contraintes de se soumettre à la décision des familles, car dire « non », peut avoir de nombreuses conséquences pour ces adolescentes. De notre correspondant à Bangui, Au village Kpockté, à 15 km de Bouar, dans la préfecture de la Nana-Mambéré, il n’est pas donné à toutes les femmes de choisir leur époux. Certaines doivent accepter de gré ou de force leur nouveau mari. C’est le cas de Sophie 16 ans. Orpheline de père, elle a été forcée de se marier à un fermier de 60 ans avec la complicité de sa mère. « Ma mère me disait toujours que l’amour n’existe pas, l’essentiel, c'est de vivre avec un homme respectable qui peut s’occuper de moi. Elle m’avait juste dit que mon futur mari est riche, qu’il va nous sortir de la pauvreté. Il est trois fois plus âgé que moi. Ça fait trois ans que je suis en couple avec lui pour ne pas désobéir à ma mère. »Le mariage sans consentement est monnaie courante dans ce village d’environ 2 000 habitants. À quelques jets de pierres de là, nous rencontrons Nadine, une autre victime. « J’ai été mariée de force, il y a deux ans, dans un autre village proche par mes parents. Mon mari me faisait subir viols et violences conjugales. Je n’étais pas heureuse, je pleurais à longueur de journée et je maigrissais beaucoup. Un jour, j’ai décidé de m’enfuir. Actuellement, je vis ici chez mon oncle qui est heureusement contre cette pratique. »« C'est une question de coutume »Très souvent, ces familles n’ont pas de sources de revenus pour prendre en charge leurs enfants. Les filles, dans ce cas de figure, deviennent des biens précieux pour les parents. Grégoire est un père de famille qui a choisi pour sa fille. « Le mariage pour nous, c’est une question de coutume. C’est une source de délivrance, de réussite et de bonheur. Le mariage permet d’éviter les dérives d’une débauche qui pourrait déshonorer la famille. Dans notre tradition, il appartient aux parents de donner leurs enfants en mariage. C’est la règle donc je n’appellerai pas cette pratique un mariage forcé. »Plusieurs organisations des droits de l’enfant et des droits de l’homme s’activent pour lutter contre ce phénomène. Maître André Olivier Manguereka est avocat aux barreaux de Centrafrique. « Nous sommes dans un État de droit et la loi centrafricaine ne défend pas cette pratique. Malheureusement, la plupart de ces filles ne maîtrisent pas leurs droits et se laissent injustement dominer par leur parent. J’encourage les filles qui sont contre cette pratique à porter l’affaire en justice. Les auteurs seront traqués, jugés et condamnés selon la faute commise. »Aujourd’hui, de nombreuses filles mariées de force sont en instance de divorce. Certaines sont malheureuses et craignent de rester célibataires à vie, car aucun homme ne souhaite se remarier avec elles.À lire aussiKessy Ekomo: «Les femmes centrafricaines sont actives et actrices du changement»
6/14/20242 minutes, 28 seconds
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Relocalisation des réfugiés soudanais au Tchad: «On ne pourra accueillir qu’une partie des déplacés» [2/2]

Au Tchad, les réfugiés de la crise soudanaise ne cessent d’affluer. La ville d’Adré, frontalière à l’est du pays d’environ 40 000 habitants, abrite désormais plus de 175 000 soudanais que les agences de l’ONU cherchent à relocaliser vers des camps de réfugiés construits en dehors de la ville, malgré le manque de financement. De notre envoyé spécial à Adré,C’est à Dogui, situé à environ 100 km d’Abéché, que le nouveau site des réfugiés est en construction. Il a une capacité d’accueil d’environ 50 000 réfugiés et va accuillir des personnes venues d’Adré et du site d’Ambélia. Des matériaux de construction jonchent le sol. Les charpentiers sont à pied d’œuvre. Abakar Adoum s’occupe de la construction des forages dans le site : « On a réalisé ces forages avec une profondeur de 54 mètres. Nous avons fait des tests de débit et la capacité de production donne 16m3 par heure. Et pour 2 000 personnes, nous avons besoin de 150m3. Notre projet est d’avoir 4 forages. »L’objectif de cette relocalisation est de permettre aux réfugiés d’avoir des conditions de vie décentes. « On a en moyenne 1 000 personnes qui arrivent par jour. On se retrouve avec cet endroit qui se remplit et les déplacés vivent dans des conditions très précaires. Si nous ne nous dépêchons pas, nous allons nous retrouver dans une situation catastrophique, avec le choléra et tout ce que cela peut engendrer », s’inquiète Benoit Kayembé, le chef de bureau HCR à Adré.À lire aussiGuerre au Soudan: «El-Facher est sans doute l’un des endroits où la situation est la pire»« Les autres resteront à Adré sous la pluie »Hassan Mahamat, est venu d'El-Geneina, au Darfour, il y a un an. Il s’occupe de la liste des réfugiés qui doivent s’installer à Dogui : « On a enregistré déjà presque une cinquantaine de ménages. Le problème, c'est qu’il y a trop d’insécurité ici et les gens ont vraiment faim et c’est comme cela depuis presque deux mois, explique Hassan. Sinon avant-hier, il y a eu encore 184 nouveaux que l’on doit enregistrer ».Depuis le début de la crise soudanaise il y a un an, le Tchad a accueilli près de 600 000 réfugiés sur son sol. Ce drame humanitaire ne devrait laisser personne indifférent, nous dit Laura Lo Castro, représentante du HCR au Tchad : « Nous pouvons accueillir aujourd’hui seulement 2 000 familles, environ 10 000 personnes. La capacité totale du camp est de 50 000 personnes. Si vous faites le calcul pour les 8 000 maisons qui restent, on parle d’environ 7 millions de dollars, détaille Mme Lo Castro. Il nous faut plus de ressources pour effectivement accélérer la construction du site. Malheureusement, on ne pourra accueillir qu’une partie des déplacés et les autres resteront à Adré, sous la pluie », se désole la représentante du HCR.Alors que les autorités tchadiennes plaident pour un soutien accru de la communauté internationale, l’afflux des réfugiés se poursuit à l’est du pays.À lire aussi«Ici, on est au cœur de la crise»: le Tchad face à l'afflux des réfugiés soudanais [1/2]
6/13/20242 minutes, 12 seconds
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«Ici, on est au cœur de la crise»: le Tchad face à l'afflux des réfugiés soudanais [1/2]

Les réfugiés de la crise soudanaise ne cessent d’affluer au Tchad. Adré, ville frontalière de 40 000 habitants située dans l’est du Tchad, a enregistré l’arrivée de plus de 17 000 personnes depuis le début du conflit et les agences de l’ONU manquent de financement pour les assister. De notre envoyé spécial à Adré, Le soleil est au zénith. Ici, selon les humanitaires, 100 à 1 000 réfugiés entrent en moyenne chaque jour à cause de la crise soudanaise. Sous le pont qui marque la frontière, Mahamat Adoum, agent de protection de la CNAR, la Commission nationale d’accueil des réfugiés, est assis devant son bureau, tablette numérique en main. Il enregistre les nouveaux réfugiés et les oriente vers un kiosque sanitaire pour les premiers examens de santé : « Nous sommes là 7 jours sur 7. Nous avons reçu près de 110 familles aujourd’hui, elles craignent l’insécurité et la famine. »Haran Hassan Mahamat, la quarantaine, veuve et mère de 6 enfants, est nouvellement arrivée en provenance de El-Djénéina, une ville du Darfour. « Nous venons d’arriver parce qu’il n’y avait pas des moyens de transports. Et là, on n’a rien à manger et la guerre ne fait que continuer on ne sait à quel saint se vouer. On a perdu nos maris, certains sont disparus, difficile de communiquer avec d’autres comme ils vivent en cachette à cause de la crise. Vues toutes ces difficultés, on préfère venir vivre avec nos frères ici. On s’est même déjà fait enregistrer. »« On n’a plus d’argent »Le Soudan est une crise oubliée mais situation humanitaire ici reste catastrophique, alerte Laoura Lo Castro, représentante du HCR au Tchad : « Ici, on est au cœur de la crise on ne sort pas de l’urgence et on n’a plus d’argent. L’année passée, on a réussi à mobiliser 40% des besoins. On est aujourd’hui au mois de mai et on a que 6%. Comment le Tchad va faire pour absorber cette population et éviter des catastrophes humanitaire », s’inquiète la représentante du HCR.En un an, le Tchad est devenu l’un des principaux pays d’accueil au monde avec près de 600 000 réfugiés à l’Est si l’on considère le nombre de réfugiés par rapport à la population. Les autorités plaident pour un soutien accru de la communauté internationale, tandis que le conflit s’enlise de l’autre côté de la frontière.
6/12/20242 minutes, 8 seconds
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Congo-B: 80 ans après, que devient le site qui a abrité la conférence de Brazzaville?

En 1944, Brazzaville, capitale de la France libre en pleine Seconde Guerre mondiale, abritait une conférence chargée de se pencher sur la transformation de l’Empire colonial français après les bouleversements de la guerre. Le rendez-vous a débouché sur des conclusions très conservatrices mais il a tout de même marqué une étape dans l’histoire de la décolonisation des anciennes colonies françaises d’Afrique. 80 ans après, le site où s’est tenue cette grand-messe n’est plus que l’ombre de lui-même. Des projets sont en cours pour le réhabiliter. De notre envoyé spécial à Brazzaville,En plein centre-ville de Brazzaville, juste derrière le Conseil économique et social, à un jet de pierre du palais présidentiel, se dresse cette vieille bâtisse de 1910 appelée à l’époque Cercle civil et militaire. En 1944, ce bâtiment a abrité la Conférence de Brazzaville. Une réunion qui a représenté une étape dans la décolonisation, même si ses conclusions sont restées très timides sur l’évolution politique des colonies africaines de la France. Stevio Ulrich Baralangui est chercheur et enseignant d’histoire contemporaine à l’Université Marien Ngouabi de Brazzaville : « La conférence de Brazzaville a apporté des changements importants constatés à partir de 1946, avec la suppression du code de l’indigénat et du travail forcé. Mais la conférence de Brazzaville n’avait pas tenu toutes ses promesses parce que c’est le colonisateur qui a planché sur le devenir des anciennes colonies en l’absence des colonisés. »Une bâtisse en fricheAu pied de vieux manguiers, cette bâtisse, séparée du fleuve Congo par une route dominée par un pont à haubans, est devenue plusieurs années plus tard le siège de l’Alliance française et ensuite le Centre de formation et de recherche en art dramatique (CFRAD).Florent Sogni Zaou, journaliste et écrivain, y a présenté sa première pièce de théâtre intitulée Homme d’affaires, il y a 40 ans : « C’est une maison qui nous a vu grandir. C’est là-bas que j’ai assisté à la première exécution d’une pièce de théâtre. Et lorsque j’ai écrit moi-même, je suis allé vivre ce que je n’avais pas prévu de vivre », raconte-t-il.À lire aussiLe Congo-Brazzaville et la Chine célèbrent les 60 ans de leur coopérationEn effet, cette maison est à l’abandon : des herbes et des petits papayers poussent sauvagement par-ci par-là. « Nous avons vu cette maison mourir. Aujourd’hui, le CFRAD est méconnaissable. D’ailleurs, quand vous y arrivez, vous trouvez un gros cadenas et une grosse chaîne. Ça signifie que la porte principale ne s’ouvre plus. Pour y entrer, il faut passer par le derrière et par là, il y a des crevasses », déplore M. Sogni Zaou.Bientôt réhabilitéeL’heure est désormais à la réhabilitation. À la suite de la dernière visite du président français Emmanuel Macron à Brazzaville, une convention a été signée dans ce sens, à la grande satisfaction de Jean-Omer Ntadi, conservateur du patrimoine culturel. « Là, il y a toutes les démarches nécessaires qui vont déboucher sur l’inscription du CFRAD sur la liste du patrimoine national. Et, au lendemain de la liste nationale, on pourrait faire en sorte que ça rentre dans la liste du patrimoine mondial. »La France a offert une enveloppe de 4 millions d’euros (plus de 2,6 milliards de FCFA) pour la réhabilitation de cet endroit.À lire aussiL’histoire coloniale du Congo racontée et chantée par «Congo Jazz Band»
6/11/20242 minutes, 45 seconds
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Frontière Maroc/Algérie: des habitants souffrent de la relation tendue entre les deux pays [2/2]

La région de l’Orientale, à l’est du royaume du Maroc, est frontalière de l’Algérie, un pays avec lequel les relations sont historiquement tendues. Depuis 1994, les frontières sont fermées et les relations diplomatiques rompues depuis 2021. Pour les populations qui vivent de part et d'autres de la frontière, cette situation est souvent un déchirement. De notre envoyé spécial à Saïdia, Avant la colonisation française, la région de l'Orientale ne connaissait pas les frontières. Mais depuis 30 ans, commercer ou voyager entre le Maroc et l’Algérie est devenu impossible légalement. Dans les rues d’Oujda, ville marocaine frontalière de l’Algérie, les jeunes comme Mounir regrettent de ne pas avoir connu cette époque : « On est des frères. Nous, notre cœur est pur. Après, chacun pense ce qu’il veut, mais on est des frères. Quand les frontières étaient ouvertes, Oujda et Alger… on travaillait ensemble, ils venaient ici et on allait là-bas. »Pour les plus anciennes générations, représentées par Daoudi, un ancien comptable aujourd’hui retraité, les échanges n’ont pourtant pas complètement cessé, il existe des chemins détournés pour aller en Algérie : « On passe par des portes comme Ahfir, Bni Drar, ou même à Oujda. Les braconniers rentrent et sortent facilement, on ne leur fait rien. Leur essence rentre ici et nous, on peut envoyer nos légumes. Le problème, c’est la politique. »Des familles déchirées par la fermeture des frontièresPour beaucoup, la création, puis la fermeture des frontières, a surtout été un déchirement. D’Oujda au Maroc à Oran en Algérie, les familles, la langue et la culture sont souvent les mêmes. Brahim Karkharch est barista à Saïdia : « Mes parents viennent des montagnes de Bin Znassen et ces montagnes vont jusqu’en Algérie... »Il regrette les conséquences sur sa famille :« On parle amazigh et aujourd’hui, j’ai encore mes cousins à Tlemcen et à Bejaia, ça fait dix ans qu’ils ne sont pas venus, ça fait dix ans qu’on ne s’est pas parlés. Les anciens sont morts, ceux qui nous rassemblaient sont morts, et la politique a tout gâché. »Se voir sans se parler, ce paradoxe prend toute sa forme à Bin Lajraf, cette attraction touristique se situe au bord d’une route à flanc de montagne. Au creux de la vallée, l’Oued Aghbal a délimité le tracé de la frontière. Derrière les barbelés, de l’autre côté de la route, à quelques dizaines de mètres, c’est l’Algérie : « Ici, on voit nos frères algériens, on échange des coucous, on papote, mais de loin. »Driss est venu de Taza, en famille, pour voir cette frontière : « Regardez, on est si proches, c’est juste à côté. Mais pour aller en Algérie, je dois aller à Casablanca, prendre un vol pour Tunis et ensuite aller en Algérie. Les Algériens et les Marocains sont des frères. On partage tellement de choses avec eux… Le combat est politique et les peuples n’ont rien à voir là-dedans. »À lire aussiCoupe de la CAF: le Sahara occidental s’invite sur le terrain du foot entre le Maroc et l’Algérie
6/10/20242 minutes, 23 seconds
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Maroc/Algérie: à Saïdia, le souvenir toujours vif de la mort de deux jeunes hommes en jet-ski

À l'est du Maroc, les frontières avec l'Algérie sont fermées depuis 1994 et les relations diplomatiques entre les deux pays sont rompues depuis 2021. En trois ans, les tensions sont allées crescendo, le Maroc et l'Algérie se concurrencent sur la question du Sahara occidental, mais aussi pour l’influence régionale. Dans l'esprit des populations, la guerre devient de plus en plus une possibilité. De notre correspondant au Maroc, Le 29 août 2023, au large de la plage paradisiaque de Saïdia, au nord-est du Maroc, deux jeunes hommes partis en jet-ski ont été abattus par les garde-côtes algériens. Dans la station balnéaire, les souvenirs des touristes sont encore frais. Un vacancier se confie : « Ce truc-là, j’y pense tout le temps. C'est le premier truc auquel j'ai pensé quand je suis arrivé ici. » Ce drame n’a pas empêché les touristes, majoritairement d’origine marocaine, de revenir sur les lieux. Sofiane, qui vit entre la France et Saïdia, est venu avec ses enfants : « Ils sont encore petits mais quand ils grandiront, c’est vrai qu’il faut qu’ils connaissent un peu l’histoire. Ils peuvent s’amuser et faire ce qu’ils veulent, mais ils ne doivent jamais aller de l’autre côté. » Le père poursuit : « Les jet-skis étaient de l’autre côté, par là… Mais il n’y a pas de frontière, il n’y a rien. Nous, on se délimite avec les rochers, alors qu’il y a encore un territoire neutre. »Des tensions de plus en plus fortes entre le Maroc et l'AlgérieLe drame de Saïdia n’est pas le premier incident frontalier dans la zone, et les tensions entre Rabat et Alger sont de plus en plus fortes. À quelques mois du début de la saison haute, un commerçant du front de mer souhaite la désescalade : « Pour l’instant, il n’y a aucun problème pour le tourisme. Mais si la situation se développe et qu’il se passe plus de choses, on sera les premiers à être touchés vu que Saïdia est la ville plus proche des frontières algériennes. » Le commerçant dénonce les réseaux sociaux : « Pour l’instant, tout va bien, mais tous les problèmes sont sur YouTube et TikTok. Franchement, je préfère ne pas assister à ces insultes entre Marocains et Algériens. »Des habitants de la région en viennent à envisager une guerre avec l'AlgérieDe plus en plus, sur les réseaux sociaux comme dans les rues d’Oujda, à quelques kilomètres au sud de Saïdia, le long de la frontière, les discours bellicistes sont présents. C’est le cas avec Mohamed, qui commerce le bois : « Moi, en tant que Marocain, je signe la guerre avec l’Algérie. » Selon lui, il faut arrêter de parler des dénominateurs communs entre les deux pays : « Tous nos rois ont essayé d’être bien avec eux. Malheureusement, la presse marocaine ne dit pas ce qui est vrai sur l’Algérie. Ils ont créé le problème du Sahara occidental pour qu’on ne revendique pas le Sahara oriental. »Avant la colonisation française, cette région ne connaissait pas les frontières, ce qui pousse certains nationalistes marocains à revendiquer ce qu’ils appellent le Sahara oriental, soit l’ouest de l’Algérie. Des revendications qui font ressurgir du passé le spectre de la guerre. En 1963, le Maroc et l’Algérie, tous deux fraichement indépendants, s’étaient affrontés dans cette région, dans ce qui reste encore le seul conflit militaire direct entre les deux pays.À lire aussiTensions entre l'Algérie et le Maroc suite à un projet de confiscation de biens immobiliers
6/9/20242 minutes, 28 seconds
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Les jeunes Dakarois émus par «Dahomey», réflexion esthétique de Mati Diop sur l'art africain spolié

Projeté à l'université Cheikh Anta Diop de Dakar, Dahomey de Mati Diop, est une mise en scène onirique de l'art africain spolié par les troupes coloniales françaises. Un film-documentaire audacieux, auréolé de l'Ours d'Or, éminemment politique, qui a touché un jeune public venu en nombre. De notre correspondante à Dakar,À l'écran, la statue du roi Ghezo raconte en langue fon son retour d'exil. La salle de cinéma ce jour-là est une salle de classe du département de lettres modernes de l’université Cheikh Anta Diop, à Dakar, pleine à craquer. Une séance spéciale, essentielle, pour Mati Diop, la réalisatrice de ce film qui raconte le voyage de Paris vers Cotonou de 26 œuvres pillées à l’époque coloniale.« Je pense que c'est justement aux artistes, aux intellectuels et à la jeunesse d'entreprendre cette démarche de restitution, estime-t-elle. Et pour moi, ça passe, par exemple, par faire ce film. Faire en sorte que ce film ne se limite pas à une sortie en salles, mais soit emmené dans des endroits spécifiques qui puissent générer du débat. »Et les questions ne manquent pas. Pourquoi faire parler les 26 œuvres ? Pourquoi l'obscurité ? Ndey Ededia, qui prépare une thèse sur la restitution des biens culturels, a été touchée par ce film très politique. « C'était génial que Mati arrive à faire parler, en fait, ces statues parce qu'elle leur donne en quelque sorte une âme, juge-t-elle. Ça me parle fortement et j'aimerais que ça puisse parler à beaucoup d'autres jeunes. C'est important de savoir d'où nous venons pour essayer, comme disait Felwine Sarr, de reconstruire un peu ce fil de l'histoire qui a été interrompu à un certain moment. »Car la plupart des étudiants qui sont là n'ont jamais entendu parler de ces 26 œuvres pillées en 1892 dans le palais d’Abomey par les troupes coloniales françaises. « Ici en Afrique, on n'a pas l'habitude de nous dire notre passé, de voir notre vraie culture », regrette El Hadj Faye, étudiant en troisième année de lettres modernes.« Ce que nous devons apprendre à l'école n'est malheureusement pas appris, confirme Assane Diemé, étudiant en master lettres modernes. Je prends l'exemple de la leçon sur le Sénégal. Quand je faisais la terminale, je me rappelle que cette leçon fait partie du programme, mais qu'elle est totalement en bas du programme. On apprenait la Chine, la Guerre froide, la Seconde Guerre mondiale et juste à la fin du programme, on apprenait le Sénégal. Et le temps ne nous a pas permis malheureusement d'apprendre ce cours-là. »Mémoire amputée que le film très politique de Mati Diop tente de réparer. Après le Sénégal, Dahomey est depuis le 31 mai à l'affiche au cinéma au Bénin. De son côté, la réalisatrice Mati Diop compte bien continuer à montrer son film dans un maximum d'universités du continent. À lire aussi«Dahomey» de Mati Diop, le film qui retrace la restitution des trésors royaux d'Abomey
6/8/20242 minutes, 24 seconds
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Élections belges et européennes: la radio Top Congo se délocalise à Bruxelles

Troisième et dernier volet de notre série de reportages sur les élections en Belgique, et la question de la représentativité des diasporas africaines. Aujourd'hui, la campagne pour les élections européennes et belges du 9 juin telle que suivie sur les ondes congolaises. En effet, la radio Top Congo a posé ses valises et ses micros à Bruxelles cette semaine pour sept jours d’émissions spéciales, une première !  Au programme de la radio Top Congo cette semaine, des interviews des présidents des différents partis belges, des candidats d’origine congolaise, et des débats avec la diaspora. Une délocalisation grand-format qui témoigne de l’importance de ces élections pour les congolais de Belgique, mais aussi pour ceux de République démocratique du Congo.L'hymne national belge remixé façon rumba congolaise, en guise d’introduction musicale pour cette émission spéciale de débat avec la diaspora, en direct et en public à Bruxelles et c’est une candidate aux élections européennes d’origine congolaise qui prend le micro en premier, Chancelvie Okitokandjo. « Il est important que la diaspora soit présente en politique : je parle des députés régionaux, des députés fédéraux, des députés européens, énumère-t-elle. Parce que c'est là que les décisions sont prises qui ont une empreinte sur ce que nous vivons au quotidien. Il est donc important pour la diaspora de s'intéresser à la politique. » À écouter aussiBelgique: la politique africaine de l'UE vue par les candidats issus des diasporasAux manettes, Christian Lusakweno, fondateur de Top Congo FM et présentateur phare de la chaîne, qui a pensé une couverture de la campagne à destination de la diaspora pour les élections régionales, fédérales et européennes qui ont toutes lieu le 9 juin en Belgique. « Ce sera l'occasion de savoir ce que les partis traditionnels font par rapport aux communautés allochtones, explique-t-il. Que ce soit par rapport au logement, au travail, à la migration. Mais aussi en termes de coopération avec la RDC, ainsi que leur point de vue sur ce qui se passe entre la RDC et le Rwanda et dans la région des Grands Lacs. »Mais les émissions s’adressent également aux Congolais de RDC : « C'était intéressant pour un média du Sud de casser l'habitude des médias du Nord qui suivent les élections du Sud. Là, ce sera un média du Sud qui suit les élections du Nord », s'enthousiasme-t-il.Pour Marceline Lukala, qui est venue assister à l’émission, cette élection revêt une importance particulière. « Nous habitons la Belgique, c'est notre terre d'accueil, explique-t-elle. Et nous devons participer au développement socio-économique et politique de ce pays. C'est normal. Alors, nous irons voter pour ceux qui sont attentifs à la vie de la diaspora congolaise. Parce que ces gens-là font les lois. Et si nous ne votons pas, nous allons subir les lois. » Au niveau belge, elle souhaite davantage de mesures pour l’emploi des jeunes et au niveau européen, des initiatives pour mettre fin au conflit dans l’est de la RDC.À lire aussiÉlections européennes: en Belgique, les partis politiques courtisent les communautés africaines
6/7/20242 minutes, 15 seconds
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Belgique: la politique africaine de l'UE vue par les candidats issus des diasporas

En Belgique, presque tous les partis, à l’exception de l’extrême droite, font désormais une place aux candidats issus des diasporas africaines. C’est surtout vrai pour les communautés d'origine marocaine et congolaise. Alors, à quelques jours des élections européennes du 9 juin, que disent ces candidats de la politique de l’Union européenne en Afrique ? De notre correspondante à Bruxelles, On rejoint Abdelrhani Belhaloumi devant le Parlement européen, où ce Belge, d’origine marocaine, a siégé au Conseil communal de Saint-Gilles, à Bruxelles, avant de se lancer dans la course aux européennes, où il est quatrième sur la liste des Engagés, un mouvement de centre-droit.En ce qui concerne la politique africaine de l’Union européenne, il salue ce qui a été fait dans le cadre des accords de Cotonou, mais souhaite que les eurodéputés tendent davantage l’oreille aux revendications de la société civile africaine. Selon lui, celle-ci « insiste pour que les Africains puissent relever des taxes sur les matières premières, faire attention à la pêche industrielle. Dans la diplomatie de l'eau, la société civile demande que l'on fasse un peu plus. » À écouter aussiLes Européens vont-ils convaincre les Africains avec leur nouveau partenariat ?Dorcas Kayembe Stamili, 32 ans, est belge d’origine congolaise et cinquième sur la liste du Parti socialiste. Elle a construit sa campagne autour de la lutte contre les discriminations et pour le respect des droits humains dans le monde. Avec, en ligne de mire, le conflit dans l’est de la République démocratique du Congo et les relations entre l’Union européenne et le Rwanda, qui soutient le groupe rebelle M23, actif dans cette zone.« Quand on voit, par exemple, que l'Union européenne signe un protocole avec le Rwanda sur les minerais stratégiques, cela pose question, estime-t-elle. La communauté congolaise de Belgique le remarque et le constate. Je pense que l'Union européenne doit réaffirmer ses valeurs humanistes pour être beaucoup plus cohérente dans ses actions et permettre aux gens d'adhérer à nouveau au projet européen. »Douzième sur la liste des démocrates flamands, Chancelvie Okitokandjo, elle aussi d’origine congolaise, plaide pour des partenariats gagnants gagnants entre l’Afrique et l’Union européenne. « Il faut des partenariats équitables, de même niveau, appelle-t-elle de ses vœux. Les deux parties doivent gagner dans ces partenariats. Cela va aider l'Europe comme cela va aider l'Afrique à se développer, faisant en sorte qu'une stabilité puisse s'y installer. »Pour cette candidate, la diversité sur les listes électorales reste le meilleur moyen de lutter contre la montée de l’extrême droite. Reste à savoir si les candidats issus des diasporas pourront accéder à l’hémicycle, rares sont ceux dépassant la quatrième place sur les listes… Or la Belgique n’a que 22 eurodéputés, et jusqu’ici pas plus de deux ou trois par parti.À lire aussiÉlections européennes: en Belgique, les partis politiques courtisent les communautés africainesÀ voir aussiSommet Union africaine-Union européenne 2022: deux continents, des priorités différentes
6/6/20242 minutes, 26 seconds
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Élections européennes: en Belgique, les partis politiques courtisent les communautés africaines

En Belgique, les listes électorales en vue des élections du 9 juin font la part belle aux candidats issus des diasporas africaines, notamment marocaines et congolaises. C’est surtout vrai pour les élections régionales et fédérales, mais ça l’est aussi pour les élections européennes. Une chose est sûre, les partis politiques belges se sont emparés des enjeux de « diversité » et sont décidés à aller chercher les voix dans les différentes communautés.   De notre correspondante à Bruxelles, Matonge, le quartier congolais de Bruxelles avec ses magasins de produits cosmétiques, ses épiceries aux étals remplis de bananes plantain et ignames et ses salons de coiffure. À quelques jours des élections européennes, les vitrines y sont tapissées d’affiches de campagnes, notamment à l’effigie de candidats issus de la diaspora africaine.Pas de quoi convaincre cette mère de famille d’origine congolaise venue pour une manucure. Elle est fatiguée des visites des politiciens dans le quartier. « On a vu Pierre Kompany, devenu en 2018 le premier maire noir de l’histoire de la Belgique, on a vu le ministre de l’Intérieur, on a vu un autre ministre dont j’ai oublié le nom. On a vu beaucoup de personnes venir parce qu’ils savent qu’ici, il y a la communauté belgo-congolaise, qu’il y a beaucoup de monde et ils espèrent qu’on votera pour eux. Moi, je ne cherche ni un Noir ni un Blanc. Je veux simplement un candidat qui réalise ce qu’il promet », explique-t-elle.Un peu plus loin, Ali déjeune avec des amis. Lui aussi dénonce les stratégies des partis qu’il juge purement électoralistes, avec une diversité de façades : « Leur stratégie pour moi, c’est propulser des personnes marocaines ou congolaises pour attirer des voix. Mais les personnes qu’ils ramènent, je vous le dis franchement : elles ne sont pas du tout imprégnées dans la communauté. On ne les connaît pas. On les voit arriver, on en rigole presque. C’est une stratégie, mais ils ne sont pas encore prêts. »Attirer l'électorat des diasporasEn Belgique, le vote communautaire est une notion polémique agitée à droite, au sujet de ce qui est décrit comme un « vote musulman », présenté plus à gauche comme un enjeu de représentativité et de diversité. C’est en tout cas devenu une donnée du jeu politique depuis une vingtaine d’années. Marco Martiniello, directeur du Centre d’étude de l’ethnicité et des migrations à Bruxelles : « Tous les partis finalement se sont dits : “il y a un élargissement de l’électorat. Il y a un électorat diasporique ou issu des minorités. Et nous allons essayer de l’attirer à nous”. Et une des manières de le faire, ça a été de mettre en avant des candidats issus de ces populations. Mais derrière, il y a quand même cette croyance que l’être humain va voter naturellement pour quelqu’un qui lui ressemble. Et je pense que c’est un postulat qui n’est pas entièrement vrai. Les choses sont beaucoup plus compliquées que ça. Mais il faut quand même en tenir compte, puisque cela joue tout de même dans les choix électoraux, et dans les stratégies des partis. »Mais le chercheur note que ces stratégies sont davantage mises en place aux élections locales, régionales et fédérales en Belgique. Ce qui questionne l’importance accordée à l’échelon européen par les partis, mais aussi par les candidats issus des diasporas.
6/5/20242 minutes, 27 seconds
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Sommet Afrique-Corée: le «choc culturel» des étudiants africains partis étudier en Corée du Sud

Séoul organise en ce moment un sommet Corée-Afrique. Une grande opération séduction qui rassemble une trentaine de leaders du continent et 48 délégations dans la capitale sud-coréenne et une initiative importante de la diplomatie sud-coréenne qui cherche à étendre son influence et les partenariats en Afrique. Parmi ceux déjà existants, il y a des bourses, dont peuvent bénéficier de jeunes Africains, pour venir étudier dans les universités sud-coréennes. De notre correspondant à Séoul,Le campus de la très prestigieuse université Yonsei s’est paré aux couleurs de l’Afrique. Tanzanie, Maroc, Kenya, Ghana... Des stands préparent les spécialités culinaires et culturelles de chaque pays, tandis qu’une poignée d'artistes offrent aux coréens interloqués, le spectacle des danses traditionnelles du Burundi.Un événement organisé par l’association des étudiants africains de Yonsei à l’occasion du sommet Corée du Sud-Afrique, dans lequel Abir Zitouni place beaucoup d’espoir. « J’espère que ça va ouvrir l’opportunité pour des étudiants en Afrique d’avoir des bourses. J’aimerais bien que ça soit un échange, par exemple en Afrique, on a beaucoup de connaissance sur l'agriculture, en revanche la Corée est plus industrialisée. Ça peut être bénéfique d'avoir ce genre d'échanges culturels », se réjouit-elle.Un modèle à suivreCes étudiants venus étudier en Corée du Sud font du pays un modèle à suivre dans plusieurs domaines, comme l’expliquent l’éthiopienne Sapril Kerubo et le Tanzanien, Felician Pacompagassa. « Je pense que leur économie est vraiment efficace, car chaque secteur est rationalisé et en ligne avec la politique. Et sur le plan de la sécurité, ils doivent être à plus de 100%. Pour moi, c'était un vrai choc culturel ! », s'exclame Sapril. « La technologie et le secteur médical sont très avancés, ils sont particulièrement compétents pour contenir le développement de maladies infectieuses, c’est pour ça que j’ai choisi la Corée », explique Felician.L’histoire du pays en fait un partenaire de choix pour le Ghanéen Franck Ada. « La Chine, les Européens, les Américains sont plus présents en Afrique. Mais quand vous regardez la nature de la nation coréenne, leur développement a été très rapide. Donc, je pense que les pays africains ont beaucoup à apprendre du succès sud-coréen qui peut être d’une aide pour rattraper leur retard. »Pour Ayoub, jeune étudiant marocain, le vécu commun de la colonisation doit permettre de faire émerger des partenariats d’autres natures. « Les pays africains ont perdu récemment la confiance dans les pays européens et sont à la recherche de partenariats avec d’autres pays. La Corée du Sud n’a pas cette histoire impérialiste, eux aussi ont dû subir la colonisation de la part du Japon et donc, cela leur permet d’avoir une confiance plus importante qu’avec les pays européens ou nord-américains. »Un argument historique mis en avant par les autorités sud-coréennes. Reste désormais à transformer les paroles en actes.À lire aussiSommet Corée du Sud-Afrique: Séoul passe à la vitesse supérieure dans ses relations avec le continent
6/4/20242 minutes, 12 seconds
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Ouganda: les difficultés d'accès au logement pour les personnes LGBT+ [2/2]

Deuxième volet de notre série sur la situation des personnes LGBT+ en Ouganda. Il y a un an, fin mai 2023, les autorités ougandaises promulguaient la « loi anti-homosexualité », considérée comme parmi les plus répressives au monde dans la criminalisation des communautés LGBT+. Les autorités assurent vouloir faire barrage à l’homosexualité, considérée comme une importation de l’Occident, mais les militants de la cause LGBT+ dénoncent des discours homophobes qui ont accompagné le vote de cette loi. Une des conséquences : la hausse des évictions. De notre envoyée spéciale à Kampala,En racontant son histoire, Boutras est envahie par l’émotion. Après s’être retrouvée à la rue, rejetée par sa famille, cette personne transgenre a fondé une organisation pour soutenir sa communauté. Nous rencontrons Boutras sur la terrasse d’un foyer qui héberge plusieurs de ses pairs.« Depuis le vote de la loi, j’ai été attaquée et harcelée. J’ai été chassée de logements que je louais, notamment parce que j’accueille des personnes LGBT+ dans le cadre de mon travail, ce qui attire l’attention et des plaintes suivent. Nous devons bouger constamment pour des questions de sécurité. J’ai déjà eu des personnes qui lancent des pierres sur mon toit », déplore Boutras.L’HRAPF, une ONG de défense des droits humains en Ouganda, a recensé 268 cas d’évictions de personnes LGBT+ depuis la promulgation de la loi. John Grace en a vu les conséquences, en tant que coordinateur de l’Uganda Minority Shelters Consortium, organisation qui regroupe plusieurs foyers pour les personnes LGBT+.« Nous avons constaté une hausse importante des demandes d’hébergements d’urgence depuis que la loi a été promulguée. Cette tendance est une source d’inquiétude, car, plus il y a de personnes regroupées dans un même logement, plus il est difficile de le gérer et plus il est visible, ce qui pose des questions de sécurité. Nous avons déjà eu des descentes de police dans plusieurs foyers », explique-t-il.Un climat de surveillanceJusqu’à peu, sous la loi « anti-homosexualité », tout propriétaire dont le logement était, à sa connaissance, utilisé pour des actes sexuels entre personnes de même sexe encourait jusqu’à sept ans de prison. La Cour constitutionnelle vient de rejeter début avril cette section, suite à un recours déposé par plusieurs organisations. Mais ses opposants dénoncent une loi qui a encouragé une atmosphère de surveillance. Par précaution d’ailleurs, John nous reçoit à son domicile, les rideaux tirés.« Pour l’instant, nous n’avons pas vu la tendance aux évictions s’inverser. J’ai peur que cette décision ne reste que des paroles en l’air. Nous avons déjà vu des acteurs non étatiques faire leur propre loi. Même ceux qui payent leur loyer se retrouvent face à des propriétaires qui leur disent ne pas vouloir d’eux dans leur logement, précise John Grace. Pour moi, il faut s’attaquer directement à ce problème. Car tant que de nouvelles personnes continueront de se retrouver à la rue, cela restera difficile pour nous de répondre à tous les besoins. »À travers son organisation, John tente d’organiser des processus de réconciliations avec les familles des personnes LGBT+ qui se sont retrouvées à la rue. Mais avec peu de succès pour le moment.À lire aussiOuganda: les conséquences de la loi anti-homosexualité sur la santé [1/2]
6/3/20242 minutes, 14 seconds
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Ouganda: les conséquences de la loi anti-homosexualité sur la santé [1/2]

Fin mai 2023, les autorités ougandaises promulguaient la « loi anti-homosexualité ». Tout acte sexuel entre personnes de même sexe est passible de prison à vie, les cas considérés « d’homosexualité aggravée » de peine de mort, et toute personne considérée comme faisant la « promotion de l’homosexualité » encourt jusqu’à vingt ans de prison. Le but : faire barrage à l’homosexualité, considérée comme une importation de l’Occident, mais les militants de la cause LGBT+ s’inquiètent des conséquences sur l’accès aux soins de santé pour cette communauté déjà très stigmatisée. De notre envoyée spéciale à Kampala,Depuis la rue, impossible de savoir qu’une clinique se niche dans cet immeuble, en plein Kampala. Si sur ces réseaux sociaux, le lieu se revendique comme un établissement dédié à la santé des personnes LGBT+, sur place la discrétion est de mise. Brian Aliganyira est le fondateur, il joue le rôle du guide. « Ici, c'est la salle du médecin et aussi la salle d’examen où nous gardons certains médicaments, comme des antirétroviraux. Ainsi, le médecin peut faire son examen, prescrire des médicaments et même les donner directement au patient, ce qui apporte une meilleure confidentialité. »Depuis le vote de la loi il y a un an, les organisations de défense des droits humains dénoncent une hausse des agressions envers la communauté LGBT+. Un climat de peur qui rend le travail plus difficile au sein de la clinique. « Nous avons dû nous préoccuper de la sécurité de la clinique de manière croissante, par rapport aux soins de santé. Certains patients ont peur de venir, par crainte de ce qui peut leur arriver. D’autres nous demandent de leur envoyer ce dont ils ont besoin, déplore Brian Aliganyira. Alors oui, nous pouvons faire livrer des autotests, des préservatifs, du lubrifiant, mais un docteur ne peut pas faire d’examens à distance. Et même le personnel de santé démissionne, affirmant ne pas pouvoir travailler dans ce climat de peur. Ils me disent qu’ils ont peur chaque jour que quelqu’un vienne les arrêter. En un an et demi, cinq personnes ont démissionné. »Prévention contre le VIH plus difficileAu cœur des inquiétudes : la lutte contre le VIH. C’est ce qu’explique Richard Lusimbo, le directeur général de l’UKPC, un consortium d’organisations de soutien aux minorités dans l’accès aux soins de santé. « La prévention du VIH est rendue plus difficile. Notamment, car iI est devenu compliqué pour ceux qui sont sous traitement antirétroviraux de les obtenir. Or, si ces personnes arrêtent leur traitement, cela augmente les possibilités d’exposition au VIH. De plus, les personnes qui sont en possession de lubrifiants, préservatifs ou même PrEP sont stigmatisées et si elles sont arrêtées, risquent d’être accusées de promouvoir l’homosexualité, alors que ce sont des produits essentiels à la prévention au sein de la communauté LGBT+. Tout ça risque donc de nous faire faire marche arrière dans la lutte contre le VIH », précise-t-il.Dès le vote de la loi, l’agence des États-Unis pour le développement international s’était inquiétée des conséquences que cette législation pouvait avoir sur la lutte contre le VIH en Ouganda. Elle avait dénoncé une « attaque déraisonnable » à l’encontre d’un groupe déjà marginalisé.À lire aussiLoi anti-homosexualité en Ouganda: un climat de peur permanente au sein de la communauté LGBT+
6/2/20242 minutes, 14 seconds
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«On n'a rien pu sauver»: au Kénya, le désarroi des agriculteurs qui ont tout perdu dans les inondations

Au Kenya, les inondations se poursuivent. Cette semaine encore, la vallée du Rift, dans l’ouest du pays, a été frappée par les intempéries. Ces hauts plateaux sont au cœur de l’activité agricole du Kenya. D’après les autorités, près de 68 000 hectares de terres arables ont été endommagés par les inondations dans tout le pays. Plus de 10 000 agriculteurs sont affectés et les autorités n’ont pas prévu de compensations. De notre correspondante à Nairobi,Alice se tient debout sur un tas de gravats. Cette agricultrice de 62 ans n’en revient toujours pas. Il y a un mois, l’effondrement d’une retenue d’eau à Mai Mahiu, à une centaine de kilomètres au nord de Nairobi, a emporté tout son village. « Je vivais ici. C'était ma maison et de l'autre côté, il y avait mes poules. Maintenant, on ne voit plus que de la boue et des arbres amenés ici par les eaux, rien d'autre. Avant, je dormais là-bas et travaillais. Mon cœur, en ce moment même, bat très fort. Quand je vois tout ce qui a été pris, c'est beaucoup », déplore-t-elle.Le drame de Mai Mahiu a fait 62 victimes et des centaines de déplacés. La plupart sont des agriculteurs, comme Mary, qui a perdu sa ferme et l’investissement de toute une vie. « Ma terre est complètement ravagée. Tout a été emporté et on n'a même pas espoir de pouvoir la restaurer. Le bétail a été emporté par les eaux, nous aussi, en plein milieu de la nuit. On n'a rien pu sauver, explique l'agricultrice. J'ai perdu presque 2,5 millions de shillings. J'ai perdu ma maison à quatre chambres, des réservoirs pour les chambres, mon bétail, mes semences. J'avais investi beaucoup dans cette ferme. »Aucune compensation du gouvernementLa semaine passée, devant le Parlement, le ministre de l’Agriculture kényan a rappelé qu’aucune compensation ne sera fournie aux agriculteurs lésés par les inondations. Les fonds alloués à la réponse d’urgence ne le prévoient pas. Margaret est écœurée. Elle a perdu 950 poules et 26 cochons. « Nous n'avons reçu aucune aide, à part la nourriture au camp de déplacés. Le gouvernement a promis de nous reloger dans des appartements et de payer les trois premiers mois de loyer. Mais rien n'a été fait. On n'a pas reçu d'argent. Il y a juste un député qui est venu nous voir, il nous a donné 12 000 shillings en liquide, puis il est reparti. C'est tout ce qu'on a reçu, ça et la nourriture offerte par des bénévoles », précise Margaret.Le ministre de l’Agriculture a promis qu’une évaluation complète des terres agricoles endommagées serait menée, mais pas avant la fin de la saison pluvieuse.À lire aussiChangement climatique: l’Afrique de l’Est et australe entre intempéries et sécheresses
6/1/20242 minutes, 9 seconds
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Vivre au bord du Zambèze après trois années de sécheresse

Confrontée à l’une des pires sécheresses de son histoire, provoquée par le phénomène climatique El Niño, la Zambie vit une situation dramatique. En février dernier, le président Hakainde Hichilema, déclarait la Zambie en situation d’urgence et de catastrophe nationale, et s’en remettait à l’aide extérieure alors que le pays est en état de faillite depuis 2020. Dans ce pays agricole, environ 80 % des récoltes de maïs ont été décimées. La malnutrition touche de nombreuses familles et près de la moitié de la population (10 millions de personnes) est en insécurité alimentaire. Dans le district de Siavonga, tout au sud du pays, au bord du fleuve Zambèze, la situation est particulièrement critique. De notre envoyé spécial à Siavonga,Le décor est sublime avec au loin les collines du Zimbabwe. Mais le calme ambiant qui règne au bord du fleuve Zambèze, témoigne d’une situation tragique. Richard Mulopendé est pêcheur : « Il n’y a plus de poissons et on nous interdit les filets de petites mailles. Et avec la sécheresse, il n’y a pas de récoltes. La vie est vraiment dure ici. » Peuvent-ils manger tous les jours à leur faim ? « Parfois, on mange. Et parfois, on reste un ou deux jours sans manger », répond le pêcheur.Un peu plus loin, des femmes font la vaisselle. Itai a 22 ans et trois enfants. « Il ne pleut plus, parce qu’on coupe du bois pour faire du charbon ». Mais alors pourquoi coupent-ils les arbres ? La question est provocatrice. La réponse fuse. « Parce qu’il faut bien nourrir les enfants. On n’a pas le choix. »Comme Itai, des milliers de Zambiens survivent en vendant du charbon alors qu’ils ont conscience que la déforestation favorise la sécheresse. À 500 mètres du fleuve, Roger Chimambo, chef d’un village d’agriculteurs, témoigne. « Avant, ça allait bien. On avait des récoltes et on mangeait tous les jours. Mais là ça fait trois ans qu’on n’a rien récolté. La vie est devenue très dure, on n’a plus rien à manger. » À lire aussiEn Zambie, El Niño questionne le business des semencesDe la malnutrition au choléraConséquence inéluctable, le retour de la malnutrition infantile. Charity Chizyuka, unique infirmière pour 1 600 habitants, décompte les hospitalisations dans son dispensaire.« On a eu trois cas de malnutrition le mois passé, et un, ce mois-ci. Ce qui signifie que la malnutrition augmente », indique l'infirmière. « Si on a un nouveau cas par mois, c’est qu’il y a un problème. Et parfois les enfants rechutent. On voit les mêmes enfants qui reviennent parce qu’il ne pleut pas et qu’il est impossible de cultiver. Certains ont des petits jardins, mais les hippopotames viennent tout ravager. Donc, c’est compliqué pour nous. Ça fait quatre que je suis ici et quatre ans que les gens n’ont pas assez à manger. » En février dernier, Charity Chizyuka luttait contre une épidémie de choléra. Elle craint à présent l’arrivée de la saison sèche et une flambée de paludisme. Ainsi va la vie au bord du Zambèze, avec la sécheresse et son cortège de maladies.À lire aussiChangement climatique: l’Afrique de l’Est et australe entre intempéries et sécheresses
5/31/20242 minutes, 13 seconds
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RDC: sur le lac Tanganyika, les inondations compliquent la navigation [2/2]

À Kalemie, à l’est de la RDC, les pluies abondantes enregistrées ces derniers mois rendent la navigation très complexe sur le lac Tanganyika. Tous les ports construits le long de ce lac, le deuxième plus grand d'Afrique, sont inondés, notamment du côté de la RDC. Ce qui rend difficile la circulation des biens et des personnes.  De notre envoyée spéciale à Kalemie,Au port de Kalemie, une dizaine de bateaux sont amarrés. Le quai est invisible, il est sous l’eau. Pas aisé pour les armateurs d’accoster, explique Judes Musa, capitaine du bateau MV Okako, arrivé de la cité d’Uvira, dans le Sud-Kivu :« Nous, qui naviguons entre le port de Moba, de Kalemie, et même d’Uvira, nous sommes en difficulté. Tous ces ports sont submergés. Il faut beaucoup de manœuvres pour accoster, le quai est dans l’eau. Si tu ne fais pas attention, tu montes sur le quai et le bateau est endommagé. »Trouver des solutions pour pouvoir accosterLe chef du port, Richard Mwanana, en est conscient. Il envisage un balisage le long du quai :« Nous cherchons à rencontrer les agents de la RVF (Régie des voies fluviales) afin qu’ils placent ici des signaux ; parce que c’est très dangereux pour le moment. Le capitaine peut heurter facilement le quai. L’eau est au-dessus du quai et quand il y a des vagues, l’eau monte. »Plus au sud, le quai du port de Moba est le plus affecté. Les armateurs menacent de suspendre le déplacement vers ce port qui, pourtant, est l’un de ceux qui approvisionnent la ville de Kalemie en produits agricoles. Comme l’explique encore Jude Musa, le capitaine du bateau Okako : « Lorsque nous arrivons à Moba, un homme se place sur le quai qui est sous l’eau. Il nous guide afin d’accoster. »Le capitaine détaille la manœuvre : « Petit à petit, on avance, puis on jette la corde, et lui va descendre sous le quai en nageant afin d’amarrer le bateau. Par la suite, les pirogues vont transporter les passagers jusqu’au rivage. C’est pénible et là, nous allons suspendre la navigation vers Moba. »Des conséquences économiques pour les ports submergésSi la communication par bateau est coupée entre le port de Moba et les autres ports de la région, la cité va connaître d’énormes conséquences économiques. Ce que craint André Yumba, vice-président du patronat à Kalemie : « Si les bateaux ne vont plus à Moba, la population n’aura plus d’autres moyens pour s’approvisionner en différents produits manufacturés qui proviennent d’autres régions. » Pour lui, il ne reste qu'à prier pour la décrue du lac :« Ainsi, il y aura de l’espoir de récupérer le port de Moba. »Pour l’heure, les bateaux qui accostent au port de Kalemie prennent plus de temps pour le chargement et déchargement à cause de la montée des eaux du lac. Ce qui ralentit le rythme de navigation sur le lac, indique le chef du port. 
5/30/20242 minutes, 16 seconds
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RDC: à Kalemie, la solidarité se met en place pour les victimes des inondations [1/2]

À Kalemie, dans la province du Tanganyika, 2 282 habitations sont soit inondées, soit endommagées en raison des fortes pluies et des inondations de ces derniers mois, selon le dernier rapport du Bureau de coordination des affaires humanitaires des Nations unies en RDC. Face au manque d’assistance humanitaire, une solidarité locale s’organise autour des victimes des inondations.   De notre envoyée spéciale à Kalemie, Mukuku, au nord de Kalemie. C'est l'un des villages qui accueille un grand nombre de sinistrés des inondations. André, le chef de la localité, explique : « Celle-ci est une maison nouvellement occupée. Et puis, il y a celle de notre frère qui est le directeur d’école. Tous ont fui les inondations. »À quelques mètres de la résidence du chef de la localité, trois jeunes gens déchargent des valises, des meubles et des ustensiles de cuisine d'une camionnette. Un habitant du village a cédé son chantier à madame Jeanne Feza, dont la maison est envahie par l'eau : « J’ai rencontré le propriétaire de la maison, il m’a autorisé de venir vivre ici avec mes enfants. J’ai vu que c’était un homme au bon cœur », confie Jeanne Feza. « Ce chantier n’avait ni toiture, ni portes. Nous avons enlevé les tôles, les portes et les fenêtres sur notre maison inondée et nous les avons placées ici, pour que la maison soit habitable. »37 740 personnes affectées par les inondations à KalemieUn peu plus au nord-est de Kalemie, dans le quartier Citira, Ermé Kalunga est occupé à finaliser son chantier. Il doit y loger ses parents, eux aussi ont été victimes de ces événements climatiques extrêmes : « Comme j’ai déjà construit ici et que je suis à 60 % des travaux, j’ai voulu que mes parents viennent habiter ici provisoirement. J’ai déjà acheté les portes. Je compte construire d’abord des toilettes qu’ils utiliseront pendant au moins quatre mois, en attendant l’arrivée de la saison sèche. À ce moment-là, je construirai des toilettes durables. »La solidarité autour des sinistrés dans la ville de Kalemie doit aller au-delà d'une simple assistance matérielle, indique pour sa part Christian Kirongozi. Il a accueilli chez lui, au quartier Kahinda, sa mère et sa sœur ainée. Leur maison était submergée : « Qu’est-ce que nous pouvons faire face à ça ?  Les récupérer, rester avec eux, essayer un peu de les consoler parce que c’est une circonstance indépendante de leur volonté. Là où ils étaient, ils ont laissé des biens de valeur… ». Il se veut rassurant : « On essaye de leur remonter [le moral] en leur disant que ce sont des choses qui arrivent... Il y a encore de l’avenir et on doit toujours garder l’espoir. »De janvier à avril 2024, la ville de Kalemie a enregistré 37 740 personnes affectées par les inondations, indiquent les Nations unies. À lire aussiInondations en RDC: «Aujourd'hui, la ville de Kalemie est coupée en deux»
5/29/20242 minutes, 14 seconds
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Sénégal: les enfants de plus en plus touchés par les problèmes respiratoires

À Dakar, ville très polluée, beaucoup d'enfants sont de plus en plus victimes de maladies respiratoires et d’infections pulmonaires. Après un épisode poussiéreux qui a recouvert la capitale le mois dernier, les cas se multiplient dans le service de pneumologie pédiatrique de l'hôpital Fann.
5/28/20242 minutes, 19 seconds
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Afrique du Sud: dans les communautés du KwaZulu-Natal, la médiation comme rempart à la violence

À l'est de l'Afrique du Sud, le KwaZulu-Natal est l'une des régions où les résultats des élections générales de mercredi sont les plus incertains. La zone est considérée comme à haut risque par la police, qui y a renforcé ses effectifs. Mais au niveau des communautés, tout un travail de médiation est également effectué pour appeler à l'apaisement, afin que les élections se déroulent le mieux possible. Il fait très chaud dans le petit studio de la radio Nongoma FM, alors que les représentants locaux des principaux partis politiques sont venus comparer leurs programmes, et débattre en zoulou.Le ton monte souvent, les esprits s’enflamment, mais tout reste sous le contrôle du présentateur, Welcome Ntombela. « Nous essayons de faire office de médiateur entre les différents partis, car comme vous le savez, il y a ici de nombreuses violences, expose-t-il. Donc ce débat était une bonne idée. Il y a quand même eu des tensions, venant notamment de la part des militants, qui essaient de nous contrôler, en faisant des signes à l’extérieur du studio ou comptant le temps de parole. »Les tensions sont multiples dans cette région orientale d'Afrique du Sud, notamment entre l’ANC et le parti zoulou de l'IFP, le Parti Inkatha de la liberté. Un affrontement qui remonte à la fin de l’apartheid et qui avait failli tourner à la guerre civile. Plus récemment, ce sont les assassinats politiques qui inquiètent, alors que le KwaZulu-Natal en a recensé 19 l’année dernière. Une région qui avait été aussi fortement touchée par les émeutes de 2021, qui avaient fait plus de 350 morts.Dans une église de la ville, l’évêque Bheki Buthelezi est venu superviser un atelier de sensibilisation à l’éducation civique. « Les endroits comme celui-ci sont la raison d’être de nos programmes, explique-t-il. Récemment, une conseillère municipale y a été tuée, elle est morte l’année dernière. Et la situation est aussi tendue avec le MK qui a fait sécession avec l’ANC, cela a changé l’atmosphère. Donc, nous concentrons toute notre attention pour que ces élections puissent être apaisées et libres pour les citoyens. »Les chefs traditionnels, qui continuent à être très respectés et suivis, ont aussi leur rôle à jouer, selon la reine Precious Thabisile Zulu, à la tête de la maison royale de eMatheni. « Avant que les partis politiques ne commencent à faire campagne, je pense qu’ils devraient se présenter aux chefs traditionnels, pour que l’on puisse ensuite en informer toute la communauté et appeler à la raison et à la tolérance, suggère-t-elle. En Afrique du Sud, on a encore besoin, selon moi, d’ateliers pour faire comprendre que l’appartenance de quelqu’un à un parti politique n’en fait pas un ennemi. »Les partis politiques ont en tout cas en tête l’importance cruciale de conquérir le cœur des Zoulous : la région a été particulièrement ciblée par les meetings et les porte-à-porte.À lire aussiÉlections générales en Afrique du Sud: gros plans sur trois régions-clés
5/27/20242 minutes, 10 seconds
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Élections en Afrique du Sud: Le Cap, vitrine de l'Alliance démocratique pour séduire les électeurs [1/2]

À trois jours des élections générales en Afrique du Sud, reportage au Cap dont l'opposition a fait sa vitrine. Avec sa bonne gouvernance, l'Alliance démocratique veut montrer que le pays tout entier pourrait être bien géré de la sorte, à condition de voter pour eux.  L'Alliance démocratique (DA) peut compter sur un atout de taille : le maire du Cap, la ville portuaire d'Afrique du Sud. Grand gaillard, jeune et sympathique, Geordin Hill-Lewis fait campagne, du porte-à-porte, alors que son mandat n'est pas en jeu. « Ce que j'aime le plus, c'est cela... Pas les bons déjeuners en ville, affirme-t-il. Il n'y rien de mieux que de rencontrer les gens chez eux. »Le maire est ici dans sa zone de confort, dans un quartier de la communauté métisse, majoritaire dans la province et fidèle à l'Alliance démocratique. « Bien sûr que je suis électeur DA ! s'exclame fièrement Steven, rencontré au cours du tractage. Je n'ai pas peur de le dire, regardez notre quartier, c'est propre. C'est ce qui fait la marque de la DA, mais pas que : pas de problèmes, pas d'ennuis, c'est le principal ! »Le maire du Cap admet qu'il fait plus facile de faire campagne ici qu'ailleurs : « On ne prend rien pour acquis, explique-t-il. C'est ce qui fait la différence avec nous, on apprécie chaque vote, car chaque vote peut faire la différence entre notre victoire et notre défaite. Donc, on doit considérer chaque électeur avec sérieux, au contraire de l'ANC qui ne s'intéresse pas aux gens. »À lire aussiAfrique du Sud: au dernier jour de campagne, l'opposition veut «clore le chapitre du règne de l’ANC»Le Congrès national africain, l'ANC, au pouvoir à l'échelle nationale, a perdu la province depuis quinze ans. Cameron Dugmore, chef de l'opposition provinciale, contredit le discours qui fait de la province la vitrine de l'Alliance démocratique. « Quand ils prétendent que la province est bien gérée, on leur rétorque qu'elle l'est pour une petite élite, nuance-t-il. Elle ne fonctionne pas bien pour la majorité. Bien qu'il y ait des pauvres et des riches partout dans ce pays, ici, il y a presque une volonté délibérée de ne pas atteindre l'égalité dans l'accès aux services de base. »Loin dans les sondages, l'ANC ne devrait pas reprendre la main sur la province, sauf en cas de coalition. Le Cap est un symbole, siège de l'Assemblée nationale, qui échappe à l'ANC.À écouter aussiAfrique du Sud : les fractures socio-économiques au cœur des élections
5/26/20242 minutes, 12 seconds
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Côte d’Ivoire: la chanteuse Zélé de Papara, figure du Djéguélé Festival

La dernière édition du Djéguélé, le festival international du balafon de Boundiali, au nord de la Côte d’Ivoire, a innové cette année en mettant en place un programme de réflexion et de débat. Universitaires et festivaliers ont pu questionner l’œuvre et la vie douloureuse de la cantatrice ivoirienne sénoufo, Koné Zélé dite « Zélé de Papara », disparue il y a 30 ans.  De notre correspondant de retour de Boundiali,Avec sa tessiture et sa technique vocale unique, Zélé de Papara, chante les douleurs et les peines qui ont émaillé sa vie et a fini par porter au plus haut la culture Sénoufo. « C’est la première artiste sénoufo qui fut connu », relève Bassimira Koné. Cet ethnomusicologue s’est penché sur ce destin douloureux. Il en a tiré un film documentaire.Zélé de Papara, née en 1934, a perdu ses 11 enfants, tous fauchés avant l’âge de trois ans. Ce qui lui a valu des accusations de sorcellerie, et la répudiation du village de son mari. Elle est retournée vivre à Papara, emmenant dans sa voix ses traumatismes et ses chagrins. « Bien qu’elle ne soit pas allée à l’école, bien qu’elle ait vécu dans une société, parce qu’elle a été refoulée de sa communauté pour faits de sorcellerie, Malgré tout ces faits reprochés, explique Bassimira Koné. Trente ans après sa mort, on continue de parler d’elle, donc c’est une forme de féminisme qui ne dit pas son nom. Quand tu la vois dans ses œuvres, c’est quelqu’un qui promeut le fait d’envoyer les jeunes filles à l’école, ce qu’elle n’a jamais pu avoir, donc c’est une forme de combativité et de résilience »La première dans un orchestre d'hommesLa chanteuse enchaîne les prestations lors de funérailles, de baptêmes ou de mariages. Elle joue d’une petite percussion attachée à sa hanche et est accompagnée par des joueurs de balafon. Kassoum Kourouma, enseignant-chercheur en musicologie à l’université FHB d’Abidjan analyse sa situation à son époque : « Elle est d’abord dans une société où la femme a un rôle subalterne. Elle est dans une société senoufo, une société qui est très patriarcale. Elle est la première femme qui réussit à intégrer un orchestre d’homme et ce n’est pas anodin ». Pour toutes ces raisons, l’universitaire est que « Zélé, c’est un modèle, c’est une pionnière en bien des domaines. »En 1987, elle est repérée par les programmateurs du Festival national des masques et des musiques traditionnelles de Yamoussoukro, et fait connaitre sa voix de contralto au grand jour, elle donnera plusieurs concerts, sans jamais pouvoir vivre correctement de son art. « Et dans cette même musique, malheureusement, elle n’est pas sortie riche, elle est restée pauvre, elle est morte pauvre, elle n’a pas eu l’occasion de faire éclore ce qu’elle savait faire de mieux, ce qui est la musique, évoque le journaliste Silver Bossiei. Elle est restée dans ces conditions jusqu’à ce que la maison tombe sur elle, un beau matin. Jusqu’à ce jour, personne ne sait où se trouve sa tombe, elle est restée un mythe. »Elle meurt en 1994 sous les décombres de sa maison qui s’est effondrée. Il subsiste peu d’enregistrements de la chansonnière qui n’avait signé aucun album en studio.
5/25/20242 minutes, 56 seconds
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Maurice: le trésor caché du célèbre pirate La Buse sera-t-il enfin découvert?

À Maurice, les autorités s'apprêtent à entreprendre des travaux d'excavation sur un site qui pourrait révéler le trésor du pirate le plus célèbre au monde. Surnommé « La Buse », le pirate français Olivier Levasseur, est connu pour son attaque du navire La Vierge du Cap au XVIIIe siècle. Sept randonneurs mauriciens ont découvert par hasard sur la plage d'Albion, à l'ouest de l'île, d'étranges indices. Le site est désormais protégé et surveillé et les expertises archéologiques ont commencé. Sur la côte ouest de Maurice, un lieu peu connu du grand public commence à révéler ses secrets d’une autre époque. Un groupe de sept randonneurs, qui fréquentent le site depuis l’adolescence, a fait une surprenante découverte : « Je suis tombé nez à nez sur un rocher avec des signes. Ce jour-là, quand je l’ai découvert, j’ai dit à mes amis : ce n’est pas normal ces signes-là. Il faut faire des recherches. Ça correspondant à des signes de pirates. »Rajeev Alhodur et ses amis se sont lancés dans une incroyable aventure pour retrouver le trésor du pirate français. Ils croient fermement que le site cache un secret lié à Olivier Levasseur, surnommé « La Buse ». Ce célèbre pirate du XVIIIe siècle aurait, selon la légende, caché son butin dans une des îles de l’Océan Indien. Lors de sa pendaison à La Réunion, il aurait jeté à la foule un cryptogramme. Christopher Assirvaden est particulièrement captivé par une interprétation de ce manuscrit : « Les 17 lignes mentionnées dans le cryptogramme, vous pouvez les voir ici. Parmi elles, il y a un symbole fascinant nommé “l'homme endormi”. D'ici, si vous regardez bien la montagne là-bas, vous verrez l'homme endormi qui vous observe. »Droit à 50% du butinOlivier Levasseur est célèbre pour avoir capturé La Vierge du Cap, un navire richement chargé d'or et de diamants. En vertu de la législation mauricienne, celui qui découvre un trésor a droit à 50% du butin, tandis que l'autre moitié revient à l'État. À la suite de leur découverte, nos sept randonneurs ont été reçus par le Premier ministre de Maurice.Le dossier a été confié au Fonds national du patrimoine, qui a initié des évaluations archéologiques. La plus récente a été menée par le professeur George Abungu, ancien directeur du Musée national du Kenya : « Nous avons observé des signes d'activité humaine sur le site. La présence d'un trésor reste à confirmer. Seules des excavations et les études archéologiques approfondies pourront le dire. »Le Fonds national du patrimoine a mis le site sous surveillance jour et nuit. Son directeur Rajeev Dowlutrao y prévoit des fouilles : « Actuellement on fait une étude approfondie sur les codes et examinés les signes. Et par la suite, nous allons procéder avec les excavations. »Maurice, autrefois refuge de pirates et de corsaires, n'a jamais livré de trésor majeur malgré des recherches intenses. Le site récemment découvert à l'ouest de l'île est une trouvaille archéologique exceptionnelle. Quant au trésor, cela demande à voir.
5/25/20242 minutes, 25 seconds
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Éthiopie: sur les traces des réfugiés perdus

Avant la guerre, le Soudan accueillait plus d’un million de réfugiés venant d’autres pays en guerre. Érythréens, Congolais, Centrafricain, Burundais avaient trouvé un abri en sécurité dans le pays, jusqu’à ce que la guerre éclate il y a un peu plus d’un an. Pour la deuxième fois de leur vie, ils ont dû fuir la guerre. Nombre d’entre eux sont allés dans les pays frontaliers comme l’Éthiopie. Et en changeant de pays, ils ont perdu le statut de réfugié qui les protégeait auparavant. Sans ressources, ni protections, les difficultés se multiplient pour ces personnes en exil depuis de nombreuses années. De notre envoyée spéciale à Addis-Abeba,Majdi est arrivé en Éthiopie il y a six mois. C’est la deuxième fois qu’il fuit la guerre. Il a d’abord quitté la Centrafrique, où ses parents ont été assassinés à Bangui. « Pendant la guerre civile, j’ai perdu mes proches, mes parents. Si je restais là-bas, j’allais mourir. »Il fuit alors au Soudan, dans un camp de réfugiés à Khartoum. « Le gouvernement soudanais a accepté de nous donner la carte de réfugié et c’est à partir de là que j’ai poursuivi mes études », raconte-t-il.Majdi obtient une licence en linguistique. Il survit grâce à des petits jobs dans des restaurants, où il accumule de l’expérience professionnelle. Jusqu’au jour où la guerre éclate. « Ce que j’ai vu, c'est vraiment catastrophique. L’avion a bombardé la place sur laquelle on vivait, on a perdu des amis, des frères. Un massacre. »100 dollars par mois le visaAlors, il fuit en Éthiopie. Mais ici, son passeport de réfugié ne lui donne aucun droit. Il ne peut pas travailler et doit payer son visa 100 dollars par mois. Les dollars s’échangent très chers au marché noir, il ne peut pas payer. En situation illégale, il finit par se faire arrêter. L’immigration confisque son passeport et lui demande 260 dollars. Chaque jour, le montant augmente de 10 dollars de pénalité. Une situation impossible. « Actuellement, je me sens très mal à cause de ça. Je demande à la communauté internationale si elle peut m’aider à récupérer le passeport et me sortir de là. »À lire aussiÉthiopie: protestation de réfugiés soudanais attaqués dans leurs campsIsaac, lui, est arrivé il y a 10 mois. Il vient de la République démocratique du Congo, du Nord-Kivu, d’où il fuit la guerre en 2002. Il s’installe à Port-Soudan. « J’avais un statut de réfugié, j’avais le droit de travail, j’étais quand même bien, se souvient-il. J’avais un petit salon de coiffure pour hommes. »Un million de réfugiés Au moment de la guerre, il fuit en Éthiopie, mais comme Majdi, les autorités éthiopiennes refusent de l’enregistrer en tant que réfugié. « J'étais avec des Congolais, des Burundais… On enregistrait les Soudanais, mais nous, on ne pouvait pas. »Isaac travaille de temps en temps dans les salons de coiffure pour survivre avec sa femme et son enfant. Il n’a pas les ressources pour payer le visa. En situation illégale, il a peur : « Je voudrais aller là où je peux être reconnu comme un réfugié. Ou avoir le droit de travailler. Parce que je ne peux pas rester sans savoir quand la paix va revenir dans notre pays. »Difficile de connaître le nombre exact de ces réfugiés. Ils sont des centaines - probablement des milliers - à être arrivés en Éthiopie, situé au milieu de nombreux pays en guerre. C’est le troisième pays d’accueil d’Afrique avec un million de réfugiés enregistrés officiellement sur son sol.À lire aussiGuerre au Soudan: ces destins tragiques qui s’entremêlent dans le camp de réfugiés de Renk, au Soudan du Sud
5/21/20242 minutes, 23 seconds
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Soudan du Sud: dans la région de Tonj, l'impact des conflits communautaires sur la sécurité alimentaire [2/2]

L'explosion du nombre de personnes en situation de grave insécurité alimentaire est la conséquence du changement climatique et des inondations catastrophiques qui ont frappé le Soudan du Sud ces dernières années, mais elle est aussi le produit des conflits communautaires qui déchirent la région. Les heurts entre clans d’éleveurs, souvent liés à des vols de bétail, peuvent en effet devenir totalement hors de contrôle et faire de nombreux déplacés. Des morts sont souvent à déplorer du fait que ces gardiens de troupeaux portent des armes. Mais la région vit actuellement une période d’accalmie ; certains services médicaux, fermés à cause de l’insécurité, sont de retour, et les habitants tentent de développer l’agriculture avec l’aide d’ONG. De notre envoyée spéciale à Malual Muor,Baignés de l’intense lumière de fin d’après-midi, des garçons guident leurs vaches aux longues cornes sur l’immense plaine à ciel ouvert à Malual Muor, un lieu-dit situé à une dizaine de kilomètres au nord de la ville de Tonj.« Je m’occupe des vaches, c’est mon père qui m’a appris ce métier », raconte Ngor Majak, 16 ans. « C’est très facile et j’aime ça, car c’est avec ces vaches que, plus tard, je paierai la dot pour me marier ! »Le visage couvert de cendres blanches et djellaba à fleurs, Ngor Majak n’est jamais allé à l’école. Le bétail, c’est toute sa vie, pour le meilleur et pour le pire. « Quand quelqu’un essaie de venir voler vos vaches, il pourra essayer de vous tuer, ou bien, c’est vous qui le tuerez. Ça ne changera jamais, c’est notre mode de vie à nous, les éleveurs de bétail. Le gouvernement ne peut pas empêcher ces conflits », se résout-il.Son collègue du même âge, Chol Kau, n’est pas de cet avis : « Avec un contrôle des armes, et avec le développement de nos villages, ça pourrait s’améliorer, les gens pourraient changer de mentalité. Si le gouvernement pouvait désarmer les civils, en fait tout rentrerait dans l’ordre », pense-t-il.À écouter aussiSoudan du Sud: le bétail comme source de survie et de conflits« C’est quand les gens ont faim qu’il y a des conflits »À 80 km de là, dans le comté de Tonj-Est, le village de Mapara a été ravagé par les inondations, mais aussi par les conflits communautaires, en 2020. « Ces conflits, c’est toujours à cause du vol de bétail ou des enlèvements de filles par un autre clan », explique Dhor Gur, le chef du village depuis 48 ans. « Entre 2020 et 2022, ils ont fait beaucoup de déplacés, la nourriture était insuffisante ici à Mapara, vingt enfants sont morts de faim pendant cette période. Mais depuis qu’il y a une clinique, ça va mieux. »En 2023, l’ONG Amref Health Africa a installé une clinique sous une tente, qui traite, entre autres, la malnutrition infantile. Dans un potager-école mitoyen, les femmes du village sont formées pour faire pousser des légumes à la maison.Parmi elles, Nyandhier Ruop, 39 ans : « C’est quand les gens ont faim qu’il y a des conflits, comme pendant les inondations il y a quatre ans : nos voisins sont venus voler du bétail chez nous, et les violences ont commencé. Ce qu’il faut, c'est que le gouvernement maintienne la paix, car nous, les communautés, nous n’y arriverons pas toutes seules ».La communauté de Mapara espère voir le développement de services de base, dans ce village qui n’a ni école, ni centre de santé permanent, pour une population de près de 5 000 habitants. Mapara est, en outre, coupé du monde pendant la saison des pluies, et les habitants attendent avec impatience la construction d’une vraie route pour accéder au village.À lire aussiSoudan du Sud: la région de Tonj tente de faire face aux inondations
5/20/20242 minutes, 36 seconds
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Soudan du Sud: la région de Tonj tente de faire face aux inondations [1/2]

Au Soudan du Sud, la région de Tonj connaît des cycles de conflits entre différents clans d’éleveurs armés. La région également frappée par le changement climatique : depuis 2019, des inondations ont détruit les cultures, et en 2021, une situation de famine a même été déclarée par l’ONU. Avec les interventions humanitaires et le reflux des eaux, la situation s’est légèrement améliorée. Mais de nouvelles inondations menacent cette année, avec un niveau du Nil et de ses affluents, qui bat à nouveau des records. De notre envoyée spéciale à Mabior Yar,Pour venir à Mabior Yar, on emprunte la route qui trace vers le nord depuis la ville de Tonj et semble marquer la frontière entre deux mondes. À l’ouest, le village et ses grands arbres feuillus, son petit centre de santé, son marché.De l’autre côté, à l’est, c’est un paysage de désolation : une immense plaine désertée à cause des inondations. « Avec ma famille, nous avons quitté cet endroit en 2020, ça fait donc quatre ans. Les inondations ont été massives. Et elles ont apporté avec elles des maladies, des serpents, des moustiques… C’est devenu invivable par ici », explique James Gai Bok, un officiel du village.« Ces inondations nous pourrissent la vie »Pourtant, certaines familles réfugiées comme lui de l’autre côté de la route ont décidé de revenir. C’est le cas d’Adhieu Manyual Ater, une grand-mère accompagnée de son mari très âgé, de ses enfants et petits-enfants. Ils sont revenus construire un, puis deux tukuls, ici, un peu au milieu de nulle part, en décembre 2023. La seule eau disponible provient d’un puits creusé à la main…« Nous sommes très inquiets. Vous voyez, à l’intérieur de ma hutte, il n’y a rien, mon grenier est vide. Nous n’avons rien à manger », indique la grand-mère. « Cela fait quatre ans que ces inondations nous pourrissent la vie. Vous cultivez, et puis vous perdez tout à cause de l’eau. Nous avons besoin d’aide. »Sa belle-fille, Aluel Ajuang Anei, renchérit : « Avant les inondations, nous cultivions plein de choses : des courges, du sorgho, de l’arachide, du mil, de l’okra et de la khudra. Mais à cause de ces inondations, nous n’avons pas été capables de cultiver quoi que ce soit. »De nombreuses précipitations attendues cette annéeLa culture du riz a été introduite l’année dernière avec succès dans le village, mais cette famille n’a pas eu le courage de participer, pensant – à tort – que l’eau allait encore tout détruire. Les chefs de Mabior Yar tentent de guider les habitants en prévision des inondations.« Il y a déjà eu deux pluies, ça veut dire qu’il va pleuvoir beaucoup cette année », avance Angelo Magak Deng, responsable local. « Nous disons aux gens qu’il faut cultiver sur des terres surélevées. Les terrains qui sont bas et qui vont être inondés, il faut les laisser pour faire pousser du riz. »Des conseils très à propos : jeudi 16 mai, le ministère des Ressources hydriques à Juba a annoncé l’arrivée d’un volume d’eau très important dans le Nil, avec l’ouverture annoncée des vannes d’un barrage en Ouganda, dans les prochains jours.
5/19/20242 minutes, 22 seconds
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Le Maroc accueille les célébrations du 100ᵉ anniversaire de la Fédération internationale des jeux d'échecs

Le Maroc accueille ce week-end une étape des célébrations du 100ᵉ anniversaire de la Fédération internationale des échecs. Ce jeu, né en Inde, a traversé les époques et les continents, connait un regain de popularité, notamment depuis la pandémie de covid 19 et les multiples confinements. Sur le continent africain, il est souvent pratiqué mais peu développé, alors la Fédération Internationale souhaite encourager les gouvernements à investir. Reportage à Casablanca. À lire aussiLes échecs, outil de soft power À lire aussiEchecs: record du monde battu par le Nigérian Tunde Onakoya au profit de son association «Chess in slums»
5/19/20242 minutes, 31 seconds
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Madagascar: dans les coulisses de l’installation de l'exposition «Memoria, Récits d’une autre histoire»

S’il vous arrive de déambuler à travers les salles d’un musée ou d’un centre d’art dans votre pays, vous êtes-vous déjà demandé comment une installation artistique, exposée le mois précédent à Abidjan ou à New-York pouvait aujourd’hui apparaître sous vos yeux, exactement à l’identique ? Une prouesse, basée sur une collaboration et une relation de confiance tissée entre l’artiste et les équipes muséales en charge du montage des œuvres. Un travail de fourmi et de rigueur auquel notre correspondante à Madagascar a eu accès. À lire aussiÀ Madagascar, l'exposition «Memoria» pousse à s'interroger sur la manière de voir le monde Fondation H
5/17/20242 minutes, 24 seconds
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Rwanda: à Kigali, Ojemba connecte des développeurs africains à des entreprises internationales

Au Rwanda, la maison Ojemba a été inaugurée le 10 mai à Kigali. Ojemba, un projet né dans la capitale rwandaise, il y a un an, d’un partenariat entre un studio nigérian et une compagnie d’ingénieurs informatiques allemande. Une collaboration dont l’objectif est de connecter des entreprises européennes avec des développeurs informatiques du continent africain, où le secteur attire de plus en plus la jeunesse.  De notre correspondante à Kigali, « Ça c’est aussi une des salles, la plupart du temps c’est ShipZero qui travaille dans cette salle, et je suis parmi les gens qui travaillent sur ce projet ». Ibrahim Bagalwa, développeur congolais de 26 ans, fait partie du premier groupe employé dans la maison Ojemba à Kigali. Depuis son ordinateur, le jeune homme travaille sur l’application d’une entreprise basée à plus de 6 000 kilomètres du Rwanda. « ShipZero, c’est un prestataire de services logistiques basé en Allemagne dont l’objectif principal est de réduire l’empreinte carbone, explique Ibrahim. Ça fait quatre mois que je travaille sur ce projet. On est une équipe de trois développeurs Ojemba ».Les 27 développeurs d’Ojemba sont répartis sur une dizaine de projets pour des entreprises clientes, en majorité européennes. Tableau de bord de l’application sur le haut de l’écran, lignes de codes sur le bas, Ibrahim teste différents programmes. « Cette région ici n’est pas affichée comme il le faudrait. J’essaie un peu d’inspecter et de voir d’où vient ce problème et comment je peux le résoudre. Et c’est ça la bonne chose d’être développeur : quand on a un problème, on est parfois content, parce qu’à la fin de la journée, on a quelque chose qu’on a appris et que l’on a résolu. »Développeur, un métier attractifUne carrière qui attire de plus en plus sur le continent. Google estimait dans un rapport à 716 000 le nombre de développeurs en Afrique en 2021. Comme beaucoup, pour Arnold Mudosa, employé d’Ojemba depuis presque un an, les premiers apprentissages de code commencent sans formation : « J’avais un ami qui codait comme ça, et je me suis dit d’accord. J’ai commencé mes recherches pour comprendre comment on crée des applications, comment on crée des sites web. J’ai appris et j’ai kiffé. »L'objectif d’Ojemba, projet porté par le studio nigérian Maliyo Games et l’entreprise allemande MaibornWolff est d'ouvrir des portes pour de jeunes développeurs sur le continent. Le cofondateur, Hugo Obi : « La population jeune africaine est très importante, alors que l’Europe expérimente un vieillissement de sa population et que la demande de talents développeurs informatiques est plus grande que ce que le marché européen ne peut fournir. Nous avons beaucoup de talents sur notre continent qui cherchent des opportunités, alors nous voyons ce projet comme une collaboration gagnant-gagnant entre l’Afrique et l’Europe. »Prochaine étape : ouvrir de nouvelles maisons Ojemba dans d’autres pays de la région et étendre les compétences développées à d’autres secteurs, comme l’IA ou la robotique.À lire ou à écouter aussiChallenge App Afrique: le numérique au service de l'agriculture
5/16/20242 minutes, 32 seconds
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Centrafrique: la suspension du trafic des baleinières bloque l’économie du pays et fait flamber les prix

En Centrafrique, plusieurs centaines de voyageurs sont bloqués dans les différents ports de la capitale depuis deux semaines. Après le naufrage d’une baleinière qui avait causé la mort d'au moins 70 personnes et provoqué la disparition de plusieurs dizaines d'autres le 19 avril dernier. Le gouvernement centrafricain a dû temporairement suspendre les activités des baleinières jusqu'à nouvel ordre. Les conséquences de cette suspension se font déjà sentir. Reportage de Rolf-Steve Domia-leu au port Sao dans le 7ème arrondissement. À lire aussiCentrafrique: après le naufrage meurtrier de la baleinière, les habitants s'interrogentÀ lire aussiAprès le naufrage meurtrier d'une baleinière, la Centrafrique fait son deuil
5/15/20242 minutes, 8 seconds
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Le Royaume-Uni restitue temporairement au Ghana des trésors royaux volés pendant la colonisation

Des objets sacrés volés, pillés par les colons britanniques, enfin de retour après 150 ans d’attente. C’est ce qui s’est passé ce 1er mai au Ghana, dans la ville de Kumasi. Un moment chargé en émotion, qui a cependant souligné la complexité pour les peuples dépossédés de se réapproprier leurs patrimoines, les objets concernés n’étant pas rendus, mais seulement prêtés par les musées britanniques. De notre correspondant de retour de Kumasi,C’est sans mot, sans voix presque, qu’Emmanuel Ainkorose, 24 ans, assiste au retour de son histoire. 32 artefacts du Royaume Ashanti, pillés il y a 150 ans par les colons britanniques, enfin exposés chez lui, à Kumasi. Un témoignage du passé du Ghana, mais aussi de sa propre famille. « Je suis très heureux de voir l’épée du royaume, appelée Mpomponsuo, par laquelle bon nombre de mes ancêtres prêtaient allégeance à sa majesté, enfin de retour. Je crois que, lorsque l’on dépoussièrera l’épée, on pourrait même retrouver de l’ADN de mes ancêtres dessus ! »Ce sabre, mais aussi des colliers, de nombreux ornements et des insignes en or, utilisés alors pour purifier l'âme du roi. Des artefacts, sacrés pour beaucoup, qui devront néanmoins retourner au Royaume-Uni dans six ans, au plus tard. Ivor Agyemang Duah a été le négociateur du roi Ashanti auprès des musées britanniques. « Il y a deux lois majeures qui empêchent le retour permanent des objets. Cette complexité législative, qui encadre le retour des antiquités, est une source de débats depuis ces cinquante dernières années. »Une première étape En cause notamment, le British Museum Act, adopté en 1963. Une loi, qui n’a pas manqué de soulever certaines critiques parmi les Ghanéens, cela n’a pas échappé à l’actuel roi Ashanti, Otumfuo Osei Tutu le second. « Légitimement, certaines personnes se sont demandées, "Ces choses nous appartiennent, alors pourquoi est-ce que l’on nous les prête ?" Mais ce n’est pas la fin, je sais qu’il nous reste tant à faire, cela reste une première étape. Ce que nous avons ici, ces objets qui ont été pillés, volés, en 1874, à la disposition aujourd’hui de notre peuple, comprennent tout de même toujours l’esprit ashanti. »Si le retour permanent de ces objets depuis le Royaume-Uni n’apparaît pas pour le moment possible, beaucoup d’autres aspects doivent être en attendant améliorés. C’est le message qu’a tenu à adresser lors de la cérémonie d’ouverture l’historien Malcom McLeod, également négociateur auprès des musées britanniques. « La restitution, si elle est traitée seulement comme une fin en soi, sans suite, gâcherait une grande opportunité. Je pense qu’il est temps pour les musées les plus riches de rechercher activement des fonds pour aider spécifiquement les musées à l’étranger. Chaque musée doit traiter l’autre en tant qu’égal, pas en tant que supérieur ou subordonné. »Le Palais Manshyia a entamé de nouvelles négociations auprès de collection et musées britanniques, mais aussi sud-africains. Les représentants ashantis espèrent, ainsi, le retour d’une centaine d’autres artefacts pillés.À lire aussiDes trésors de la cour royale des Ashantis, pillés il y a 150 ans, de retour au Ghana
5/14/20242 minutes, 21 seconds
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Côte d'Ivoire: les commerçantes des marchés traditionnels initiées à la vente en ligne

En Côte d’Ivoire, les commerçantes des marchés traditionnels ciblent désormais les réseaux sociaux pour renforcer leur chiffre d’affaires. Au marché d’Anono, situé dans la commune de Cocody, les femmes apprennent de plus en plus à utiliser les médias sociaux tels que Facebook, WhatsApp ou TikTok, afin d’y proposer leurs produits. Les femmes d’un certain âge ne sont pas en marge. 
5/13/20242 minutes, 20 seconds
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Sénégal: à Dakar, un club de lecture organisé sur des thématiques liées au genre

Les clubs de lecture ont le vent en poupe depuis quelques années. À Dakar, l’initiative féministe et panafricaine Kimpavita, qui a déjà un festival, un podcast, et des projets de recherche, lance le sien autour de thèmes liés au genre. Lors de la dernière rencontre, c’est la dépigmentation de la peau qui a été abordée, avec une discussion autour de l’ouvrage Décolorés en présence de son autrice. Reportage
5/13/20242 minutes, 24 seconds
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Au Grand Sud malgache, des cliniques mobiles pour pallier les déserts médicaux

Dans les zones dépourvues de centres de santé, elles sont devenues le salut d’une partie de la population malgache. Les cliniques mobiles sont depuis quelques années déployées sur le territoire malgache. Dans le Grand Sud de l’île, ces gros camions équipés de matériel de santé et de personnel qualifié parcourent des milliers de kilomètres, pour venir à la rencontre d’habitants isolés, dont les moyens ne leur permettent pas de se déplacer vers des structures de santé.
5/11/20242 minutes, 23 seconds
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Soudan du Sud: au centre de transit de Renk, un espace sécurisé pour les réfugiées soudanaises

Dans son dernier rapport sur la guerre au Soudan, publié fin février, l'ONU dénonce les violences sexuelles perpétrées par les belligérants. Les femmes, les adolescentes et même des enfants en sont victimes. Le commissaire aux droits de l'homme, Volker Türk, considère ces violations comme des « crimes de guerre ». Dans le centre de transit pour les réfugiés de Renk, au Soudan du Sud, l'ONG IRC a mis en place un espace réservé aux femmes. Deux fois par semaine, elles se retrouvent pour échanger sur leurs expériences et tenter de libérer la parole.
5/10/20242 minutes, 22 seconds
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Cinéma en Centrafrique: le septième art fait sa révolution

En Centrafrique, le cinéma connaît une véritable révolution ces dernières années. Ce déclic est non seulement provoqué par la naissance de nombreuses sociétés de production privées, mais aussi le lancement, en 2020, du projet Ciné-Bangui. Cette initiative tenue par des experts de l'école nationale de cinéma de Lyon en France et l'Alliance française de Bangui, vise à former des talents pour le développement du cinéma centrafricain.  De notre correspondant à Bangui,Concentrés devant une dizaine d'ordinateurs, les jeunes réalisateurs et cinéastes travaillent sur des projets de film. Ils produisent et réalisent eux-mêmes des courts et longs métrages sur la culture, les coutumes, les richesses ou encore le quotidien des Centrafricains.« Le cinéma a toujours existé en Centrafrique. C'est vrai qu'il n'est pas beaucoup valorisé, mais il y a des gens qui ont toujours fait des efforts dans ce domaine », explique Daniel, cinéaste et technicien du son. « Le projet Ciné-Bangui a commencé en 2020. C'est un projet financé par l'ambassade de France, destiné à former les jeunes Centrafricains en cinéma. Grâce à cette initiative, beaucoup de personnes commencent à s'intéresser au cinéma centrafricain, avec une nouvelle génération qui est en train de faire en sorte que le cinéma soit consommé sur le plan national et international. »Un cinéma respecté et représenté à l'échelle internationaleLa Centrafrique possède aujourd'hui une centaine de cinéastes. Ils réalisent des films et participent à plusieurs festivals en Afrique et dans le monde, dont certains sont primés. Orphée Zaza est l'un d'eux.« Depuis cinq, six ans, la cinématographie centrafricaine est respectée et représentée à l'échelle internationale », souligne Orphée Zaza. « Nous avons par exemple le film Makongo qui a rencontré un grand succès au niveau international avec plusieurs prix. Nous avons aussi le film du cinéaste Rafiki Fariala. Nous, étudiants !, qui a gagné une centaine de prix et plus de 200 sélections à l'international. En tant que réalisateur, j'ai fait deux court métrages qui m'ont permis d'être visible en 2021 au Burkina Faso, au Fespaco. »À écouter aussiRafiki Fariala, réalisateur de cinéma centrafricainPour un financement centrafricain de son cinémaEn 2022, le film La sexualité pas avant le mariage de la jeune cinéaste Emmanuella Lalanga a été primé au festival « Bangui fait son cinéma » et projeté dans plusieurs salles en Europe. Malgré ces avancées, elle note des défis à relever. « En Centrafrique, il n'existe pas de commission pour financer les films. Tout le temps, on se tourne vers les commissions internationales pour chercher des financements », relate Emmanuella Lalanga. « Le film, c'est de l'argent. La cinématographie, c'est toute une chaîne avec différents corps de métier. Si on n'a pas de moyens, on ne peut pas faire de films », martèle-t-elle.Et pour rêver grand, Orphée Zaza propose une solution : « Il faut maintenant une implication politique, c'est-à-dire la création d'un fonds de production et de développement, pour permettre aux cinéastes de réaliser des films. Ce fond leur permettra aussi de faire des avances en vue de chercher des coproductions à l'international », plaide Orphée Zaza.Cependant, le tissu professionnel reste fragile. Les cinéastes n'ont pas toujours un accès facile aux acquisitions télé pour promouvoir leur film sur le territoire centrafricain et à l'échelle mondiale.
5/9/20242 minutes, 23 seconds
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Gabon: le PDG, ancien parti au pouvoir, se cherche un avenir

Suite au coup d’État d’août dernier au Gabon, un grand dialogue national s’est achevé il y a dix jours. Mille recommandations ont été proposées, notamment suspendre l’ancien parti au pouvoir PDG (le Parti démocratique gabonais), rendre inéligibles ses responsables, lancer des enquêtes contre des cadres ou encore leur faire demander pardon à la nation. Un PDG aujourd’hui à la croisée des chemins, lui qui a perdu le pouvoir et risque de lourdes conséquences si les conclusions du dialogue sont appliquées. À lire aussiGabon: l'ancien parti au pouvoir PDG en pleine incertitude sur sa gouvernance
5/8/20242 minutes, 30 seconds
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Cameroun: le musée des rois Bamoun «pour conserver notre histoire» [3/3]

Au Cameroun, le musée des rois Bamoun à Foumban dans l'ouest du pays retrace l'histoire d'un des plus anciens royaumes d'Afrique subsaharienne fondé en 1384. 600 ans d'histoire retracés grâce à des milliers d'objets exposés. L'occasion pour le peuple Bamoun de découvrir davantage son histoire. Ce musée des rois Bamoun est un cadre propice pour accueillir les objets d'arts Bamoun illicitement exposés dans des musées étrangers. Derrière la barrière du musée des rois Bamoun, Dave Kwende et ses camarades de 2de mixte au lycée classique de Foumban sont en admiration devant l’architecture atypique de ce musée.« Ça vous présente vraiment la valeur des Bamoun ici à Fouban, dont nous sommes vraiment très fiers de ces personnes qui ont eu cette idée vraiment magnifique de consulter ce musée par ici pour d’autres personnes qui vont aussi venir visiter et vont connaître que la culture des Bamoun. » Le bâtiment est construit sous la forme d’un serpent à deux têtes, surmonté par une mygale avec une cloche à l’entrée. À l’intérieur, vous êtes embarqué dans 600 ans d’histoire d’un des plus anciens royaumes d’Afrique subsaharienne.  Aziz Mbohou chargé de la communication du royaume. « Chaque roi, lorsqu’il accède au trône, consigne tous les objets de son prédécesseur. Et évidemment, Laurent Joya est l’une des figures de proue du royaume Bamoun. En termes d’inventivité, vous voyez son mollet, le moulin, à modo le maïs, les premiers manuscrits de l’écriture qu’il a inventée. Vous voyez ses ouvrages. »« L’émotion, c’est quand vous vivez votre passé »Dans la première pièce, la tunique du roi Mbombo, un colosse de 2 mètres a qui l’on doit le symbole du serpent à deux têtes est exposé, tout comme des armes, ustensiles et autres tenues centenaires, on y retrouve également une salle de projection. C’est une autre pièce qui a marqué José Yaneya animateur radio locale.« L’émotion, c’est quand vous vivez votre passé. Je vous prenais un exemple. J’ai vu le téléphone du roi Bombo entre ses mains. Maintenant, je vois ce téléphone déposé au musée. Ça me fait renaître quelque chose et vraiment c’est. C’est là où vous voyez un peu le rôle du musée. Ce musée, c’est pour conserver notre histoire. »À Foumban, depuis l’inauguration du musée, on espère le retour du trône des rois Bamoun illicitement exporté et exposé au musée de Berlin. Le sultan Nabil Mforifom Njoya actuel roi des Bamoun ambitionne de le rajouter à la collection des 12 500 objets et artefacts exposés dans le musée reflétant la richesse, la variété et le savoir-faire des artisans Bamoun.À lire aussiCameroun: les forgerons du royaume Bamoun, une notoriété qui traverse les frontières du pays [2/3]
5/7/20242 minutes, 15 seconds
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Cameroun: les forgerons du royaume Bamoun, une notoriété qui traverse les frontières du pays [2/3]

Dans le paysage culturel du royaume Bamoun, impossible de passer à côté des forgerons du bronze. À son âge d’or, leur art a attiré de nombreux touristes. Aujourd’hui, il y en a moins, tout comme le nombre de forgerons Bamoun qui a diminué, ces dernières années. Mais leur réputation ne faiblit pas au Cameroun. Et les œuvres majestueuses de ces sculpteurs du bronze illuminent toujours le centre d'artisanats de Foumban. À lire aussiCameroun: le métier de tisserand traditionnel bamoun est menacé [1/3]
5/6/20242 minutes, 16 seconds
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Cameroun: le métier de tisserand traditionnel bamoun est menacé [1/3]

À Foumban, capitale du royaume bamoun, dans l'ouest du pays, les tisserands traditionnels sont de moins en moins sollicités, concurrencés par les tissus industriels qui affluent en masse sur le marché. Mais des passionnés travaillent à la pérennisation d'un art ancestral qui se transmet depuis 600 ans, en famille, chez les Bamoun.
5/5/20242 minutes, 16 seconds
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Soudan du Sud: l'agriculture, refuge pour les malades du syndrome du hochement de tête [3/3]

Au Soudan du Sud, c’est une maladie mystérieuse et dévastatrice qui touche les enfants à partir de trois ans. Le syndrome du hochement de tête est une maladie neurologique qui évolue au fil des années vers une forme d’épilepsie, parfois mortelle. Les organisations qui se sont réunies au sein de la Nodding Syndrome Alliance, un consortium d’ONG et d’universités formé en 2019, ont mis en place une réponse pour aider les familles, dans trois localités de l’Équatoria-Occidentale, à l’ouest du pays.  De notre envoyée spéciale à Mundri,En cette fin d’après-midi, les cultivateurs font des allers-retours vers la rivière pour remplir leur arrosoir et irriguer leur potager. Ce groupe d’agriculteurs est un peu spécial : tous souffrent du syndrome du hochement de tête et d’épilepsie. Le groupe est soutenu par la Sudan Evangelical Mission, une ONG membre de la Nodding Syndrome Alliance. Des cliniques spécialisées fournissent des traitements antiépileptiques et des travailleurs sociaux accompagnent les malades et leurs familles. Des semences, des outils et des formations leur ont été fournis.Wilson Banyiri, la quarantaine, est épileptique depuis 20 ans. Le père de quatre enfants a toujours son tube de cachets blancs dans la poche : « Maintenant, je vais bien, en prenant ce traitement. J’en prends deux le matin et deux le soir. Je n’ai pas eu de convulsions depuis trois mois. »Ce potager, c’est tout ce qu’il a pour subvenir aux besoins de sa famille : « Ce qui me motive à venir travailler dur ici, c’est que je veux pouvoir financer l’éducation de mes enfants. C’est ma priorité. »Ailleurs à Mundri, Suzan Surah Dobili s’occupe seule de ses enfants. Son fils, Emmanuel Mande, a bien failli arrêter l’école, quand le syndrome du hochement a commencé. Il avait 12 ans, c’était en 2017 : « Avant que nous ayons accès aux médicaments, l’état de mon fils était très préoccupant. Il ne pouvait rien faire, ni travailler ni laver ses vêtements. Il restait à l’intérieur de la maison, très affaibli. Mais maintenant qu’il a ce traitement, il peut cultiver dans notre ferme familiale, il coupe de l’herbe pour refaire notre toit, il plante du manioc, il fait sa lessive tout seul. »« Les parents se demandent quoi faire »C’est grâce à Jacob Danger Brown, travailleur social, lui-même handicapé par la tuberculose dans son enfance, qu’Emmanuel Mande a pu bénéficier du soutien de la Nodding Syndrome Alliance depuis 2020. Le travailleur social parcourt les villages reculés afin d’identifier des cas et conseiller les familles. « Il y a beaucoup de cas de syndrome du hochement de tête en dehors de la ville. Les gens souffrent. Les parents se demandent quoi faire. Et ils échouent à aider leurs enfants. Parfois, dans un foyer, vous trouvez deux ou trois enfants qui ont la maladie… Ces gens n’ont pas l’argent nécessaire pour acheter des médicaments antiépileptiques, et même pour venir jusqu’à Mundri de leur village reculé, c’est très difficile. La situation de tous ces enfants est terrible. »Jacob Danger Brown en appelle aux donateurs, et au gouvernement, pour que des actions de plus grande ampleur soient menées, afin que les traitements soient disponibles dans les villages reculés.À écouter aussiSoudan du Sud: les ravages du mystérieux syndrome du hochement de tête
5/4/20242 minutes, 22 seconds
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Soudan du Sud: la médecine traditionnelle comme alternative contre le syndrome du hochement de tête [2/3]

Quelque 6 000 cas de syndrome du hochement de tête ont été estimés dans la région de l'Équatoria-Occidentale, au Soudan du Sud. Mais l’étendue de l’épidémie est mal connue, notamment du fait du manque d’infrastructures médicales. Le manque d’accès aux soins, et notamment aux médicaments antiépileptiques qui permettent de contrôler les symptômes de la maladie, pousse certains parents d’enfants malades à se tourner vers des herboristes, des médecins traditionnels. De notre envoyée spéciale à Mvolo,Tailleur de profession, Barnaba Makoy a appris à utiliser les herbes médicinales dans sa région natale de Wulu, dans le centre du pays. Suite à des conflits communautaires, en 2006, il est parti se réfugier à Mvolo. « La maladie est présente dans mon village d’origine, mais pas autant qu’ici. Nous utilisons des herbes pour la traiter. Quand mon fils a eu la maladie, je suis allé creuser pour déterrer certaines racines, et je les ai fait bouillir. Mon fils a bu cette infusion et a guéri. Il va bien et est aujourd’hui à l’école. »Barnaba Makoy montre l’arbre dont les racines sont pour lui un remède contre cette maladie du hochement de tête, que la science ne sait pas encore guérir. Il affirme même avoir guéri huit enfants.Reportage AfriqueSoudan du Sud: des familles lourdement affectées par le syndrome du hochement de tête« Je n'avais pas d'autre alternative »Martha Agum, la cinquantaine, a quant à elle utilisé une autre technique, dans le passé, pour soigner son propre enfant : « Vous faites bouillir les herbes, et plongez de longues feuilles dans cette décoction, que vous appliquez bien chaudes sur la tête du malade. La maladie est alors expulsée sous forme de transpiration. »Convaincue d’avoir ainsi guéri son fils, il y a quinze ans, pendant la guerre, elle conseille pourtant aujourd’hui aux parents d’aller à l’hôpital, pour bénéficier du traitement contre l’épilepsie qui atténue les symptômes. « Ce traitement qu’ils donnent à la clinique est le meilleur. Dans mon cas, je n’avais pas d’autre alternative. De nos jours, les gens ne croient plus trop dans les herbes. Il faudrait que les traitements modernes soient amenés au plus près des gens, dans les villages reculés. »Grand ReportageSoudan du Sud: les ravages du mystérieux syndrome du hochement de têteMise en garde contre le recours à la médecine traditionnelleDirection Mundri, autre ville touchée par le syndrome du hochement de tête, à 100 km au sud de Mvolo. Là-bas, une clinique spécialisée existe. Et la directrice de la santé du comté, Victoria Alawia Alberto, met en garde contre le recours à la médecine traditionnelle.« Nous ne savons pas comment ces herboristes dosent leurs prescriptions ni quels types d’herbes, ils utilisent, fait-elle valoir. En matière de santé, le dosage des médicaments est très important. Mais dans le cas de ces traitements par les herbes, il y a un risque que des malades y aient recours et meurent. C’est ce qui nous inquiète. C’est pourquoi nous souhaitons en savoir plus sur la pratique de ces médecins traditionnels. Pour que cela ne nuise pas à nos patients ni à notre communauté. »Victoria Alawia Alberto espère que la recherche scientifique avancera et qu’un traitement médical curatif sera un jour disponible contre le syndrome du hochement de tête.
5/3/20242 minutes, 24 seconds
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Soudan du Sud: des familles lourdement affectées par le syndrome du hochement de tête [1/3]

Au Soudan du Sud, dans la région d’Équatoria-Occidentale, une maladie à l’origine inconnue s’attaque aux enfants : le syndrome du hochement de tête. C’est un trouble neurologique qui démarre dès l’âge de 3 ans. Les enfants touchés se mettent à hocher de la tête au moment de manger, et perdent connaissance. La maladie s’aggrave dans les mois qui suivent, avec des crises d’épilepsie, des retards de croissance importants, qui laissent souvent les enfants et adolescents touchés handicapés. Reportage auprès de mères et de filles lourdement affectées, dans la petite ville de Mvolo. De notre envoyée spéciale à Mvolo,Sa récolte détruite par des vaches, Penina Monyo Gulu Biro n’a d’autre choix que de ramasser du bois pour le revendre et pouvoir acheter de quoi nourrir ses trois enfants. Délaissée par son mari, elle assume seule cette responsabilité. Mais elle est épuisée. Car deux de ses enfants souffrent du syndrome du hochement de tête, une maladie qui a déjà traumatisé cette famille. « Une de mes filles est morte de cette maladie il y a des années. Ça a démarré par le hochement de tête, et puis ça a empiré, les crises d’épilepsie ont commencé et elle en est morte », explique-t-elle.Son autre fille, Tabo, 17 ans aujourd’hui, a développé la maladie à son tour en 2016. Elle a survécu, mais les crises sont fréquentes et elle n’a pas de traitement efficace : « Je ne l’autorise pas à aller à la rivière toute seule, ou à rester près du feu sans surveillance. À l’intérieur de notre tukul [une hutte, NDLR], elle a son lit par terre, et moi, je dors sur un vrai lit, parce que si elle dort sur un lit, elle va tomber lors de ses crises nocturnes, je reste avec elle pendant la nuit au cas où », confie Penina Monyo Gulu Biro.À lire aussiSoudan du Sud : les ravages du mystérieux syndrome du hochement de têteUn fardeau pour les mèresSi toute la communauté souffre de ce mal mystérieux, ici à Mvolo, ce sont souvent les mères qui portent seules ce fardeau. C’est ce dont témoigne cette femme que nous appellerons Mary pour protéger son identité. Elle confie que son mari boit et ne travaille pas. Elle aussi, elle a perdu une fille à cause de cette maladie, en 2022. La petite avait 12 ans quand elle est morte, et était enceinte de deux mois. Un choc pour la famille.« Quand nous, les membres de la famille, avons découvert qu'elle était enceinte, nous lui avons demandé : mais qui est-ce qui t’a fait ça ? Elle a dit qu'elle ne pouvait pas vraiment dire qui était cet homme, qu’il avait "des vêtements colorés" et qu’il "venait généralement de cette direction". C'est le jour même où nous avons commencé à lui poser toutes ces questions que la maladie a commencé à s'aggraver. Les convulsions sont devenues violentes et ont continué, jusqu'à ce qu’elle meure. »Des malades victimes d'abus sexuelsLa mère de famille est en colère et n’hésite pas à dénoncer les abus sexuels sur les filles malades du hochement de tête à Mvolo : « Bien sûr, je peux conclure que c’est quelqu’un qui a commis un viol. Parce que cette personne n’est pas venue ouvertement se montrer. Le même cas s'est produit avec la fille de ma belle-sœur. Elle est tombée enceinte d'un inconnu et elle était très jeune aussi. Mais elle a pu aller au terme de sa grossesse. Elle a été emmenée à l’hôpital pour accoucher. Nous avons l'enfant ici avec nous, mais la fille de ma belle-sœur, elle, est morte lors d’une crise d’épilepsie. Elle est tombée dans l'eau et s’est noyée. »Son fils de 20 ans souffre aussi de la maladie. Il se tient à l’écart, l’air triste. Ce que Mary demande, c’est l’aide du gouvernement et des ONG, pour que des traitements efficaces soient disponibles pour aider les enfants malades à Mvolo.
5/2/20242 minutes, 36 seconds
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La prévention des AVC au Sénégal

Au Sénégal, une association de soutien aux patients et aux familles de victimes d’AVC vient de terminer une campagne d’un mois de sensibilisation et de prévention contre les accidents vasculaires cérébraux, première cause des décès du service neurologique de l’hôpital Fann de Dakar. Reportage  Sous deux tentes à l’entrée de l’hôpital Fann, des patients attendent leur tour pour être examinés par des infirmiers… Adama Cissé, habillée d’une blouse blanche, est en train de passer un tensiomètre autour du bras d’une femme âgée.L’hypertension et le diabète sont deux des principaux facteurs de risque d’un AVC – accident vasculaire cérébral — très courant au Sénégal.Amadou Diallo, ouvrier de 63 ans, a préféré se faire dépister pour pouvoir agir en cas de mauvais résultat : « La glycémie, c'est pas mal, ce n'est pas élevé ».L’association de soutien aux patients et familles de victimes d’AVC organise ces dépistages pour expliquer les démarches afin d’être pris en charge rapidement dès les premiers signes d’AVC. Car les produits ou le matériel pour prendre en charge les patients qui arrivent dans un état critique sont souvent indisponibles ou trop chers, regrette le neurologue Mbagnick Bakhoum.L’association organise des activités pour sensibiliser au sujet des facteurs de risque… comme la nourriture, explique Bamba Cissé, le secrétaire général de l'association. Celle-ci montre aussi aux familles comment prendre en charge une victime d’AVC qui revient à la maison avec des séquelles.
5/2/20242 minutes, 18 seconds
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Madagascar: lutter contre la transmission des stéréotypes de genre dans les métiers

Déconstruire les stéréotypes de genre rattachés aux métiers, c’est l’un des défis que s’est lancée une association malgache animée par des étudiants et de jeunes professionnels. La dizaine de jeunes intervient dans des écoles primaires, essentiellement en milieu rural, pour proposer une autre vision du monde du travail et de nouveaux horizons.
4/30/20242 minutes, 26 seconds
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Kawaï Nanami, la tiktokeuse qui veut réconcilier les jeunes Ivoiriens avec leur culture ancestrale

Une jeunesse déracinée, qui ne connait ni son histoire ni sa culture d’origine ? À travers ses vidéos sur Tik-Tok et Instagram, Ruth-Esther Yapobi dite « Kawaï » tente de réconcilier les jeunes avec la culture ancestrale des 69 ethnies du pays. De notre correspondant à AbidjanRuth-Esther Yapobi porte une robe en pagne tissée et des parures de cauris. « J’ai 20 ans et je me suis lancée dans la création de contenus en août 2023, et en mars 2024, j’ai commencé la série “Échos d’Ivoire” sur Tik-Tok et Instagram », explique-t-elle.Échos d’Ivoire évoque tout à la fois les rites et coutumes des ethnies ou encore les contes et légendes du pays. « On nous a racontés Cendrillon, La Belle et la Bête ou encore Mowgli, mais personne n’a parlé de Kouakou Ananse et pleins d’autres divinités que moi-même je ne connais pas. Et au fur et à mesure de mes recherches, je me dis : “Ah c’est une histoire captivante à raconter à mes petits frères, à mes amis”. »Ses vidéos sont portées par des montages dynamiques enrichis par des cartes, des photographies. Diplômée d’un BTS en logistique, Kawaï a récemment ressenti le besoin de se plonger dans la culture de la Côte d’Ivoire et d’en faire profiter ses abonnés. « Ça n’a pas été fait à l’école et si ça n’a pas été fait à l’école, par qui ça va être fait ? Par nous ! Parce que nous sommes cette génération qui a soif d’apprendre, cette génération qui a envie de se découvrir, là maintenant, c’est le moment avec les médias sociaux, de montrer aux jeunes leurs vraies valeurs, africaines. » Se sentir ivoirienPour cela, elle se rend régulièrement à la bibliothèque nationale et compile dans ses posts ce qu’elle a appris dans les livres. Kawaï se déplace aussi dans les grands événements culturels. Un micro à la main, la créatrice de contenus se balade dans les allées du MASA, le Marché des arts du spectacle, et enchaîne les interviews avec les artistes ou les micros-trottoirs.Elle arrête les jeunes festivaliers pour leur demander un mot dans leur langue d’origine. Bien souvent, elle reçoit en guise de réponse un sourire gêné et un grand silence. Une façon de faire vivre le débat sur le lent effritement des spécificités culturelles du pays. Étudiante, Miriam Samasi salue la démarche. « C’est quelque chose que je me reproche, le fait d’être assez éloignée de ma culture, je n’arrive pas à parler les langues de mes trois ethnies (malinké, agni, bété). Toute ma vie, j'ai parlé le français. Je parle plusieurs langues comme le japonais, le coréen ou bien l’anglais, mais je ne connais pas ma langue maternelle, explique la jeune femme. Actuellement, je travaille sur moi-même pour me rapprocher de ma culture et me sentir ivoirienne. »À ce jour, Kawaï finance son travail elle-même, à terme elle souhaiterait vivre de cette activité et faire d’Échos d’Ivoire une référence en matière de plateforme éducative sur la culture ivoirienne.
4/29/20242 minutes, 28 seconds
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RDC: une exposition qui interroge sur les conditions d’exploitation des minerais

En République démocratique du Congo, le musée de l’Académie des Beaux-arts de Kinshasa accueille depuis le 18 avril une exposition collective de trois artistes : Kolwezi, un jour un rêve. Une plongée dans la riche ville minière de la province du Lualaba où les artistes questionnent et veulent interpeller sur l’exploitation artisanale des mines dans le pays. À lire aussiRDC: des exploitants artisanaux manifestent à KolweziÀ lire aussiRépublique démocratique du Congo: les quartiers de Kolwezi grignotés par l'exploitation du cobalt
4/28/20242 minutes, 16 seconds
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Sénégal: la restauration des actualités sénégalaises, «l’archéologie audiovisuelle de l’Afrique indépendante»

Alors que sur le continent africain, les archives audiovisuelles des années 1960 sont rares, au Sénégal, depuis quelques mois, quatre films qui datent de 1966 sont de nouveau disponibles pour le public sénégalais. Après un travail de restauration de plus de deux ans, ces quatre films ont été projetés dans un cinéma de Dakar. De notre correspondante à Dakar, À l’écran défilent en noir et blanc des immeubles flambants neufs, une cathédrale fraîchement restaurée, le port, quelques passants, une ville belle et moderne. C’est Dakar en 1966, la capitale ne compte alors que 100 000 habitants et est sur le point d’accueillir le premier festival mondial des arts nègres, organisés par Léopold Sedar Senghor. Pour Moustapha Samb, directeur d’exploitation du Pathé, c’est un retour en enfance : « En tant que Sénégalais, j’étais très fier de revoir Dakar à, de ressentir toute l’énergie de la créative à l’époque. Pour moi, c'est le commencement et comme on dit en wolof pour aller de l’avant, il faut savoir d’où l’on vient. »Car les images qui sont projetées ce jour-là sont celles des actualités sénégalaises. Petits films de 8 à 20 minutes qui, dans les années 1960, étaient diffusés dans les cinémas de Dakar, avant le film. Sorte de tour d’actualité nationale et mondiale, à une époque où la télévision est quasi inexistante. Réalisé par de jeunes cinéastes africains comme Ababacar Samb, Momar Thiam ou Paulin Soumanou Vieyra, entre autres. Pour Marco Lena, historien et co-initiateur de ce projet de restauration, ces images ont donc valeur de patrimoine : « Parce qu’en fait, on se rend compte que ça marque les images sur l’Afrique, tournées par les Africains pour les Africains, il y a toujours un point de vue externe. Ces images représentent l’archéologie audiovisuelle de l’Afrique indépendante. »Des milliers d'heures de travailArchéologie, car ces images, il a fallu les faire renaître. Découvertes en 2019, abandonnées dans une pièce du ministère de la Culture à Dakar, Cecilia Cincerelli, de la cinémathèque de Bologne a passé de long mois à restaurer ces films. « Cela représente des milliers d’heures de travail. Si on le fait manuellement, vous devez imaginer que pour chaque image vous pouvez rester une journée. Alors, imaginez sur un film. »Le résultat est époustouflant, à part quelques taches blanches tout y est et ne demande plus qu’à être vu par le plus grand nombre. Pour Moustapha Samb, président de l’association culturelle Mamiwata : « Pour ces jeunes aujourd’hui, on voit que l’audiovisuel, version numérique est en plein essor, mais je pense que ces jeunes ont besoin de voir ce qui se faisait avant pour aller de l’avant. »Les quatre films de 1966 :  - Le Sénégal et le Festival mondial des arts nègres, Le 3e Festival des arts, Sénégal an XVI et Voyage aux Antilles du Président Senghor - doivent être programmés dans différents festivals et les cinémas du Sénégal, avant que d’autres de ces films qui vont jusqu’à 1980 puissent être restaurés.À écouter aussiSénégal: abandonnées depuis des années, les archives audiovisuelles font peau neuve
4/27/20242 minutes, 24 seconds
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Centrafrique: Idylle Mamba célèbre 20 ans de carrière par un «retour aux sources» à Bangui

En Centrafrique, la chanteuse Ydille Mamba a bouclé vendredi 26 avril une série de deux concerts inédits à Bangui. Ces deux concerts organisés à l'Alliance française visent non seulement à couronner ses 20 ans de carrière, mais aussi à valoriser les anciennes chansons et les styles de musiques centrafricains encore méconnus à l'échelle mondiale. Devant le podium éclairé par des jeux de lumière dignes des grands soirs, les fans agitent les mains, leurs téléphones allumés et des mouchoirs. La salle de l'Alliance française de Bangui, en République centrafricaine, est remplie de mélomanes venus savourer cet instant historique. Vêtue d’une robe rouge, celle qui se fait appeler « guerrière rouge » estime qu’il est important de « revenir aux sources, revenir au pays, revenir voir la famille. Ça fait déjà 20 ans que je suis dans ce métier de chanteuse, mais c'est la première fois d'être chez moi, faire un concert inédit comme j'ai toujours rêvé de le faire. C'est un grand plaisir pour moi. »Révélée en 2004 comme lauréate de la chanson francophone organisée en Centrafrique, Ydille Mamba a été finaliste du prix Découvertes RFI en 2014. En 20 ans de carrière, elle a côtoyé les plus grands artistes mondiaux. Mais selon Alex Ballu, promoteur musical à Bangui, il était temps qu’elle revienne à la source. « C'est une artiste qui fait beaucoup d'efforts pour la culture centrafricaine en général et la musique en particulier. Après avoir rencontré des artistes de renoms comme Youssou N'Dour, Yelema, Lokua Kanza et sa participation aux différents festivals en Europe et en Afrique, c'est important pour elle d'organiser ce concert dans son pays », estime-t-il.À lire aussiYoussou N'Dour et Idylle Mamba en duo pour chanter la paix en Centrafrique« Je suis content d'être là pour soutenir mon artiste. C'est une initiative très encourageante de la part de cet artiste parce qu'elle vit en Europe. Elle a décidé de revenir nous offrir ce beau spectacle et je suis très content », raconte avec excitation Rostand, l'un de ses nombreux fans. Autre particularité de son spectacle, Ydille Mamba a invité sur scène les musiciens centrafricains qui ont marqué les années 70, 80 et 90. Pour la chanteuse, il s'agissait de rendre hommage à « des anciennes gloires, ceux qui ont marqué la musique centrafricaine, ceux qui ont marqué mon enfance. J'ai voulu rendre hommage à ces icônes de la musique centrafricaine. Partagée cette scène avec eux, c'est juste magnifique. J'ai encore cette chance d'avoir quelques-uns vivants, donc il faut en profiter. Il faut qu'on les honore. À travers ces séries de concerts, j'ai voulu leur rendre hommage. »Une soirée riche en couleurs. Le public est reparti satisfait, heureux d’avoir pu oublier, le temps d’un concert, les crises qui ont secoué le pays ces vingt dernières années.À lire aussiLe Ti-Î Festival, un événement culturel majeur de la scène centrafricaine
4/26/20242 minutes, 20 seconds
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Trente ans de démocratie en Afrique du Sud: l’État de droit et la Constitution, fierté du pays [3/3]

Le 27 avril 1994, tous les Sud-Africains étaient appelés à participer aux premières élections libres. Nelson Mandela allait être élu, mettant fin au régime d’apartheid. Une nouvelle Constitution serait ensuite écrite, protectrice de tous les Sud-Africains et présentée comme la plus progressiste du continent africain. La loi fondamentale est protégée par la Cour constitutionnelle, un monument important au centre de Johannesburg et dans le cœur de ses habitants. De notre correspondant à Johannesburg,C’est journée porte ouverte à la Cour constitutionnelle. Un groupe scolaire venu de Soweto, encadré par le Bukho Bami Youth Centre, prend place sur les bancs de la Cour. Les adolescents s’amusent à imiter les juges. Leur professeur appelle au calme et interroge ses élèves. L’un d’eux, Kamogelo Selemela, connaît très bien le rôle de la Cour constitutionnelle, même le nom de son président. « Si le gouvernement veut ajouter une loi à notre Constitution, il doit passer par les juges, comme Raymond Zondo. Et ils ne doivent pas seulement écouter le gouvernement, mais ils doivent aussi regarder les intérêts des citoyens Sud-Africains. »Ses camarades l’applaudissent en claquant des doigts. Son professeur, Daluxolo Magamdela, y voit un rapport particulier des Sud-Africains avec la politique. « Pour eux comme pour les Sud-Africains, la politique joue un rôle très important dans leur vie, donc même de manière inconsciente, ils savent qui dit ça et qui fait quoi. » Un lieu symboliqueLa Cour constitutionnelle a été construite sur le site d’une ancienne prison où ont été brièvement incarcérés Mahatma Gandhi et Nelson Mandela. « Du pire peut naître le meilleur », souligne Lorraine Mhlari, guide touristique. « La Cour a été construite ici pour la rendre accessible et ouverte à tous. C’est un lieu de transparence pour montrer qu’il n’y a rien à cacher dans notre Constitution. »La Cour constitutionnelle a beaucoup fait parler d’elle quand elle a condamné l’ancien président Jacob Zuma à 15 mois de prison pour outrage à la justice en juin 2021. Ce jugement était un signe d’indépendance, rappelle Lesego More, de la fondation Democracy Works. « Notre Cour constitutionnelle peut être saisie pour des affaires qui contestent les décisions de l’exécutif, du président et de son gouvernement. Et elle peut juger en défaveur du président. C’est la preuve d’une Constitution qui promeut l’État de droit, les droits de l’homme, qui tient les gens responsables de leurs actions. Et qui nous garantit des élections crédibles, c’est très important, donc c’est un document dont on est très fiers. »Les prochaines élections auront lieu le 29 mai et la Cour constitutionnelle a déjà été saisie pour statuer sur la validité de la candidature de Jacob Zuma.À écouter aussiTrente ans de démocratie en Afrique du Sud: quels résultats pour la politique de logements sociaux? [2/3]
4/25/20242 minutes, 16 seconds
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Trente ans de démocratie en Afrique du Sud: quels résultats pour la politique de logements sociaux? [2/3]

Elles sont surnommées les « maisons RDP », du nom du programme phare de l’ANC lors des élections de 1994, le « Programme de reconstruction et de développement » : un plan visant à offrir des logements salubres aux populations maintenues dans la pauvreté sous l’apartheid, et à favoriser l’accès à la propriété. Il s’agit d’un des programmes de l’ANC les plus visibles, avec ces maisons bien reconnaissables, qui ont bourgeonné à l’extérieur des villes. Trente ans plus tard, cette politique de logement social quasi unique au monde a permis d’offrir un toit à des millions de Sud-Africains, mais elle a aussi connu des obstacles. De notre correspondante à Johannesburg,Selon les chiffres officiels, il existe désormais près de 3 millions de ces maisons RDP. Mais leur qualité ou leur taille ont pu décevoir alors que le gouvernement s’est vite fait dépasser par la demande. Sello, au chômage, a hérité du vieux logement social de sa mère décédée, une habitation qui n’a jamais été terminée.Vous voyez, c'est à moitié fini, avec la chambre. Les briques s’arrêtent là, ils ont juste construit une chambre et des toilettes. Si on a l’argent, on peut finir, mais à l’époque ma mère n’avait pas de travail. Donc, on a complété avec de la tôle et du carton ici, pour protéger de la pluie et du vent. Quand il pleut, l’eau rentre quand même, c’est tout mouillé par là.Une liste d'attente de plus d'un million de personnesSi un foyer gagne moins de 170 euros par mois, il peut, en théorie, devenir propriétaire d’une de ces maisons RDP, de façon gratuite, et aura le droit de la revendre au bout de huit ans. Mais par exemple, dans la région autour de Johannesburg, il existe selon les autorités une liste d’attente de plus d’un million de personnes.Lassé de patienter, Morgan, la cinquantaine, a fini par construire illégalement une maison en tôle sur un terrain vide.J’avais bien déposé un dossier, il y a au moins 15 ans, et j’attends toujours, je ne sais pas ce qui se passe. Alors, je me suis construit cet abri, donc ça va. Mais je ne comprends pas pourquoi ils ne respectent pas leurs promesses. Il vaut mieux ne rien promettre du tout, plutôt que de faire des promesses en l’air. Maintenant, on demande des terres, et on construira nos propres logements, je pense que ce sera mieux.À lire aussiTrente ans de démocratie en Afrique du Sud: les échecs de la réforme agraireUne politique ambitieuse malgré les couacsÀ d’autres endroits, ce sont des projets de maisons RDP en cours de construction qui ont été occupés de force. Le programme a donc connu des ratés, mais cela reste une politique généreuse et ambitieuse pour Johan Fourie, professeur d’économie à l’université de Stellenbosch.On peut saluer le gouvernement pour avoir voulu aider le plus de gens possible, avec des contraintes budgétaires et des limites aux capacités à construire rapidement. Il y a, certes, des critiques autour de la façon dont cela a été fait : souvent, ces maisons RDP sont en périphérie des villes, et les gens doivent ensuite dépenser beaucoup en transports, pour aller travailler ou faire les courses. Ça les a placés dans une sorte de piège spatial. Aujourd’hui, on peut se dire que le gouvernement aurait dû faire ceci ou cela, mais je ne suis pas sûr qu’à l’époque, cela aurait été possible ou envisageable.Des limites dont le président Cyril Ramaphosa a en tout cas bien conscience, puisqu’il a récemment promis vouloir s’assurer que les logements sociaux soient situés plus près des emplois et des services.À lire aussiTrente ans de démocratie en Afrique du Sud: un bilan mitigé pour l’économie
4/24/20242 minutes, 23 seconds
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Trente ans de démocratie en Afrique du Sud: les échecs de la réforme agraire [1/3]

Il y a bientôt trente ans, le 27 avril 1994, les Sud-Africains participaient aux premières élections libres de leur histoire. Le scrutin allait signer la fin du régime d'apartheid et la victoire de Nelson Mandela et de son parti, l'ANC. Le régime d'apartheid et les gouvernements précédents avaient limité drastiquement l'accès à la terre pour les populations noires. Dès son élection, l'ANC a voulu réparer cette injustice en achetant des milliers d'hectares et en les redistribuant aux communautés spoliées. Trente ans plus tard, l'un de ses programmes n'a pas atteint ses objectifs. De notre correspondant à Pretoria,Portia Mdhlovu est invitée à monter sur scène pour partager son expérience. En 2010, l’État a racheté et redonné les terres que sa communauté réclamait. « Sous l’apartheid, ils ont exproprié les gens des fermes, car ils avaient conscience du potentiel économique de leurs terres. Nos grands-parents ont été déplacés dans les zones rurales où le sol n’était pas cultivable », relate Portia Mdhlovu.Une fois la terre restituée, un conseil d’administration veille à l’exploitation de la terre au bénéfice de tous. Ici des terres agricoles, là des projets immobiliers qui génèrent des profits redistribués sous forme de revenus ou de bourses scolaires. C’est ce qui motive le collectif. « Tout le monde veut que ça marche. Ils partagent les mêmes objectifs, ils travaillent ensemble et ils impliquent toute la communauté », souligne Portia Mdhlovu.Des problèmes rencontrés par les associations communalesMais cet état d’esprit manque dans la majorité des associations de propriété communales, les structures qui reçoivent les terres. Seuls 7% d’entre elles fonctionnent correctement. Ces associations regroupent des centaines, parfois des milliers d’individus qui peuvent entrer en conflit, regrette le journaliste agricole Tiisetso Manoko, du magazine Food For Mzansi.« Les principaux problèmes traversés par les associations communales, ce sont : une mauvaise gestion financière, une mauvaise gestion des ressources et des conflits d’intérêts. De nombreuses figures du monde agricole et même le gouvernement se demandent si on a vraiment besoin de ces associations », explique Tiisetso Manoko.À lire aussiAfrique du Sud: l’éternel conflit de redistribution des terresFavoriser la propriété individuelle ?Le parti d’opposition, l’Alliance démocratique, appelle à les supprimer pour favoriser la propriété individuelle. Il faut surtout ajuster le dispositif, défend Kgampi Bapela, spécialiste en développement agricole pour une filière du gouvernement, Industrial Development Corporation (IDC).« Au lieu de donner les terres à tout le monde, il faudrait identifier des jeunes fermiers au sein de ces communautés prêts à exploiter la terre immédiatement », pense Kgampi Bapela. « C’est une chose de redistribuer la terre, mais s’il manque la technique, si les communautés ne sont pas préparées... Il faut une approche intégrée. »Alors que ce programme fonctionne mal, le parti radical de l’EFF appelle à une réforme polémique : la nationalisation de toutes les terres.À écouter aussiTrente ans de démocratie en Afrique du Sud: un bilan mitigé pour l’économie
4/23/20242 minutes, 9 seconds
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Sénégal: à Dakar, le fléau des déchets plastiques perdure

Au Sénégal, les dégâts de la consommation débridée de plastiques jetables sont omniprésents, que ce soit dans les zones rurales comme dans les villes, et bien sûr à Dakar.  De notre correspondante à Dakar,Un groupe d’employés municipaux et de citoyens volontaires balaye les rues de la commune de Fann-Point E-Amitié et entasse les déchets dans des brouettes. Au milieu des feuilles mortes, d’énormes quantités de plastiques viennent s’accumuler dans la collecte.« C'est dégueulasse, ce n’est pas hygiénique. Ce sont des bouteilles d'huile qui viennent certainement des mécaniciens, on ne sait jamais... Ce sont aussi des sachets en plastique d’eau », souffle une employée, exaspérée.Impossible d’éviter ces sachets, pour boire de l’eau ou pour faire ses achats ; ils sont ancrés dans les habitudes sénégalaises, ce que déplore Amadou Mbengue, responsable communal de la Sonaged, qui collecte les déchets. « Même en boutique pour acheter pour 25 francs de sucre, c’est [distribué] dans un sachet plastique. On est en train de surproduire des déchets plastique », s'alarme Amadou Mbengue.À lire aussiSénégal: le «Plastic Odyssey», un navire de sensibilisation au recyclage du plastique, est à DakarPourtant, le pays a bien adopté en 2020 une loi interdisant tous les plastiques à usage unique, gobelets, couverts, sacs, mais sans suite. « La sanction manque dans ce pays. La sanction pécuniaire », martèle-t-il.Problème environnemental et problème sanitaireÀ Dakar, il y a aussi le phénomène des charretiers qui ramassent les ordures en dehors du circuit officiel, et les balancent dans la nature. Ces plastiques rejetés dans les rues et les océans posent un problème environnemental, mais aussi un problème sanitaire, comme l’explique le professeur Adams Tidjani, spécialiste des microplastiques, qui dirige aujourd’hui l’institut des métiers de l’environnement et de la métrologie.« Quand il se dégrade, la chaîne du polymère, du plastique donc, devient des microplastiques. Et donc ce microplastique, à ce moment, peut être ingéré par les animaux, les animaux errants, comme dans la mer par les poissons », indique-t-il. « Donc, depuis quelque temps, on s'est rendu compte que dans nos assiettes, on retrouvait du microplastique. On ne sait pas quelles seront les conséquences de ce microplastique pour notre santé. »À lire aussiAu Sénégal, une «start-up» recycle les déchets pour réduire les émissions de gaz à effets de serreLe recyclage du plastique est encore balbutiant au Sénégal, seules quelques initiatives privées se penchent sur la question. Pourtant, c’est une piste à exploiter pour le professeur Tidjani. « Je suis convaincu qu’on peut faire beaucoup de choses. Mais ce ne serait possible que lorsque vous avez un "back-up", un laboratoire de recherche, parce qu'il faut faire des tests », explique-t-il. Et d'ajouter : « Par exemple : les clôtures de village ne sont pas bonnes, on peut en construire avec des plastiques, des bouées dans les mers. »Deux cent cinquante mille tonnes de plastique sont jetées chaque année, à peine 30 000 sont recyclées selon le ministère de l’Urbanisme.
4/22/20242 minutes, 7 seconds
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Des Malgaches en route pour la Coupe du monde de parkour en France

Sport encore méconnu à Madagascar, le parkour est une discipline rattachée à la gymnastique qui consiste pour le « traceur » – nom donné à l’athlète – à franchir avec rapidité et technicité une série d’obstacles naturels ou urbains tout en réalisant des figures. Les quatre meilleurs traceurs malgaches s’envoleront bientôt pour la Coupe du monde qui aura lieu en France, à Montpellier, du 10 au 12 mai prochain, à condition d'avoir les fonds nécessaires pour payer leur voyage. De notre correspondante à Antananarivo,Les yeux rivés sur ses athlètes, Faliniana Antonio Dahefa, l’entraîneur, surveille le placement de tous leurs membres. Une main qui dérape, un pied qui accroche, et la course de vitesse – speed-run dans le jargon – peut rapidement se finir par une chute douloureuse sur l’un des obstacles en granit.« Il y a beaucoup de préjugés encore sur ce sport, parce que c’est considéré comme dangereux et très urbain. Et du coup, nous, notre objectif, c’est de casser un petit peu ces préjugés. Parce que c’est un sport qui est vraiment accessible à tout le monde, filles comme garçons et qui peut s’apprendre à tout âge. On est conscients que c’est notre rôle de donner de la valeur à ce sport. Et c’est encore tout un défi. »Ambiance bienveillanteHumbles, solaires, décontractés aussi. Les quatre Traceurs Gasy, du nom de leur équipe (trois garçons, une fille) qui s’apprêtent à concourir à la Coupe du monde de parkour, s’entraînent cinq fois par semaine, au côté des débutants, dans une ambiance bienveillante.Ce jour-là, l’entraînement a lieu dans l’un des jardins de la ville, mis à disposition par la mairie. Les traceurs et traceuses utilisent le mobilier urbain pour répéter leurs figures. « Comment tu as trouvé le webster à la fin [salto avec élan sur un seul pied, NDLR] ? Je n’étais pas trop bas ?  », demande l’athlète. « Le webster, ça a été », lui répond l’entraîneur.À écouter aussiEn France, le parkour fait de plus en plus d’adeptesSalto avant, arrière, aerial twist 720, Toky Ranaivomanana, lunettes rondes vissées sur le nez, enchaîne les acrobaties au-dessus des pavés avec une facilité déconcertante. Le jeune homme de 21 ans a beau être champion de Madagascar en freestyle, les retours du coach sont essentiels à sa préparation. Celui qui est capable de sauter pieds joints, une hauteur d'1m60 sans élan, s’apprête à participer à sa seconde Coupe du monde. Il représentera la Grande Île dans les deux disciplines du concours : speed-run, et freestyle, sa favorite.Faire briller l’Afrique« Est-ce que c’est possible pour toi de faire un saut de chat à la place du saut tout simplement ? », demande le coach à Toky après sa démonstration. « Après le lasy [passage d’un obstacle les jambes d’abord, avec appui de la main sur l’obstacle, NDLR] tu veux dire ? - Oui, après le lasy, tu fais un costal [salto sur le côté, NDLR] pour atterrir sur l’autre obstacle. - Oui, je pense que je peux le faire... »« Le jour J, c'est-à-dire pendant la compétition, j’espère bien faire tout ce qui est double vrille ou double costal, parce que ça peut me permettre d’obtenir de bonnes notes », souligne Toky Ranaivomanana qui poursuit : « Surtout, il faut que j’enchaîne très bien mes mouvements parce que ça compte aussi. Tout cet enchaînement, je l’ai, je le déciderai une fois sur place, à Montpellier, parce qu’on ne peut pas prévoir à l’avance les obstacles qui seront installés. »Madagascar est l’un des rares pays du continent à présenter des athlètes. Avec sa participation, l’équipe malgache espère bien montrer son talent et faire « briller l’Afrique », dit-elle. Une participation encore conditionnée à la récolte de fonds : une cagnotte en ligne vient d’être lancée pour permettre aux Traceurs Gasy de vivre leur aventure.À écouter aussiBénin : plongée dans le parkour en milieu urbain
4/21/20242 minutes, 27 seconds
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Tunisie: «Lost in Tunis», un projet photo sous le regard d'un jeune passionné

Dans la vie, Mourad Ben Cheikh Ahmed travaille dans la finance. Sur ses pauses déjeuner et son temps libre, il explore la ville de Tunis qu’il mitraille de son appareil photo pour le plus grand bonheur des près de 100 000 internautes qui suivent ses aventures sur Facebook. La capitale tunisienne – dont la médina est classée patrimoine mondial de l’humanité par l’Unesco – regorge de pépites architecturales délaissées qu’il tente de retenir en photos.
4/20/20242 minutes, 28 seconds
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À Abidjan, le monde entier vient programmer les arts du spectacle africain

Le Marché des arts du spectacle africain d'Abidjan (MASA) est un marché professionnel couru dont le point d’orgue cette année a été les rencontres « B to B », en tête-à-tête entre artistes, musiciens, comédiens, conteurs ou danseurs et des professionnels, propriétaires de salle ou programmateurs de festival. Point d’orgue, car ce jeudi matin, jour des rendez-vous pro, la salle des rendez-vous n’a pas désempli… Résultat, 300 à 350 rendez-vous professionnels en une matinée. Cette année, à Abidjan en Côte d'Ivoire, de mémoire de MASA, on avait jamais vu autant de monde. Une vraie ruche avec des rendez-vous toutes les douze minutes en tête-à-tête dans la salle Christian Lattier. « Cette fois-ci, les chiffres ont été triplés ! s'exclame Ousmane Boundanoé, co-organisateur de ces rencontres professionnelles. Nous sommes passés d'une trentaine à près de 115 programmateurs ou d'acheteurs de spectacles qui viennent de tous les continents : de la Corée, du Japon, de la Chine, de presque-toute l'Europe, des États-Unis, du Canada, des pays d'Afrique notamment anglophone, Kenya, Afrique du Sud... », énumère-t-il avec fierté.Un succès qui est aussi lié au système informatique mis en place : « Les inscriptions sont faites depuis près d'un mois à travers une plateforme qui a très bien fonctionné. En fonction de la discipline, ils prenaient des rendez-vous et les rendez-vous ont généré des agendas. Nous, nous étions chargés de faire en sorte qu'ils puissent se voir physiquement et qu'ils puissent échanger sur les propositions qu'ils ont eues et aussi sur les intérêts des autres », détaille Ousmane Boundanoé.À écouter aussiAu MASA d'Abidjan, artistes et spectateurs font leur marchéEt c’est ainsi qu’un Ouagalais, Boniface Kagam-Bega, directeur du festival « Rendez-vous chez nous » a rencontré pour la première fois une troupe de danseur bobolais à Abidjan : « J'avais entendu parler du spectacle, mais je ne l'avais pas vu. Ils viennent de Bobo-Dioulasso. Au-delà du handicap, c'est un spectacle avec des sourds-muets que j'aimerais vraiment programmer en novembre au Burkina Faso. Moi, je suis à Ouagadougou. Le chorégraphe, je l'ai raté à Lyon il y a quelques mois. La dernière fois, je lui disais : "Bon, c'est Abidjan qui va nous permettre de nous rencontrer et que Bobo-Dioulasso vienne jouer à Ouagadougou », raconte-t-il, amusé.L’un des problèmes majeurs de ces négociations de contrats, c'est le coût du transport pour aller jouer à l’étranger. Comme l'explique Manandilu Zanatzua, du groupe de musiciens malgaches Masabao : « Concernant le déplacement, les programmeurs disent toujours "Madagascar, c'est un peu loin". Donc, on a des problèmes de transports comme cela. »Pour aider les artistes de la sélection MASA, les organisateurs ont décidé de mettre en place un Fonds d’aide à la mobilité qui permettra de participer au coût du transport. C’est ainsi que les Ivoiriens du groupe Zolo de Koriani, près d’Odienne, partiront en mai prochain à Caracas pour montrer aux Vénézuéliens leur technique de danse patrimoniale.■ Le Circus Baobab triomphe avec son spectacle YongoyélyC’était l’une des spectacles les plus attendus au Masa d’Abidjan jeudi 18 avril. La troupe guinéenne de Cirque « Circus Baobab », l’une des compagnies pionnières et majeures du continent, a présenté son tout nouveau spectacle « Yongoyéli ». Une performance d’acrobates féminines pleine d’espoir et de joie autour d’un sujet grave : l’excision.À lire aussiAu Marché des arts et du spectacle africain, les artistes s’inquiètent des statuts variés ou inexistants
4/19/20242 minutes, 21 seconds
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Tchad: ces réfugiés soudanais qui tentent de rejoindre l’Europe [5/5]

Alors que la réponse humanitaire manque de financement pour assurer la relocalisation et l’aide de base aux réfugiés qui ont fui les combats, les massacres et désormais la faim qui sévit au Soudan, ces derniers sont de plus en plus nombreux à poursuivre leur route, vers le nord du Tchad ou même vers l’Europe. De notre envoyé spécial à Farchana,À Farchana, au Tchad, dans le premier camp de réfugiés soudanais, on rencontre les anciens, ceux qui ont fui la guerre des années 2000 au Darfour et n’ont pas pu rentrer chez eux. Avec l’arrivée de près de 600 000 nouveaux Soudanais cette année, les humanitaires ont dû réduire l’aide jusqu’ici distribuée, poussant les plus jeunes à prendre la route, indique Mahamat Aladine : « Les jeunes quittent le camp pour chercher de l’or à Kouri Bougoudi dans le nord du Tchad. Ils y travaillent parfois plusieurs années dans des conditions extrêmement difficiles. Ils descendent dans des trous à plus de 100m de profondeur et, parfois, ont dû faire des mois sans rien trouver. La vie y est très chère et il n’y a presque pas d’eau... » Ceux qui survivent aux éboulements et parviennent à se faire un petit pécule poursuivent leur route. Mahamat Khamis Ismail est professeur. Il a vu partir nombre de ses élèves. « On a perdu tellement de jeunes, c’est dramatique... Plus de 100 personnes de la communauté sont mortes dans la mer Méditerranée. Même mon petit frère est parti. On s’est cotisé pour lui payer le voyage vers Kouri Bougoudi, il a trouvé un peu d’or et il est parti en Libye, mais là-bas, il s’est fait arrêter par la police avant de pouvoir traverser vers l’Europe. On a donné tout notre argent pour le faire libérer, mais depuis on a plus de nouvelles. Pour les jeunes, au Soudan, c'est la mort, au Tchad, c'est la misère, alors qu’est-ce qu’il leur reste ? Ils préfèrent mourir au cours du chemin que de ne pas tenter », se lamente-t-il.À écouter aussiSoudan: des réfugiés fuyant la guerre en proie à la famine au TchadCes mouvements devraient s’accentuer, notamment vu les conditions d’accueil au Tchad et surtout vu les profils des nouveaux réfugiés soudanais venus des grandes villes du Darfour comme El Geneina.« Les personnes qui sont des étudiants, des médecins, des avocats, des enseignants et qui sont restées dans des sites de réfugiés fait qu'il y a un désespoir qui cause un déplacement vers l'Europe, explique Jerome Merlin, représentant adjoint au Tchad du HCR, l'Agence des Nations unies pour les Réfugiés. On va dire que le Tchad est un peu une digue dans cette région. Mais si cette digue lâche, bien sûr qu'il pourrait y avoir des mouvements d'ampleur dans la sous-région et au-delà de la sous-région, notamment vers l'Europe. »« L’Europe est composée de grands pays bien plus riches que le Tchad, elle devrait prendre sa part… »  estime, quant à lui, Mahamat Aladine. Selon le HCR, 6 000 réfugiés soudanais sont déjà arrivés en Italie depuis le début du conflit, soit près de six fois plus que l’année précédente. À écouter aussiRéfugiés soudanais au Tchad: le travail de collecte des traumatismes par l'ONG Handicap international
4/18/20242 minutes, 16 seconds
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Tchad: l'hygiène, le combat quotidien des réfugiés soudanais à Adré [4/5]

À la frontière tchado-soudanaise, les humanitaires tentent de bâtir au plus vite des camps pour accueillir les réfugiés, sans parvenir à tenir le rythme face à des arrivées qui sont constantes. La ville frontalière d’Adré se retrouve ainsi débordée, et l’assainissement du site – qui abrite encore 150 000 personnes selon les autorités – représente un véritable défi, alors que plus de 1 600 cas d’hépatite E ont été déclarés. De notre envoyé spécial,Ce soir, les équipes de Médecins sans frontières (MSF) dispensent une formation aux femmes enceintes, la population la plus vulnérable à l'hépatite E. Une maladie que l'on combat par l'hygiène, nous explique Aristide Kelly, responsable médical, qui énumère les solutions dispensées : « Il faut se laver les mains avant de manger, il faut se laver les mains lorsqu'on est passé par les latrines, il faut bien laver les légumes et les fruits, c'est la contamination de l'eau et des aliments... » Selon lui, « un seul cas peut, via ses excréments, contaminer un point d'eau si, justement, les mesures ne sont pas prises. Il faut assainir ce milieu-là. »La gestion des latrines, c'est le domaine de Léopold Rojon qui nous amène à l'extrémité du camp pour nous présenter deux grands trous dans le sol. « C'est la base de la fosse d'une latrine que l'on vient consolider avec des sacs de sable pour ensuite la vidanger. On coule une dalle en béton et on bâche tout ça, on construit une porte et on a notre latrine qui est là. On évite la contamination par les eaux de ruissellement, on assainit le camp... C'est un des moyens de prévenir les maladies », explique-t-il méthodiquement. Le site spontané de réfugiés d'Adré dispose actuellement d'une latrine pour 677 personnes, la norme minimale étant d'une pour 80 personnes... Tandis que le jour décline, une petite foule se forme autour du point d'eau géré par MSF qui, chaque jour, distribue près d'un million de litres. Michel Daamon Daïkreo s'occupe de l'assainissement du camp et de son approvisionnement en eau potable, ce qui, de son propre aveu, « n'est pas une mince affaire... »Il utilise une solution chlorée pour désinfecter son bidon avant de le remplir au robinet alimenté par une immense poche d'eau de 15 000 litres. Celle-ci suffit aux besoins du camp uniquement durant deux heures trente, affirme-t-il. « Il faut cinq fois cette grande poche d'eau par jour. » Ici, on distribue « entre huit et dix litres d'eau par jour et par personne. Sachant qu'il faut vingt litres » en situation normale, explique-t-il. Ainsi, les habitants du camp ne reçoivent que la moitié de leurs besoins en eau, « à la fois pour boire, pour faire la vaisselle, pour se laver, etc. C'est insuffisant. » Dès lors, maintenir un niveau d'hygiène suffisant pour se préserver des maladies représente un défi quotidien pour les familles. 
4/17/20242 minutes, 26 seconds
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Tchad: la difficile intégration des nouveaux réfugiés soudanais [3/5]

Si l’immense majorité des Tchadiens accueillent à bras ouverts ces réfugiés soudanais, la pression exercée sur les maigres ressources de la région provoquent quelques tensions, notamment avec les « anciens » réfugiés soudanais, qui étaient déjà plus de 400 000 installés dans la région depuis le début du conflit au Darfour dans les années 2000. De notre envoyé spécial à Farchana,Du haut du rocher qui surplombe la plaine, on distingue le premier camp des années 2000 avec ses airs de petit village, les nouvelles maisonnettes en paille construites en 2023 et les toutes dernières extensions faites de bâches et de taules où s’est installée la famille d’Hatim Abdallah Al Fader.« Bon, ce n’est pas si mal... Après tout, il faut comprendre que c’est un abri d’urgence alors quand il fait chaud dehors il fait chaud dedans et pareil quand il fait froid », relativise Hatim Abdallah Al Fader. « Il n’y a qu’une seule fenêtre donc l’air ne peut pas vraiment circuler. Mais ce n’est pas grave parce que c’est temporaire. J’espère que je ne vais pas rester ici trop longtemps, car mes enfants ont besoin de faire des études, c’est ça ma priorité », explique-t-il.À écouter aussiLes survivants de la société civile soudanaise collectent les preuves du nettoyage ethnique en cours [1/5]« J’ai tout fait moi-même »En deux semaines, cet ancien consultant a déjà construit sa clôture et un auvent. Comme lui, près de 12 000 réfugiés ont été relocalisés sur ce site aride et balayé par les vents.Harmra Adam Mahamat et ses six enfants vivent ici depuis près d’un an. Depuis que des hommes en armes ont dévasté son village, elle n’envisage plus de rentrer. D’épais murs en briques protègent sa maison de la canicule. « Ah non, ce n’était pas comme ça du tout comme ça quand je suis arrivée ! La bâche, les voleurs peuvent la couper pour rentrer dans la maison, et la paille, elle risque de prendre feu », s’exclame-t-elle. « Oui j’ai tout fait moi-même, ça m’a pris quatre mois, car pour trouver de l’eau pour faire les briques, c’est tout un problème dans cette région. Maintenant je suis en train de construire des toilettes, cela va tout changer », espère Harmra Adam Mahamat.À écouter aussiUn an après le début du conflit, les réfugiés soudanais fuient désormais la faim [2/5]Des distributions pour les nouveaux réfugiés au détriment des plus anciensFaute de financements, le Programme alimentaire mondial a dû couper les distributions prévues pour les « anciens » au profit des nouveaux réfugiés, plus démunis encore. Mahamt Khamis Ismail, les cheveux blancs, le regard doux, fut parmi les premiers arrivés sur le site. « Certains anciens ne comprennent pas cette différence de traitement, ils disent que nous sommes tous des réfugiés et que donc nous devons tous être traités de la même manière et recevoir la même chose. Cela a créé quelques problèmes, il y a eu des violences, quelques anciens ont attaqué les nouveaux pour piller les vivres, mais l’armée est intervenue et ils sont en train de régler ça. »À lire aussiGuerre au Soudan: des cuisines communautaires pour s’entraider durant le ramadan« Pour ma part », conclut cet enseignant de 47 ans, « je pense qu’il faut donner aux nouveaux dont les blessures sont plus fraîches. Les nôtres sont plus anciennes même si tout aussi douloureuses. »
4/16/20242 minutes, 20 seconds
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Un an après le début du conflit, les réfugiés soudanais fuient désormais la faim [2/5]

Au Soudan, cela fait maintenant un an qu’Abdel Fattah al-Buran et Mohamed Hamdan Daglo, dit « Hemedti », les deux généraux qui dirigeaient ce pays d’Afrique de l’Est, ont engagé toutes les forces dans une lutte à mort pour le pouvoir, plongeant une nation entière dans le chaos. Le conflit a fait des milliers de morts, essentiellement des civils, et plus de 8 millions de déplacés, provoquant l’une des pires crises humanitaires au monde selon les Nations unies. L’insécurité alimentaire, qui touche 18 millions de personnes, a atteint le niveau 4, le niveau de faim le plus grave jamais enregistré dans le pays, et celui qui précède l’état de famine. Au Tchad voisin, les réfugiés soudanais continuent d’arriver, mais après les combats, ils fuient désormais la faim.
4/15/20242 minutes, 25 seconds
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Les survivants de la société civile soudanaise collectent les preuves du nettoyage ethnique en cours [1/5]

Il y a un an jour pour jour, Abdel Fattah al-Buran et Mohamed Hamdan Daglo, dit « Hemedti », les deux généraux qui dirigeaient ce pays d’Afrique de l’Est, ont engagé toutes les forces dans une lutte à mort pour le pouvoir, plongeant une nation entière dans le chaos. Un an plus tard, toutes les tentatives de médiation ont échoué. Le conflit a fait des dizaines de milliers de morts, essentiellement des civils, et plus de 8 millions de déplacés, provoquant l’une des pires crises humanitaire au monde selon les Nations unies. Dans la région du Darfour, au sud-ouest du pays, se déroule selon les experts un véritable « nettoyage ethnique », que les victimes qualifient même de « génocide ». L’accès à la zone est impossible aux journalistes et aux enquêteurs, mais les survivants de la société civile soudanaise tentent, au péril de leur vie, de collecter des preuves dans les camps de réfugiés du Tchad.
4/14/20242 minutes, 20 seconds
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Nigeria: paroles d'anciennes filles de Chibok, 10 ans après leur enlèvement

Dans la nuit du 14 au 15 avril 2014, 276 lycéennes âgées entre 15 à 18 ans, pour la plupart chrétiennes, étaient enlevées dans leur internat public de Chibok par le groupe armé Boko Haram. Alors qu'elles faisaient la une de l'actualité dans le monde entier il y a encore sept ans, les filles de Chibok sont retombées dans l'oubli depuis, avec la banalisation des enlèvements de masse au nord-est et surtout dans le nord-ouest du Nigeria. Témoignages d'Amina Nkeki et Jummai Metuh, qui ont vécu ce spectaculaire kidnapping d'avril 2014, puis plusieurs années de séquestrations. De notre envoyé spécial à Yola,Dans son logement une pièce de Yola, Amina Nkeki apprécie la liberté d'élever sa fille Patience, née en captivité d'un père membre de Boko Haram. Bénéficiant d'une aide fédérale, Amina a trouvé son équilibre en reprenant ses études. Mais les enlèvements en 2024 dans des écoles du nord-ouest du Nigeria replongent Amina dans un cauchemar sans nom.« Les enlèvements et les séquestrations se poursuivent dans ce pays. N'y a-t-il pas de dirigeants dans ce pays ? Ils ne prennent aucune mesure pour lutter contre l'insécurité. Je ne cesse de me demander quand tout cela va s'arrêter. »À lire aussiNigeria: deux jeunes filles de Chibok retrouvées 8 ans après leur enlèvement en 2014« J'ai pardonné aux membres de Boko Haram »Pour Jummai Mutah, chaque enlèvement de masse est une douloureuse épreuve. Maman d'une petite Zoey, elle est soulagée de vivre en sécurité à Yola, loin de Chibok, toujours sous la menace de Boko Haram. Pourtant, Jummai confesse ne plus en vouloir aux responsables de sa séquestration :« J'ai déjà pardonné aux membres de Boko Haram. Mais Dieu dit de pardonner et d'oublier. Certes, j'ai pardonné, mais quant à oublier... Je demande encore à Dieu pour qu'il me fasse oublier tout le passé. Car je sais que même si je dis que je pardonne, je ne peux pas oublier. »La quête de paix sans passer par la JusticeJummai se rmémore encore la forêt de Sambisa et la dramatique malnutrition durant sa captivité. Aujourd'hui remise physiquement, Jummai se sait fragile mentalement. Pour être en paix, elle n'envisage pas de recourir à la justice pour réparer ses années de jeunesse perdues :« Nous ne sommes pas les seules à avoir connu ce genre de situation au Nigeria. Je sais que la justice fait son travail. Mais même si j'essaie, je ne pourrais pas gagner un procès. Alors, que puis-je faire ? »Et comme Amina, l'école est la rare institution nigériane à laquelle Jummai croit encore. Dans deux ans, elle compte bien inscrire sa petite Zoey en maternelle.
4/13/20242 minutes, 10 seconds
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Ghana: BuzStopBoyz, une initiative pour débarrasser Accra de ses déchets

Accra, capitale du Ghana, ses cinq millions d’habitants et ses milliers de tonnes de déchets produites quotidiennement... En manque d’infrastructures et de logistique, la ville voit ses rues polluées de plastiques et déchets ménagers. Pour aider à rendre Accra plus belle, un collectif s’est créé : les BuzStopBoyz. Une association d’une centaine de bénévoles, en soutien d’un système qui nécessite une meilleure régulation.
4/12/20242 minutes, 32 seconds
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Éthiopie: Fetiya Ousman, une ranger au service des éléphants et de la population

Nous nous rendons dans l’est de l’Éthiopie, au sud d’Harar, au sanctuaire de Babille qui compte près de 300 éléphants. En 50 ans, la population des éléphants y a diminué de moitié. Mais elle remonte depuis cinq ans, grâce à une vraie politique de protection. La première femme ranger du parc, Fetiya Ousman, a été récompensée en 2023 par le prix international du ranger. La pression démographique y accentue les tensions entre les communautés et les animaux autour des ressources naturelles de plus en plus rares. Des menaces multiples que Fetiya doit gérer au quotidien.  De notre correspondante à Addis Abeba,Sous un immense acacia, Fetiya Ousman observe les traces laissées par les éléphants. « Quand le soleil devient très chaud, les éléphants restent sous l’arbre pour avoir de l’ombre après avoir mangé et marché », indique-t-elle. « Ils peuvent faire beaucoup de chemin, plusieurs kilomètres. Ils peuvent aller très loin pour trouver les grands arbres. C’est pour cette raison qu’ils sont partis. »Ce jour-là, nous ne parviendrons pas à rencontrer les animaux stars du parc de 6 892 hectares. Car les hommes s’y installent de plus en plus. Ils coupent les arbres pour en faire du charbon, et construire des abris.« Les habitants du parc ne contrôlent pas les naissances, donc ils ont beaucoup d’enfants. Ils ont alors besoin de plus de terres. Ils viennent s’installer près de la rivière qu’il y a dans le parc », explique Fetiya Ousman, et ce, malgré le risque.À lire aussiLa population des éléphants d'Afrique diminue de plus en plus viteTravail de préventionDepuis septembre, 13 personnes sont mortes, tuées par des éléphants. Ce qui amène parfois les familles à se venger et les tuer. Si la plupart des habitants ont appris à vivre avec les mammifères géants, Fetiya continue son travail de prévention.« Nous prenons soin de nos animaux, de leur écosystème. Je ne leur donne pas seulement des informations, je leur rappelle les règles, la loi. Je leur dis que c’est illégal d’être ici. Ce n’est pas simple pour moi de leur dire directement, donc c’est bien que le gouvernement nous aide à le faire, car eux représentent la loi », soutient la ranger.À lire aussiZimbabwe: une centaine d’éléphants morts à cause de la sécheresse et du manque d'eauEn quête d'équilibreLe gouvernement régional a récemment donné raison aux rangers en sauvant 200 hectares de terres que des investisseurs voulaient accaparer. Un soutien de taille pour Fetiya, qui tente de trouver un équilibre avec les différents acteurs, comme Ahmed Hassan, chef d’un village installé illégalement.« Elle travaille vraiment bien, elle a de bonnes idées. Elle équilibre tout. Elle s’inquiète de tout, des ressources, des animaux, des personnes », affirme Ahmed Hassan. Fetiya dirige une équipe de 61 rangers. Ses collègues aussi l’apprécient : « Elle agit comme un homme, elle passe beaucoup de temps avec nous. C'est notre modèle et aussi notre cheffe, mais on ne le ressent pas. »Une figure inspirante, mais en proie aux sacrificesÊtre une femme ranger représente beaucoup de sacrifices. « Mon mari m’a demandé de quitter mon travail. Il m'a dit : ''Tu es la femme de quelqu’un, tu ne peux pas aller te promener avec d’autres rangers dans les montagnes.'' Mais j’ai décidé ce ne pas arrêter. »Son mari l'a quittée et laissée seule avec son fils. Malgré la pression sociale, Fetiya Ousman inspire d’autres femmes qui postulent pour devenir ranger. Cinq font partie de l’équipe aujourd’hui. Ambitieuse, Fetiya a repris ses études à distance pour prétendre au poste de directrice du parc.
4/11/20242 minutes, 19 seconds
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Benjy Axel, l'artiste engagé contre les maux de la Centrafrique

En Centrafrique, Benjy Axel, de son vrai nom Benjamin Axel Josias, est un artiste engagé qui fait de la musique pour conscientiser ses compatriotes dans un pays qui a connu de multiples crises. Ce jeune de 27 ans révolutionne la musique centrafricaine avec sa voix, son énergie et ses textes qui parlent des maux qui minent le développement de la Centrafrique. De notre correspondant à Bangui,Entouré des membres de son équipe constituée de chanteurs et danseurs, Benjy Axel nous donne rendez-vous à sa répétition. Dans cette grande salle, c’est une musique engagée qui raisonne en écho.Benjy Axel a commencé la musique en 2018 dans le groupe Bantou Squad avant de se lancer dans une carrière solo en 2021. Il s’est imposé avec plusieurs titres, dont « Mâ Béa », qui cartonne en ce moment. « Je suis un artiste qui conscientise. La musique, c'est un canal que j’utilise pour parler à mes frères centrafricains. Le titre "Mâ Béa" est un titre purement conscient qui interpelle les centrafricains à prendre conscience. Chacun doit s’investir à fond pour le développement de notre beau pays, la RCA », explique le chanteur.Un artiste engagéCe style lui a valu le prix de meilleure révélation en 2023 aux Tongolo Awards, qui récompense les talents centrafricains. Dans un pays en crise comme la République centrafricaine, Cyrus, l’un de ses plus grands fans, pense que la RCA a besoin de ce genre d’artiste.« C’est un artiste très talentueux. Benjy Axel parle de ce qui ne va pas dans le pays et en même temps, il donne des solutions de manière comique pour apaiser les tensions. Il va aller très loin dans sa carrière, à condition qu’il se fasse entourer par un bon manager et une bonne équipe de communication », se réjouit Cyrus.LancementEt cette équipe est déjà en place avec des projets concrets pour la société centrafricaine. « Benjy Axel a commencé avec un projet pour défendre les causes des enfants de la rue. Il travaille aussi sur un projet qui lutte pour l’égalité de genres en Centrafrique. Il est actuellement en studio pour sortir une chanson qui va sensibiliser les gens sur les discours de haines et les méfaits de la désinformation qui tuent actuellement la société centrafricaine », précise Marius Gamando, l’un des managers du chanteur.Pour conquérir le monde, Benjy Axel s’invite au festival international Afro Beat au Burkina Faso. « Avec mon équipe, on a établi beaucoup de plans pour cette année. Ça commence à porter ses fruits avec première invitation au festival international de musiques urbaines à Ouagadougou du 18 au 21 avril 2024. Et après, nous allons organiser un grand concert au pays », annonce l'artiste.Âgé de 27 ans, il se dit inspiré par des artistes tels qu'Alpha Blondy, Tiken Jah Fakoly ou encore Lokua Kanza, qui, comme lui, ont porté des messages engagés pour l’émancipation du continent africain.À lire aussiTout ce que l'art crée comme convergences entre l'Afrique et ses diasporas
4/10/20242 minutes, 26 seconds
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Retour des réfugiés en Centrafrique [3/3]: la difficile réintégration dans les villages

En Centrafrique, les crises militaro-politiques de 2013-2017 ont provoqué le départ de plus de 600 000 personnes vers les pays voisins. Ces dernières années, alors que la situation sécuritaire s'améliore progressivement, plus de 35 000 réfugiés ont décidé de se réinstaller dans leurs localités. Ils bénéficient de projets socioprofessionnels de réintégration, mais cette aide est mal vue par la population restée sur place, qui la perçoit comme une injustice. Pour apaiser cette réintégration et faire en sorte que la cohabitation reste pacifique dans les grandes villes et villages, les autorités locales et le HCR mettent en place des actions. De notre envoyé spécial à Béloko,Jeudi 14 mars, il est 12 heures à Béloko, ville frontière avec le Cameroun. Une foule d’hommes, de femmes et d’enfants chantent en signe de bienvenue. Les larmes de joie coulent sur les visages quand le convoi à bord duquel se trouve plusieurs centaines de réfugiés centrafricains traverse la frontière.Gabriel, un habitant de Béloko, n’a pas hésité à venir accueillir ses compatriotes. « Je suis ému de les voir retourner au pays après des années. En ce moment, la RCA a besoin de ses fils et filles. Ensemble, nous allons serrer les coudes pour développer notre cher et beau pays », témoigne-t-il.À lire aussiRetour des réfugiés en Centrafrique [1/3]: le souvenir du départ, «j’ai vu une femme enterrer son bébé mort de faim»Les émotions se succèdent. Dans le bus, Mariama, 23 ans, agite les drapeaux centrafricains et camerounais. Après cinq ans au Cameroun, elle est enthousiasmée de revenir sur la terre de ses ancêtres. « Dans le camp de réfugiés, nous avions de la nourriture, de l'eau potable et des soins de santé. Nos enfants fréquentaient de bonnes écoles. Même si nous étions bien traités, j'ai senti qu'il y avait quelque chose qui manquait. C'est cette forte envie de revenir au pays où on se sent mieux que chez soi », se réjouit-elle.Retour au paysNon loin de cette immense foule qui savoure cet instant historique, certains habitants ne voient pas d'un bon œil ce rapatriement. Devant sa boutique de commerce général, Rodrigue partage le riz et du café avec ses camarades. « C'est une bonne initiative parce que ce sont des compatriotes qui reviennent au pays. Mais je ne peux pas cacher mon inquiétude, explique-t-il. La vie est dure et nous avons tous besoin d’aide et de travail. Je constate que les activités socioprofessionnelles de réintégration ne concernent que les rapatriés. Nous aussi, nous avons besoin d'aide pour relancer notre vie. »Opérateur économique avant la crise, Amadou est heureux de revenir au pays dans l'espoir de reprendre ses activités, mais après dix ans, il a aussi peur de l'inconnu. « Tout ce que je veux, c'est une cohabitation pacifique avec mes frères qui sont restés au pays. Je demande aux autorités de trouver une solution favorable et durable pour tout le monde. La nation a besoin de tout le monde. »Des dispositions sécuritaires sont prises par les forces de l'ordre pour une réintégration apaisée dans toute la Nana-Mambéré. Les autorités locales et le HCR ont également mis en place des programmes de sensibilisation dans les quartiers, villes et villages pour décrisper les tensions et faciliter une cohabitation pacifique.À lire aussiRetour des réfugiés en Centrafrique [2/3]: «Les hommes armés ont tout volé»
4/9/20242 minutes, 13 seconds
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Retour des réfugiés en Centrafrique [2/3]: «Les hommes armés ont tout volé»

Suite de notre série de reportages sur les Centrafricains de retour dans leur pays, alors que le Haut-commissariat des Nations unies pour les réfugiés (HCR) veut faire revenir chez eux 300 000 réfugiés d’ici à 2028. Ils sont déjà plus de 36 000 à avoir emprunté le chemin du retour. Si certains sont heureux d’être revenus chez eux, d’autres sont inquiets parce qu'ils ont tout perdu. De notre envoyé spécial à Baoro,L’air égaré, Aïssatou Adamou est assise sur un amas de briques en argile. Autour d'elle, de hautes herbes et des pièces de charpentes éparpillées, en partie détruites par les termites. Cette femme d'une trentaine d'années ne reconnaît plus sa maison. « Mon père a survécu mais ma mère a été tuée. J'ai fui très loin avec mes petits frères et sœurs. Mon père est encore au Cameroun. Je suis revenue dans l'espoir de reconstruire une nouvelle vie, mais ce que je viens de découvrir ressemble à un coup de couteau en plein cœur. Ma famille a vraiment besoin d'aide », déplore-t-elle. Le temps est à l'urgence et la question de la reconstruction s'impose à tout le monde.Dans le même périmètre, Ibrahim Amino nous amène à proximité d'un cours d'eau. C'est ici qu'il élevait des animaux en 2015. Aujourd'hui, il ne lui reste plus rien. « Quand les rebelles avaient attaqué le village, j’ai fui comme tout le monde vers le Cameroun, laissant derrière moi une centaine de moutons, cabris et bœufs. Cela représente une fortune pour ma famille parce que notre richesse repose sur l'élevage. Hélas, les hommes armés ont tout volé. »Des formations proposées par le HCRPendant qu'il en parle, des larmes coulent le long de son visage. Pour aller de l'avant, Ibrahim Amino participe actuellement à une formation en informatique. « Cette formation gratuite a une durée de six mois, initiée par une ONG et le HCR. On nous apprend les basiques de l'informatique. À la fin, nous aurons chacun un certificat. J'espère pouvoir avoir les connaissances nécessaires pour mettre en place une entreprise multimédia qui pourrait m'aider dans l'avenir », espère-t-il.Et même si l’étape de reconstruction ne sera pas facile, certains se lancent dans l’élevage de poulets. Abdoulaye Mariam et ses amis ont créé l'année dernière le groupement Barco, qui signifie espoir. « Nous avons choisi ce domaine parce que c’est l'un des secteurs qui génère beaucoup d'argent à Baoro. On ne peut pas croiser les bras à tout attendre des ONG, explique-t-elle. Nous avons actuellement 433 poulets sur le marché. C'est ce qui nous aide à reconstruire notre vie sur le plan économique. Le prix des poulets varie de 3 500 à 4 000 FCFA. »Le HCR a lancé l'année dernière un vaste projet de retour et de réintégration des réfugiés centrafricains de l'étranger. Ce programme de cinq ans prévoit le rapatriement volontaire de 300 000 personnes dans les préfectures de la Nana Membéré, Membéré Kadeï et la Lobaye.À lire aussiRetour des réfugiés en Centrafrique [1/3]: le souvenir du départ, «j’ai vu une femme enterrer son bébé mort de faim»
4/8/20242 minutes, 14 seconds
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Retour des réfugiés en Centrafrique [1/3]: le souvenir du départ, «j’ai vu une femme enterrer son bébé mort de faim»

En Centrafrique, les populations qui avaient fui l’ouest et le nord-ouest du pays au plus fort de la crise rentrent progressivement. Entre 2013-2017, plus de 600 000 Centrafricains avaient été contraints de quitter leurs villes et villages pour se mettre à l’abri des violences. Dans ce premier volet, des réfugiés se souviennent de leur départ, de ce qu'ils ont enduré et vu durant leur voyage vers le Cameroun.  De notre envoyé spécial à Baoro,Alors qu’il menace de pleuvoir, Amania écrase des feuilles de manioc dans un pilon. Tout en préparant le repas du soir, bébé attaché au dos, elle se souvient de cette année 2015 où elle a fui la ville de Baoro pour le Cameroun. « Notre village a été attaqué aux environs de 4h du matin. Des hommes armés ont brûlé des maisons, tués nos bétails et plusieurs habitants. J’ai juste le temps de prendre mon fils et de fuir. Dans la brousse, nous mangions des tubercules, des feuilles et des racines sauvages. J’ai parcouru 1 000 km pendant plusieurs semaines avant d’arriver au Cameroun. »Dans ce quartier destiné aux réfugiés revenus chez eux, chacun essaie de reconstruire sa vie en oubliant les traumatismes du passé. À perte de vue, on voit une succession de cases en bâches et en bambous.« C’est ça l’enfer »Appuyée sur deux béquilles, Soraya se lève en titubant pour nous accueillir dans le salon de sa maison en argile. Âgée d’une quarantaine d’années, elle a été touchée par plusieurs projectiles de grenade dans sa concession en 2014. Son corps est couvert de petites blessures cicatrisées. « Mon mari a aussi été touché au ventre. Il a succombé en chemin et nous l’avons enterré au pied d’un arbre dans la brousse. On ne pourra jamais retrouver sa tombe provisoire pour couper le deuil. J’ai été transportée à tour de rôle par mes trois fils jusqu’au Cameroun. C’est ça l’enfer. »Pendant que Soraya s’exprime, Alima sa voisine manifeste le désir de parler. Elle fait s’allonger son garçon de neuf ans sur une natte et raconte. « En fuyant cette guerre, j’ai vu une femme enterrer son bébé mort de faim au pied d’un palmier. Quelques heures après son passage, des bêtes sauvages ont dévoré le corps. Nous avions beaucoup souffert. Mais maintenant, il est temps de reconstruire notre pays. »À lire aussiRCA: le HCR étudie les possibilités de retour des centaines de milliers de réfugiés et déplacésPréparer le retour au paysEntre 2013 et 2017, pendant la crise, plusieurs milliers de Centrafricains ont trouvé la mort. On a aussi enregistré la destruction de villages, de champs, de maisons d’habitations et de greniers. Aujourd’hui, tout est à refaire, selon Olivier Fafa, représentant du HCR.« Nous sommes en train de préparer le retour de 300 000 personnes originaires du sud-ouest du pays. Nous avons planifié de les faire entrer au pays sur une période de cinq ans jusqu’en 2028. Pour que cela soit durable, nous avons prévu un certain nombre d’activités de réintégration dans les zones de retour, c’est-à-dire, reconstruire des écoles, des maisons, augmenter les capacités d’accueil des centres de santé existants, créer les forages, mais aussi donner vie à ces retournés à travers la création d’emploi ».Entre 2017 et 2024, plus de 36 000 réfugiés ont déjà été rapatriés sur la base du volontariat.À lire aussiCentrafrique: «Il y a une réduction du nombre des personnes en besoins humanitaires», selon un représentant de l’ONU
4/7/20242 minutes, 26 seconds
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Harar, ville sacrée de l'islam en Éthiopie

Considérée comme la quatrième ville sacrée de l’islam, après La Mecque, Médina et Jérusalem, Harar est située dans la partie orientale de l’Éthiopie. D’abord fermée au monde extérieur jusqu’à son intégration à l’Éthiopie en 1887, elle devient ensuite un comptoir marchand, ouvert sur le monde, mélangeant les cultures. Mais elle a su garder ses traditions religieuses qui font l’identité singulière de ses habitants, les Hararis. Immersion en plein ramadan dans l’unique ville sainte musulmane d’Afrique. De notre correspondante à Addis-Abeba,Dans les ruelles du centre historique d’Harar, résonne la prière Zikri. Les habitants se retrouvent au petit matin pour chanter pendant des heures. Les croyants dansent au son du tambour dans une ambiance de ferveur religieuse. Une tradition millénaire explique Kimiyat Abdujebar, une habitante d’Harar : « Cet événement s’appelle Badr. Nous célébrons le jour où le prophète Mahomet a gagné la bataille de Badr. »« Beaucoup de gens différents viennent des alentours pour participer à la prière Zikri. Nous attendons encore beaucoup de monde. La prière dure jusqu’à midi, que nous célébrons ici et autour du temple Abadir », précise Adil Selahadin, un autre habitant d’Harar.La plus sainte Les textes sacrés en langue harari ont été écrits sur des manuscrits conservés précieusement dans le musée de la ville. La calligraphie arabe à l’encre noire et rouge recouvre des pages jaunies, ornées de dessins, fourmillant parfois d’annotation. Coran et prières sont restaurés par Elias dans son atelier : « Ces chansons ont 500 ans. Quand le manuscrit est arrivé dans le musée, il était en plusieurs pièces séparées. Il a d’abord été nettoyé et digitalisé avant d’arriver dans cet atelier. Je l’ai recollé ». Elias ajoute ensuite une couverture en cuir, puis imprime dessus des sceaux ornementaux, à la façon harari : « Ici le plus vieux manuscrit a 1 000 ans, près de 1 400 ont été collectés auprès des habitants. »La plus touristiqueUn patrimoine religieux et populaire qui fait de Harar une destination touristique prisée. Pour en faire sa première source de revenus, la ville s’est lancée dans une vaste rénovation qui doit se terminer avant les festivités de la fin du ramadan indique le directeur des musées de Harar, Abdunasir Abdulahi  : « La première étape a été de nettoyer les rues des saletés et de refaire les routes. Puis de faire la peinture avec beaucoup de couleurs différentes pour attirer les enfants et la troisième étape et de reconstruire les murs qui ont été détruits, ce que l’on fait en ce moment. »Plus de 10 000 personnes sont attendues pour l’Aïd. Marqué par trois jours de cérémonies et de performances, ce festival a été inscrit au patrimoine immatériel culturel de l’humanité par l’Unesco en octobre dernier.À lire aussiEn Éthiopie, la crise économique met fin à l'âge d'or du khat
4/6/20242 minutes, 17 seconds
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Rwanda, 30 ans après le génocide des Tutsis: Godeliève Mukasarasi, une vie d'engagement pour les femmes victimes de violences sexuelles [6/6]

C’est le combat de sa vie, la protection et le soutien des femmes victimes de violences sexuelles pendant le génocide perpétré contre les Tutsis au Rwanda. Dès 1994, Godeliève Mukasarasi s’engage en créant l’organisation Sevota pour leur venir en aide. Un engagement social, mais aussi dans la justice et la réconciliation. De notre correspondante à Kigali,Entourée des femmes de son association, Godeliève Mukasarasi commence la réunion par une séance de relaxation, des techniques de tapotement du visage et du cou pour libérer le stress…« Il faut toujours maintenant cet aspect psychosocial, parce que même si le trauma a diminué, le trauma ne guérit pas tout à fait. Il y a des crises. Lorsque c’est le moment des commémorations, tu te rappelles des choses malheureuses que tu as vécues », dit-elle.Une volonté d’aider les groupes les plus vulnérablesDepuis 30 ans, l’association Sevota, créée par Godeliève accompagne des femmes victimes de violences sexuelles pendant le génocide. Une volonté d’aider les groupes les plus vulnérables. « La plupart des femmes survivantes du génocide sont aussi survivantes de violences sexuelles, soit des viols, soit des mariages forcés ou conditionnés. Et parmi ces femmes-là, il y a celles qui ont des enfants nés de viols », indique-t-elle.Le premier groupe de femmes se forme à Taba, la commune de Godeliève, à une trentaine de kilomètres de Kigali. Un engagement également auprès de la justice pour la fondatrice de Sevota, dont les proches témoignent auprès du TPIR en préparation du procès du bourgmestre Jean-Paul Akayesu. Mais en décembre 1996, à quelques mois du début des audiences, la famille est attaquée. « Lorsque les jugements du Tribunal international pour le Rwanda ont commencé, comme mon mari était témoin, il fut fusillé par les infiltrés. Donc c’était pas facile pour moi. Mais comme c’était une œuvre de moi-même, que j’avais commencé, j’ai continué à travailler avec ces femmes-là », explique-t-elle.Le travail de soutien continueEn 1998, Jean-Paul Akayesu est condamné à la perpétuité… Un jugement historique, premier au monde à qualifier les violences sexuelles comme éléments de crimes de génocide. Dans l’organisation Sevota, désormais étendue à 66 groupes de plus de 500 femmes, le travail de soutien continue. « La plupart des femmes étaient restées orphelines. Alors le fait de se visiter, c’est une façon de recréer et de s’autoguérir des traumas. Parce qu’elles considèrent leurs autres amies comme ses soeurs, comme ses tantes », raconte-t-elle.Après 30 ans d’engagement, Godeliève Mukasarasi a encore de nombreux projets, dont la création d’un musée des femmes et d’un jardin pour les Justes situés dans son district, à Kamonyi.
4/6/20242 minutes, 31 seconds
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Rwanda, 30 ans après le génocide des Tutsis: des maisons de retraite pour les rescapés vieillissant dans la solitude [5/6]

Au lendemain du génocide, certains rescapés se sont retrouvés absolument seuls, leurs familles décimées. Pour celles et ceux qui avaient alors déjà un certain âge, reconstruire une cellule familiale ou affective n’a pas toujours été possible. Trente ans plus tard, pour que les rescapés les plus âgés ne vieillissent pas dans le dénuement et la solitude, des maisons de retraites les accueillent. Avant le génocide, il n’y avait pas de maison de retraites au Rwanda. Le gouvernement en a construit quatre depuis 2016, appelées « Impinganzima ». De notre envoyée spéciale,À l’entrée du bâtiment réservé aux femmes, un groupe de résidentes est en pleine partie d’igisoro, un jeu traditionnel rwandais. Autour du plateau en bois ponctué de cavités incurvées dans lesquelles il faut déplacer des graines, un seul homme.Sur 98 pensionnaires, sept seulement sont de sexe masculin. Il y a 30 ans, durant le génocide, les hommes tutsis ont été systématiquement exterminés.Delphine Muterambabazi, la coordinatrice de l’Impinganzima de Huye nous fait visiter les lieux. « Dans chaque chambre, deux lits. Une résidente âgée dort avec une résidente plus jeune qui sera en mesure de se lever et de venir chercher de l’aide si la plus âgée des deux a besoin de quelque chose la nuit. »Les chambres donnent sur une cour intérieure, fleurie et ombragée. Sous la galerie, des résidentes sont assises seules ou en petites groupes. Habillées de jolis pagnes colorés, certaines tissent des paniers. Dans une vaste cuisine, le repas mijote dans d’immenses marmites. Dans quelques instants, le déjeuner sera servi dans le réfectoire. Les repas sont pris en commun autour de grandes tables en bois robustes. Des résidentes participent, volontairement, aux travaux de ménage, de cuisine et de vaisselle. « Beaucoup aiment se sentir actives », nous dit Delphine Muterambabazi avant de nous accompagner près de la maison des hommes, plus petite, plus calme, pour rencontrer deux résidents.Yohanna Ruzigamanzi, 75 ans, vient du secteur de Mata dans le secteur de Nyaruguru : « Avant de venir ici en 2017, je me sentais seul. J’avais tout le temps peur de me réveiller un matin et de découvrir que tous mes voisins étaient repartis se cacher. Quand j’entendais la pluie tomber sur le toit en tôle, j’avais l’impression qu’on venait détruire ma maison. C’était difficile de dormir. J’avais du mal à me nourrir. On me faisait des dons parfois, mais ça ne changeait rien. Ma vie a changé. Ici, on prend soin de moi. J’étais tout maigre. Regardez comme j’ai pris du poids. Et voici ma Chérie chouchou », ajoute-t-il blagueur.À côté de lui, l’octogénaire, Azela Nyirangirumwami : « On m’a dit que mon mari avait été tué à Kibuye, mon fils à Kibungo. Certains de mes proches ont été jetés dans la rivière. Je n’ai pas pu les enterrer. »La résidente de 84 ans s’est retrouvée complètement seule après le génocide, elle avait déjà 54 ans. « Je n’avais rien à dire à mes voisins. Et quand on discutait, on ne faisait que se mentir. Mais ici, avec les autres résidents, on se parle vraiment, on dit ce qu’on a sur le cœur. On prend soin les unes des autres. Quand l’une de nous se sent vraiment mal, on l’encourage, on lui dit que le pire, on l’a déjà vécu. Que rien de plus douloureux, de plus triste ne peut nous arriver. Imaginez ? Imaginez regarder autour de vous et ne plus voir aucun visage familier. Plus d’enfant, plus de mari, plus rien. Quand nous vivions seules, on a toutes eu peur de mourir dans nos maisons et d’y pourrir, mangée par les rats puisqu’il n’y avait plus personne pour se soucier de nous. Mais ici, on s’occupe très bien de nous. Les enterrements sont dignes. Donc, je veux mourir ici. »D’après la coordinatrice du centre, la majeure partie des résidents souffrent de troubles mentaux. L’équipe du centre se prépare à les accompagner au mieux avant chaque commémoration.
4/4/20242 minutes, 20 seconds
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Rwanda, 30 ans après le génocide des Tutsis: le secteur de la santé mentale se prépare aux commémorations [4/7]

Au Rwanda, le 7 avril 2024 marquera le début de 100 jours de commémorations officielles du génocide de 1994 perpétré contre les Tutsis. Il y a 30 ans, selon les Nations unies, plus d'un million de personnes – en majorité des Tutsis, mais également des Hutus, et d'autres opposants au génocide – ont été systématiquement tuées en moins de trois mois. Nous consacrons cette semaine une série de reportages à la société rwandaise, 30 ans après. À l'approche des commémorations, le secteur de la santé mentale se mobilise pour venir en aide aux rescapés les plus vulnérables pendant cette période douloureuse, à travers des formations de volontaires qui seront déployés au cours de la première semaine de deuil. De notre correspondante à Kigali,Au milieu d’une salle d’hôtel, deux formateurs montrent les techniques d’évacuation à un groupe de jeunes volontaires. Parmi eux, Alice Tuyizere, 22 ans, étudiante dans la ville de Musanze, dans le nord du pays. « C’est ma première fois comme volontaire. Je suis Rwandaise, donc je veux aider mes concitoyens, je veux pouvoir les aider du mieux possible. »Cent-vingt étudiants de 40 universités du pays seront déployés pendant les commémorations. À tour de rôle, chacun pratique les techniques de premiers secours enseignées : position latérale de sécurité en cas d’évanouissement, évacuations vers les centres dédiés à la santé mentale dans les cérémonies... Une prise en charge particulière, explique Alice Tuyizere :« J’ai appris beaucoup de choses sur comment aider quelqu’un en crise traumatique pendant les commémorations, comment le calmer, comment lui parler, et l’aider de plusieurs façons. Certaines personnes qui sont traumatisées ne sont pas prêtes à surmonter ce qu’il leur est arrivé. »Crises de panique, hallucinations, flashbacks… L’année dernière, les autorités ont enregistré plus de 2 800 interventions au cours de la première semaine de commémoration. Dans la salle, Athanase Nsengiyumva, psychologue, donne des conseils aux jeunes volontaires sur la prise en charge des crises traumatiques.À écouter aussiRwanda: face au génocide, dans les archives d’IbukaFormations en cascadeCes besoins périodiques sont trop importants pour les 16 psychiatres, 2 000 psychologues et 500 infirmières psychiatriques pratiquants au Rwanda. Depuis février, des formations de personnels soignants généralistes et de volontaires sont organisées pour préparer les commémorations. Des formations en cascade, explique Audace Mudahemuka, coordinateur national du groupe d’étudiants :« On forme trois personnes par université, et ces trois personnes deviennent à leur tour des formateurs. Ils forment à leur tour des étudiants dans leur université pour avoir un grand nombre de personnes avec des compétences de base pour soutenir. »Plus d’un quart des rescapés du génocide souffrent encore de stress post-traumatique. Les besoins en accompagnement psychologique ne s’arrêtent pas à la période de commémoration : selon les autorités, un Rwandais sur cinq est affecté par des problèmes de santé mentale, en majorité par la dépression.À lire aussiRwanda: aux origines du génocide des Tutsis
4/3/20242 minutes, 24 seconds
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Rwanda, 30 ans après le génocide des Tutsis: des génocidaires présumés toujours recherchés [3/7]

Il y a 30 ans, selon les Nations unies, près d’un million de personnes – en majorité des Tutsis, mais également des Hutus et d’autres opposants au génocide – ont été systématiquement tuées en moins de trois mois. Dans certaines régions, les rescapés attendent encore de voir certains génocidaires présumés arrêtés, comme à Gishyita, dans la province de l’ouest du pays, d’où sont originaires les deux derniers fugitifs génocidaires présumés et recherchés par le Mécanisme chargé des derniers dossiers du Tribunal pénal international pour le Rwanda. De notre envoyée spéciale à Gishyita,Responsable local de l’association de rescapés Ibuka, Adrien Harorimana avance vers un bâtiment administratif sur les hauteurs de son village natal de Gishyita. « Ici, c’est le bureau de l’ancienne commune de Gishyita. Sikubwabo Charles, le bourgmestre pendant le génocide contre les Tutsis, travaillait ici », indique-t-il.Face à lui, s’étend à l’horizon la colline de Bisesero, où le survivant s’est réfugié pendant le génocide. L’une des collines où l’ancien bourgmestre Charles Sikubwabo et le commerçant Riyandikayo, les deux derniers fugitifs recherchés par le Mécanisme, sont suspectés d’avoir mené des attaques.« Ce serait très important qu’ils soient traduits en justice. S’ils sont déjà morts, ce serait très triste pour les rescapés. Pour nous, on voudrait les voir jugés et condamnés de leur vivant », espère Adrien Harorimana.Long format RFIJustice internationale, dans les rouages de la lutte contre l’impunitéTraque contre-la-montreDans l’ancienne commune de Gishyita, la vie a repris son cours. Des enfants jouent au ballon devant l’église catholique de Mubuga, où les fugitifs sont accusés d’avoir participé au massacre de plusieurs milliers de Tutsis. À côté du mémorial construit trois ans plus tôt, Vincent Usabyimfura, rescapé, espère encore obtenir justice pour ses proches disparus :« Je voudrais lui dire, à Sikubwabo, que ce n’est pas quelqu’un de bien. Il aurait dû être un exemple, en tant que dirigeant, mais malheureusement, il a participé au massacre. Mais je lui dirais aussi qu’il n’a pas réussi à tous nous tuer. »À écouter aussi«Tu as tué ma sœur ?»: 30 ans après le génocide des Tutsis au Rwanda, rescapés et ex-génocidaires cohabitentQuelques dizaines de mètres avant l’église, d’anciens génocidaires montrent du doigt le croisement en face de l’école du village, point de rencontre, selon eux, des autorités qui organisaient les massacres. « Il y avait des réunions. Ce sont les autorités qui nous ont donné l’ordre d’attaquer, dont Sikubwabo », se souvient Shumi Elamu, libéré après plus de sept ans de prison. « Je voudrais le revoir et qu’ici, on puisse l’accuser directement de ce qu’il nous à pousser à faire, car il nous a appelé à faire du mal. »En cas d’arrestation, les deux fugitifs doivent être extradés et jugés au Rwanda. Trente ans après, c’est une traque contre-la-montre : s’ils sont toujours en vie, Riyandikayo et Charles Sikubwabo sont aujourd’hui âgés de plus de 60 et 80 ans.
4/2/20242 minutes, 20 seconds
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«Tu as tué ma sœur ?»: 30 ans après le génocide des Tutsis au Rwanda, rescapés et ex-génocidaires cohabitent [2/7]

Au Rwanda, le 7 avril 2024 marquera le début de cent jours de commémorations officielles du génocide de 1994 perpétré contre les Tutsi.. Comment vivre ensemble ? Trente ans après, une grande partie de génocidaires sont sortis de prisons et sont retournés dans leur village à côté des rescapés qui ont perdu leurs proches dans les tueries. Au niveau du gouvernement, un ministère de l'Unité nationale a été créé. Sur le terrain, des associations comme l'ONG Interpeace tentent d'aider les villageois à vivre ensemble malgré les traumatismes. C'est notamment le cas dans le district de de Bugesera, anciennement Nyamat. Envoyée spéciale à Bugesera,Rentré de sa parcelle où il cultive bananes, haricots et patates douces, Innocent Gatanazi, 65 ans, nous reçoit dans son salon. Petite pièce sobre, quasiment vide, dans le village de Kabeza. Il a passé 8 ans en prison et fait 4 ans de travaux d’intérêt général : « En prison, je faisais des cauchemars. Je me disais que personne n’allait me pardonner. J’avais peur que les gens que j’avais trahis en tuant leurs proches se vengent et me tuent, raconte Innocent Gatanazi, Une fois dehors, même libre, je rêvais de la prison. Quand je croisais une rescapée, je me disais "Oh non elle m’a vue, elle pense sans doute à ce que j’ai fait". Mvura Nkuvure m’a aidé. »« Ses voisins savaient qu'il avait tué »« Mvura Nkuvure » : (« Tu me soignes, je te soigne », en kinyarwanda) est un programme développé par l’association Interpeace pour des dialogues dans les communautés entre rescapés et anciens génocidaires. Innocent nous conduit chez Aurélie Uwimana. Connue pour ses prêches à l’Église, elle a été choisie pour animer le groupe de la cellule de Musovu.« Quand Gatanazi est sorti de prison, c’est comme s’il était entré dans une autre prison. Il vivait reclus parce que ses voisins savaient qu’il avait tué pendant le génocide. Les premiers temps, personne ne peut regarder vers l’avenir. Que ce soit les ex-détenus ou les rescapés. C’est un long processus, précise Aurélie Uwimana. Les rescapés, quand ils réalisent qu’ils se sentent mieux, disent aux autres de participer. Ceux qui ont commis le génocide, au début, pensent qu’on les invite pour les piéger et les arrêter à nouveau. Mais eux aussi, une fois qu’ils voient que ça aide, ils en parlent à d’autres et nous demandent de créer d’autres groupes. »Àécouter aussiGénocide des Tutsis au Rwanda: «Ce sont des procès hors norme, extrêmement complexes à organiser»« J’étais remplie de haine »C’est dans ce cadre qu'Innocent a revu Françoise Mukaremera cultivatrice, elle aussi, d'un village voisin. Il a tué sa petite sœur de 5 ans en 1994.« Je me méfiais de tout le monde. J’étais remplie de haine. Je voulais tuer ceux qui avaient tué les miens. Puis j’ai rejoint le groupe Mvura Nkuvure. Quand j’ai vu Gatanazi, j’ai eu très peur. J’ai pensé qu’il était là pour me tuer, explique Françoise. Après une première session, une deuxième, une troisième, une quatrième... Je me suis peu à peu calmée. (…) Je lui ai demandé  "c’est vrai que tu as tué ma sœur ?". Il a dit oui. Il a raconté. Il m’a demandé pardon. Après plusieurs rencontres, je lui ai dit que j’avais réfléchi, que j’avais trouvé un chemin pour vivre avec ».Faute de pouvoir proposer un suivi individuel à chaque citoyen traumatisé, les formes de thérapie de groupe apparaissent comme des options. Le défi est de pouvoir le faire à grande échelle car entre 17 000 et 20 000 génocidaires sortiront de prison. Selon les Nations unies, plus d'un million de personnes - en majorité des Tutsis, mais également des Hutus et d'autres opposants au génocide - ont été systématiquement tuées en moins de trois mois.À lire aussiGénocide des Tutsis au Rwanda: «Ce sont des procès hors norme, extrêmement complexes à organiser»À lire aussiRwanda: aux origines du génocide des Tutsis
4/1/20242 minutes, 21 seconds
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Rwanda: 30 ans après le génocide des Tutsis des charniers continuent à être découverts à Ngoma [1/7]

Le 7 avril 2024 marquera le début de cent jours de commémorations officielles du génocide de 1994 perpétré contre les Tutsis. Pour plus de la moitié de la population née après le massacre, les séquelles, les échos, les blessures et les silences sont encore bien présents. Ainsi : trente ans après, des rescapés ignorent toujours où sont les restes de leurs proches et les exhumations de victimes continuent, comme à Ngoma, près de Huyé, anciennement Butare, dans le sud du Rwanda. De notre envoyée spéciale à Ngoma,« Ça, c'est la maison de Hishamunda. Hishamunda, c'était le père de la famille. » Théodate Siboyintore regarde tristement le terrain cabossé devant lui. Le représentant de l'association de rescapés Ibuka pour le district désigne l'emplacement de la maison de la fille d'un génocidaire. Il y a six mois, sous cette maison, des ossements ont été découverts. « Comment on a trouvé les corps ici ? Quand la fille après avoir construit une maison en 2007 a voulu construire une clôture. Et en creusant, là où ils peuvent mettre les fondations, les maçons ont trouvé les corps. »« Ils n'ont rien dit »D'abord une quarantaine, puis des dizaines d'autres sont retrouvés sous la cuisine ou les toilettes. La maison est finalement détruite. Dessous, il y avait un millier de corps, selon Ibuka.Pendant trente ans, les propriétaires du terrain n'ont rien dit. « Ah on se pose beaucoup de questions. Nous vivons avec les gens qui sont comme ça ? Après trente ans, les gens ne veulent pas changer ? Les gens ont toujours cette idée de toujours menacer, toujours mettre les rescapés en danger, en colère, ajoute le représentant de l’association Ibuka. On se pose beaucoup de questions, mais on n'a pas de réponses exactes. » Selon les Nations unies, plus d'un million de personnes - en majorité des Tutsis, mais également des Hutus, et d'autres opposants au génocide - ont été systématiquement tués en moins de trois mois au Rwanda.À lire aussiRwanda: aux origines du génocide des TutsisLes ossements et les habits sont entreposés dans un bâtiment administratif tout proche. De jeunes hommes les nettoient en les frottant dans des bassines. Consolée Mukamana les dépose ensuite délicatement sur de grandes bâches sur le ciment. En 1994, elle avait 14 ans, elle en a 44 aujourd’hui. Mère de cinq enfants, elle a du mal à dire ce qui est arrivé à leurs grands-parents. Trente ans après, elle cherche toujours une trace de sa mère.« Je cherche cette robe »« C'est très important, pour nous, notamment les habits. Quand vous avez perdu quelqu'un et que vous vous souvenez du vêtement que la personne portait quand elle a été tuée, vous cherchez ce vêtement, explique Mukamana. Ma mère portait une robe verte, en pagne. Chaque fois qu'on trie des vêtements, je cherche cette robe. »Un homme étend les vêtements une fois lavés. Un tee-shirt jaune, un vêtement d'enfants à rayure, un tissu fleuri. Alice Nyirabagina, 41 ans, coordonne. Elle est choquée que des gens aient pu vivre des années sur un charnier. « Quand on découvre que la personne dort, mange, fait sa toilette, sur des charniers, c'est très triste, raconte la coordinatrice. Et encore aujourd’hui, ils ne veulent pas parler de ce qui s'est passé alors qu’ils étaient là, ils savaient tout. »La propriétaire de la maison et son père sont depuis en prison et seront jugés. Les corps et les vêtements reposeront au mémorial de Ngoma après une cérémonie organisée pendant les commémorations.À lire aussiGénocide des Tutsis au Rwanda: «Ce sont des procès hors norme, extrêmement complexes à organiser»
3/31/20242 minutes, 20 seconds
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Sénégal: la fierté des habitants de Ndiaganiao, village natal du président élu Bassirou Diomaye Faye

Le pays se prépare à la cérémonie d’investiture du président élu Bassirou Diomaye Faye prévue ce mardi 2 avril, date de la fin du mandat du président sortant Macky Sall. Le nouveau chef de l’État, 44 ans, est originaire de Ndiaganiao, commune rurale située dans le département de Mbour, à une centaine de kilomètres à l’ouest de la capitale. Les habitants du village se disent « fiers » de l’enfant du pays. De notre envoyée spéciale à Ndiaganiao, Ça n’arrête pas dans la cour de la maison familiale. Voisins, amis, responsables politiques ou journalistes défilent pour féliciter Samba Faye, le père du nouveau chef de l'État assis devant la porte en boubou bleu : « Quand il a été élu président, ça a surpris tout le monde ! Je ressens de la fierté, je suis content et je remercie Dieu. » L’octogénaire a longtemps été chef de village et militant du Parti socialiste. Quels conseils donne-t-il à son fils ? « Il faut qu’il s’occupe des populations avant de s’occuper de ses parents. On l’a élu pour ça, pour qu’il aide les Sénégalais. Les gens veulent du changement. Il doit travailler pour tenir ses promesses. » Ndiaganiao se trouve au bout d’une piste sablonneuse en mauvais état. Autour, des baobabs et des terres agricoles. Partout, des affiches et inscriptions au nom du nouveau président. Mor Sarr est un ami de Bassirou Diomaye Faye depuis le collège. Il se souvient d’un élève très sérieux, travailleur et attaché à sa communauté : « Il était brillant, surtout dans les matières littéraires. Les soirées ce n’était pas notre dada. C’était quelqu’un qui passait tout son temps, à part l’école, à côté de sa mère. Il jouait au football, c’est un bon joueur, mais il n’a pas d’autres fréquentations. »À lire aussiSénégal: qui est Bassirou Diomaye Faye, passé en un éclair de la prison à la présidence?« La politique, c'est arrivé tard »Lorsqu’il est parti à Dakar pour ses études, est-il resté proche de ce terroir en pays sérère ? « À chaque fois que les cours s’arrêtaient à l’université, il rentrait pour cultiver les champs. Avant même de s’inscrire à l’université, c’était le programme qu'il avait prévu pendant ses vacances scolaires, faire paitre les chèvres et les moutons en brousse ou cultiver les champs, précise son ami. La politique, c'est quelque chose qui est arrivé tard dans sa vie. »Sur son téléphone, Léopold Diouf, enseignant, nous montre une photo de jeunesse : « C’est la première réunion du Pastef à Ndiaganiao. Je suis là, le président est là. »Depuis, il a rejoint la coalition Benno Bokk Yakaar du président sortant Macky Sall, mais souhaite bonne chance à l’enfant du pays : « L’espoir est grand. D’abord, il faut la réconciliation, la justice, la baisse des prix et l’emploi des jeunes. Il est obligé d’avoir des résultats. Le connaissant, il va réussir », ajoute Léopold Diouf.Devant l’ancienne école primaire de Bassirou Diomaye Faye, Bineta Diouf, 13 ans, pour elle, le nouveau président est un modèle inspirant : « Bassirou Diomaye Faye est un bon exemple pour moi. »À lire aussiSénégal: de qui Bassirou Diomaye Faye va-t-il s’entourer pour mener son projet?
3/30/20242 minutes, 25 seconds
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Gabon: immersion au coeur de la formation des parachutistes

Au Gabon, trois compagnies des parachutistes gabonais ont réalisé des exercices grandeurs natures visant la libération d’une partie du territoire occupée par une armée étrangère. Pour cela, l’armée a projeté sur le terrain des paracommandos. Le Gabon a fait appel à un avion de l’armée de l’air française pour projeter les troupes. RFI a suivi la formation des commandos qui étaient sur le point de prendre leur vol. Avec notre correspondant au Gabon, Zone militaire de l’aéroport de Libreville. Alignés comme à l’école, les 75 soldats gabonais, lourdement équipés, reçoivent les dernières consignes de leurs instructeurs. L’inquiétude est palpable mais tous bombent le torse car sauter est un moment de gloire pour les para-commandos. « C'est un grand jour. C'est vrai qu'il y a tout le stress, mais on est content d'être là et on est prêt pour le saut ! », raconte l'un d'eux.À quel moment est-il le plus difficile d'être un parachutiste ? « Le moment le plus difficile, c'est au sortir de l'avion. Après, c'est un jeu d'enfants », selon l'un d'entre eux. « Le plus difficile, c'est la sortie de l'avion et l'atterrissage. Si nous n'avons pas bien assimilé ça, on peut être sûr qu'à l'atterrissage, on risque un bobo », ajoute cet autre parachutiste.Le pilote de l’avion de type Casa venu de Lyon, en France, met les moteurs en marche. Les instructeurs galvanisent la troupe. L’embarquement est très rapide. L’adjudant Kevin de l’armée française est le chef de cabine. « On quitte l'aéroport pour environ vingt minutes de vol avant largage. C'est là où le cœur bat la chamade. Tant que la porte n'est pas ouverte, ça va encore. C'est quand la porte s'ouvre que l'on entend plus personne parler », explique-t-il.À bord, la pression monte. Un bouton rouge s’allume dans l’avion. Tous les sauteurs sont debout. Les cœurs battent la chamade. Les portes s’ouvrent, et c’est parti. « Tout s'est passé comme prévu. Impeccable. On a les comptes-rendus qui remontent par radio, pas de blessé, impeccable », explique l'adjudant.L’exercice simule la libération d’une partie du territoire occupée par une force ennemie. Les soldats qui viennent de sauter doivent être rapides, agressifs et courageux pour déloger l’ennemi.À lire aussiAu Gabon, une série de primes versée aux militaires très commentée
3/29/20242 minutes, 22 seconds
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Afrique du Sud: dans le Township de Langa, la mauvaise alimentation provoque de l’obésité

Après la crise sanitaire liée au VIH débutée dans les années 90, la ville du Cap est confrontée à un autre fléau : les maladies non transmissibles et l’obésité. Le Cap est une des villes où le taux d’obésité est le plus élevé au monde. En cause, une alimentation de mauvaise qualité et pas équilibrée. Mais comment bien manger quand on habite un township comme celui de Langa, le plus vieux de la ville. Entre des maisons en brique multicolore et des baraques en tôle, difficile de trouver un espace vert. Pourtant, juste après la salle de billard, on aperçoit un bout de jardin. Paul Molitzani, ancien fermier à la retraite : « J’ai commencé à cultiver ce jardin, il y a quatre ans. Mais comme il n’y avait aucun endroit pour cultiver, je me suis installé sur une décharge. J’ai mis 3 mois pour tout nettoyer et pouvoir en faire un jardin. Ensuite, j'ai planté des légumes. C’est pour ça que je suis en pleine forme. J’ai 73 ans. Je n’ai aucune maladie parce que je mange des produits frais. »Trouver un terrain n’est pas la seule difficulté, Kurt Ackerman de l’association pour l’alimentation et l’agriculture urbaines : « L’accès à la terre, aux engrais, aux semences, sont un vrai problème ici à Langa. Les agriculteurs doivent quitter la communauté pour aller chercher ce dont ils ont besoin. C’est cher et ils sont en transport en commun donc ils ne peuvent pas ramener grand-chose dans un bus ou un taxi. C’est pour ça qu’on a créé une coopérative, pour grouper les commandes, avoir de plus grosses quantités à de meilleurs prix tout au long de la saison. »Une population à risqueKoma gowi, une jeune habitante de Langa, discute avec la propriétaire d’une rôtisserie. Au menu de la viande évidemment, mais pas un seul légume. Elle veut donc sensibiliser sa communauté aux bienfaits d’une nourriture équilibrée : « J’ai commencé à m’intéresser à la nutrition pour des questions de santé. Je ne voulais pas devenir obèse, avoir des difficultés à respirer à cause du surpoids. Mais pour ça il faut être informé. »Au Cap, 70% des femmes de plus de 15 ans et 60% des hommes sont en surpoids. Jane Battersby de l’université du Cap : « Les gens travaillent souvent loin de la communauté. Donc si vous avez 2 h de transport à l’aller et 2 h au retour, vous n’avez pas le temps de préparer un repas traditionnel sain et équilibré. Vous achetez donc des plats déjà préparés. Mais comme vous n’avez pas l’électricité, ça restreint encore vos possibilités. Si vous n’avez pas de réfrigérateur, vous ne pouvez rien conserver. Donc votre régime alimentaire est profondément modifié par votre environnement. Et pour changer cela, c’est compliqué. Il faut agir dans différents secteurs. »En 2018, l’Afrique du Sud a instauré une taxe sur les boissons sucrées pour limiter le fardeau de l’obésité. Mais la population des townships, victimes de fortes inégalités, reste la plus à risque.À lire aussiConséquences de l'obésité dans le monde: «19 maladies produites» par ce fléau
3/28/20242 minutes, 15 seconds
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La cathédrale de Carthage rouverte au public les soirs de ramadan

Elle fut l’un des lieux de culte catholiques les plus prestigieux d’Afrique. La cathédrale de Carthage – édifiée à la fin du XIXe siècle à l’emplacement même où le roi Louis IX, dit Saint-Louis, aurait rendu l’âme – est ouverte au public tous les soirs de ramadan. Un mois sacré où les Tunisiens aiment sortir après la rupture du jeûne. De notre correspondante à Tunis,Il est 21 heures, les premiers visiteurs arrivent tout doucement, presque timidement. Érigée sur la colline de Byrsa, à Carthage, la cathédrale fait partie du paysage urbain des Tunisois, mais peu sont ceux qui y avaient déjà mis les pieds.Haïfa, expert-comptable de 39 ans, a sauté le pas avec ses deux petits garçons : « Les enfants me demandent toujours "mais c’est quoi ce grand palais là-bas ?" Moi-même, je n’avais pas d’idée approfondie de la question et de l’histoire du lieu. Alors, je leur ai dit : "allons-y, c’est l’occasion !" »Des travaux de réhabilitationUn palais, avec ses 174 colonnes, son dôme bleu et ses dorures, la cathédrale de Carthage est à la fois imposante et apaisante.« En fait, le charme de la cathédrale me prend, m’envahit toujours. Pendant la journée, mais surtout pendant les soirées, c’est le calme absolu », s'émerveille Salma Guenounou, étudiante en architecture en cinquième année. Une ambiance un peu mystique la nuit, « surtout quand il n’y a pas beaucoup de visiteurs. Tu as l’opportunité d’errer, de te promener, d’apprendre un peu plus toujours, c’est génial », ajoute-t-elle.C’est ici même que Saint-Louis aurait rendu son dernier souffle. Ici même qu’histoires de Tunisie et de France se mêlent, une fois encore. Emin Turki est l’un des architectes qui supervisent les travaux de réhabilitation. Ravalement de façade, reprise des vitraux, renforcement de la coupole, mais surtout, permettre aux Tunisiens de renouer avec un pan de leur passé.« Le patrimoine – ou ce qu’on appelle le patrimoine colonial – n’a pas été reconnu en tant que patrimoine jusqu’à il y a quelques années. Quelque part, la révolution a permis de retrouver ce lien avec l'histoire récente de la Tunisie, explique Emin Turki. C’est une partie de nous, c’est une partie de notre histoire, au même titre que le patrimoine carthaginois, romain, arabo-musulman. Toutes les civilisations qui ont traversé ce pays. »Ouverte aux visiteurs jusqu’en juin, la cathédrale de Carthage va ensuite se refaire une beauté. Une grande réouverture, en même temps que le musée de Carthage, est prévue pour 2027.À lire aussiTunisie: Tabarka et Aïn Draham, destinations privilégiées de l’écotourisme
3/28/20242 minutes, 28 seconds
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Maroc: des migrants subshariens refoulés dans le sud du pays

Au Maroc, les candidats à l’immigration vers l’Europe sont toujours nombreux à être sur le territoire chérifien. Les routes vers l’Espagne, des Canaries au détroit de Gibraltar, sont extrêmement surveillées, les migrants sont régulièrement éloignés manu militari des frontières et refoulés vers le centre du pays. C’est le cas de Béni Mellal, une ville étudiante et agricole au cœur de l’Atlas. De notre correspondant de retour de Béni Mellal,Il suffit de se balader dans les principales artères de la ville pour repérer Pierre-Olivier. Ce Camerounais d’une quarantaine d’années, se trouve au feu rouge d'un carrefour avec plusieurs camarades. Comme beaucoup de Subsahariens ici, il doit mendier pour survivre.Sa grande silhouette est soutenue par des béquilles, blessure qu’il doit à une tentative de franchissement de la frontière vers l’Espagne à Melilla, une des deux seules enclaves européennes sur le continent africain. Il a tout tenté pour rejoindre l’Europe, y compris la traversée vers les Canaries au départ du Sahara occidental.« De Laâyoune, j'ai essayé d'aller vers les îles Canaries. Malheureusement, il y a eu un naufrage et il y a eu une déportation où on arrêtait tous les immigrés pour les faire partir de Laâyoune. Et quand on les arrête, on les rejette de ce côté de Béni Mellal et dans diverses villes », témoigne Pierre-Olivier.Documents d'identité confisquésAdamu n’a pas eu le temps d’essayer de franchir la frontière avec l’Europe. À son arrivée au Maroc, il affirme que ses documents d’identité lui ont été confisqués par la police aux frontières. Il vient du Cameroun anglophone et souhaitait demander le statut de réfugié.« J’ai essayé d’aller à Rabat pour récupérer mes documents, mais sur le chemin, j'ai été envoyé dans cette petite ville. Nous sommes des bannis, des illégaux qui ne peuvent pas aller dans les grandes villes. Je voudrais récupérer mes papiers et m’enregistrer comme réfugié, mais le bureau est à Rabat. J’ai essayé d’y aller deux fois, mais je n’y arrive pas, il y a trop de contrôles et ils me renvoient ici à chaque fois », déplore-t-il.Découragés par cette situation, les candidats à l’exil choisissent parfois de s’installer pour quelque temps sur place. Mais trouver du travail, explique Bayo Paul Dako, médiateur culturel de l’ONG italienne Progettomondo, n’est pas toujours chose aisée. « Des personnes qui ont plus ou moins une proximité culturelle avec la population marocaine, comme les Soudanais par exemple, ça peut plus ou moins être facile, et pour d'autres personnes, ça peut être un peu plus compliqué. Mais en général, les personnes travaillent sur les chantiers en tant que main-d'œuvre, ou bien dans les champs d'olives ou d'agrumes. » D’autres, comme Moussa, ont choisi une autre voie. Le jeune homme de 25 ans fabrique lui-même des bijoux qu’il vend tous les jours au marché. Après quatre ans de tentatives, il dort aujourd’hui dans son propre appartement et rêve désormais d’un avenir au Maroc.« Pour aller en l'Europe, c'est très difficile et je peux me retrouver peut-être à perdre 10 ans de ma vie comme ça. Du coup, qu'est-ce qu'il faut faire ? Est-ce que ce n'est pas mieux de chercher à l'intérieur de la société marocaine et voir, avec le temps, si j'ai une carte de séjour, je peux peut-être commencer à faire du commerce international », espère Moussa.Depuis le renforcement des contrôles aux frontières européennes en 2022, de plus en plus de candidats à l’exil envisagent, comme Moussa, de s’installer au Maroc ou de rentrer chez eux. À écouter aussiLes Canaries : la route migratoire la plus mortelle vers l'Europe
3/27/20242 minutes, 37 seconds
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Guinée: 40 ans après la disparition de Sékou Touré, une mort à l'époque indicible

C’était il y a 40 ans, la mort d’Ahmed Sékou Touré. Le 26 mars 1984 mourait, à Cleveland aux États-Unis, le père de l’indépendance guinéenne, lors d'une opération de chirurgie cardiaque. Après 25 ans d’un pouvoir autoritaire et sans partage, les Guinéens ont bien du mal à faire face à la nouvelle. Les premières heures, c’est le silence qui s’impose.
3/25/20242 minutes, 21 seconds
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Côte d'Ivoire: la Camerounaise Kristine Tsala à l'honneur avec l'exposition «Fantasmagorie» à Abidjan

La Windsor Gallery d’Abidjan accueille depuis vendredi 22 mars la première exposition solo de l'artiste camerounaise Kristine Tsala, « Fantasmagorie ». Visite guidée. De notre correspondante à Abidjan,Les quinze tableaux de Kristine Tsala qui composent cette exposition sont réalisés à la peinture aquarelle et acrylique, en jouant sur les reliefs et les superpositions, au point de ressembler parfois à des collages. Entre l’abstrait et le figuratif, ils représentent des silhouettes humaines fragmentées, à la fois miroirs de l’artiste, explique-t-elle, et incarnations d’une humanité universelle.« Avec la maturité, parce que la quarantaine passée, j’ai vraiment eu le besoin de me connecter à moi-même et d’analyser les choses de l’intérieur. C’est un appel à se connecter à soi-même… Je prends un exemple : vous avez les carreaux noirs et blancs qui symbolisent l’équilibre, le jour et la nuit. C’est la somme des énergies négatives qui vous pousse à développer le caractère et le charisme que vous avez aujourd’hui. Ce que nous avons à l’intérieur de nous, ce n’est ni bon ni mauvais, c’est l’équilibre. »Force et vulnérabilitéLa plasticienne camerounaise, qui réside à Abidjan depuis deux ans, dit avoir voulu se présenter au public de Côte d'Ivoire dans toute sa force et sa vulnérabilité. C’est cette sincérité qu’a appréciée la commissaire d'exposition de la galerie Windsor, Jessica Cissoko, qui salue la singularité du travail de Kristine Tsala.« La première fois que je me suis retrouvée face à une œuvre [de Kristine Tsala], j’ai été vraiment surprise, presque envoûtée par son travail, un travail totalement immersif. Quand on est face à une œuvre de Kristine Tsala, on a l'impression de rentrer dans un univers différent, dans son univers à elle, et c’est ce que j’ai essayé de transmettre au travers de la scénographie. Son travail s’adresse bien entendu aux Ivoiriens, mais aussi à tous nos visiteurs internationaux. »Les œuvres de Kristine Tsala resteront exposées à la galerie Windsor pendant un mois, jusqu’au 26 avril.
3/24/20242 minutes, 8 seconds
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RDC: le rap pour mettre des mots sur les maux des shégués

Les shégués sont ces enfants des rues de Kinshasa ; filles, garçons de tous âges qui vivent de la mendicité, de petits boulots et du vol à la tire. Derrière un quotidien teinté de violence se cachent aussi des histoires familiales douloureuses. Un centre culturel, Mokili Na Poche, accueille certains enfants la journée. Au programme : activités culturelles pour se reconnecter à la société. Et l’activité qui cartonne : l’enregistrement d’un album de rap. Un moyen pour eux de se raconter à travers des morceaux de musique. De soigner des traumatismes et de reprendre confiance en soi dans une société qui les rend invisibles.
3/23/20242 minutes, 31 seconds
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RDC: le rap, un réconfort dans le calvaire des «shégués», ces enfants des rues de Kinshasa

En RDC, direction les rues de Kinshasa pour partir à la rencontre des «shegués». Ce sont ces enfants, filles et garçons de tous âges, qui vivent de mendicité, petits boulots et de vol à la tire. Derrière un quotidien teinté de violences se cachent aussi des histoires familiales douloureuses. Pour rendre leur quotidien supportable, certains de ces enfants trouvent du réconfort au centre culturel Mokili na Poche où ils écoutent toute la journée de la musique, et notamment du rap. À écouter aussiRDC: enfant des rues, une histoire de pauvreté à Kinshasa
3/22/20242 minutes, 17 seconds
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Kenya: «cartels» et gouvernement se livrent à une autre guerre de l’eau dans les bidonvilles

Ce 22 mars, c’est la journée mondiale de l’eau. Dans les quartiers informels de la capitale du Kenya, une bataille se joue autour de l’accès à « l’or bleu ». Avec une urbanisation grandissante, la précieuse ressource est disponible en quantité trop faible pour répondre aux besoins de la population de Nairobi. Dans les quartiers où les habitants n’ont pas accès à l’eau courante, elle est devenue une substance trafiquée par des vendeurs qui rivalisent les uns avec les autres et défient l’État. De notre correspondante à Nairobi,À Mathare, quartier informel de Nairobi, les points de vente d’eau pullulent. Les habitants n’ont pas l’eau courante et la ressource est rationnée. Alors, lorsque les robinets coulent, des queues se forment. Florence est mère au foyer de trois enfants. Elle est venue remplir ses bidons. « Où je vis, il n’y a pas d’eau et ceux qui la font venir la vendent trop cher, le jerrican de 20 litres y est à 20 centimes. Ici, c’est à moins d’un centime, ce qui me permet de garder de l’argent pour manger. »Derrière elle, Kennedy Ouno, le vendeur, récupère les paiements : « Je double le prix quand il y a des pénuries. Vous savez ici, certaines personnes se connectent de manière illégale aux tuyaux pour vendre de l’eau. Ce qui réduit le débit ou même crée des pénuries. Il faut aussi constamment faire des réparations parce que les tuyaux passent près des eaux usées donc chaque faille risque de contaminer l’eau. »Plus loin, Samuel, lui, n’a plus d’eau à son point de vente depuis trois semaines. Il accuse ceux qu’il qualifie de « cartels » d’avoir fermé son robinet. Une hypothèse plausible pour Tobias Omufwoko. PDG de la Wash Alliance, une organisation de plusieurs acteurs du secteur. « Certaines personnes dans ces quartiers informels, souvent en connivence avec les agents de la compagnie d’eau, vont par exemple fermer une ligne pour créer une pénurie et ensuite aller vendre leurs bidons. On les appelle des cartels parce que ces individus travaillent de manière illégale, en collaboration avec des acteurs du secteur formel. Ils veulent battre le système, mais ils appauvrissent les pauvres en leur vendant de l’eau plus chère. »À lire aussiJournée mondiale de l'eau: «Ce qui inquiète, c'est l'eau nécessaire à la production agricole»Une police de l'eauLe gouvernement estime perdre plus de 70 millions d’euros par an en revenues non collectés, en partie à cause de ce vandalisme. Pour y faire face, les autorités ont déployé début 2023 une police de l’eau. 400 hommes à travers le pays, d’après Samwel Alima, secrétaire d'État chargé de l’eau. « L’objectif de cette police, c'est de surveiller les actes de destruction et d’arrêter ceux qui les commettent. Il faut mettre fin à ce système. La population a besoin d’eau. Les policiers contrôlent aussi les connexions illégales. Nous voulons que chacun paye, ces revenus nous permettent d’assurer la maintenance du réseau pour qu’il fournisse de l’eau de manière constante. »Samwel Alima vante le bilan de cette police de l’eau. Mais à Mathare, beaucoup sont sceptiques. Ils déplorent la corruption et dénoncent la connivence des vendeurs légaux et illégaux, un mauvais état du réseau et surtout, un manque d’eau pour répondre aux besoins de la capitale.Pour aller plus loinJournée mondiale de l'eau
3/21/20242 minutes, 18 seconds
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Comores: hommage à Mtswamwindza, fondateur de l’islam dans l'archipel, à l’occasion du ramadan

Aux Comores, en cette période de ramadan, on se souvient des pères fondateurs de l’Islam dans l’archipel. L’une de ces personnalités, Mhasi wa Fesimayi, plus connu sous le nom de Mtswamwindza, a joué un rôle central dans l’islamisation de l’archipel. Notre correspondant, Abdallah Mzembaba, s’est rendu dans le village dont il est originaire, Ntsaweni où le Scout Kachandar organisait une conférence en sa mémoire. De notre correspondant de retour de Ntsaweni,Vivant à l’époque du prophète Mohamed, Mtswamwindza est reconnu comme le premier pèlerin comorien et le principal acteur dans la propagation de l’islam dans l’archipel. Dimanche dernier, Taandhati Mohamed Adria, employée à la présidence des Comores, assistait, comme d’autres jeunes, à une conférence commémorative pour Mtswamwindza. « Depuis longtemps, je me sens fière d’être née à Ntsaweni d’où est originaire Mtswamwindza, lui qui est à l’origine de l’islam dans le pays. Il n’y a pas plus grande fierté que celle-là. »À la médiathèque de la ville, ancien palais royal, les jeunes manifestent un vif intérêt pour cet homme et son histoire. Une histoire qui semble avoir commencé par un concours de circonstances. Aladine Aly Mohamed, est enseignant d’histoire et c’est lui qui anime la conférence : « Des Arabes omanais et yéménites qui faisaient leur commerce sont venus vers la Côte Nord, nord-ouest, près de l’ancienne cité de Ntsaweni puis ils ont chaviré. Il y avait des pécheurs de Ntsaweni qui les ont trouvés et qui les ont ramenés ici. »Cette rencontre est déterminante. Ces naufragés discutent avec leurs hôtes du prophète et de l’émergence d’une nouvelle religion en Arabie. Celui qui n’est pas encore appelé Mtswamwindza décide alors d’aller en Arabie à la rencontre de ce nouveau prophète.Introduction de l'islam au ComoresSur place, il découvre l’islam, les califes, ainsi que la construction et les danses arabes. Après plus de vingt ans d’exil, Mtswamwindza décide de retourner aux Comores, où il fonde une école coranique et initie les habitants à la nouvelle religion, transformant ainsi les traditions locales. Au VIIe siècle, une mosquée est construite, qui atteste encore aujourd’hui de l’ancienneté de l’islam dans l’archipel, bien avant l’arrivée des Arabes. « C’est en décembre 2010 qu’il y a eu des fouilles archéologiques. Elles devaient dissiper les doutes sur cette histoire. C’est un bouleversement total dans notre histoire ».Mtswamwindza ne se contente pas d’enseigner la religion, il transforme aussi les mentalités, d’où son surnom. L’islam s’entrelace avec les coutumes locales pour façonner la civilisation comorienne actuelle. Depuis sa disparition, de nombreux lieux et entités portent son nom à Ntsaweni, garantissant ainsi son souvenir. À Ntsaweni, une structure, le Scout Kachandar, transmet l’histoire de Mtswamwindza aux plus jeunes.Mtswamwindza repose désormais avec Mohamed Ibn Outhman dans un mausolée à côté de la mosquée qu’ils ont construite ensemble au VIIe siècle. Chaque année, sa commémoration a lieu le lendemain de l’Aïd al-Adha.À lire aussiDans plusieurs pays africains, l'entame du ramadan entre partage, tradition et problèmes de budget
3/20/20242 minutes, 21 seconds
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Côte d’Ivoire: une adaptation de «L'Avare» joué à Abidjan pour dénoncer les vices de la société

En Côte d’Ivoire, L’Avare va être présentée au public les 21 et 22 mars, dans une version ivoirienne de cette célèbre pièce de théâtre de Molière écrite au XVIIe siècle. Mise en scène par Abass Zein et jouée par une palette d’artistes locaux qui font référence, cette comédie montre à quel point les gens de notre société vivent au-dessus de leur image. Le tout, interprété dans un subtil mélange d’argot ivoirien et d’alexandrin. À lire aussiCôte d’Ivoire: première représentation pour la pièce événement «Benguiste Story»
3/19/20242 minutes, 22 seconds
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Gabon: les habitants de Libreville en proie à la canicule et à la montée des eaux

La canicule bat son plein au Gabon. Les prévisions météorologiques affichent des températures proches des normales de saison, mais le ressenti, lui, est très différent : la chaleur est perçue de manière plus intense que d’habitude. Malgré ces fortes chaleurs, le gouvernement déconseille la fréquentation des plages, à cause d’un autre phénomène beaucoup plus dangereux, constaté la semaine dernière : la montée des eaux de la mer.
3/18/20242 minutes, 18 seconds
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Tchad: malgré la transition, la jeunesse est restée gangrénée par le chômage

Au Tchad, une des principales frustrations de la population, c’est le difficile accès des jeunes au marché de l’emploi. Le faible tissu économique ne permet pas d’inclure la masse des jeunes, notamment diplômés, qui se retrouvent sans emploi. Sur ce point, beaucoup estiment que la transition a échoué. De notre envoyé spécial à Ndjamena,Étudiante en licence de communication des entreprises, Charlotte s’interroge pour l’après-diplôme, partagée entre confiance en elle et inquiétude face à un marché de l’emploi verrouillé.« Ici au Tchad, pour trouver un travail, c'est un peu difficile. Si tu n'as pas quelqu'un qui travaille quelque part et quelqu'un avec qui tu peux te mettre en contact pour avoir un emploi, ça ne fonctionne pas du tout », pense l'étudiante. « Nous avons des dirigeants qui ne font pas leur boulot, ils ne pensent qu'à eux alors que les jeunes sont dans les rues et n'ont rien. Ils font des promesses, mais rien de bon jusque-là », poursuit Charlotte.À écouter aussiAppels sur l'actualité - Être étudiant à Ndjamena en 2024Avec l’augmentation de la population, les rangs des jeunes diplômés sans emploi grossissent. Il faut donc se débrouiller, explique Hamza.« Il y a beaucoup de jeunes qui font les "clandos". On les appelle communément les "clandoman". À part ça, même au marché, il y a les jeunes diplômés qui font les activités appelées "ngoundja", les ventes de friperie, tout ça. Ils font ça au marché et c'est partout comme ça », décrit-il.Faute de trouver un travail après son master, Hamza s’est décidé à lancer une entreprise de sérigraphie avec l’aide de son oncle. « On est là encore, on entreprend au quartier comme ça. Mais c'est difficile l'entrepreneuriat, même ici au Tchad, tant que tu n'as pas un réseau autour de toi. Ce sont les amis, les frères, les cousins.... Ce sont eux qui viennent payer ta marchandise. »« La jeunesse tchadienne en a marre des promesses »Ancien activiste dans la société civile, Casimir rêve de monter une chaine vidéo. Il déplore la situation actuelle de la jeunesse.« Nous avons deux choses à faire. D'abord la volonté politique : par exemple, ici, il y a l'intégration qui s'annonce. Il faut respecter l'égalité des chances et également encourager les investisseurs », soutient Casimir, qui ajoute : « Il faut un climat de paix. Nous, la jeunesse tchadienne, on en a marre des promesses. À un moment donné, on risque même de créer une institution de promesses ici au pays », souffle-t-il.À écouter aussiTchad: une période de transition qui n'a pas satisfait tout le mondeLa fonction publique ne suffit pas, et le secteur privé est trop faible. Le gouvernement reconnait un problème social de fond. Son porte-parole Abderramane Koullamalah souligne que la transition n’a pu affronter tous les défis.« Si la politique d'insertion des jeunes a été ignorée durant plusieurs années, ce n’est pas au président Mahamat Idriss Déby qu'il faut rendre comptable de ça. Il a recruté énormément de jeunes dans la fonction publique. La fonction publique ne peut pas être un endroit pour faire du recrutement, parce que nous allons faire exploser le budget de l'État. »Les jeunes diplômés sans emploi espèrent que le sujet prendra une place majeure dans les programmes des candidats à la présidentielle du 6 mai.
3/17/20242 minutes, 23 seconds
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Centrafrique: quand il y a plus d'un siècle, une météorite tombait sur Bangui

Il y a plus d'un siècle, le quartier du Lando, dans le 4e arrondissement de la capitale centrafricaine, était le principal fief de la tribu des N'Dris. Les autres ethnies y étaient rejetées, maltraitées et tuées. Un jour, au début des années 1900, une météorite est tombée dans le secteur. La légende dit qu'à la suite de cette chute, une série de malheurs s'est produite dans les rangs des N'Dris et que ceux-ci ont fini par fuir. Aujourd'hui, ce quartier abrite toutes les communautés. De notre correspondant à Bangui,Niché dans une vallée à l'est de la capitale, Lando est un quartier légendaire. À l'instant où le soleil passe son zénith, nous arrivons à l'endroit où la météorite est tombée il y a un siècle. Le terrain est accidenté, et on ne tarde pas à distinguer ce qu'il reste de l'astéroïde. Un morceau de roche de 50 cm de long et 30 cm de large, noir et calciné.Sidi, l'un des sages de ce quartier, raconte la légende de cette météorite : « Cette météorite était tombée parce que les N'Dris commettaient beaucoup d'actes inhumains sur les autres tribus. Ils étaient à l'origine d'agressions physiques et même de tueries. Ils n'acceptaient pas l'installation des autres tribus dans ce quartier qu'ils considèrent comme les leurs. » À lire aussiArchéologie: «le plus vieux cimetière d'Afrique de l'Est» découvert au Kenya« Cette météorite a apporté un mauvais sort dans le rang des N'Dris »Après la chute de cette pierre céleste, plusieurs cas de malheurs étaient enregistrés dans le rang des N'Dris. Danfodjo est l'actuel chef du quartier Lando. « À l'époque, dit-il, tout le monde remarquait la chute spectaculaire de cette météorite comme une boule de feu. Et dès le lendemain, les N'Dris commencèrent à perdre des membres importants de leurs communautés. Cette météorite a apporté un mauvais sort dans le rang des N'Dris. Tous les jours, on enregistrait plusieurs décès et partout, c'était le deuil dans le quartier. »  Au bout d'une semaine, alors que le malheur persiste, ils décident de fuir le secteur, selon le chef.« Après ces drames, les N'Dris ont décidé de partir très loin, abandonnant ainsi le quartier et leurs biens. Ils se sont finalement installés au quartier Kassaï, à Kaïmba ou encore derrière la colline, en face. C'est comme ça que les autres communautés ont pris le contrôle du quartier. Aujourd'hui, quelques familles des N'Dris tentent de revenir ici après un siècle. »À écouter aussiQuels sont les mondes oubliés d’Afrique? Une histoire qui perdure chaque jourTous les jours, des religieux, des curieux et même des touristes viennent découvrir l'histoire de cette pierre. Blandine a construit sa maison à deux mètres de l'endroit. « Ici, chacun à son interprétation, explique-t-elle. Les uns pensent que c'est une pierre qui porte malheur, d'autres disent que c'est un être humain qui s'est transformé. Certaines personnes ont peur de l'approcher ou la toucher. Mais depuis que je vis ici avec ma famille, on n'a rien constaté de mal. »Certains habitants prennent leurs distances avec cette légende et relativisent la place de la météorite dans l’histoire des N'Dris. Selon eux, ce sont les tensions intercommunautaires qui ont plutôt poussé ces derniers à quitter le secteur.
3/16/20242 minutes, 17 seconds
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La langue française, telle qu'elle est parlée dans le sport congolais

La semaine de la langue française débute ce samedi 16 mars. Une semaine placée sous le signe des mots du sport, et intitulée « Sur le podium ». Dans le sport comme sur les autres sujets, le français est enrichi en Afrique avec les apports des langues locales et l'invention de nouvelles expressions.
3/15/20242 minutes, 17 seconds
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Tunisie: Tabarka et Aïn Draham, destinations privilégiées de l’écotourisme

Situés entre la montagne et la mer, Tabarka, Aïn Draham et leurs environs regorgent de circuits de randonnée, d’artisanat, et d’une faune et flore encore préservée. Peu connus dans les circuits des agences touristiques pour les étrangers, les initiatives de promotion de ce tourisme vivent surtout grâce au tourisme local, un retour vers la nature et les savoir-faire traditionnels souvent recherché par les vacanciers tunisiens. De notre correspondante à Tunis,C’est à l’entrée du fort génois de Tabarka, une bâtisse du XVIe siècle surplombant la Méditerranée, que nous rencontrons Rania Mechergui, native de la région et randonneuse insatiable. « C’est une attraction importante de la ville de Tabarka, il y a tout le monde qui vient ici pour découvrir cette île et entendre l’histoire des Génois qui ont vécu sur cette terre », explique Rania Mechergui.Mais le fort n’est qu’une étape des circuits que proposent Rania avec son agence d’écotourisme, Dar El Ain, qu’elle a fondée en 2017.« Tabarka, depuis les années 1960, c’était toujours la destination de tourisme culturel, le jazz, la beauté de la ville, mais on n'a jamais pensé à la Tabarka de l’intérieur, les zones rurales de Tabarka, la Kroumirie en général », dit Rania Mechergui. « Il y a à l’intérieur des forêts, une population qui a un savoir-faire très, très important, qui a une cuisine très diversifiée, mais on n'a jamais pensé à valoriser tout ça à travers le tourisme », ajoute-t-elle.Comme d’autres régions, les autorités se sont plutôt focalisées sur l’attractivité de la mer et des hôtels sur la côte pour drainer le tourisme de masse. Mais aujourd’hui, Rania s’adresse à une autre clientèle avec des circuits de randonnées et de rencontres chez les artisans, elle travaille avec une communauté d'une quarantaine de personnes entre les femmes cuisinières et les artisans.« Il y a une gamme de clientèle tunisienne qui cherche ce genre d’expérience, qui cherche à découvrir le pays, qui cherche à faire découvrir à leurs enfants la nature et les bonnes pratiques dans la nature », insiste-t-elle.À lire aussiLa Tunisie s’éloigne du tourisme de masse pour plus de petites maisons d’hôtes localesÉcologie et patrimoine culinaireUn tourisme focalisé aussi sur l’écologie et le patrimoine culinaire. À Aïn Draham, dans une maison de campagne au fond d’un sentier, le cabanon de Casa Del Fromagio est rempli à craquer de Tunisiens qui viennent découvrir des fromages affinés.Haykel Abidi a lancé ce projet après plusieurs années passées en Europe, où il a découvert l’importance du tourisme autour des produits de terroir. « Je fais autour de ce produit un produit écotouristique, un produit durable, un produit qui sort de l’ordinaire, dans une ambiance campagnarde à Aïn Draham, à 650 mètres d’altitude, la neige, le froid », indique Haykel Abidi.À écouter aussiEn Tunisie, le tourisme reprend des couleursIl s’est fait connaître grâce au bouche-à-oreille et aux réseaux sociaux. Pour Zeineb, 39 ans, une cliente de la capitale, ce genre d’initiative devrait être plus valorisée. « Moi, j’adore ! Je goûte les nouveaux fromages à chaque fois et on vient à Tabarka chaque année avec ma famille. Pour moi, c’est vraiment le genre de tourisme qu’il faut plus, la nature, le plein air », confie la cliente.Nouveauté dans le pays, l’écotourisme manque encore de cadre législatif clair. Il gagne à être encouragé. Les indicateurs touristiques dans le gouvernorat de Jendouba, où se trouvent Tabarka et Aïn Draham, sont en hausse ces dernières années, à la fois grâce à l’afflux des vacanciers algériens, mais aussi du regain d’intérêt des Tunisiens pour ces régions.
3/14/20242 minutes, 28 seconds
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L'African Women Orchestra célèbre la musique et les talents de femmes à travers l'Afrique

Faire monter les femmes sur scène et les encourager à jouer de la musique. C’est l’objectif de l’African Women Orchestra. Depuis huit ans, cette initiative kényane encadre des jeunes femmes pour les aider à poursuivre leur passion musicale. L'organisation prépare aussi un concert annuel qui a lieu autour du 8 mars, la journée internationale des droits des femmes. Plusieurs femmes d’Afrique de l’Est se retrouvent au sein d’un orchestre qui mêle musique classique et talent de la région. Le concert a eu lieu il y a quelques jours dans la capitale kényane. De notre correspondante à Nairobi,L’orchestre accompagne la voix de Liboi, chanteuse kényane. Sur scène, une vingtaine de femmes. Habillées dans des tissus africains multicolores, loin du traditionnel noir des orchestres. Ici, on revisite les codes. Le concert alterne entre musique classique et titres contemporains. L’audience se lève et danse. Quelques fausses notes n’ont pas entaché l’enthousiasme du public. « C’était très beau. J’ai beaucoup aimé le mélange de musique classique et de rythmes africains. Nous, africains, on adore danser à chaque occasion, donc j’ai trouvé ça formidable ! ». « C’était magnifique de voir des femmes jouer ensemble. Cela montre les progrès que nous avons faits en tant que pays, que continent, pour s’assurer que les femmes aient de la visibilité et soient écoutées », se réjouit une autre spectatrice.Wandiri Karimi est à la guitare. Elle anime aussi l’évènement. Cette passionnée de musique a cofondé l’African Women Orchestra après avoir constaté qu’elle était souvent la seule femme sur scène à jouer un instrument : « Un grand travail a été fait et de plus en plus de personnes intègrent des orchestres. On veut encourager cette tendance et faire en sorte que les jeunes filles qui ont appris à jouer un instrument, peut-être à l’école, et souhaitent continuer ont un espace où elles peuvent être jouées et être écoutées. Et on joue certes du Bach, du Beethoven, mais on met aussi en lumière des chanteuses du Kenya ou de l’Afrique de l’Est. On adapte leur musique pour accompagner l'orchestre. »Encourager les vocations musicales des jeunes fillesL’une au tuba, l’autre au trombone. Deux jeunes artistes ougandaises font un duo. Sumayya Nabakooza et Miriam Nyirabanasi ont 24 et 23 ans. Elles sont toutes les deux originaires des bidonvilles de Kampala. Elles ont découvert la musique grâce à une ONG, Brass for Africa et l’enseignent aujourd’hui.« Quand j’ai commencé à jouer, les garçons dans le groupe disaient “oh elle ne va pas savoir jouer” et moi, je me disais la même chose. Mais petit à petit, ils ont vu de quoi j’étais capable et moi aussi, je l’ai réalisé. Je me suis dit que j’avais une opportunité de jouer de cet instrument et de l’utiliser pour inspirer d’autres jeunes filles. Pour moi, c'est très important parce que peut-être que si j’avais eu un modèle à suivre quand j’étais plus jeune, j’aurais cru en moi dès le départ », affirme Sumayya Nabakooza.Sumayya veut montrer des vidéos du concert à ses élèves, surtout aux jeunes filles. Pour, dit-elle, encourager leur ambition.À lire aussiOrchestra Baobab, groupe mythique ouest-africain, se fête avec le titre «50 ans»
3/13/20242 minutes, 15 seconds
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Éthiopie: à Addis-Abeba, le triste ramadan des Soudanais séparés de leurs familles par la guerre

Près d’1,7 million de Soudanais passent le mois du ramadan loin de leur pays, après avoir fui la guerre et les combats qui continuent d’y faire rage. Près de 36 000 ont passé la frontière à l’est, pour être en Éthiopie et demander le statut de réfugiés. D’autres ne sollicitent pas la protection des ONG, et vont directement jusqu’à la capitale, Addis-Abeba. Ils attendent un visa pour pouvoir partir dans un autre pays ou rentrer chez eux. Beaucoup sont là depuis plusieurs mois et se sentent bloqués dans cette ville immense, où l’on ne parle pas leur langue. De notre correspondante à Addis-Abeba,Beaucoup de réfugiés soudanais logent à Haya Ulet, un quartier en plein cœur d’Addis-Abeba. Ils se retrouvent dans les quelques restaurants de spécialités soudanaises présents dans la capitale éthiopienne. Ici, ils peuvent se sentir un peu à la maison et rompre le jeûne du ramadan ensemble. Même si pour Ali, 18 ans, c’est très différent : « C’est dur de faire le jeûne ici. Il faut trouver la plus grosse communauté soudanaise pour passer le ramadan ensemble parce que si je reste avec les Éthiopiens, je ne saurai pas quand il faut casser le jeûne. Tu ne peux même pas entendre la prière, et il n’y a pas beaucoup de mosquées. »Ali est à Addis depuis cinq mois. Pour lui, la vie est trop chère ici : « Si la guerre s’arrête, je retournerai au Soudan, mais pour le moment, je voudrais aller en Europe par tous les moyens. Parce que la vie est difficile ici, on doit payer 100 $ par mois pour le visa et puis on a vécu la guerre. »À lire aussiÉthiopie: dans les camps, des réfugiés s'efforcent de respecter le jeûne du ramadan Des conditions difficile de jeûneAmal est arrivée en novembre, elle attend d’avoir un visa pour partir en Arabie saoudite. Pour elle, rien n’est comme avant : « Ici il n’y a pas notre nourriture traditionnelle, les traditions sont différentes, donc on jeûne et puis c’est tout. On avait l’habitude de se préparer pour le ramadan avec tout notre cœur, spirituellement, mais aussi financièrement. Mais ce n’est plus pareil, nous avons été forcés de quitter notre pays, les familles sont séparées, certains sont allés à l’est, à l’ouest, en Égypte, certains sont dans des camps de réfugiés. C’est la pire des situations. »Sahar est là depuis un mois avec ses deux filles de 15 et 18 ans. Elle voudrait rejoindre son mari qui a réussi à aller en France : « Regardez mes filles, ça fait plus d’un an qu’elles n’ont pas étudié, elles perdent l’habitude, elles ne s’exercent plus. Déjà avant au Soudan les études étaient souvent interrompues, mais là en plus, elles ont des images de combats, de guerre et pleins de choses négatives dans leur tête. »Difficile de faire le ramadan dans ces conditions. Les réseaux sont coupés, impossible d’avoir des nouvelles des proches restés dans le pays en guerre. « Je suis inquiète, si mon père est vivant ou pas, je ne sais pas. Les proches qui nous envoyaient de l’argent ne sont plus joignables. »L’ONU a demandé aux belligérants un cessez-le-feu à l’occasion du ramadan. Refusé par les forces armées soudanaises.À lire aussiDans plusieurs pays africains, l'entame du ramadan entre partage, tradition et problèmes de budget
3/12/20242 minutes, 13 seconds
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Procès du 28-Septembre en Guinée: les images du massacre du stade projetées pendant l'audience

En Guinée, le procès du massacre du stade de Conakry vient de connaître un moment fort. Lors de l’audience du mercredi 28 février ont été diffusées les images de la tuerie. Plus de 150 personnes ont été assassinées par les forces de défense et de sécurité guinéennes, lors d’un meeting de l’opposition organisé le 28 septembre 2009.   De notre correspondant à Conakry,Un drap blanc a été tendu contre un mur pour y projeter les images du massacre. « C’est une vraie innovation. À travers cette vidéo, on voit la répression, on entend des coups de fusil et on comprend effectivement le carnage qu’il y a eu au stade et surtout l’acharnement des militaires dans la répression. C’est un élément très important pour la suite du procès et qui, nous l’espérons va emporter la conviction du juge », a déclaré Maître DS Bah, coordinateur du collectif des avocats des victimes à la sortie de cette audience, très intense.C’est la première fois que des vidéos sont ainsi diffusées lors d’un procès criminel en Guinée. Devant un public clairsemé, car selon l’avocat certaines victimes ont été renvoyées chez elles. Il ne fallait pas risquer de les « retraumatiser » : « Je dois vous dire que c’est avec une forte émotion que le capitaine Moussa Dadis Camara a visionné cette vidéo. » Maître Pépé Antoine Lamah défend l’ancien président putschiste et principal accusé, le capitaine Moussa Dadis Camara.  « À aucun moment, on a projeté ici un quelconque élément qui indique ou qui montre le capitaine Moussa Dadis Camara en train de donner des instructions, des ordres ou des moyens à qui que ce soit daller commettre des crimes qu’on est en train de juger aujourd’hui. »À lire aussiMassacre du 28-Septembre 2009 en Guinée: le témoignage d'une victime emblématiqueSur les images sépia, tournées il y a 14 ans à l’aide de petits caméscopes à cassettes, on ne voit pas toujours les détails. Mais le récit du massacre, tel que l’ont raconté les victimes et les témoins, s’anime sur grand écran. Au stade, la foule en liesse entre en premier, suivie des leaders politiques et enfin des militaires venus clôturer ce meeting funestement. « Ces violences ont été filmées »Lamarana Sow est journaliste. À l’époque, c’est un jeune vidéaste, sans caméra. Quand il croise un ami muni d’un caméscope, il décide de le suivre dans la manifestation : « On a filmé ces scènes jusqu’à ce que les choses ont commencé à changer du côté du stade du 28 septembre à partir du moment où des leaders politiques sont bastonnés. Je peux vous assurer que j’ai pu filmer une grande partie de ces violences. »Mais personne ne verra jamais cette vidéo : « Ce qui est arrivé ce dimanche, malheureusement, le gars était très mal équipé et il ne savait pas qu’il allait filmer ces violences. Il lui restait une cassette où il avait filmé un baptême, il l’a rembobiné et filmé dessus le massacre. »Quelques vidéos seulement du massacre ont pu être conservées. Elles font partie aujourd’hui des rares preuves que contient le dossier.À lire aussiMassacre du 28-Septembre en Guinée: le procureur réclame une requalification des charges
3/11/20242 minutes, 36 seconds
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Tunisie: à Tunis, une exposition met à l’honneur le photographe sénégalais Adama Sylla

C’est au 32bis, un espace dédié à la recherche, à la création qu’est exposé le travail d’Adama Sylla. Au delà du talent de cet artiste de 90 ans qui connait une notoriété sur le tard, les organisateurs de l’évènement y voient une façon de célébrer l’Afrique et de rappeler aux Tunisiens qu’en plus d’être arabes, ils sont aussi africains. À lire aussi«La Mécanique poétique d’Adama Sylla», photographies d’une époque au Sénégal
3/10/20242 minutes, 29 seconds
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Centrafrique: les feux de brousse lancés par des chasseurs en périphérie de Bangui

Durant cette période de saison sèche, la lutte contre les feux de brousse est toujours un grand défi à Bangui, notamment dans plusieurs secteurs situés à l'est de la capitale. Les flammes ont déjà détruit plusieurs maisons, des greniers, et dévasté plusieurs hectares de champs. La plupart de ces feux sont provoqués par des chasseurs et c'est une source de conflits entre chasseurs et agriculteurs.
3/8/20242 minutes, 17 seconds
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À Madagascar, l'accès des femmes au planning familial reste un défi

À Madagascar, la Journée internationale des droits des femmes a été placée cette année sous le thème de la promotion de la planification familiale. Un réel défi, dans un pays où moins d’une femme sur deux en âge de procréer (15-49 ans) a recours à la contraception. Entre stigmatisation, tabou et croyances sociales, les obstacles au plein accès des femmes aux services de santé sexuelle sont encore puissants. Alors, pour les lever, on sensibilise et on informe. De notre correspondante à Antananarivo,Dans la cour sablonneuse de ce centre de santé de base, Victorine, sage-femme, agite un panier rempli de contraceptifs. Face à elle, une vingtaine de femmes, leur enfant aux bras, écoutent attentivement l’équipe médicale défaire les « on dit » sur ces méthodes. « Il ne faut jamais arrêter la pilule. Certaines s’imaginent, une fois chez elles, qu’il ne faut pas avaler le comprimé rouge. C’est faux ! C’est ce qui vous aide à avoir vos règles chaque mois », martèle la sage-femme.À l’intérieur de l’étroite salle de consultation, les patientes défilent. Sabrina a 22 ans, et un enfant. Sa grossesse surprise l’année dernière, c’est ce qui l’a finalement poussée à choisir une contraception hormonale. Une démarche, reconnaît-elle, encore très mal vue hors mariage. « Ici, quand tu prends des contraceptifs, ça veut dire que tu joues avec les rapports sexuels. "Ah, c’est parce qu’elle a beaucoup d’hommes", [les gens] pensent comme ça. On dit d’elles que ce sont… comme des prostituées », explique Sabrina.À lire aussiMadagascar: la contraception, un enjeu de santé publiqueRumeurs et barrières socialesÀ ces rumeurs sur leur sexualité, s’ajoutent pour les jeunes femmes le poids de croyances bien ancrées. « J’ai entendu dire que si des filles qui n’ont pas encore des enfants prennent des contraceptifs, c’est très difficile pour elles d’avoir des bébés après », ajoute Sabrina.Des rumeurs issues de barrières sociales difficiles à faire tomber. Blouse rose ajustée, Victorine fait les 100 pas dans le centre de santé. Une fois assise derrière son bureau en bois, la sage-femme responsable du centre se veut la plus pédagogue possible.« Pour contrer ces rumeurs, la sensibilisation est très importante », souligne Victorine. « Quand de nouvelles femmes entrent dans mon cabinet, je prends toujours l’exemple de mes autres patientes qui utilisent la planification familiale depuis longtemps. Je leur dis : "regardez-les, elles sont en très bonne santé. Alors, venez nous voir jusqu’ici vous et vous aurez les réelles informations !" »À écouter aussiUn planning familial pour lutter contre la pauvreté et la mortalité maternelle à Madagascar« C'est encore un long chemin à faire... »Encourager les femmes à franchir la porte des services de santé sexuelle, dont l’accès pour toutes est un droit dans la loi malgache. Mais pour le docteur Valérie, responsable médicale chez Médecins du monde (MDM) à Tamatave, il n'est pas encore vécu comme tel par la majeure partie des femmes. « C’est encore un long chemin à faire », constate-t-elle. « Il faut savoir que Madagascar est un pays de religion, quand on parle de santé sexuelle reproductive, il faut bien faire attention de ne pas heurter [certaines personnes]. »Un sujet encore souvent tu ou murmuré en société. Mais la planification familiale devrait ce 8 mars être abordée à voix haute partout dans le pays dans les cortèges et les cercles associatifs. Pour cette journée, la question a été érigée au rang de priorité par les autorités.
3/7/20242 minutes, 24 seconds
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Tchad: quand les délestages plombent la vie quotidienne des usagers

Les difficultés d’accès à l’électricité sont un souci de longue date à Ndjamena. Beaucoup estiment que la situation ne cesse d’empirer, et craignent de passer des semaines difficiles, alors qu’on entre dans la période la plus chaude de l’année, et que la période du ramadan approche. De notre envoyé spécial à Ndjamena,L’air brassé par le ventilateur du petit salon de Khonon est un soulagement, alors que la température dépasse les 40°C dans le quartier Madagascar de Walia. Ce petit confort, ce professeur de karaté ne le doit qu’à lui-même. Il a longuement économisé pour une installation solaire.« C'est difficile d'avoir l'argent. Chez nous, ici, le travail, ce n'est pas facile d'en avoir. L'électricité chez nous, c'est déjà un luxe. Même si tu as l'électricité, ça veut dire qu’à la fin du mois par exemple, on te donne une facture ou tu n'arrives même pas à payer et tu n'as même pas le jus, encore. Donc le mieux c’est d’avoir des panneaux, tu es tranquille », explique Khonon.À écouter aussiÀ Ndjamena, les délestages d'électricité pourrissent le quotidien des habitantsPas de courant malgré les travauxAu milieu de la rue, des poteaux et des câbles électriques posés voici quatre mois par la Société nationale d’électricité. Les riverains ont cotisé pour l’installation, mais il n'y a toujours pas de courant, nous explique Jacques, le neveu de Khonon. Il habite juste en face.« Les câbles sont passés, mais jusque-là, la SNE n'est pas encore revenue pour pouvoir donner la connexion dans chaque concession. Nous nous sommes décarcassés pour avoir des dizaines de millions [de francs CFA], faire passer des dizaines de poteaux et nous sommes encore sans jus », constate Jacques.Étudiant, il a pu s’offrir un panneau avec ses petits boulots, mais pas encore la batterie qui lui permettra de travailler après le coucher du soleil.« [Pour] les études, il faut aussi faire des recherches à côté, il faut aussi rédiger des devoirs, il faut faire des traités, des exposés... Et l'électricité, c'est un luxe, comme on l'a dit. Ce n’est pas facile d'avoir l'électricité et même en journée. Même à l'université, il n'y a pas de l'électricité tous les jours, il faut amener 100 francs ou 200. Charger à la cabine, cela devient trop coûteux et trop pesant pour moi. Je me suis dit qu'il faut que j'économise petit à petit, on va tasser la ceinture, on va dormir aussi affamés pour ne serait-ce qu’avoir de l’électricité », indique l'étudiant.À écouter aussiTchad: les coupures d'électricité trop fréquentes exaspèrent la populationVers des améliorations les prochaines semaines ?Augmentation de la population et étalement urbain, générateurs trop peu nombreux, en panne ou en maintenance, mauvaise gestion et détournement de carburant… Les causes des délestage sont nombreuses. Les autorités promettent des solutions depuis des années.Ministre de l’Énergie depuis janvier, Louise Ndougonna Mbakasse Riradjim le reconnait, mais elle espère des améliorations dans les prochaines semaines. « Il y a deux grands projets, un à Gassi et un autre à Djermaya. Les deux doivent produire 62 mégawatts, le tiers du besoin en électricité de la ville de Ndjamena. En mars, ce n'est pas possible de les avoir, ça sera en avril en pleine canicule », déclare la ministre.Selon elle, plusieurs partenariats avec des entreprises privées sont en cours de finalisation pour produire de l’électricité supplémentaire, notamment via des champs solaires.
3/6/20242 minutes, 22 seconds
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Tchad: une période de transition qui n'a pas satisfait tout le monde

À deux mois de la présidentielle qui doit conclure trois ans de transition au Tchad, prévue le 6 mai, les candidats peuvent commencer à déposer leur dossier. Ce cycle électoral s’amorce dans un climat crispé, entre contestation de la transparence du processus et mort de l’opposant Yaya Dillo dans des circonstances contestées. À Ndjamena, croit-on à ces élections ? Quel bilan tire-t-on de cette période transitoire ?  De notre envoyé spécial à Ndjamena,À l’arrière de l’association dont il est bénévole et où il nous reçoit, dans le bruit du générateur, obligatoire pour obtenir du courant, Hamza partage son dépit.Les trois années de transition ont été selon lui un gâchis. « Franchement, c’est négatif. Ils sont venus par appartenance politique, par obédience, tout ce qu’il faut. Mais s’il y a un bilan, dans l’ensemble, nous, on peut dire "c’est simple", c’est l’échec que moi, je suis en train de voir parce qu’il n’y a pas de concret. Tout ce qu’ils ont dit, c’était juste, comme on dit, pour nous "balayer" », déplore-t-il.Diplômé sans emploi, Hamza tente de lancer une entreprise avec l’aide d’un oncle, mais les temps sont durs. « Ils ont promis d’intégrer les jeunes, on n’a pas vu. Ils ont promis de donner aux groupes financiers 50 000 projets, on n’a pas vu. Ils ont promis d’électrifier le Tchad, tout ça... on n’a pas vu. Avec la cherté du carburant, vous avez vu vous-même, c’est très compliqué en tant que jeune, surtout », constate-t-il amèrement.« Les vieilles habitudes ont toujours la peau dure »Processus politique peu crédible, difficultés socio-économiques renforcées… C’est aussi le sentiment d’Houzibe Gombo Breye, membre de la société civile.« Les Tchadiens avaient fixé beaucoup d’espoir sur cette transition-là : qu’à l’issue de cette transition, on va organiser des élections justes, transparentes, crédibles. Mais il était également question de pouvoir remettre debout cette république qui est à la traîne depuis 63 ans », explique-t-il. « La transition a raté cet objectif-là de pouvoir faire en sorte que l’État tchadien, qu’il se remette sur ses deux jambes. Les vieilles habitudes ont toujours la peau dure. Il y a un groupuscule qui ne veut pas que les choses aillent dans le bon sens », pense Houzibe Gombo Breye.À lire aussi Candidature de Mahamat Déby au Tchad : l’opposition n’est pas surprise mais dénonce un « leurre »« Mahamat Deby est un président qui a la main tendue »Un bilan très critique que ne partage pas Gassim Cherif. Ancien du groupe rebelle CCMSR, il a intégré l’assemblée de transition après l’accord de Doha. S’il reconnaît la stagnation socio-économique, il salue des avancées indéniables sur le plan de la réconciliation.« Mahamat a été coopté, choisi par ses pairs et on peut estimer que c’est une continuité. Mais moi, je suis dans les faits. Dans les faits, c’est que c’est un président qui a la main tendue qui a permis le retour de politico-militaires. Le retour des opposants politiques comme Masra et d’autres », souligne Gassim Cherif. « On ne peut pas imputer tout le mal du Tchad à Mahamat. Il a hérité d’une situation très complexe et une transition, par définition, n’est pas là pour résoudre tous les problèmes. Le défi du président Mahamat et de la classe politique, c’est de poser le jalon d’un Tchad nouveau et ce que le président Mahamat appelle la "Refondation". »Gassim Cherif a rejoint la coalition qui soutient la candidature de Mahamat Idriss Déby à la présidentielle du 6 mai.À écouter aussiSuccès Masra : « Rien dans la Constitution ne m’empêche d’être candidat à la présidentielle si je le souhaite »
3/5/20242 minutes, 20 seconds
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Madagascar: la lecture pour tous grâce à une maison d'édition qui se lance la fabrication de livres en braille

À Madagascar, si les établissements de prise en charge des personnes aveugles et malvoyantes sont rares, les ressources éducatives dédiées aux porteurs de ce handicap le sont encore plus. Depuis 2019, une petite maison d’édition tananarivienne de livres jeunesse s’est lancée le défi de proposer quelques ouvrages en malgache et en braille. Elle est la seule aujourd’hui à avoir investi ce créneau.15 titres jeunesse sont désormais disponibles en double version braille et « écriture noire », uniquement sur commande.  De notre correspondante à Antananarivo,« - Marie-Michèle ! On vient de recevoir les feuilles en braille d’Antsirabe ! :  Ah super, je vais pouvoir faire l’assemblage alors. »Au sein de sa petite maison d’édition Jeunes malgaches, Marie-Michèle Razafintsalama s’adonne à un drôle d’exercice : « Ça c’est la page de garde… Je repère que c’est la page 1. Et après c’est la page 2. Là, tu vois, les points tout en haut, c’est la pagination. Moi, je ne lis pas le braille, mais c’est avec ça que je me repère pour faire l’assemblage. »Sur la table devant elle, l’éditrice fait deux piles. Une avec les pages en papier glacé d’un livre illustré pour enfants, provenant de sa collection. L’autre pile, ce sont les feuilles épaisses transparentes qu’elle vient de recevoir, sur lesquelles apparaissent une multitude de points en relief. Cette étape de transcription en braille et de poinçonnage des feuilles est sous-traitée à Antsirabe. « Tout est fait à la main, que ce soit la transcription sur la machine à écrire et ensuite l’assemblage. Et après, on va faire une reliure spirale quand tout sera fini. C’est un processus qui est très long parce que si par exemple, on a une commande de dix exemplaires du même livre, la personne qui fait la transcription va devoir taper dix fois chacune des pages du livre. »« Tous les enfants doivent pouvoir lire »Sur cette opération, la petite maison d’édition ne fait quasiment pas de bénéfice. Qu’importe, sa rétribution, Marie-Michèle la trouve ailleurs : « Nous, on veut vraiment permettre à tous les enfants de lire, d’accéder au savoir et aux connaissances. Ici, il y a encore beaucoup d’enfants qui n’ont pas accès aux livres. Surtout les enfants en situation de handicap, c’est pour ça qu’on le fait. »Une aubaine pour les associations qui soutiennent les personnes malvoyantes. En mettant entre les mains d’enfants atteints de déficience visuelle les ouvrages en braille conçus par Marie-Michèle, Holiniaina Rakotoarisoa, directrice exécutrice et fondatrice de l’ONG MERCI, qui œuvre pour l’inclusion sociale des personnes porteuses de handicaps, a ressenti une véritable évolution chez ses petits protégés.« Ils sont très contents de lire les livres avec les autres enfants qui n’ont pas de déficience. Ils sont autonomes de faire la lecture tout seuls. Ils sentent qu’ils peuvent avoir les droits comme les autres. Et pour les enfants qui ne peuvent pas encore lire les livres en braille tout seul, car trop petits, ils entendent les autres lire à haute voix et ça les motive à apprendre le braille. »Un outil d’inclusion incroyable qui mériterait d’être dupliqué. À l’heure actuelle, il n’existe aucune entreprise malgache qui édite des livres en braille pour adultes.À lire aussiSolidarité internationale entre associations d'aveugles françaises et africainesÀ lire aussiMaroc: le traité facilitant l'accès à la lecture pour les malvoyants enfin signé
3/4/20242 minutes, 22 seconds
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Les eaux sénégalaises se vident de leurs poissons

C'est une des raisons qui pousse des milliers de pêcheurs sénégalais à prendre la route de l'immigration clandestine. Le centre de recherche océanographique de Thiaroye travaille à quantifier la ressource halieutique qui s'effondre. L'une des méthodes que le centre utilise pour mesurer ce phénomène inquiétant est de récolter des données quotidiennement aux ports de débarquement un peu partout dans le pays. Elles sont ensuite traitées par des chercheurs qui tirent la sonnette d’alarme depuis des années. À lire aussiSurpêche en Afrique de l’Ouest: «Si vraiment les décideurs voulaient y mettre fin, ils pourraient le faire»À écouter aussiSénégal: le pillage des poissons s'intensifie
3/3/20242 minutes, 16 seconds
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Côte d’Ivoire: le plus grand bidonvillle d’Afrique de l’Ouest en pleine gentrification

À San Pedro, le marché de l’immobilier explose dans l’ancien bidonville du Bardot. Autrefois en périphérie, ce quartier est désormais central, en raison de l’extension de la ville portuaire de 400 000 habitants. Jadis précaire et criminogène, le Bardot a connu un telle transformation qu’il est actuellement l’un des plus prisés de San Pedro. De notre envoyé spécial à San Pedro,En marchant aux abords de la place Ado où des adolescents ont organisé un tournoi de foot, difficile de penser que le quartier fut un jour considéré comme l’un des plus grands bidonvilles d’Afrique de l’Ouest. Les plus âgés, eux, se souviennent bien de l’ancien Bardot et de ses petites ruelles. Sissé Basséplo, et Fofana Mamadou ont vécu respectivement 25 et 35 ans dans ce quartier :  « Avant, c'était un [lieu] insalubre et criminel, parce qu’il y avait des maisons en bois, donc on agressait, on braquait même en plein jour, à 10h, 12h même. »Fofana Mamadou se rappelle que « c’était un bidonville, il n’avait même pas de courant à San Pedro. Les maisons que tu vois étaient en bois, il n’y avait pas de maison en dur, on pouvait même pas marcher ! Parce que tu te retrouvais dans les bois. Il n’y avait que deux routes à l’époque, on vivait dans les bois et on avait honte.  San Pedro a évolué et s’est transformé à 100%. »À lire aussiLa CAN 2024, une aubaine économique pour San PedroEn 20 ans, de larges rues ont été tracées dans une optique de planification urbaine et le quartier a été raccordé à l’électricité et à l’eau courante. Le quartier compte 50 000 habitants et a été divisé en 18 sous-quartiers. Mory Sylla, conseiller municipal de San Pedro montre les systèmes de récupération des eaux de pluie : « Vous voyez de la canalisation un peu partout qui longe les différentes voies, et les ouvertures de voies ont été faites par des techniciens (..) en tenant compte de certaines normes. »  En raison de ce développement fulgurant, les loyers ont fortement augmenté alors que les salaires restent peu élevés. Comme de nombreux habitants du quartier, Sissé Basséplo est docker au port de San Pedro, un métier saisonnier et précaire : « Évidemment, le prix des loyers ont augmenté, en 2002-2003, c'était 15 000 Francs CFA par mois aujourd’hui pour se loger, il faut payer coutent 50 000 Francs CFA. (…). S’il y avait une politique d’urbanisation au niveau du logement, ça ferait plaisir à la population. »Pour faire face à la pénurie de logements, la mairie de San Pedro envisage la construction de nouveaux quartiers, ou d’une « ville nouvelle ».
3/2/20242 minutes, 22 seconds
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Éthiopie: le tabou de la dépression

La santé mentale est un sujet tabou en Afrique. Pourtant, le taux de suicide sur le continent est le plus élevé au monde : 11 personnes sur 100 000 se donnent la mort chaque année, selon l’OMS. En Éthiopie, les troubles mentaux sont les principales maladies non transmissibles. Dans le pays, les malades sont victimes de discrimination et de stigmatisation. Honteux, peu d’entre eux décident de se faire soigner.  Reportage de notre correspondant à Addis-Abeba,Charifa souffre d’une dépression sévère à la suite d’un événement traumatisant. Peu après la naissance de son fils, elle assiste au suicide d’une amie très proche. Elle témoigne : « J’étais dans la rue avec elle, je la suppliais de revenir. Je lui ai dit que j’avais un enfant d’un mois à la maison dont je devais m’occuper. Je me suis retournée pour rentrer et elle s’est jetée sous ce maudit camion. » Charifa subit alors les conséquences mentales du trauma à travers un sentiment de culpabilité obsédant : « Je haïssais mon enfant, mon nouveau-né. J’avais toujours cette vision où je me jetais sous un camion avec lui. »Elle décide alors de se faire interner à l’hôpital pendant un mois pour se faire soigner. Et affronte l’incompréhension de ses proches : « "Mais non Charifa, tu es une personne joyeuse, tu ne peux pas faire ça. Tu peux te soigner avec de l’eau bénite ou le Coran, grâce à la religion. Pourquoi as-tu besoin de la science pour te soigner ?" Expliquer aux gens ce qu’est la santé mentale ou ce que je traversais était la chose la plus difficile que je devais faire. Je fais face à cela tous les jours. »À lire aussiSanté mentale: les jeunes Africains peu informésCulture du secretLe Docteur Andarge Gedamu, neurologiste et psychiatre, a pris en charge Charifa à la clinique Nordic d’Addis-Abeba. Il estime que près de 30% des patients viennent à l’hôpital pour des troubles mentaux, mais ont du mal à l’admettre. Dans le pays, parler de sa vie privée est mal vu… « Il y a un mot en amharique "gebena" : cela veut dire "je ne veux pas parler de moi-même, c’est privé". Et à cause de cette pression, la majorité des patients n’expriment pas leurs problèmes, ils le gardent secret et cela les rend malades, les dérange et s’accumule dans le corps. C’est un gros problème dans ce pays » explique le docteur.Au-delà de la culture du secret, les malades se tournent le plus souvent vers des méthodes traditionnelles. « Ils vont dans les eaux sacrées, ou utilisent d’autres formes d’expériences traditionnelles. C’est un soutien, je n’ai pas d’opinion négative sur ces formes de soin. Ce serait bien qu’on puisse les combiner avec les traitements modernes » indique le neurologue.Mais les infrastructures manquent. En Éthiopie, il y a environ un psychiatre pour deux millions d'habitants concentrés en ville et dans des hôpitaux… difficile d’accès pour la majorité de la population.À lire aussiSanté mentale: le tabou autour du suicide se lève difficilement en Côte d’Ivoire
3/1/20242 minutes, 5 seconds
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Vers une amélioration de la situation alimentaire dans le Grand Sud malgache?

Dans le Grand Sud malgache, les régions Anosy et Androy sont réputées pour leur climat hostile : une chaleur sèche et étouffante, un vent violent et poussiéreux, des précipitations de plus en plus rares. Soumises aux changements climatiques et aux effets d'El Niño, ces régions cumulent souvent de tristes records, notamment en matière de malnutrition de ses habitants. Actuellement, 800 000 personnes font face à une grave insécurité alimentaire dans la zone. Mais la situation s'est cependant améliorée par rapport aux années précédentes, dans les zones bénéficiant de programmes d'aide et de sensibilisation. C'est le cas notamment à Sampona. Reportage de notre correspondante de retour de Sampona,Sous l'arbre à kabary (l'arbre à discours), au milieu du village, une cinquantaine de femmes et leurs enfants s'abritent du soleil. Les rafales de vent soulèvent le sable qui fouette le visage des enfants. Sur la natte, Nasolo, dix fois maman, tient à nous faire une démonstration, avec sa petite dernière, âgée de deux ans. « Je pose la réglette sur son bras, après je la fais passer tout autour, et je regarde la mesure qui indique la grosseur de son bras. Et voilà ! Si la taille est en dehors de la marque verte, c'est qu'il y a un problème. On ne sait pas grand-chose d'autre, mais quand on sait faire ça, on sait si son enfant est malnutri ou en bonne santé », dit-elle.Ces bracelets de mesure du périmètre brachial, l'Unicef les distribue massivement aux parents depuis 2021. Un outil simple d'utilisation et précis qui contribue depuis trois ans à déceler de manière plus précoce la malnutrition aigüe sévère et modérée chez les tous petits. Une manière aussi d'autonomiser les parents sur le suivi de la santé de leur enfant et d'aller chercher de l'aide dès que les seuils d'alerte sont atteints.À lire aussiMadagascar: opération de lutte contre la malnutritionUn bracelet qui peut sauver des viesC'est ce qui s'est passé il y a peu pour Bien-Aimé, un an et demi. Arisoa, sa maman, a décelé une anomalie en mesurant son bras. Depuis, elle se rend tous les quinze jours au centre communautaire à 1h30 de marche de chez elle. « Enlève les vêtements de ton enfant ! Je le mets dans la balance… 8kg … 500 ! » Tema Modiohazy manipule le garçonnet. « Je suis agente communautaire. Je reçois les enfants malnutris qui viennent sur ce site. Ce que j'ai fait avec Bien-Aimé, c'est que je l'ai pesé, puis je l'ai mesuré. Il est encore dans le jaune, donc malnutri. Mais de manière générale, les mamans écoutent bien les conseils sur l'alimentation et la diversification. »Arisoa opine. « Je sais que ce serait bien de lui donner des petits poissons maintenant, de l'ananas ou des bananes. Mais on n'a pas de ça ici. On n'a que du sorgho. On voudrait planter du manioc, mais la pluie ne tombe pas. »Au village, les mamans râlent. Depuis 2021, année de la terrible sécheresse, les ménages recevaient tous les deux mois 50 000 ariary (soit environ 10 euros) via le Fonds d'intervention pour le développement, pour faire face à l'absence de récoltes. Mais en janvier, le versement a pris fin, « parce que la situation alimentaire et nutritionnelle s'est améliorée », expliquent les acteurs humanitaires (le village de Sampona est passé de la classification IPC 3 à IPC 2), qui ont donc décidé de prioriser d'autres zones.Ces populations restent cependant vulnérables. Qu'adviendra-t-il d'elles quand tous les acteurs appelés à des urgences plus graves seront partis ? En Androy, au moins quatre enfants sont morts de faim depuis le début de l'année.
3/1/20242 minutes, 22 seconds
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Congo-Brazzaville: l'explosion du prix de la dot

Au Congo-Brazzaville, selon la tradition, la dot est l’étape obligatoire avant le mariage célébré par l’officier d’état-civil. Mais son organisation coûte de plus en plus cher et son prix, jadis fixé à 50 000 francs CFA (soit 76 euros), augmente de plus en plus. De notre correspondant à Brazzaville,Ce samedi après-midi de petite saison sèche, le ciel est bien dégagé. Sur l’avenue de l’intendance dans le sixième arrondissement, dans une parcelle exigüe, environ 150 personnes sont venues assister à une cérémonie de dot. Pendant deux heures, la famille de Féfé, la future épouse, égraine la longue liste des objets apportés par l’époux, aidée par les facilitateurs traditionnels. À l’heure de remettre la dot proprement dite, les deux familles s’engouffrent dans la maison, loin des regards. Joël, le futur époux, est ému de prendre enfin la main de sa promise. « Je remplirai tous les devoirs vis-à-vis de ma femme », déclare le marié en public.Le montant de la dot n’a pas été révélé, mais après l’avoir reçue, les frères et oncles de la mariée expriment leur satisfaction. « Elle est désormais mariée. C’est un honneur pour la famille. Toi-même, tu vois comment les jeunes filles d’aujourd’hui tournent comme ça sans rien trouver. » « Pour moi, c’est une victoire devant le Seigneur. Parce que pour de nombreuses filles actuellement, ce n'est pas facile d’avoir un homme qui viendra t’honorer devant ton père et ta mère. Ça signifie qu'il y a de la fidélité et le sérieux dans l'éducation que papa a portée sur sa fille », témoignent-ils.Procédurier coutumier ou facilitateur traditionnel, Edo Ambroise Ngoumba regrette le fait que la dot ne soit plus au montant fixe de 50 000 francs CFA. Certaines familles exigent plusieurs centaines de milliers de francs et même des millions, parce que, disent-elles, le paiement de la dot est devenu l'occasion d'une grande fête. « Il y a de nombreux invités qui viennent. Et, quand ils sont là, il faut qu'il y ait à boire et à manger. C'est compliqué. Il y a un grand changement actuellement. Or, si nous voyons bien dans les temps, la dot était au maximum à 50 000 francs CFA. Et tu te mariais sans problème », analyse-t-il.Un changement décrié par Humbert Lendo, sexagénaire, chef de famille. « Vous trouvez que c'est normal. C'est une façon de tuer la société, puis on fait chômer nos filles comme ça. La dot, c'est 50 000 francs CFA officiellement et selon le code de la famille. Quand les beaux-parents exagèrent et demandent 1 million ou 2 millions de francs CFA, ce n'est pas bon », déplore-t-il.Face au prix démesuré de la dot, nombreux sont les jeunes Congolais qui vivent avec leur âme sœur sans honorer les familles.
2/28/20242 minutes, 29 seconds
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Le KwaZulu-Natal, «swing state» de l'Afrique du Sud

En Afrique du Sud, à bientôt trois mois des élections générales du 29 mai, les principaux partis politiques ont déjà présenté leur programme. La campagne électorale est lancée et une province concentre l'attention : le KwaZulu-Natal. Cette province qui comprend la ville de Durban est la deuxième en termes d'électeurs avec plus de 20 % du corps électoral. Elle fut longtemps un bastion historique de l'ANC, le parti au pouvoir. Mais son hégémonie y est contestée. De notre envoyé spécial de retour de Durban,Malgré des sondages négatifs, l'ANC est encore capable de remplir des stades. Pour le plus grand plaisir du président Cyril Ramaphosa. « Vous tous, qui êtes ici dans le stade, en très grand nombre, plus de 75 000, merci d'être présents. » Pour l'ANC, le soutien du KwaZulu-Natal est crucial, souligne Abel Soobramoney, un militant originaire du township de Chatsworth, près de Durban. « Si l'ANC perd le KwaZulu-Natal et le Gauteng, il perd les élections. C'est le bastion de l'ANC et l'ANC ne perdra pas. »Nous sommes ici en territoire zoulou. Un régiment de combattants traditionnels chante en l'honneur de l'ANC. Une séquence importante, alors que l'ancien président Jacob Zuma, lui-même zoulou, joue sur cette identité ethnique pour attirer des voix vers son nouveau parti. Mais l'ANC résiste, selon Mzwandile Mbeje, éditorialiste politique pour la télévision publique sud-africaine. « Je pense que le parti voulait montrer que malgré la popularité de Jacob Zuma. À la fin, c'est le parti qui compte. Et c'est qu'ils ont réussi à prouver aujourd'hui au vu de l'importance de la foule. » « La compétition c'est bon pour la démocratie »L'ANC a fait mieux que le parti Combattants pour la liberté économique (EFF), réuni dans le même stade le 10 février, avec moins de supporters. Ce sera au tour de L'Inkatha Freedom Party de prendre possession du même stade, le 10 mars. Les formations politiques se bousculent dans le KwaZulu-Natal, mais cette concurrence n'inquiète pas Nonceba Mhlauli, cadre de l'ANC. « La compétition, c'est bon pour la démocratie, ça la renforce, ainsi que les partis politiques. Et pour nous, l'ANC, c'est comme une piqûre de rappel. »La concurrence est saine : ce message d'apaisement est le bienvenu dans une région connue pour ses violences politiques.À lire aussiAfrique du Sud: démonstration de force de l'ANC à Durban autour de Ramaphosa
2/27/20242 minutes, 18 seconds
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Maroc: le centre d'hébergement Chourouk à Ben Guerir redonne espoir aux femmes vulnérables

Ben Guerir, petite ville d’environ 80 000 habitants à trente minutes de Marrakech. C’est là que se trouve le centre d’hébergement géré par l’association Chourouk, dédié à l’accueil de femmes en situation difficile ou victimes de violences. Depuis sa création en 2012, l’équipe du centre est connue pour son action auprès des femmes les plus vulnérables et marginalisées : mères célibataires, femmes rejetées par leurs familles ou violentées par leurs conjoints, etc. Notre correspondante s’est rendue sur place pour les rencontrer. « Je suis ici pour profiter de l’hébergement qu’on m’offre parce que je suis enceinte. J’en suis à mon neuvième mois. Je peux accoucher à tout moment maintenant, et si je n’étais venue ici, je n’aurais pas pu faire suivre ma grossesse par un médecin. Je serais restée cachée par peur du regard de la société. » Asma a 17 ans. Elle occupe une chambre dans le centre d’hébergement depuis sept mois. Violée dans son village près de Ben Guerir, elle a dû fuir pour masquer sa grossesse.Souad Lahrach est l’assistante sociale du foyer. Elle se charge du premier accueil. « On est le seul centre d’hébergement ici. Donc, on accueille toutes sortes de catégories de femmes et quelle que soit la forme de violence à laquelle elles sont confrontées. Mon rôle est de les écouter et de les conseiller selon leurs demandes et leurs besoins. Certaines veulent un accompagnement juridique, donc je les aide avec mes connaissances ou alors, elles rencontrent notre avocate. D’autres veulent voir un psychologue ou juste vider leur sac. Donc je les écoute, je les mets à l’aise et une fois qu’elles sont dans mon bureau et que la porte est fermée, personne ne peut entrer », explique-t-elle.Pour la présidente de l’association, le rôle du centre d’hébergement et de son équipe est de rassurer ces femmes et de les mettre à l’aise. « On a un jardin entretenu par les femmes qu’on accueille, et là, on a une aire de jeu pour les enfants des mamans qu’on héberge, avec des balançoires et des toboggans. Notre centre d’hébergement n’est pas une prison. On leur donne leur liberté. Elles peuvent cuisiner ce qu’elles ont envie de manger. Elles vivent comme une famille », indique Khadija Elidrissi.Dans la cuisine, on retrouve Ghizlaine. Depuis trois mois, la jeune femme de 41 ans est hébergée avec sa fille d’un an et demi. « J’étais mariée, mais mon mari s’est enfui et je ne savais plus où aller, alors je suis venue ici. Et ici, je suis en paix, on a tout à notre disposition. C’est comme si j’étais chez moi. Je suis même mieux que quand j’étais chez ma famille ou celle de mon mari. On s’entraide, on cuisine ensemble, on dort ensemble. On est comme des sœurs », explique-t-elle.Le centre peut accueillir jusqu’à 35 femmes. Elles peuvent rester autant qu’elles le souhaitent, mais le but de l’association est de les aider à gagner leur indépendance. Elles peuvent suivre des cours d’informatique et de couture pour pouvoir un jour trouver un emploi et subvenir à leurs besoins.
2/25/20242 minutes, 22 seconds
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Le théâtre au Cameroun: comment les comédiens des web-séries peuvent booster le théâtre [3/3]

Au Cameroun, le théâtre fait clairement de la résistance, le public a déserté les salles de spectacle. Le boom des réseaux sociaux a favorisé la web-série prisée par les populations, car elle épouse mieux l'air du temps. Certains comédiens de théâtre, en migrant vers la web-série, ont connu le succès. Avec leur popularité, ils contribuent au retour du public dans les salles.
2/24/20242 minutes, 19 seconds
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Le théâtre au Cameroun: Africlown, le spectacle qui ramène les clowns au théâtre [2/3]

Depuis 2022, la compagnie Koko Gna Longue, habituée du théâtre classique, s'est engagée dans le théâtre clownesque, un véritable challenge. Car, ce genre nouveau qui creuse progressivement son sillon est très peu connu du public camerounais. La compagnie est en tournée au Cameroun. Avec le spectacle Africlown, une pièce de trois numéros, montée en collaboration avec la compagnie Les Matarperses de Niort, Les comédiens sont déterminés à rencontrer leur public. À lire aussiHemley Boum, le Cameroun au cœur
2/23/20242 minutes, 21 seconds
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Le théâtre au Cameroun: portrait du dramaturge Landry Nguetsa [1/3]

Le festival « Théâtre 237 » débute ce vendredi à l’Institut français de Yaoundé. Dix représentations théâtrales sont au programme. Rencontre avec le dramaturge et metteur en scène Landry Nguetsa. Il est à la tête de la compagnie Emintha, avec laquelle il fait le tour du monde. Landry passe ses journées entre le campus universitaire où il dirige le théâtre, et différents lieux culturels de Yaoundé.
2/22/20242 minutes, 22 seconds
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À Madagascar, la Fondation H démocratise l'accès à l'art contemporain

Dans le cadre du Programme Hay, la Fondation H ouvre ses portes tous les matins à des écoles publiques de la capitale Antananarivo et ses environs, avant l’arrivée des visiteurs. Reportage auprès d'une classe de 9e venue visiter cette fondation privée malgache et participer à un atelier inspiré de l’œuvre de la tisserande Madame Zo. La Fondation H, qui soutient la création artistique du continent africain, s’est fixé comme objectif depuis 2021 d’offrir un nouvel espace d’interaction auprès du jeune public, pour démocratiser l’art contemporain et le patrimoine culturel africain. En moins d’un an, elle a accueilli près de 2 500 enfants.
2/21/20242 minutes, 21 seconds
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RDC: Kin’Gongolo, un groupe de musique kinois aux instruments 100% écolo

En République démocratique du Congo, Kin’Gongolo, un groupe de musique 100% kinois a une particularité : des instruments « déglingués » faits à partir de déchets et d’objets de récupération trouvés dans les rues de Kinshasa. Le résultat est étonnant : un mélange de groove et de rythmes traditionnels. Des morceaux qui rendent hommage aux travailleurs congolais et font passer un message écologique.  
2/20/20242 minutes, 22 seconds
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Tunisie: la renaissance de l'artisanat pipier à Tabarka

À Tabarka, au nord de la Tunisie, Anis Bouchnak perpétue un savoir-faire hérité de son grand-père depuis plus d’un demi-siècle, celui de maître artisan pipier. Dans un petit atelier, il produit une à deux pipes par jour, réalisées en bois de bruyère, qui pousse le long du pourtour méditerranéen et dans la Kroumirie, la région montagneuse du nord-ouest tunisien. Autrefois, elle servait aux maîtres artisans pipiers français, désormais, alors que l’activité est devenue rarissime en France, en Tunisie, Anis a su se l’approprier et la préserver. « Là on a mis en marche la perceuse, on va percer le trou du foyer, le foyer, c’est là où on met le tabac ». Dans son atelier, en plein centre-ville, Anis Bouchnak sculpte des broussins de bruyère… Un arbuste résistant au feu qui pousse dans la région de Tabarka dont le nom veut dire « pays des bruyères » en berbère. Il en fait des pipes à tabac, uniques en leur genre et entièrement réalisées à la main. « J’aime bien travailler avec les anciennes techniques. Je trouve que c’est beaucoup plus dur mais quand on arrive à avoir un résultat qui est égal à celui avec toutes les techniques modernes, on est beaucoup plus fiers quoi », dit-il.Un travail minutieux hérité du savoir-faire de son grand-père, artisan pipier depuis les années 70. « Nous en Tunisie, il y avait un gros marché de gens qui fumaient la pipe et on était obligés d’importer de France ou d’Algérie. Et il s’est dit puisqu’on a la matière première, et qu’elle est de qualité, pourquoi pas ne pas fabriquer notre propre pipe pour le marché tunisien ? », raconte-t-il.Pour connaître le métier, Chedly, son grand-père part en France et l’apprend d’une façon peu conventionnelle à Saint-Claude dans le Jura. Il veut acheter les machines nécessaires et regarder les artisans mais il se heurte à des refus. « En allant là-bas, personne n’a voulu lui vendre parce que c’était un arabe et qu’il y avait un peu de racisme à ce moment-là. Avec sa petite échelle, il montait par la fenêtre et il regardait les machines, il se faisait virer à chaque fois, il a vraiment volé le métier quoi. Et petit à petit, ben il a réussi. Deux ans pour remonter les machines, comprendre le process et tout, et une année pour sortir la première pipe ».Plus d’un demi-siècle plus tard, c’est Anis qui continue de faire vivre ce métier par passion. Il est passé de la production semi-industrielle de son grand-père à de l’artisanat. Depuis une dizaine d’années, il utilise le stock de bruyère hérité de génération en génération. « On a une très bonne qualité de bruyère un peu dure à travailler par rapport à la bruyère italienne ou la française mais quand on sort une belle bruyère, c’est très joli », indique-t-il.Les broussins d’Anis ont plus de 35 ans d’âge, une ancienneté nécessaire pour la qualité cette souche arborescente qui doit sécher pendant plusieurs années après avoir été bouillie pendant 12 heures dans de l’eau. « Et en fait, c’est un peu comme le vin. Plus on va laisser sécher, plus la bruyère va devenir légère, plus elle va avoir du goût », ajoute-t-il.Des produits principalement dédiés à l’export pour un marché international et très demandeur du fait main…
2/19/20242 minutes, 30 seconds
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Côte d'Ivoire: Picard Amiral, de braconnier à protecteur des tortues marines

Pour développer son projet de protection des tortues marines entrepris il y a 15 ans dans les environs de Grand-Bereby, l’ONG CEM (Conservation des espèces marines) a proposé aux chasseurs, habitués à nourrir leur famille avec la viande de tortues, de travailler pour l’organisation. Emballé par un projet à plusieurs facettes, Picard Amiral, ancien braconnier, est devenu spécialiste dans la protection et la préservation des trois espèces de tortues marines que l’on peut observer près des côtes ivoiriennes.  De notre envoyé spécial à Roc, près de Grand-Brerby,« Quand elles sont en train de faire leur ponte, il faut que nous, les écogardes, nous soyons à côté, pour les suivre. Après leur ponte, on les accompagne, jusqu’à la mer ». Il est 21h passé. Comme chaque soir, ou presque, Picard Amiral va arpenter la plage de roc. 4 km aller, 4 km retour, plusieurs fois par nuit. Sa lampe rouge sur le front et ses yeux grands ouverts, il recherche les tortues marines profitant de la nuit pour aller pondre discrètement des centaines d’œufs dans un trou qu’elles recouvrent de sable.Une nouvelle activité aux multiples bénéfices« Aujourd’hui, je me sens mieux dans ce projet par rapport au braconnage avant. Quand l’ONG est venue me solliciter, j’ai dit OK, c’est vrai, quand je vendais la viande de tortues, je gagnais un peu de sous pour pouvoir nourrir la petite famille. Mais l’ONG est venue pour les rémunérations, ils ne m'ont pas proposé grand-chose, mais mon village Roc a bénéficié de plein de projets, grâce aux tortues marines, on a eu un bâtiment de trois classes, dans notre école primaire, un château d’eau », note l'ancien braconnier.À écouter aussiLa mondialisation du braconnageLes tortues attirent les touristes et favorisent les dons. C’est son père, pourtant grand consommateur de viande de tortues marines, qui l’a convaincu de passer de braconnier à écogarde il y a une dizaine d’années. « La tortue marine est la nourriture de mes parents Kroumens, et aujourd’hui, on est venu leur priver de leur propre nourriture, et ce n’était pas facile pour eux…, reconnaît-il. On ne peut pas dire que le braconnage n'existe plus, mais les mentalités ont changé ».Altercations entre écogarde et braconniers Aujourd’hui, Picard Amiral est même devenu un spécialiste de l’animal, il gère une écloserie pour protéger les œufs des prédateurs et il est capable de reconnaitre les trois espèces de tortues marines présentes à Grand-Bereby à partir des traces qu’elles laissent sur la plage.Mais les débuts n’ont pas été faciles, il a fallu parfois en venir aux poings avec les chasseurs de tortues : « Quand je fais des patrouilles la nuit, je suis menacé par mes frères, je dirais sinon les braconniers ou les chasseurs de tortues. Souvent, je suis seul sur la plage, et ils peuvent venir à trois personnes, comme ça. Quand j'essaye de les ramener à la raison, ils essayent de me mettre des coups de poing, de me tabasser un peu partout... Pourquoi ? Parce que je ne veux pas leur laisser la liberté de tuer des tortues. À tout moment, c'est le même scénario. Je ne me suis pas laissé faire. J'ai eu aussi à les boxer sur la plage à cause des tortues marines. » Aujourd’hui, Picard rêve de suivre une formation scientifique en Côte d'Ivoire ou à l'étranger sur les tortues marines.À lire aussiCentrafrique: la difficile renaissance du parc national Manovo-Gounda Saint Floris [1/3]
2/18/20242 minutes, 39 seconds
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RDC: les agriculteurs de Manomapia face au désastre de l'exploitation minière [2/2]

Au quartier Manomapia, dans la commune de Fungurume, la pollution due à l’exploitation minière n’affecte pas seulement l’air. Les habitants se plaignent que le sol et l’eau sont aussi contaminés par le gaz provenant de l’usine de traitement du cuivre et du cobalt de Tenke Fungurume Mining (TFM). Les cultures sont détruites. Des accusations que l’entreprise continue de rejeter, les considérants non-fondées. C’est le deuxième volet du reportage Manomapia sous l’emprise de l’exploitation minière. De notre envoyée spéciale de Fungurume, Le quartier Manomapia est construit sur des collines. Presque chaque ménage a un jardin. On y trouve des légumes et surtout du maïs frais. Mais certaines plantes ont fané comme si le feu était passé par là. Debout dans son champ situé à 10 mètres de sa maison, Kasongo Mujinga est consternée : « Regardez l’état des plantes de maïs, pourtant nous sommes en saison des pluies. Regardez…. Tout est brûlé par l’acide, j’ai décidé de tout arracher. »Les arracher….. Car le service de l’environnement de la commune a interdit de consommer même les légumes, explique Jeanne Kapanga, sa voisine : « Que ce soit les légumes de nos jardins ou encore le maïs, nous avons l’ordre de ne pas les consommer. Ils nous ont dit que c’était contaminé par l’acide et que cela pouvait avoir des effets nocifs sur la santé. Mais, nous n’avons pas de choix. Nous les consommons. »Toute la récolte brulée par l'acideUne houe sur son épaule, Tshinyemba Koj revient de son champ situé dans la périphérie. Pour lui aussi, c’est la désolation, car l'agriculture est sa principale activité : « Il y a la patate douce, la courge, le maïs. Mais nous n'y touchons plus. On ne peut plus les consommer, tout est détruit. Comment allons-nous vivre ? Nous ne sommes pas des salariés, nous ne sommes que des cultivateurs. Là, les enfants ont été renvoyés hier de l’école, que vais-je faire ? »William Yav, un autre agriculteur, se voit aussi dépourvu de sa seule source de revenu. Il pense qu'il réalisera une mauvaise récolte sur son champ de maïs de deux hectares : « La culture du maïs n’est pas bonne cette année. Nos champs sont à l’image de ce que vous voyez ici dans le quartier, tout le maïs a brulé, il n’y aura pas de production cette année, c’est la galère. »Enquête en coursPour l’heure, l’étendue des champs impactés par l’activité minière de TFM n’est pas connue, car ces agriculteurs ne sont pas identifiés, explique Eric Muland, chef de service de l’agriculture de la commune de Fungurume : « L’agriculteur est censé acheter sa carte de planteur. Elle nous permet ainsi de l'identifier ainsi que son site d’exploitation. Et il va bénéficier de l’encadrement technique par des conseils. Et en cas de désastre, il sera assisté par des agronomes. »En attendant les conclusions de la commission d’enquête mise en place par le gouvernement provincial du Lualaba, certains paysans exigent déjà qu’ils soient indemnisés.À lire aussiRDC: la population de Manomapia sous l'emprise de l'exploitation minière [1/2]
2/17/20242 minutes, 20 seconds
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RDC: la population de Manomapia sous l'emprise de l'exploitation minière [1/2]

Depuis plus de six mois, des habitants du quartier Manomapia, de la commune de Fungurume dans la région du Katanga, dénoncent des cas de pollution de l’air, de l’eau et du sol. Ils accusent l’entreprise Tenke Fungurume Mining (TFM), l’un des gros producteurs du cuivre et du cobalt en RDC, qui a construit dans ce quartier sa nouvelle usine de traitement de ces minerais. Selon la communauté, une centaine de personnes ont déjà consulté le personnel soignant, que ce soit pour des problèmes respiratoires, des éruptions cutanées ou encore des saignements de nez. Saignements de nez, vomissements de sang : depuis décembre, six enfants sont morts. L'entreprise dément toute responsabilité. De notre envoyée spéciale de Fungurume, Assise sur une natte à l’entrée de sa maison, située à moins de 10 mètres de l’usine 30 K de TFM au quartier Manomapia, Alphonsine Mwambuyi pleure encore son bébé de six mois décédé il y a plus de quatre semaines : « Les infirmiers ont dit que les poumons de mon bébé étaient attaqués par l’acide. Il toussait beaucoup. Ensuite, il a vomi beaucoup de sang. Mon bébé m’a quitté dans ces conditions. J’ai une grosse blessure au cœur... »Alors que la discussion se poursuit, d’autres habitants du quartier en colère approchent. Marie-Claire Kabulo, âgée d'une cinquantaine d'années, n’hésite pas à montrer les éruptions cutanées sur son ventre : « Ces gros boutons apparaissent sur tout mon corps. Regardez, en dessous des aisselles… Vous voyez, madame ! Et j’ai de fortes douleurs, c’est dur. »« Nous mourrons à petit feu »D’après ces habitants, l’usine refoule chaque soir du gaz dans l’air. Ce qui affecte leur santé. Hélène Banza, qui a aussi saigné du nez il y a quelques semaines, relate les symptômes : « D’abord la tête devient lourde, tu as eu mal au cœur comme si on t’avait poignardé. Et puis la gorge sèche, les yeux et le nez chatouillent. Après des grosses gouttes de sang coulent du nez... »Un peu plus loin, Héritier, jeune papa d’une trentaine d’années, prend un bain de soleil devant sa maison. Lui non plus ne cache pas sa colère : « Les autorités nous demandent de nous calmer et pourtant, ici, nous mourons à petit feu... Moi, je n’ai nulle part où aller. Là, vous me voyez, je suis malade et affaibli, je ne travaille plus. »Analyses en coursÀ plus d’un kilomètre à l’est de l’usine est construit un centre de santé public. Vêtu de sa blouse blanche, Faustin, infirmier de garde, est aussi conscient du danger : « L’odeur de l’acide arrive jusqu’ici au centre de santé. Et pour nous protéger, nous mettons les masques qui sont conservés là dans l’armoire. Nous les donnons aussi aux malades internés dans le centre. »Plus de 100 malades provenant du quartier Manomapia ont été référés à l’hôpital général de la commune de Fungurume pour des soins. L’entreprise TFM déclare qu’elle prend très au sérieux les plaintes des habitants. Elle assure par ailleurs que ses mesures de protection de l’environnement sont conçues selon les normes les plus strictes. De leur côté, les autorités attendent les résultats des analyses des échantillons de sang, de l’air, du sol et de l’eau prélevés par un toxicologue avant de se prononcer.À lire aussiNord du Niger: la société civile d'Arlit s'inquiète de la qualité des eaux
2/16/20242 minutes, 21 seconds
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Tunisie: la détresse des familles de Tunisiens disparus en mer

En Tunisie, 1 313 personnes parties des côtes tunisiennes ont disparu ou sont morts en mer Méditerranée en 2023, selon les chiffres du Forum tunisien des droits économiques et sociaux. Un nombre record. Depuis le début de l’année, les départs de bateaux se multiplient et les familles de disparus restent dans le doute quant au sort de leurs proches qui n’atteignent pas les côtes européennes. Rencontre avec des familles d’une quarantaine de Tunisiens qui ont disparu depuis la mi-janvier. Reportage de notre envoyée spéciale à El Hencha,Depuis début 2024, l’Organisation internationale pour les migrations a décompté 124 disparitions en mer. Dans la ville d’El Hencha, les portraits des disparus en mer sont encore affichés sur une pancarte au rond-point, un mois après leur disparition. Le 10 janvier dernier, près d’une quarantaine de personnes âgées de 12 à 40 ans sont parties vers l’Italie dans une embarcation de fortune. Leurs familles n’ont plus de nouvelles depuis... Comme Meftah Jalloul, 64 ans, poissonnier et père de Mohamed, âgé de 17 ans et son seul fils : « Ce n’était pas sa première tentative, il avait déjà essayé deux fois et à chaque fois, je l’en empêchais. Il avait arrêté l’école et s’occupait d’un troupeau de moutons. Cette fois-ci, je l’ai aidé à partir, je lui ai donné 1 000 dinars, mais il ne m’a pas prévenu de quand est-ce qu’il allait prendre la mer ».Mohamed est parti pendant la nuit, avec une météo incertaine. Lui et les autres ont pris le risque de prendre la mer malgré le mauvais temps, en espérant ainsi ne pas se faire remarquer par les garde-côtes. Depuis, son père ne sait pas s’il a fait naufrage, car il n’a plus de contact : « Le seul espoir, c’est qu’ils aient dérivé vers la Libye. Nous avons des gens de notre entourage qui vont partir sur place, voir s’ils sont dans des prisons libyennes. Vu que j’ai travaillé là-bas, je sais leur dire où aller, c’est notre seule option ».Les familles livrées à elle-mêmesLes familles se sentent abandonnées par les autorités. Le tribunal de Sfax a ouvert une enquête, mais les recherches de corps en mer n’ont rien donné. Fathi Ben Farhat, professeur de Taekwondo de 48 ans, espère aussi que son neveu de 17 ans, Malek, se trouve en Libye : « On se retrouve dans des situations où c’est à nous d’enquêter parce que nous n'avons aucune information. Les députés, le gouverneur, la municipalité, nous appellent, nous les familles, pour avoir des informations sur les recherches, ils n’appellent pas la police. C’est pour vous dire à quel point on est seuls et livrés à nous-même. »Alors que les familles d’El Hencha attendent toujours des informations sur leurs proches, le 12 février dernier, la Garde nationale a annoncé que 17 personnes ont également été portées disparues dans la zone de Bizerte, au nord de la Tunisie. Comme à El Hencha, leurs familles se mobilisent, face à l’impossibilité du deuil, faute d'avoir trouvé les corps.À écouter aussiNaufrages en Méditerranée: les migrants face à une Europe forteresse
2/15/20242 minutes, 8 seconds
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À Madagascar, une bibliothèque de rue donne le goût de la lecture aux plus défavorisés

Dans un des quartiers très populaires de la capitale Antananarivo, une association malgache propose tous les samedis matin depuis 2016 une bibliothèque de rue itinérante destinée aux enfants défavorisés. Une association convaincue que la lecture et l’écrit peuvent être d’incroyables vecteurs d’ascension sociale. Reportage de notre correspondante de retour d’Anosibe « Qui a écrit ce livre ? (...) Quel est le titre du livre ? (…) Bravo ! » La bruine qui s’abat ce samedi matin sur le quartier boueux et malodorant d’Anosibe n’a pas effrayé la soixantaine d’enfants venue participer à l’atelier lecture. Ils ont entre 1 et 16 ans. Serrés les uns contre les autres, en tailleur sur la bâche dépliée pour l’occasion, ils écoutent, attentifs, le conte malgache lu par une des bénévoles de l’association Boky Mitety Vohitra (« Bibliothèque des rues » en français).« Ici, il y a beaucoup d’enfants non scolarisés, préciseMarie Michelle Razafintsalama, la présidente de l’association, à l’origine de cette formidable initiative. Je suis persuadée qu’on peut acquérir les connaissances sans être allé à l’école. Et c’est pour ça que je crois en cette activité, pour que les enfants puissent avoir les connaissances, les savoirs, apprendre l’éducation, le savoir-vivre, à se respecter. »À lire aussiMadagascar: la société civile dresse sa liste de recommandations pour transformer l'éducationLes filles représentent 50% des lecteursAprès la lecture commune, vient enfin le temps de lecture libre. C’est la ruée sur les livres. L’animatrice tempère : « chaque enfant choisit un livre qui lui plaît. Venez, venez ! Hé hé, asseyez-vous ! » Malgré le bruit ambiant, Malala, 14 ans, se plonge dans sa bulle et dévore les trois livres qu’elle a choisis : « Moi, je n’ai pas de livre à la maison. Tous les samedis, il y a la bibliothèque qui vient. Des fois, c’est dans d’autres quartiers, alors je me déplace : je viens à chaque fois. J’aime lire des livres, parce qu’il y a beaucoup de choses à découvrir. Je rêve de pouvoir lire plus, mais au quotidien, je me contente de mes cahiers d’école pour m’évader. »Victor, un papa, passe dans le quartier et reconnaît sa fille, assise au milieu des enfants, absorbée dans sa lecture : « Moi, je n’ai pas eu l’opportunité d’aller à l’école. J’ai passé toute mon enfance à mendier jusqu’à ce que je devienne tireur de charrette. Alors quand j’apprends que la bibliothèque vient ici, j’encourage ma fille à y aller. On a vraiment de la chance qu’ils soient là, ces bénévoles. Je dis à Tiana : "Sois attentive, écoute bien ce qu’ils vont t’apprendre, ça t’aidera à aller loin". » Aller loin, Marie-Michelle l’espère. Elle a aussi et surtout réussi à sensibiliser les familles pour laisser les filles venir à la bibliothèque de rue et les éloigner le temps de deux heures par semaine, des corvées du foyer. Elles représentent désormais 50% des lecteurs. Une belle victoire pour l’association.À lire aussiMadagascar: un appel aux dons pour l'éducation fait polémique
2/14/20242 minutes, 22 seconds
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Sur les traces africaines d’Aston «Family Man» Barrett

Au sein des Wailers, il était celui qui accompagnait Bob Marley à la basse. Né en 1946, Aston Barrett est décédé le 3 février dernier. Tout au long de sa carrière, avec ou sans la légende du reggae, il a tissé des liens et partagé son savoir avec le continent africain. C’est l’un des « riddim » – rythme en patois jamaïcain – les plus connus en Afrique. Enregistrée en 1986, avec Aston « Family Man » Barrett à la basse, son frère Carlton à la batterie, une chanson culte : Jérusalem, d’un certain Alpha Blondy. « Quand on a composé Jérusalem, j’ai apporté ma cassette de Côte d’Ivoire et Family Man est celui qui a tout goupillé. C'est eux qui ont officialisé l’existence du reggae africain », explique le chanteur ivoirien.Alpha Blondy a croisé la route d’Aston Barrett grâce à une grande journaliste qui a notamment écrit Rockers d’Afrique et Le Premier Rasta : Hélène Lee, qui a toujours fait le pont entre le continent africain et la Jamaïque. Des sessions studio à Kingston, Alpha Blondy retient une chose : le son, le feeling d’Aston Barrett. « Il y a une sorte de magie, dans sa basse et sa façon de jouer. Et il apporte quelque chose à laquelle vous ne vous attendez pas. Il apporte sa propre résonance, sa vibration. »L'Afrique unieLiés par le rastafarisme à l’empereur d’Éthiopie Hailé Sélassié, Marley et ses musiciens – dont d’Aston Barrett – se sont toujours tournés vers l’Afrique. En 1979, la pochette de l’album Survival est un patchwork des drapeaux du continent. Y figure ce titre : Africa Unit.En décembre de la même année, les Wailers sont invités à jouer au Gabon. Marley revient avec sa troupe en avril 1980. Dans la nuit du 17 au 18, dans le stade Rufaro bondé, les Wailers célèbrent sur scène l’indépendance de la dernière colonie européenne. La Rhodésie du Sud devient le Zimbabwe.Discret, sensible, mais si puissant avec sa basse, Aston « Family Man » Barrett a donc participé à sa manière à l’émancipation du continent africain. Et c’est dans ce cadre qu’Alpha Blondy a souhaité lui rendre hommage : « Mon frère "Family Man", mission accomplie. Vous avez rendu des millions d'hommes heureux, seul Dieu peut vous remercier. Reposez en paix. ».À lire aussiEn 2023, Bob Marley réunit toujours l’Afrique
2/13/20242 minutes, 18 seconds
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Centrafrique: la transhumance au cœur des tensions entre éleveurs et agriculteurs

Située au cœur du continent, la Centrafrique couvre une superficie de 623 000 km2 et possède plusieurs millions d’hectares de pâturages largement sous-exploités. Ce qui attire des éleveurs des pays de la sous-région, en quête de nourriture pour les troupeaux. Mais la transhumance transfrontalière qui s’observe chaque année pendant la saison sèche entre le Cameroun, le Tchad et la Centrafrique est à l’origine de nombreux conflits entre éleveurs et agriculteurs. De notre correspondant à Bangui,Ce champ de 20 hectares a été saccagé et brûlé, il y a une semaine. En marchant, nous découvrons des tubercules de manioc, des ignames, des maïs ou encore des patates dont les résidus sont visibles. Pendant que Julienne évalue l’ampleur des dégâts, quelques bœufs égarés reviennent sur leurs pas. « La plupart des éleveurs ne distinguent pas les champs et les couloirs de transhumance, raconte-t-elle, très remontée. Les bœufs ont investi mon champ. Je les ai chassés avec des cailloux et des bâtons. Les éleveurs n’étaient pas d’accord. C’est pourquoi ils ont tout saccagé. »Le champ de Julienne se trouve à 500 mètres d’un cours d’eau très prisé par les bœufs. Un groupe d’éleveurs venus du Niger y a élu domicile. Ces nomades ont parcouru plus de 2 000 km à la recherche de verts pâturages. Moussa en fait partie : « Les éleveurs ont beaucoup de problèmes parce que ces derniers temps, les agriculteurs installent leurs champs à proximité des couloirs de transhumance et des points d’eau. C’est ce qui nous met régulièrement en conflit. »CohabiterEn 2023, une cinquantaine d’incidents ont été documentés entre éleveurs et agriculteurs. « Il y a des couloirs qui sont là alors on doit faire des investissements. L’important, c'est de faire le balisage de ces couloirs, relève Aimé Sambo, responsable de transhumance au sein de l’ONG Wild Life Conservation Society (WCS) qui travaille en partenariat avec le ministère de l’Élevage pour des solutions durables. On doit construire des points d’eau, on doit aménager les centres de santé vétérinaires pour attacher ces passeurs à suivre les couloirs afin de ne pas empiéter les parcs ou de ne pas empiéter les champs. En mettant en place ces infrastructures, nous allons minimiser le conflit. ».La République centrafricaine accueille chaque année environ 5 000 troupeaux d’éleveurs venus du Tchad, Cameroun, Soudan et Niger pendant la saison sèche.À lire aussiCentrafrique: à Paoua, l’insécurité menace le développement de la filière arachide [4/5]
2/12/20241 minute, 59 seconds
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Centrafrique: le retour des «cache-nez» pour se protéger de la poussière de Bangui

En Centrafrique, le gouvernement a mis en place depuis un an une politique de réhabilitation des avenues et ruelles de la capitale afin de stimuler l'économie locale. En conséquence des travaux, les trajets sont déviés dans les quartiers, sur des ruelles en latérite et les Banguissois subissent les panaches de poussière. Dans cette situation, les vendeurs de rue ont retrouvé la parade et un moyen de faire quelques gains, en ressortant les cache-nez. Les masques de protection utilisés contre le Covid-19, servent désormais de protection contre la poussière. À lire aussiCentrafrique: importante saisie de médicaments falsifiés près de Bangui
2/11/20242 minutes, 12 seconds
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CAN 2024: avant la finale, la mère de l'Ivoirien Sébastien Haller retient son souffle

Comme tout un pays, Simone Kuyo est passée par toutes les émotions pendant cette CAN. Aujourd’hui, la mère de Sébastien Haller rêve de voir son fils soulever la Coupe ce dimanche soir. C'est le grand jour à la CAN, celui de la finale de cette 34e édition qui opposera le Nigeria à la Côte d'Ivoire. Des Ivoiriens ressuscités, passés par toutes les émotions et qui vont pouvoir compter sur leur buteur star, Sébastien Haller. L'attaquant du Borussia Dortmund, de retour d'une blessure à la cheville, a joué son premier match comme titulaire en demi-finale et a marqué le seul but du match contre la RDC. Il est venu à la CAN avec sa femme, sa sœur, ses enfants et sa maman, Simone Kuyo, qui a vécu jusqu'à ses 17 ans en Côte d'Ivoire. Le buteur de 29 ans revient de loin. Lui qui a vaincu un cancer l'an dernier n'imaginait pas rater cette CAN en Côte d'Ivoire.Le match Côte d'Ivoire-Nigeria est à suivre ce dimanche soir à partir de 20h TU en direct et intégralité sur l'antenne Afrique de RFI.À lire aussiCAN 2024: pour la RDC, un dernier match peut transformer la «CAN du travail» en CAN de la fierté
2/10/20242 minutes, 52 seconds
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Kenya: The Travelling Telescope veut rendre l'astronomie accessible à tous

Un planétarium mobile et des télescopes. C’est grâce à ces outils qu’une initiative kényane fait découvrir les étoiles et planètes aux plus jeunes, aux quatre coins du pays. Depuis bientôt dix ans, The Travelling Telescope tente de rendre l’astronomie accessible à tous et toutes. À travers des activités dans des écoles, des séances dans son planétarium à Nairobi ou encore des week-ends d’observation des étoiles, l’organisation espère inspirer des vocations.
2/9/20242 minutes, 16 seconds
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RDC: l'hôpital de Salama à Bunia se dote d'un pôle chirurgical

En Ituri, dans le nord-est de la RDC, les populations subissent les violences de conflits communautaires ainsi que les exactions des ADF, une milice venue d’Ouganda. D’après les Nations unies, plus de 200 civils ont été tués ces six dernières semaines en Ituri, où les infrastructures de santé manquent. À Bunia, depuis juin, l’hôpital de Salama a ouvert un pôle chirurgical grâce à Médecin sans frontières.
2/9/20242 minutes, 16 seconds
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Bouaké, ville de CAN depuis 40 ans

Place aux demi-finales de la CAN ce mercredi 8 février, avec un dernier match joué au stade de la Paix de Bouaké : Nigeria-Afrique du Sud. Bouaké avait déjà accueilli une demi-finale de CAN, en 1984. La ville était la seule à l'époque, en plus d'Abidjan, à recevoir la compétition. Depuis, le stade a quasiment doublé de volume après deux rénovations en 2007 et 2018. Et Bouaké a beaucoup changé. La deuxième ville du pays profite aussi de la CAN pour tourner la page douloureuse des années noires et de la crise des années 2000. Avec un acteur central dans l'histoire de la ville depuis 40 ans : le stade, aujourd'hui appelé stade de la Paix. Nigeria-Afrique du Sud à Bouaké : à suivre en direct sur RFI à partir de 17h TU.RDC-Côte d'Ivoire à Abidjan : à suivre en direct sur RFI à partir de 20h TU. À lire aussiCalendrier, résultats et classements des matches de la CAN 2024À lire aussiCAN 2024: Nigeria-Afrique du Sud, Côte d’Ivoire-RDC... ce qu’il faut savoir sur les demi-finales
2/7/20242 minutes, 38 seconds
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Madagascar: visite d'une plantation artisanale de vanille de l'île aux Nattes

Un couple franco-malgache dans le secteur de la vanille depuis des générations a décidé il y a 10 ans de se lancer dans la culture et la commercialisation de la gousse sur l’île aux Nattes, petit coin de paradis de 3 km² au large de la côte Est malgache. La petite exploitation accueille désormais des touristes pour une immersion sensorielle, gustative et totalement écologique. De notre correspondante à Antananarivo,Devant l’un de ses 2 000 pieds de vanille, Lionel Schmitt présente au visiteur ses protégées : des gousses vertes, au calibre exceptionnel.« Elle est bien épaisse, elle est bien dure, bien charnue. Cela fera un bon produit, un produit de qualité. » Son secret, il le partage volontiers. Il ne pollinise qu’une fleur sur deux. « Si on pollinisait toutes les fleurs, on aurait des gousses qui feraient 14-16 cm. Mais là, ça nous permet d’avoir des gousses qui font 20-22 cm », explique-t-il. « Alors, tu vois, là, il y a les pétales de la fleur qui s’ouvrent et si à midi on n’a pas pollinisé, la fleur va se refermer et là, c'est terminé, elle ne produira plus. Donc, il faut polliniser avant midi. »Lionel a tout appris de son épouse, Lynda Razanavololona. Comme elle, il reproduit le geste, vif et précis, de la pollinisation manuelle, à l’aide d’une épine de citronnier cueillie sur l’agrume d’à côté.« Là, juste en dessous de mon pouce, tu as le sac à pollen, et en dessous, le pistil. Je dégage le pistil et l’étamine, je lève le petit opercule, tout simplement, et je mets en contact le sac à pollen et le pistil pendant cinq secondes », indique Lionel.À lire aussiMadagascar: les planteurs lancent un cri d'alerte face à la chute des prix de la vanillePas de produits chimiquesLes visiteurs peuvent s’initier au geste. La promenade se poursuit. La chaleur est intense et les odeurs, multiples. Le sol est meuble, presque élastique. Des troncs de bananiers jonchent la plantation, vestiges de la dernière tempête, la semaine passée. Ils feront de l’humus en se désagrégeant et nourriront les pieds de vanille.Ici, nulle trace de produits chimiques. Les petits tracas se règlent grâce à des solutions naturelles.« On avait un problème avec les escargots, qui nous mangeaient les feuilles de vanille. Et ce qu’on a trouvé, c’est qu’il fallait juste faire un habitat pour les hérissons et il suffit de mettre des branches, des feuilles, tout un amas de produits où ils puissent faire un nid. Ils sont venus. Et depuis, ce sont eux qui nous mangent les escargots », dit Lionel Schmitt.À lire aussiMadagascar: un rapport explosif crée la polémique au sein de la filière de la vanille« Tout est artisanal »Au village, la visite de la petite exploitation a rehaussé l’offre culturelle touristique de l’île et fait la joie des habitants. À la boutique, Lynda emballe avec soins les gousses qui ont séché dans des bouteilles en verre.« On est passionnés. Moi, je suis quatrième génération qui cultive, qui prépare, et qui vend de la vanille. Tout est artisanal », assure Lynda. « Nous, on ne récolte pas à la date de l’ouverture de la campagne vanille. On préfère attendre plusieurs semaines pour que notre vanille soit bien mûre et ait plus de vanilline. »Star de Madagascar, fleuron de l’agriculture nationale, la vanille qui a fait de la Grande île le premier exportateur mondial de l’épice, se dévoile ici, à l’île aux Nattes, en toute simplicité.
2/6/20242 minutes, 23 seconds
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En Côte d’Ivoire, le foot c’est ballon, et la CAN c’est bouchon

En Côte d’Ivoire, il ne reste plus que quatre rencontres, une à Bouaké et trois à Abidjan, avant la fin de la CAN. Pour le plus grand regret de tous les fans de football. Les habitants du nord d’Abidjan, eux, vont pouvoir souffler un peu. Notamment autour du village d’Ebimpé où se trouve l’immense stade Alassane Ouattara, et dans la commune voisine d’Anyama. Car les jours de match, les locaux doivent prendre leur mal en patience : impossible d’avancer d’un pouce. Malgré les bouchons d’Anyama, conducteurs, commerçants et écoliers restent philosophes malgré tout.  À lire aussiCAN 2024: Nigeria-Afrique du Sud, Côte d’Ivoire-RDC... ce qu’il faut savoir sur les demi-finales  À lire aussiCAN 2024: Haller, Lookman, Mokoena... ces joueurs qui peuvent faire la différence en demi-finales
2/5/20242 minutes, 33 seconds
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Côte d'Ivoire: les lêkês, l'atout tendance et charme de la CAN

La Côte d'Ivoire est toujours en course, dans cette 34e édition de la Coupe d'Afrique des Nations. Et c'est tout un pays qui profite de la qualification des Éléphants en demi-finale. Les ventes de maillots sont en hausse, et celles de lêkês aussi ! Les lêkês, ce sont ces petites chaussures ouvertes en plastique, très populaires depuis les années 80 dans le pays. Les Ivoiriens seront tous en lêkês mercredi soir pour la demi-finale entre la Côte d'Ivoire et la RDC.
2/4/20242 minutes, 38 seconds
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Maroc: Imsouane, un village de pêcheurs et de surfeurs détruits par les bulldozers

Le 17 janvier dernier, les commerçants et les habitants d'Imsouane, un village de pêcheurs connu pour ses vagues et ses côtes prisées des surfeurs, ont reçu un ordre clair des autorités locales : quitter les lieux en 48 heures avant l’arrivée des bulldozers. La raison officielle invoquée est l’occupation illégale du domaine maritime public. Mais les habitants pensent qu’on les expulse pour construire des grands complexes hôteliers modernes et luxueux. De notre envoyée spéciale à Imsouane,« Ce qui s'est passé, ça fait mal au cœur. Ce n'est pas juste pour moi, c'est pour pas mal de gens qui sont dans la même situation que moi, parce que je n'ai rien, je n'ai que ça ». Abderrahim tenait un petit restaurant dans le centre historique d’Imsouane. Il était connu pour cuisiner le meilleur poulpe de la région. « Ici, c'est ma petite maison, c'est pour le business. Mais la famille, elle vit ailleurs, elle vit à Tamri. J'ai réussi à louer une maison parce que je travaille ici, donc je peux payer le loyer. J'ai loué une maison pour mes enfants, pour qu'ils aient accès à l'école ». En 48 heures, Abderrahim a perdu sa seule source de revenus. Ils sont nombreux à être dans la même situation, le centre faisait vivre de nombreuses familles, installées dans les montagnes aux alentours. Depuis trois ans, Younes est propriétaire d’une maison troglodyte sur le front de mer. Son combat, c’est la protection de ce patrimoine.« J'aimerais juste qu'ils laissent un endroit de mémoire où les gens puissent dire ça, c'était l'ancien Imsouane, avant, c'était comme ça. J'espère seulement que l'avenir pour ce village inclura évidemment la population locale, qui est la population qui a fait émerger la destination Imsouane. Donc, j'ai confiance en les autorités de mon pays pour prendre les bonnes décisions et pour n'oublier personne sur la route », explique-t-il.Aucune demeure préservéeMalgré le combat mené par Younes, sa maison troglodyte a été détruite. Aucune demeure du front de mer n’a été préservée. Si Younes a encore confiance en son pays, d’autres n’en attendent plus rien.C’est le cas de Mohamed Irizi, un autre habitant du front de mer. « On nous a appris l’amour de la patrie, nos parents, nos grands-parents nous l’ont transmis. Ils nous ont enseigné à mourir pour notre religion, pour nos enfants et pour notre pays, mais on nous l’a confisqué ce pays et nos enfants aussi. Ils sont perdus et nous, on se tait encore et encore. Mais jusqu’à quand on va avoir peur ? On ne meurt qu’une fois ? Eh bien, venez nous tuer. Venez me tuer une bonne fois pour toutes plutôt que de me tuer à petit feu comme vous le faites. »Le réaménagement d’Imsouane est prévu depuis 2022. Mais dans ce plan que nous avons pu consulter, le centre historique du village devait être rénové, mais préservé. Contactées, les autorités locales n’ont pas donné suite à nos sollicitations.À lire aussiMaroc: les habitants du village d’Imsouane, réputé pour ses plages de surf, chassés de leurs maisons
2/3/20242 minutes, 30 seconds
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Mauritanie: dans le parc national de Diawling, le défi de la préservation des espèces

Chaque année, le parc national du Diawling, au sud de la Mauritanie, qui borde le fleuve Sénégal, procède au comptage international des oiseaux d’eau migrateurs et locaux. L’occasion de faire l’état des lieux de ses zones humides. Créé en 1991, ce parc a été conçu pour restaurer entièrement l’écosystème du territoire asséché par les aménagements hydro-agricoles mis en place sur le fleuve Sénégal, comme le barrage anti-sel de Diama en 1987. Une préoccupation toujours au cœur des priorités du parc et plus largement de la réserve de biosphère transfrontalière.
2/2/20242 minutes, 15 seconds
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Sénégal: trouver un emploi, une galère pour les chômeurs de Kédougou [5/5]

Préoccupation centrale des Sénégalais, à l’approche des élections : celle de trouver du travail. Avec un taux de chômage autour de 20% en 2023, cette difficulté à trouver un emploi est particulièrement forte pour les moins de 35 ans qui représentent les 2/3 de la population. À Kédougou, par exemple, région enclavée à 700 km de Dakar au sud-est du Sénégal, le secteur privé peine à absorber les demandeurs d’emploi même si plusieurs sociétés minières internationales exploitent de l’or dans cette région. À lire aussiPrésidentielle au Sénégal: avec les creuseurs de Kédougou, dernière grande ville de l’Est
2/1/20242 minutes, 14 seconds
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Sénégal: à Dakar, les prix des loyers explosent [4/5]

Dans la région de Dakar, les loyers ont augmenté de 256 % entre 1994 et 2014. Et les frais dévolus au logement représentent en moyenne 37% du budget des ménages. Les prix de la location explosent, malgré un décret entré en vigueur le 1ᵉʳ mars 2023 pour imposer une baisse de 15 % des mensualités de moins de 300 000 francs CFA.
1/31/20242 minutes, 23 seconds
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Sénégal: des disparités dans l'accès à l'électricité [3/5]

Le Sénégal a un des bons taux d’électrification pour la région, il atteint près de 80% en moyenne. Mais il y a en réalité beaucoup de disparités entre les villes et les campagnes, et dans certaines zones rurales, les habitants sont toujours privés de courant. Parfois, alors même que des pylônes électriques passent en plein milieu de la localité.
1/30/20242 minutes, 25 seconds
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Sénégal: paroles d'agriculteurs des zones rurales de Fatick [2/5]

Cette semaine, RFI s’est déplacée à travers le Sénégal pour écouter les préoccupations des populations un mois avant l’élection présidentielle du 25 février prochain. Une de nos correspondantes, Théa Ollivier, s’est rendue dans la région de Fatick, fief du président sortant Macky Sall, pour donner la parole aux agriculteurs des zones rurales.
1/29/20242 minutes, 20 seconds
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Sénégal: le pouvoir d'achat des familles face au coût de l'alimentation qui explose [1/5]

C’est l’une des préoccupations principales des Sénégalais à l’approche des élections : le coût de la vie, en particulier de l’alimentation, qui explose ces dernières années. Le pouvoir d’achat des familles diminue et cette baisse les force à faire des sacrifices. 
1/28/20242 minutes, 16 seconds
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Tunisie: les semailles perturbées par le changement climatique

En Tunisie, la saison des semailles touche presque à sa fin, mais cette année les agriculteurs ont dû s’adapter à la longue période de sécheresse qu’a connu 2023. Avec l’arrivée tardive des pluies, beaucoup ont semé sur le tard leurs céréales et craignent une nouvelle baisse de production pour la récolte à venir. En 2023, la récolte céréalière avait déjà connu une baisse drastique de 60% par rapport à 2022 à cause des sécheresses. Pour tenter d’anticiper la saison 2024, l’Office des céréales a annoncé augmenter de 24% les semis et de soutenir les agriculteurs, mais sur le terrain, les professionnels font face à de nombreux problèmes, climatiques et économiques.  De notre correspondante à Tunis,À Oued Zitoun, au nord de la Tunisie, certains champs sont asséchés et délaissés, d’autres sont en plein labour, d’autres encore verdoyants. Ce paysage atypique reflète les problèmes des périodes de sécheresse de ces dernières années.Aymen, agriculteur de 34 ans, prépare sa parcelle de 80 hectares pour y semer de l’orge. « Là, vous avez des gens qui sèment encore par ici, ceux qui le font à la main, sans le semoir. Vous avez aussi ceux qui ont déjà planté, surtout tout ce qui est foin, parce que c’est mieux de commencer par ça », indique-t-il.Tout un secteur affectéSi chacun fait les semailles à son rythme, c’est parce que les agriculteurs jouent au chat et à la souris avec les pluies tardives et sporadiques, elles sont arrivées seulement fin novembre cette année.« C’est vrai qu’on a commencé les semailles très tard cette année, on attendait la pluie, qui est arrivée en retard », poursuit Aymen. « D’habitude, on commence à préparer la terre et les semailles dès le mois de septembre, mais là tout a été chamboulé, on a eu un automne chaud avec l’arrivée des pluies seulement en novembre. Et en plus, on doit faire vite, car lorsque arrivent les pluies, elles sont diluviennes donc la terre n’est pas exploitable, on doit profiter des deux ou trois jours d’éclaircie pour semer. »Ces chamboulements climatiques affectent toute la chaîne de production et le métier d’agriculteur est de moins en moins rentable pour les petits exploitants.Belaid Amor, 60 ans, au volant du tracteur et agriculteur depuis quatre décennies, en sait quelque chose. « Je le vois autour de moi. Les agriculteurs n’ont plus les moyens de travailler, ils ne peuvent pas acheter un tracteur, encore moins une terre, ils ne peuvent pas se payer un semoir, l’engrais et s’ils louent une terre ou que l’État leur donne une terre, ça ne change rien, car ils ne peuvent pas payer les ouvriers qui vont l’aider », constate-t-il.Manque de vision dans la politique agricoleLeith Ben Becheur, agriculteur de Jendouba au nord-ouest, s’inquiète du manque de vision dans la politique agricole. Car après les semailles tardives vient le problème des engrais, pas toujours disponibles en quantités suffisantes.« Ce que l’on demande tout simplement, c'est qu’il y ait suffisamment de contrôle au niveau de la qualité et des prix et qu’on ne serve pas à l’agriculteur qui peine déjà à droite et à gauche, des produits qui risqueraient d’être des vieux stocks parce qu’il y a eu deux ans parce qu’il y a eu deux années de récoltes très médiocres donc de moins forte utilisation de ces choses-là. »Il faudra encore surveiller la pluviométrie du mois de mars et la hausse des températures pour garantir un bon rendement en 2024.
1/27/20242 minutes, 24 seconds
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Le festival Réminiscence explore la richesse de la littérature ivoirienne

À l’occasion de la CAN, le festival culturel Réminiscence organise à Abidjan une exposition collective qui célèbre quatre piliers de la littérature ivoirienne : les romanciers fondateurs Bernard Dadié et Ahmadou Kourouma, l’autrice jeunesse Jeanne de Cavally et le poète et dramaturge Niangoran Porquet.  De notre correspondante à Abidjan,Ces mots sont issus du célèbre ouvrage autobiographique de Bernard Dadié, Climbié. Le titre de l’exposition, « Créons pour ne pas mourir des imitations », a été emprunté lui aussi à cette figure tutélaire de la littérature ivoirienne, qui a ouvert en Côte d’Ivoire le champ de la poésie, des contes et des nouvelles… « On se trompe souvent sur cette Afrique des années 1930 à 1960, observe Nicole Vincileoni, spécialiste de Bernard Dadié – dont un quart de l'œuvre n’a jamais été publiée – et secrétaire générale de sa bibliothèque-archives. On se trompe sur ces générations, qui étaient des générations qui avaient un besoin fou de culture, de connaître le monde, qui apprenaient toutes les langues, si c’était possible, et toutes les cultures... Et puis après, bizarrement, avec les indépendances, il y a eu comme un repli sur soi. »Pour trouver sa voie, la littérature de la Côte d’Ivoire indépendante a dû rompre avec l’académisme colonial – avec les imitations, justement – et se rapprocher de sa propre culture, indique Alain Tailly, ingénieur culturel et écrivain : « C’est une littérature relativement jeune. C’est une littérature en construction, qui a commencé par imiter les grands maîtres français. Mais à partir des années 1960, qui a produit des textes où elle revendiquait une originalité de la langue, notamment avec Les Soleils des indépendances d’Ahmadou Kourouma, l’immense Kourouma. Une littérature d'affirmation, de quête d’une identité ».Une identité étroitement liée aux traditions orales de la Côte d’Ivoire, pour l’écrivaine Véronique Tadjo, qui a elle-même repris l’histoire de la reine fondatrice du royaume Baoulé dans son ouvrage Reine Pokou, avec une lecture moderne du mythe à la lumière de l’histoire politique de son pays. « Moi, j’ai été nourrie au conte, et l’oralité est très importante. Et elle continue, d’ailleurs. Une oralité urbaine, on le voit avec les jeunes qui s’emparent du nouchi, qui continuent ce travail sur la langue française. Qui ressentent cet héritage comme le leur, mais qui veulent que cette langue ressemble à leur réalité », indique-t-elle.Avec 600 écrivains publiés en Côte d’Ivoire, les jeunes talents sont nombreux, les maisons d’édition également. Mais la chaîne du livre a désormais besoin d’être dynamisée et structurée, plaide Alain Tailly, et de s’étendre sur tout le territoire ivoirien, pour toucher les lecteurs hors des murs d’Abidjan.
1/26/20242 minutes, 16 seconds
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CAN 2024: à Korhogo en Côte d'Ivoire, football et spiritualité sont étroitement liés

Malgré deux défaites en trois matchs, la Côte d’Ivoire s’est qualifiée in extremis pour les huitièmes de finale de sa CAN de football à domicile. Elle affrontera le Sénégal ce lundi 29 janvier. Certains y verront un cadeau du ciel, d’autres la conséquence d’un travail mystique. Un cliché peut-être, mais aussi une réalité : dans les territoires où les croyances traditionnelles sont encore très présentes, sport et spiritualité sont souvent associés. Exemple à Korhogo, dans la région du Poro.
1/26/20242 minutes, 26 seconds
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Pablo Picasso chez les Sénoufos

C'est l'histoire improbable de la visite de l'un des plus grands artistes de l'histoire dans un petit village de Côte d'Ivoire : Pablo Picasso est-il allé se ressourcer, trouver l'inspiration auprès d'artisans traditionnels du peuple sénoufo, au nord du pays ? Difficile de l'affirmer à 100%, mais des guides touristiques nationaux et internationaux en font l'écho. Et même les biographes de l'artiste ne démentent pas catégoriquement.
1/24/20243 minutes, 5 seconds
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Guinée: les jeunes panafricains tentent de faire vivre l'héritage de Kwame Ture [2/2]

Il y a 25 ans, Kwame Ture disparaissait. Le leader du mouvement des droits civiques, idéologue du Black Power, devenu panafricain, est enterré à Conakry, où il a passé la moitié de sa vie. Aux États-Unis, Kwame Ture reste une figure importante dont on continue de faire connaître les combats, c’est une personnalité plus confidentielle en Guinée. Certains tentent néanmoins de faire perdurer son souvenir, notamment parmi la jeune génération de militants panafricains. De notre correspondant à Conakry,Ils sont plusieurs dizaines, réunis dans l’un des seuls parcs de Conakry, ils terminent d’installer une estrade. Des militants venus de neuf pays du continent pour participer au Festival international panafricain de Nguékhokh. À cette occasion, un hommage a été rendu à Kwame Ture. « C’est l’un des plus grands panafricains parmi les afro-descendants, si ce n’est le plus grand. Car il a quitté les États-Unis, il a choisi de rester en Afrique, de travailler pour les Africains et avec les Africains », affirme le responsable de la Commission communication du Fipan, Baben Souaré.Mais si l’héritage de Kwame Ture est aujourd’hui valorisé aux États-Unis, son souvenir en Guinée a fini par s’estomper : « On ne peut pas avoir une conscience politique sans conscience historique. Donc forcément, il faut connaitre le passé, connaitre son prédécesseur », explique Souleymane Diallo, coordinateur général du Fipan, qui est venu du Sénégal. La pensée de Kwame Ture doit permettre, selon lui, de former les jeunes militants : « Pour nous, c’est un militant incontournable du milieu panafricanisme. C’est vrai que beaucoup de panafricanistes ne le connaissent pas bien. C’est pour cela que nous essayons de faire un travail de fond pour expliquer son œuvre, pour expliquer comment à travers son approche, à travers ses idées, il a pu aider tous les pays africains, notamment la Guinée à aller vers un processus de souveraineté et d’indépendance », ajoute Souleymane Diallo.Le plus jeune fils de Kwame Ture, Alpha Yaya participe à l’évènement. Derrière lui, une affiche. Sur une carte de l’Afrique sont représentées les grandes figures du panafricanisme. Le visage de Kwame Ture a été placé au centre du continent : « Kwame appartient à toutes ces personnes qui désirent être libres. C’est un sentiment de fierté de voir qu’il est aimé et qu’il continue à guider des millions de jeunes à travers le monde, malgré son absence. »Sur un continent et dans un pays plus précisément, la Guinée, où la nouvelle génération est en quête d’identité, les figures comme Kwame Ture trouvent aujourd’hui une seconde jeunesse. Les idées du penseur et militant, toujours aussi actuelles, posent les bases des combats politiques du XXIe siècle en Afrique.À lire aussiKwame Ture, le destin hors du commun d'un Black Panther parti s'installer en Guinée [1/2] 
1/23/20242 minutes, 20 seconds
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Kwame Ture, le destin hors du commun d'un Black Panther parti s'installer en Guinée [1/2]

Il est né dans les Caraïbes, a grandi à New York et est mort à Conakry. Stokely Carmichael, alias Kwame Ture, est une figure du mouvement des droits civiques aux États-Unis, et un idéologue charismatique du Black Power. Cet Afro-Américain s’établit dans la Guinée de Sékou Touré à la fin des années 1960. Son destin restera à jamais lié à ce pays où il développe de nouvelles thèses panafricaines. De notre correspondant à Conakry,Lui, son regard magnétique. Elle, son visage doux et lumineux. Stokely Carmichael et la chanteuse, militante sud-africaine Miriam Makeba, forment un couple iconique de la lutte antiraciste. À la fin des années 1960, ils s’envolent pour la Guinée.« C’est quelqu’un qui laisse tous ses privilèges aux États-Unis pour venir en Afrique, où le pays peine à se développer. Il faut être un homme de conviction et un Africain dans l'âme pour pouvoir faire cet acte », dit son fils Alpha Yaya.À Conakry, au contact du président Sékou Touré et de son ami le dirigeant ghanéen Kwame Nkrumah, Stokely Carmichael se convertit au panafricanisme qu’il va désormais considérer comme la solution aux problèmes du peuple noir. En hommage à ces deux leaders, il adopte un nouveau nom : il devient Kwame Ture.   Jordan Garcia, le consul honoraire de la Guinée en Californie, explique que « c'est quelqu'un qui [l'a] tout de suite très intéressé, parce que c'était différent de Martin Luther King qui était un pasteur. Si on vous mettait une claque sur la joue gauche, il faut tendre la joue droite. Lui, c'était complètement différent. C'était “s'il nous tire dessus, on va leur retirer dessus”. »De figure controversée à personnage réhabilitéÀ cause de ses idées, le jeune Stokely Carmichael se retrouve dans le viseur du FBI. Figure controversée dans les années 1960, aux États-Unis, le personnage historique a depuis longtemps été réhabilité par Washington. « Le gouvernement reconnaît les complexités de l'histoire de Kwame Ture », explique l’ambassadeur des États-Unis à Conakry, Troy Fitrell. « Ses contributions et ses opinions, ses positions plus radicales. Mais les positions plus radicales sont aussi une contribution à la conversation des droits civiques ». 1998, le 15 novembre. L’ambassadeur américain de l’époque assiste même, à Conakry, aux funérailles de Kwame Ture. « Il a vécu la moitié de sa vie en Guinée. Il adorait la Guinée, il adorait le peuple guinéen. Il voulait mourir ici », rappelle Bokar Biro, le fils aîné du penseur panafricain.Kwame Ture est enterré au cimetière Cameroun à Conakry. Il repose dans la partie musulmane. 
1/22/20242 minutes, 24 seconds
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Côte d'Ivoire: à San Pedro, les ONG en soutien aux travailleuses du sexe durant la CAN

À San Pedro, supporters et travailleuses du sexe affluent dans la cité côtière où la CAN bat son plein. Dans un pays où le VIH a reculé de près de 50 % sur la dernière décennie, et où les autorités affichent leur ambition d’éradiquer la maladie d’ici 2030, les ONG craignent une recrudescence des infections sexuellement transmissibles (IST) pendant la compétition.
1/21/20242 minutes, 29 seconds
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«Essamay: Bocandé la panthère», un documentaire sur la légende du football sénégalais

C’est l’histoire d’une légende du football sénégalais et africain : Jules François Bocandé, originaire de Casamance et décédé en 2012. Il est pour la première fois mis à l’honneur dans un documentaire, Essamay : Bocandé la panthère, qui a été diffusé en avant-première à Dakar. Un moment d’émotion pour les spectateurs et le réalisateur.
1/20/20242 minutes, 16 seconds
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Côte d'Ivoire: au Bardot de San Pedro, la CAN pour tous

San Pedro, connue pour son dynamisme économique, son port et son industrie du cacao, présente une autre facette avec le quartier du Bardot. L'ancien plus grand bidonville d'Afrique de l'Ouest s'est construit de façon anarchique, au fil des arrivées des nouveaux habitants, venus des terres du Liberia voisin, de Guinée ou du Burkina Faso. Rattachés à la municipalité en 2011, les quartiers insalubres se sont modernisés et la CAN a fait du bien grâce à de nouvelles infrastructures. On peut même y profiter de la CAN presque comme ailleurs.
1/19/20242 minutes, 47 seconds
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RDC: à la rencontre des auteurs de bandes dessinées de Lubumbashi

Si aujourd’hui le manga ou les comics sont prisés des jeunes Congolais, à Lubumbashi, une nouvelle génération de bédéistes se lance un défi : celui de proposer à ses lecteurs des histoires locales avec un style de dessin qui met en valeur l’Afrique et sa culture. Un premier numéro Le Combat des éléphants a été publié en version électronique à la fin du mois décembre dernier. De notre correspondante à Lubumbashi,Assis derrière son ordinateur, Jeannot Kongolo, jeune bédéiste, tient entre ses mains un album imprimé en noir et blanc. La bande dessinée porte le titre de Rafiki, « Ami » en kiswahili.« Rafiki est une production de notre groupe BELUShi. C’est une idée qu’on a développée, et on aura à aborder plusieurs thèmes. Pour la première partie, nous avons parlé de l’insalubrité dans la ville. Il y a trois personnages. Celui-ci c’est Kyabu, lui, c'est Rafiki qui s’appelle Mingaji. Il y a aussi la fille qui se nomme Ngoy », indique-t-il.Un style de dessin propreEntre-temps, chaque membre du groupe développe ses propres projets. Daniel Mukembe, par exemple, vient de publier la version électronique de sa bande dessinée intitulée en kiswahili Bukonvi ya Tembo.« Le titre Bukonvi ya Tembo signifie “Le Combat des éléphants” ou “Le Combat des géants”. Je me suis inspiré du dicton qui dit “Lorsque deux éléphants se battent, ce sont les fourmis qui en pâtissent”. Alors, je parle de la situation politique dans notre pays. Chaque fois que des acteurs politiques s’affrontent, la population paye le prix. Il y a des jeunes qui meurent », explique-t-il.Dans cette œuvre, Daniel Mukembe a utilisé un style de dessin qui lui est propre. « J’ai voulu faire revivre l’Afrique, avec les scarifications et les motifs Africains et aussi la ressemblance des personnages à la réalité », insiste-t-il, avant de poursuivre : « Parce que j’ai eu à lire des bandes dessinées qui parlent de l’Afrique et produites par des Européens, tous les personnages africains sont caricaturés, alors que les autres sont semi-réalistes »Une absence d'industrie culturelle pour promouvoir la bande dessinéeCette effervescence ravive de vieux souvenirs sur la bande dessinée made in Lubumbashi. « Il y avait des journaux tels que Mwana Shaba Junior qui publiaient une série dans chaque numéro. On racontait beaucoup d’histoires ; on interpellait les travailleurs à ne pas voler, à protéger l’outil de travail », se souvient Robert Aron Tshibang, fonctionnaire de l’État.Mais la jeune génération des bédéistes de Lubumbashi fait face à l’absence d’industrie culturelle pour promouvoir son travail, explique Ethan Ndala, l’un d’eux.« Par exemple, pour l’animation, il nous faudra un bureau, du matériel comme des ordinateurs avec carte graphique. Il faut du personnel et un financement. Ça ne peut se faire tout seul ».Quoi qu’il en soit, ces jeunes ne perdent pas espoir. Dans la ville de Lubumbashi, il y a beaucoup de sources d’inspiration et de potentiels lecteurs, disent-ils. 
1/18/20242 minutes, 16 seconds
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Au Maroc, la réforme du Code de la famille au cœur des attentes des militantes féministes

Le Maroc en pleine réforme de la Moudawana, le Code de la famille. Près de 20 ans après la dernière réforme de ce texte, le royaume chérifien s’apprête à le modifier pour plus d’égalité entre les hommes et les femmes. En septembre 2022, Mohammed VI a lui-même adressé une lettre au chef du gouvernement dans laquelle il exige qu’on lui présente des « propositions d’amendements » du Code de la famille « dans un délai n’excédant pas six mois ». À lire aussiMaroc: les femmes manifestent pour l'égalité des droits avec les hommes
1/17/20242 minutes, 27 seconds
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À Nouakchott, les supporters des Mourabitounes croient en leurs chances à la CAN

En Côte d'Ivoire, les Étalons du Burkina Faso se sont imposés de justesse ce mardi face à l’équipe mauritanienne des Mourabitounes grâce à un pénalty dans le temps additionnel. La Mauritanie qui participe pour la troisième fois consécutive de son histoire à la compétition et jugée plus faible sur le papier, s’est finalement révélée tenace. Une petite fierté malgré la défaite pour les Mauritaniens qui ont pu regarder le match en début d’après-midi dans les cafés de Nouakchott. Tous espèrent cette année passer la phase des matches de poule. À lire aussiCAN 2024: revivez le match Burkina Faso-Mauritanie, 1-0
1/17/20241 minute, 57 seconds
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Côte d’Ivoire: bienvenue à la Cité CAN de San Pedro

La CAN a démarré presque partout en Côte d’Ivoire, sauf à Korhogo, dans le nord du pays, où les équipes du groupe E font leur entrée ce mardi. À San Pedro, sur la côte sud-est, les joueurs commencent la compétition ce mercredi 17 janvier. C’est dans ces deux villes que les cités CAN ont été construites : des quartiers entiers sont sortis de terre en quelques semaines pour loger les équipes. À San Pedro, 32 lotissements sur mesures accueillent trois formations : la Zambie, la Tanzanie et la RDC. Et les joueurs se croisent dans la plus grande détente. À suivre aussi[En direct] CAN 2024: l'Algérie se fait surpendre par l'Angola qui égalise  
1/15/20242 minutes, 36 seconds
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Madagascar: plongée dans la «Piscine» pour intégrer l’École 42 Antananarivo

C’est une immersion dans une « Piscine » un peu particulière, celle de l’École 42, une école d’informatique, une école de la vie 100% gratuite qui accueille les élèves sans condition de diplôme ni limite d’âge. Suite à des tests en ligne, 600 candidats malgaches de 14 à 40 ans ont été sélectionnés pour plonger dans la fameuse piscine. Une épreuve éliminatoire de quatre semaines de travaux acharnés pour accéder à l’École 42 Tana et la garantie d’un travail après la formation. De notre correspondante à Antananarivo,L’ambiance est feutrée. Il est minuit et ils sont encore une quarantaine de « piscineux », concentrés sur leur écran, à remplir des lignes de codes. Autour d’eux, des fresques colorées, des canapés, une salle de jeux. Le lieu se veut accueillant pour leur permettre de se surpasser. « Les piscines mettent les candidats à rude épreuve parce qu’ils doivent se donner à 300%. C’est très difficile à vivre, mais en même temps, c’est magique, on s’en souvient toute sa vie ! » Et pour cause, Yann San Sebastian, le directeur pédagogique de 42 Tana, est lui-même passé sur les bancs de 42 à Paris.Ce rythme intense a déjà poussé à l’abandon un quart des sélectionnés. Mickael, 19 ans, s’accroche. L’ex-étudiant en licence d’anglais découvre des notions et manipule des langages de programmation qui lui étaient encore totalement inconnus, il y a deux semaines. « Je viens ici toutes les deux nuits pour essayer d’avancer un peu plus et rattraper des cours que je n’ai pas pu recevoir. Quand je dis rattraper les cours, ça veut dire faire beaucoup de recherche et demander à beaucoup de gens ce que je dois faire. »Parce qu’ici, il n’y a pas de professeurs. Pas d’horaire, non plus. La pédagogie est basée sur le concept du « peer learning », (« l’apprentissage par ses pairs »). « C’est très déboussolant au début, mais je trouve que c’est le meilleur système vu que l’on passe plus de temps à la pratique qu’à la théorie et j’apprends beaucoup plus de trucs de mes camarades. », ajoute Mickael.Un apprentissage intensifDès qu’ils réussissent un projet, un autre se débloque automatiquement et leur est soumis. Comme dans les jeux vidéo : « J’ai été complètement larguée au début et maintenant ça va. » Malala 20 ans, était pilote de drone. Elle a tout plaqué pour s’initier au code. « J’ai beaucoup évolué, même question relationnelle. Jamais je n’aurais pensé parler avec d’autres gens, ni même leur partager mes erreurs et tout ça. Jamais je n’aurais pensé faire ça. J’ai mis toute ma vie en parenthèse juste pour réussir cette piscine et j’espère vraiment être prise. C’est mon avenir qui se dessine actuellement. »« Ce que les sociétés cherchent, c’est d’avoir des développeurs qui soient capables de rechercher des infos par eux-mêmes. Car aujourd’hui les technologies évoluent très rapidement et c’est ce qu’ils apprennent ici. Ils sont très friands des étudiants qui sortent de 42 », précise le directeur pédagogique. Le Réseau 42 est reconnu internationalement pour ses formations intensives en programmation, administration système, intelligence artificielle, ou encore cybersécurité. Il compte désormais 54 écoles de par le monde. Madagascar est le deuxième pays africain à adhérer à ce réseau mondial.Malala, Mickael et les autres sauront la semaine prochaine s’ils ont triomphé face à la piscine. Les candidats sélectionnés intègreront la toute première promotion de 42Tana dès février.À lire aussiÀ Madagascar, une école du réseau 42 dédiée à l’informatique et à la programmation suscite l’engouement
1/14/20242 minutes, 23 seconds
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Ces patients d’Afrique subsaharienne qui continuent à se faire soigner en Tunisie

Alors que l’année 2023 a été marquée en Tunisie par un déferlement de violences à l’encontre des communautés subsahariennes, environ 100 000 patients en provenance des pays d’Afrique de l’Ouest et centrale se sont fait soigner et opérer l’an dernier, selon les chiffres officiels. De notre correspondante à Tunis,Au son de la voix de la diva égyptienne Oum Kolthoum, Mamadou Billo Kanté, Guinéen de 77 ans, se laisse conduire d’un bout à l’autre de Tunis. Comme tous les matins depuis une vingtaine de jours, un chauffeur a été mis à sa disposition. Mamadou décrit sa routine médicale : « Urologue, cardiologue, ophtalmologue, neurologue… Chaque jour, nous avons un programme spécial avec un spécialiste. Les infrastructures sanitaires sont vraiment impeccables, les médecins aussi, ce sont des médecins de haut niveau. »Au programme aujourd’hui, une visite de contrôle chez le Dr Rania Abid, ophtalmologue. Monsieur Kanté a tout juste été opéré de la cataracte, des deux yeux. Pris en charge dans des structures privées et non pas dans les hôpitaux publics tunisiens qui manquent souvent de tout, il finance son voyage sur ses fonds propres. « Du billet d’avion jusqu’aux frais d’intendance, d’examens, les médicaments… on est autour de 80 millions de francs guinéens. Combien ça fait en euros ? Calculez ! », plaisante-t-il. Vérification faite, cela fait près de 8 400 euros.AppréhensionsAlors que ces derniers mois ont été marqués par un déferlement de violences à l’encontre des Subsahariens dans le pays, le choix de la Tunisie est-il bien sage ? « Alors là, vous mettez les pieds dans le plat. Ces évènements des immigrés là, ça a quand même eu un impact négatif parce que tout le monde se sentait concerné par ce qui est arrivé. Cela faisait tout de même une mauvaise image. »Ces appréhensions, Olfa Kelmami, est aux premières loges pour les entendre. Sa société Smedi, spécialisée dans la prise en charge des patients subsahariens en Tunisie depuis quinze ans, a fait les frais des remous de l’actualité. De près de 800 en 2022, le nombre de patients a chuté à environ 600 cette année. « Il y a des gens qui ont eu peur. Il y a des gens qui nous ont appelé pour nous dire : "est-ce que c’est vrai ce qu’on est en train de voir ?". Il y a des gens qui ont annulé par précaution, explique la directrice générale. Les malades que nous avons là, ce sont eux qui ont été nos ambassadeurs. Ils ont appelé leur famille. Quelques-uns ont même fait des vidéos, des photos pour dire “Je suis en plein centre-ville, je n’ai rien, je suis à l’aise, je suis en sécurité”. »Cette société tunisienne mise désormais sur l’ouverture de structures médicales dans les pays subsahariens ainsi que la formation de médecins sur place. De quoi faciliter la prise en charge des patients... et éviter aussi de subir les remous de l’actualité.À lire aussiEn Tunisie, un rapport choc sur les violences subies par les personnes migrantes
1/13/20242 minutes, 26 seconds
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Icônes du foot ivoirien [6/6] – Gervinho, enfant chéri de la Côte d'Ivoire

Natif d'Anyama, Gervinho a disputé cinq Coupes d'Afrique des nations. Deux souvenirs sont marquants : un mauvais en 2012, lorsqu'il rate un tir au but décisif en finale face à la Zambie et un plus heureux, en 2015, lorsqu'il remporte enfin la CAN sans regarder la séance de penalties, trop stressé sur sa petite chaise. Rencontre à Sol Béni, terrain d'entraînement de l'ASEC d'Abidjan, son club formateur. Le fantasque ailier âgé de 36 ans revient sur ses plus grands moments de CAN.
1/12/20242 minutes, 18 seconds
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Icônes du foot ivoirien [5/6] – Yaya Touré, l'empereur du milieu

La CAN, c'est déjà demain ! Et avant le coup d'envoi de la 34ᵉ édition à Abidjan, RFI vous propose toute la semaine une série autour des icônes ivoiriennes du ballon rond. Souvent comparé et opposé à Didier Drogba, place aujourd'hui à Yaya Touré. Le milieu de terrain, natif de Bouaké, a joué plus de dix ans avec la tunique orange des Éléphants. Pour près de 100 sélections... Celui qui a disputé 3 Coupes du monde et 6 Coupes d'Afrique a terminé sa carrière en apothéose en 2015. En soulevant la CAN avec le brassard de capitaine, Yaya Touré, l'empereur du milieu, c'est un reportage de Martin Guez et Youenn Gourlay.
1/12/20242 minutes, 31 seconds
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Icônes du football ivoirien [4/6] – Didier Drogba, l'enfant d'Andokoi

Didier Drogba est l'une des plus grandes stars de l'histoire du ballon rond au pays des éléphants. Si l'attaquant n'a jamais gagné la CAN, malgré deux finales jouées, il reste l'icône absolue. La vedette de Chelsea, le médiateur de Bouaké, le meilleur buteur de l'histoire de la sélection et l'enfant du pays. Bien que Didier Drogba ait fait ses classes en France, il a grandi à Andokoi, l'un des 52 quartiers de Yopougon, commune d'Abidjan. À lire aussiCalendrier et résultats de la CAN 2024Tous nos articles, analyses et podcasts consacrés à la CAN 2024
1/10/20242 minutes, 39 seconds
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Icônes du football ivoirien [3/6] – Sébastien Haller, l'Éléphant retrouvé

Le coup d'envoi de la Coupe d'Afrique des nations approche. Il verra affronter samedi 13 janvier la Côte d'Ivoire face à la Guinée-Bissau. Un coup d'envoi qu'aimerait donner Sébastien Haller, l'attaquant star des Éléphants. Il a traversé l'année la plus difficile de sa carrière, lui qui a vaincu un cancer des testicules et qui se remet d'une blessure à la cheville, contractée juste avant la CAN. À lire aussiCalendrier et résultats de la CAN 2024À lire aussiTous nos articles, analyses et podcasts consacrés à la CAN 2024
1/9/20242 minutes, 24 seconds
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Icônes du football ivoirien [2/6] – Alain Gouaméné, gardien sacré de la Côte d'Ivoire

À l'occasion de la 34e Coupe d'Afrique des nations, qui commence samedi 13 janvier à Abidjan, RFI vous propose cette semaine une série consacrée aux icônes du football ivoirien. Place, aujourd'hui, à Alain Gouaméné ! Le gardien du temple ivoirien, âgé aujourd'hui de 57 ans, a disputé pas moins de huit CAN, et fut surtout l'homme fort de la toute première Coupe d'Afrique remportée par les Éléphants, en 1992 au Sénégal. Alain Gouaméné, homme du match en demi-finale face au Cameroun, et en finale contre le Ghana. Il a confié ses souvenirs à Martin Guez et Youenn Gourlay. À lire aussiCalendrier et résultats de la CAN 2024À lire aussiTout sur la CAN 2024
1/8/20242 minutes, 31 seconds
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Icônes du football ivoirien [1/6] – Laurent Pokou, «l'homme d'Asmara»

À l'occasion de la 34e Coupe d'Afrique des nations, qui commence samedi 13 janvier à Abidjan, RFI vous propose cette semaine une série consacrée aux icônes du football ivoirien. Premier épisode : la légende Laurent Pokou. « L'homme d'Asmara », comme il fut surnommé, a été la première grande star du foot ivoirien dans les années 1970. Éternel joueur de l'ASEC d'Abidjan, longtemps meilleur de l'histoire de la CAN, le natif de Treichville s'est éteint à Abidjan en 2016, à l'âge de 69 ans. 
1/7/20242 minutes, 32 seconds
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Côte d'Ivoire: les villes hôtes de la CAN [7/7] – Man, la ville aux 18 montagnes

Septième et dernier épisode de notre série sur les villes hôtes de la CAN de football en Côte d’Ivoire. Nous nous intéressons aujourd’hui à Man, dans l'ouest du pays. La ville aux 18 montagnes, elle, n'accueillera pas les matchs. Elle a pourtant longtemps cru qu'elle jouerait un rôle durant la compétition, puisque l'ancien président du Comité d'organisation de la CAN (COCAN) est originaire de la région. La ville, habituellement touristique, tourne donc au ralenti, et les habitants se sentent oubliés. 
1/6/20242 minutes, 24 seconds
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Côte d'Ivoire: les villes hôtes de la CAN [6/7] – San Pedro, deuxième poumon économique du pays

Sixième épisode de notre série sur les villes hôtes de la CAN qui aura lieu du 13 janvier au 11 février en Côte d’Ivoire. Dans le sud-ouest du pays, la ville portuaire de San Pedro accueille ce samedi soir le match de préparation Côte d’Ivoire - Sierra Leone, et à partir de la semaine prochaine, les équipes du groupe F composé du Maroc, de la RDC, de la Tanzanie et de la Zambie. Le deuxième poumon économique du pays a bénéficié de la CAN, à plusieurs égards. 
1/6/20242 minutes, 26 seconds
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Côte d'Ivoire: les villes hôtes de la CAN [5/7] – Korhogo, entre engouement et défis sécuritaires

Cinquième épisode de notre série sur les villes qui accueillent la CAN du 13 janvier au 11 février. Direction Korhogo, dans le nord du pays. La « Cité du Poro », fief de l’ancien Premier ministre Amadou Gon Coulibaly, accueille la CAN avec un certain engouement puisque le pays voisin, le Mali, y jouera. L’équipe a d’ailleurs toutes ses chances face à la Tunisie, l’Afrique du Sud et la Namibie. Mais durant la compétition, la ville proche du Burkina Faso et du Mali, deux pays en proie à de forts risques sécuritaires, sera forcément très surveillée. 
1/5/20242 minutes, 24 seconds
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Côte d'Ivoire: les villes hôtes de la CAN [4/7] – Bouaké, la renaissance de l'ancienne ville rebelle

Quatrième épisode de notre série sur les villes qui accueilleront la CAN du 13 janvier au 11 février. Bouaké, deuxième ville la plus peuplée du pays, reçoit le groupe D, composé du Burkina Faso, de l’Algérie, de la Mauritanie et de l’Angola. Une ville bouillonnante qui fut le siège de la rébellion dans les années 2000, mais qui cherche à aller de l'avant et effacer son image de ville rebelle.
1/4/20242 minutes, 30 seconds
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Côte d'Ivoire: les villes hôtes de la CAN [3/7] – Yamoussoukro, l'endormie en passe de se réveiller

Yamoussoukro, capitale politique de la Côte d’Ivoire depuis 1983, est souvent décrite comme endormie en raison de son immensité, de son calme et de sa faible densité, mais elle pourrait se réveiller durant la compétition, car elle accueille le groupe C, le groupe au niveau le plus homogène.
1/2/20242 minutes, 19 seconds
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Côte d'Ivoire: les villes hôtes de la CAN [2/7] – Le Plateau, symbole de la métamorphose d'Abidjan

Suite de notre série sur les villes, quartiers ou villages ivoiriens qui accueilleront la Coupe d'Afrique des nations, du 13 janvier au 11 février. Nous vous emmenons aujourd’hui au Plateau, le centre des affaires d'Abidjan, la capitale économique ivoirienne, où l’historique stade Félix Houphouët-Boigny a été rénové pour accueillir les matchs de la compétition. En quelques mois seulement, le Plateau est devenu le symbole d’une ville en pleine métamorphose.
1/1/20242 minutes, 25 seconds
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Côte d'Ivoire: les villes hôtes de la CAN [1/7] – Le village d'Ébimpé rattrapé par l'urbanisation

Premier épisode de notre série en Côte d'Ivoire sur les lieux qui accueilleront la Coupe d'Afrique des nations, du 13 janvier au 11 février 2024. Nous vous emmenons aujourd’hui dans le village d’Ébimpé, dans le nord d’Abidjan, où se situe le stade olympique Alassane Ouattara de 60 000 places, le plus grand stade de cette compétition, qui accueillera le match d'ouverture et la finale. Un village forcément rattrapé par la ville et ses grands travaux.
1/1/20242 minutes, 29 seconds
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Mozambique: à Mocímboa da Praia, au Cabo Delgado, une situation sécuritaire stabilisée [2/2]

Direction le nord du Mozambique pour le second reportage consacré à la situation sécuritaire dans la province du Cabo Delgado. La ville de Mocímboa da Praia, ancien bastion des jihadistes du groupe Ansar al-Sunna, plus connu sous le nom de shebabs, reprend vie petit à petit. Si l'insécurité persiste dans certaines zones de la province, plus de deux ans après le déploiement des forces rwandaises et de la SADC, la situation sécuritaire s'est largement améliorée dans la région. De notre envoyée spéciale à Mocímboa da Praia,Revenu à Mocímboa da Praia il y a plus d’un an, Dade Sumail a repris ses activités de vendeur de poisson : « Quand les terroristes étaient là, nos commerces étaient très affectés. Ils sont venus trois fois, ils volaient nos marchandises et s’enfuyaient dans la brousse. Maintenant, la situation est revenue à la normale, il n’y a plus de problème de sécurité ».Dans le marché, les attaques des insurgés restent encore dans les esprits. Difficile pour certains de croire à une sécurité durable, explique le commerçant Awali Mbaroko : « Certains habitants ne peuvent pas imaginer que la guerre est terminée... Beaucoup sont restés dans la brousse, et ils ne peuvent pas croire que la ville est paisible maintenant ».Aucun incident n’a été enregistré dans la ville depuis sa reprise des mains des insurgés en août 2021. Selon les autorités, le groupe Ansar al-Sunna s’est désormais réfugié à plus d’une centaine de kilomètres au sud, notamment dans le district de Macomia. Le major-général de l’armée mozambicaine Tiago Alberto Nampele : « La zone où l’ennemi est présent est le nord de la forêt de Katupa. Mais ils sont seulement dispersés en très petits groupes, ils ne se rassemblent pas dans des bases, juste dans de petits camps très flexibles ».Le soutien de l'armée rwandaiseDans les rues de Mocímboa da Praia, les convois des patrouilles rwandaises passent régulièrement devant les marchands. 3 000 soldats et policiers du pays des mille collines sont déployés dans la province depuis plus de deux ans.Le brigadier général Ronald Rwivanga, porte-parole de l’armée rwandaise : « Combien de temps nous allons rester ici ? Nous poursuivons désormais plusieurs étapes pour développer le secteur sécuritaire. Nous n’avons pas de calendrier, mais nous sommes en train de renforcer les capacités pour s’assurer que quand on prendra la décision de se retirer, ils seront capables d’opérer par eux-mêmes ».Selon l’armée, moins de 300 insurgés restent actifs dans la région. Mais les combattants provoquent encore des mouvements de population. En novembre, l’ONU enregistrait plus de 1 500 déplacés dans le district de Macomia suite à des attaques.À lire aussiMozambique: À Palma, au Cabo Delgado, les habitants espèrent un retour à la normale [1/2]
12/30/20232 minutes, 11 seconds
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Mozambique: À Palma, au Cabo Delgado, les habitants espèrent un retour à la normale [1/2]

Dans le nord du Mozambique, dans la région du Cabo Delgado, l'armée rwandaise mène depuis plus de deux ans une opération conjointe avec les forces mozambicaines pour contrer l'insurrection des shebabs d'Ansar Al-Sunna, groupe jihadiste affilié à l'État islamique. Si l'insécurité persiste dans certaines zones de la région, le retour au calme dans la ville de Palma, lourdement attaquée par le groupe armé en mars 2021, a permis aux habitants de retrouver un quotidien plus apaisé.  De notre envoyée spéciale à Palma,Devant l’échoppe d’un barbier, Sumail Efo attend son tour, entouré d’autres clients. Depuis son retour à Palma huit mois plus tôt, le pêcheur a vu revenir une grande partie de la population qui s'était réfugiée, comme lui, dans des camps de déplacés internes éloignés des zones de conflits. « Quand nous étions dans les camps, c’était très dur de s’habituer à ce type de vie, raconte-t-il. Nous avons préféré revenir et recommencer ici. »Dans la rue principale de la ville de Palma, certains bâtiments détruits témoignent encore du passage des insurgés d’Ansar Al-Sunna en mars 2021. Après la reprise de la ville par les forces mozambicaines et rwandaises quelques mois plus tard, les habitants ont découvert, à leur retour, des maisons saccagées par les jihadistes.À lire aussiMozambique: les habitants sont de retour à Cabo Delgado« L'important, c’est de s'assurer que cette stabilité est durable »Un peu plus loin, dans le marché de la ville, Alidade Mandanda, vendeur de tissu, a dû tout repartir de rien. Plus de deux ans après l’attaque, le père de famille cherche encore certains de ses enfants, toujours portés disparus. « Aujourd’hui, la paix est rétablie. Mais le problème, c’est que nous n’avons pas encore pu retrouver certains membres de notre famille et que nous ne savons pas si cette tragédie ne pourrait pas recommencer. Dans ma famille, on était 15 personnes. Mais si vous venez chez moi aujourd’hui, nous ne sommes plus qu’entre cinq et sept personnes », témoigne le père de famille.Le marchand n’ose toujours pas retourner dans ses champs, malgré le retour au calme dans le district de Palma. Plus de 800 000 personnes ont été déplacées par le conflit au Cabo Delgado depuis 2017. Si des attaques persistent dans le sud de la province, les Nations unies enregistrent désormais près de 540 000 habitants de retour dans leur ville d’origine.« L'important, c’est de s'assurer que cette stabilité est durable, affirme le gouverneur de la région, Valige Tauobo. Nous, les civils, nous avons l’impression que tout va bien maintenant. Mais d’autres, qui ont des projets ici, ont besoin de plus. Il n'y a pas que la sécurité qui est importante, il y a beaucoup de choses à reconstruire aussi ! Mais les choses avancent et nous pensons que les projets vont recommencer. »Parmi les activités économiques toujours suspendues depuis 2021, le mégaprojet gazier du groupe TotalEnergies dans la péninsule d’Afungi, à quelques kilomètres de la ville.À lire aussiMozambique : la vie reprend à Palma deux ans après l’insurrection des jihadistes d'Ansar Al-Sunna
12/29/20232 minutes, 24 seconds
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Sénégal: le laboratoire Carbone 14 de Cheikh Anta Diop, un des héritages de l'historien panafricain

À l'occasion du centenaire de Cheikh Anta Diop, célébré du 21 au 29 décembre – date de naissance de l'historien et scientifique sénégalais –, le laboratoire Carbone 14 à l'Université Cheikh Anta Diopa a ouvert ses portes au public à Dakar. Que reste-t-il aujourd'hui de l’héritage de Cheikh Anta Diop ? Les enfants s’agglutinent autour du banc de synthèse du laboratoire Carbone 14 de Cheikh Anta Diop. Fondé par le célèbre scientifique et historien – mais aussi homme politique – en 1966, il s'agit du premier laboratoire africain qui fait de la datation des événements, c'est-à-dire qui analyse des objets comme des coquillages, du bois ou des ossements afin de connaître leur âge. Ces travaux ont permis de revoir et de réhabiliter l'histoire de l'Afrique, berceau de l’humanité.Les enfants observent avec fascination les tubes de verre et fioles où passait le gaz produit par la combustion des objets issus de fouilles archéologiques qui étaient ensuite analysés, afin de quantifier le carbone 14 qu’ils contenaient.Alpha Omar Diallo est ingénieur, il s’occupe de la visite du laboratoire transformé en musée : « On peut prendre l'exemple du bois, du charbon de bois, des ossements et ainsi de suite, explique-t-il aux enfants. On essaye de connaître la quantité de carbone qu'il y a dans l'élément, depuis sa mort. Mais une fois que l'individu meurt, sa quantité de carbone commence à diminuer. Tous les 5 730, la quantité initiale se divise par deux. Ça peut aller jusqu'à 50 000 ans. À partir de là, il est difficile de détecter le carbone, car il aura complètement disparu. »À écouter aussiPaulin Melatagia, chercheur camerounais : en matière d'IA, « l'Afrique développe ses propres solutions par la formation et la recherche »Une « force de proposition » sur les questions environnementales Cheikh Anta Diop est le premier à utiliser cette technique en Afrique. Et ces résultats lui permettront de réécrire et de s'approprier l’histoire du continent. Nouhou Diaby est le directeur par intérim du laboratoire : « La création de ce laboratoire, qui était le premier en Afrique, a beaucoup contribué à la datation et à la confirmation que l'Afrique est le berceau de l'humanité, explique-t-il. Il a conforté l'idée que les premiers hommes et les premières civilisations étaient nés en Afrique. C'est grâce à ces travaux que cela a pu être mis en évidence. »Dans une salle fermée à double tour, une autre machine plus petite et moderne est utilisée par les chercheurs. Aujourd’hui, le laboratoire s’intéresse aussi aux questions environnementales, comme à la quantification de la pollution dans la ville de Dakar ou dans les eaux souterraines de la capitale. Ceci, toujours en utilisant la même technique au carbone 14. « La moule ou les poissons incorporent beaucoup de pollution, décrit l’ingénieur Alpha Omar Diallo. Nous, à travers ces différents animaux aquatiques, on peut déterminer la quantité de pollution dans l'eau. Cela aide à la prise de décision : ce qui nous intéresse, c'est d'éclairer la lanterne des décideurs, être une force de proposition sur plusieurs thématiques comme la pollution atmosphérique, la pollution des eaux, la pureté de certains produits… »Mis à l’arrêt à la mort de Cheikh Anta Diop en 1986, le laboratoire Carbone 14 a repris du service au début des années 2000.À écouter aussiAutour de la question - Comment valoriser la science et celles et ceux qui la font sur le continent africain ?
12/28/20232 minutes, 17 seconds
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Soudan du Sud: À Rotriak, le récit d’une mère ayant fui les horreurs à Khartoum [2/2]

Ils sont plus de 400 000 Sud-Soudanais à avoir fui le Soudan depuis le début de la guerre mi-avril, et sont rentrés dans leur pays en catastrophe. Parmi eux, une femme Nuer de 33 ans, que nous appellerons Mary, a vécu plus de dix ans à Khartoum. Elle témoigne des atrocités commises par les Forces de soutien rapide (FSR) du général Mohammed Hamdan Dogolo (dit Hemedti).  De notre correspondante de retour de Rotriak,Son bébé dans les bras, Mary marche à travers les tentes après avoir reçu une assistance en argent liquide d'une ONG. Un soutien vital puisqu’elle est seule à s’occuper de sa belle-mère, très malade et âgée, ainsi que de ses enfants, depuis leur fuite de Khartoum. Les Forces de soutien rapide (FSR) du général Mohammed Hamdan Dogolo continuent de se battre contre les Forces armées soudanaises (FAS), et s’en prennent aussi aux civils, n’épargnant pas les nombreux Sud-Soudanais vivant à Khartoum, comme Mary. À Rotriak, une localité située au nord de la ville de Bentiu, la capitale de l’État d’Unité, non loin de la frontière avec le Soudan, des dizaines de milliers de rapatriés se sont installés le temps de trouver les moyens de rejoindre leurs régions d’origine.« Avant le conflit, nous avions une vie confortable à Khartoum, raconte Mary. Mais dès les combats du 15 avril, tout a changé pour le pire. Beaucoup de gens ont été tués, et beaucoup d’atrocités ont été commises. Les FSR violent les femmes. Si vous refusez, ils vous tuent. Ils volent aussi tout ce que vous possédez. Nous sommes arrivées ici sans rien. »À lire aussiSoudan du Sud : À Rotriak, zone d’accueil des déplacés, l’aide se fait attendre [1/2] « Les Forces de soutien rapide ont aussi violé leur fille, devant tout le monde »Dès les premiers jours du conflit, les Forces de soutien rapide ont pénétré dans l’enceinte où Mary et d’autres familles Sud-Soudanaises habitaient. Il s'agit de Jabra, un quartier nord de Khartoum. Sous la menace, Mary leur a donné toutes les économies de la famille, qu’elle gardait soigneusement « enterrées dans un trou, en cas de problème ». Elle a ensuite supplié les miliciens de les laisser tranquille.Ses voisins, eux, n’ont pas eu cette chance. Mary a assisté impuissante aux viols dont cette famille a été victime : « C’étaient mes voisins, témoigne-t-elle. Les FSR ont violé des hommes, mais ça, c’est trop difficile d’en parler. Ils ont aussi violé leur fille, devant tout le monde. Devant moi, devant son frère et sa mère, toute la famille était présente. Elle avait seulement 12 ans. Et ils étaient un groupe, les FSR faisaient la queue pour la violer. Après ça, elle est restée paralysée, ses jambes ne la portaient plus. C’était terrible. C’est dur de me souvenir de ça. Il n’y avait pas d’hôpital où l’emmener, en pleins combats c’était impossible… Je ne sais pas comment elle va maintenant, car cette famille a fui après ce drame. C’étaient des Nuer aussi. »Mary est alors enceinte. Elle donne naissance à une petite fille le 5 août et décide de fuir Khartoum le jour même. Sur la route, le harcèlement par les Forces de soutien rapide continue, ralentissant le trajet. Au bout d’un mois et demi, Mary, son aïeule, son bébé et les autres enfants finissent par arriver à Rotriak. Depuis, elle survit en quémandant du poisson aux pêcheurs. Elle ne songe pas un instant à retourner au Soudan : « Je préfère mourir dans mon pays. Après ce dont j’ai été témoin à Khartoum, je ne veux pas y retourner. »Mary dit attendre « l’aide de Dieu » pour pouvoir continuer son voyage jusqu’à Leer, au sud de l’État d’Unité, sa région natale.À lire aussiGuerre au Soudan : le viol utilisé comme arme de guerre dans le conflit
12/27/20232 minutes, 17 seconds
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Soudan du Sud: À Rotriak, zone d’accueil des déplacés, l’aide se fait attendre [1/2]

Au Soudan du Sud, la région de Bentiu fait face à une crise humanitaire grave. À Rotriak, une localité créée de toute pièce en 2020 pour reloger 50 000 personnes déplacées par les inondations, ONG et autorités tentent de répondre aux besoins immenses, mais les habitants restent livrés à eux-mêmes.  De notre correspondante de retour de Rotriak,En ce matin chaud de début novembre, une équipe de l’ONG sud-soudanaise Coalition for Humanity roule à grande vitesse depuis Bentiu en direction de Rotriak, sur la route étroite qui traverse la forêt inondée. Les inondations provoquées par le changement climatique ont déplacé des dizaines de milliers de personnes, qui ont perdu leurs moyens de subsistance. De plus, depuis mi-avril, la guerre au Soudan a provoqué le retour de plus 400 000 Sud-Soudanais. Ces rapatriés sont, eux aussi, démunis et viennent grossir les rangs des personnes en besoin d’aide humanitaire. À Rotriak, la situation se complique de jour en jour.« Avec l’afflux actuel en provenance du Soudan, la situation est vraiment complexe à Rotriak, alarme John Muoch, chef de projet au sein de l'association. Il n’y a pas assez de ressources disponibles. Les établissements de santé, ou encore les écoles, sont en nombre insuffisant, car un grand nombre de personnes arrivent du Soudan. Et ce sont des gens qui arrivent complètement démunis. »Une petite foule attend en plein cagnard la distribution d’argent organisée par l’ONG. Ce sont les plus vulnérables qui ont été sélectionnés comme bénéficiaires : femmes seules, rapatriées, femmes enceintes, personnes en situation de handicap… Derrière ce groupe, des anciens se plaignent de ne pas être inclus. Parmi eux, Kai Thor, 70 ans, déplacé par les inondations il y a deux ans : « Tout mon bétail et mes chèvres ont été emportés par l’eau, il ne me reste rien du tout ! se désole-t-il. Nous les personnes âgées, nous sommes venues en nous aidant de nos cannes, mais la plupart d’entre nous ne sont pas enregistrés, nous n’avons reçu aucune assistance ! »Son collègue Phar Mathot, 75 ans, déplacé par les inondations il y a trois ans, renchérit : « Tous ceux qui sont là à nous écouter vont rentrer chez eux bredouille ! Ils iront quémander de l’argent à des connaissances pour pouvoir acheter de la farine. Nous voulons des équipements de pêche. Puisque toute la zone est entourée d’eau, qu’il y a beaucoup de poisson et que personne ne veut nous aider, notre seule issue est de pêcher ! »À lire aussiSoudan du Sud: à Bentiu, face à la montée des eaux, la lutte des femmes pour la survieLes déplacés ont toujours un accès insuffisant aux services de baseÀ Rotriak, les mieux logés vivent dans des tentes fournies par les compagnies pétrolières, les autres fabriquent des abris. L’eau potable est accessible grâce aux installations des ONG, mais l’absence de soins médicaux est flagrante. Des personnes âgées agonisent dans les tentes, sans aucuns soins médicaux, comme cette vieille femme dénutrie, une morsure de serpent infectée au genou.Nyakuon Gatkuoth a, elle, trouvé de quoi survivre en ces temps difficiles : elle marche quatre heures aller-retour pour acheter du lait au camp de bétail afin de le revendre ici à Rotriak. « J’ai commencé cette activité, car j’avais des difficultés pour nourrir mes enfants, raconte-t-elle. J’avais seulement un dollar pour commencer ! J’ai acheté deux, puis quatre bouteilles, et les ai revendues à Rotriak, et ai gagné 3 dollars. Et ainsi de suite… Maintenant, j’achète deux ou trois jerricans de 5 litres à la fois. »Mais la pression sur les services de base continue de s’accentuer, avec de nouvelles arrivées au Soudan du Sud par milliers, du fait de l’aggravation du conflit au Soudan.À lire aussiSoudan du Sud : à Bentiu, la lutte des habitants face à la montée des eaux
12/26/20232 minutes, 30 seconds
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Maroc: avec « Nos mères », Fadwa Misk utilise le podcast pour libérer la parole sur les droits des femmes

Gros plan sur les podcasts au Maroc et en particulier ceux qui traitent des questions féministes. Il est encore difficile, voire impossible, d’aborder certains sujets sur les médias classiques, notamment lorsqu’il s’agit de sujets liés aux droits des femmes. Le podcast s’est alors imposé comme un format alternatif permettant de libérer la parole et de dépasser les tabous. La journaliste, autrice et militante féministe Fadwa Misk a fait le choix d’adopter sa pièce de théâtre « Nos mères » en podcast. Elle raconte l’histoire de cinq femmes marocaines, de leur rapport à leur mère et de la manière dont elles choisissent de s’affranchir des nombreux carcans imposés par une société conservatrice.
12/25/20232 minutes, 22 seconds
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Centrafrique: une famille se retrouve grâce à un film diffusé au festival «Bangui fait son cinéma»

Le film documentaire Les rêves de Malick, projeté à l'ouverture de la 4e édition du festival Bangui fait son cinéma, a contribué à un regroupement familial. L’acteur principal, un jeune garçon de 10 ans vivant dans un orphelinat, a été identifié par des voisins du quartier, permettant ainsi à sa mère de le retrouver après deux années de séparation. Grâce à ce film, Malick peut célébrer la fête de Noël en famille pour la première fois depuis deux ans. 
12/24/20232 minutes, 20 seconds
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Côte d'Ivoire: une chorale interconfessionnelle chante pour Noël

Que serait Noël sans ses chorales ? La Côte d’Ivoire aussi a les siennes, même si le pays ne compte qu’un tiers de chrétiens. Reportage auprès de la chorale interconfessionnelle Chœur à Cœur, à l’Ivoire Trade Center de Cocody.  De notre correspondante à Abidjan,C’est la kora qui est à l’honneur pour ce concert. Un instrument à cordes ouest-africain, qu’on n’a pas l’habitude d’entendre dans une chorale de Noël, et pourtant… Manolli Ekra, la co-organisatrice du projet Chœur à Coeur, dit avoir voulu proposer un spectacle de Noël pour les parents et les enfants de toutes les origines. Le concert réunit 70 choristes (30 enfants et 30 adultes), plusieurs solistes et un orchestre.« On a deux chœurs, un chœur d’adultes et un chœur d’enfants », indique Manolli Ekra. « Deux chorales totalement différentes, la chorale d’enfants vient d'Aboboté et la chorale d’adultes de Cocody. Mais quand on les voit chanter ensemble, à force de répéter, ils chantent comme un. Dans le répertoire proposé, ça partait des chants en anglais, du gospel, avec aussi des classiques au tam-tam proposés sous forme de contes. »C’est ce mélange des genres qui a séduit Nahikey Zadi. Chanteuse de soul et R’n’B, elle est l’une des solistes soprano pour ce concert. « C’est une chorale qui mélange des amateurs, des professionnels, des enfants… Un peu de tout », constate Nahikey Zadi, qui poursuit : « Des pianistes, des joueurs de kora. Il y aura à tous les niveaux, des petites touches pour qu’on ressente qu’on est en Côte d’Ivoire. »Programmation inclusiveEt pour plaire à tous les Ivoiriens, les organisatrices ont choisi une programmation interconfessionnelle. Aux chants traditionnels chrétiens se mêlent donc des chants musulmans, en arabe. Cette inclusivité a attiré Khadidja Niang, mère de deux petites filles de 3 et 5 ans.« C’est vrai que c’est l’esprit de Noël, mais ça reste un pays laïc, la Côte d’Ivoire. Moi et mes enfants sommes de confession musulmane… et ça développe l'acceptation des autres, tout simplement. »Ce pari audacieux a payé. La chorale Chœur à Cœur a attiré pour cette représentation près de 700 spectateurs, repartis conquis après près de deux heures de concert.
12/23/20232 minutes, 54 seconds
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Maurice: les centres commerciaux deviennent la principale attraction de la population

Les centres commerciaux s’imposent de plus en plus dans la vie des Mauriciens. Ils relèguent même au second plan la plage en termes de priorité de loisirs. L’offre n’arrête pas de séduire. Dans une île qui compte seulement 1,3 million habitants, certains centres commerciaux attirent jusqu’à 7 millions de visiteurs par an. À l’approche des festivités, ils ont placé la barre encore plus haut.
12/22/20232 minutes, 31 seconds
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Fermeture de l'ambassade de Corée du Nord à Conakry: quel avenir pour la coopération Guinée-Corée? [2/2]

Après soixante-cinq ans de présence à Conakry, l’ambassade de Corée du Nord a fermé au début du mois de décembre. C’est une page qui se tourne pour la Guinée, où Pyongyang avait été l’une des premières capitales à installer un poste diplomatique, au lendemain de l’indépendance. Le départ de l’ambassade pourrait remettre en cause la coopération entre les deux pays. Des relations bilatérales qui sont particulièrement fortes dans le domaine agricole. 
12/22/20232 minutes, 15 seconds
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Guinée: fermeture de l'ambassade de Corée du Nord, «une relation spéciale» [1/2]

Soixante-cinq ans de présence en Guinée et puis un départ brutal, annoncé par une simple note verbale. La Corée du Nord a fermé au début du mois de décembre son ambassade à Conakry. À en croire des sources proches de Séoul, il faut y voir les effets des sanctions internationales. Manquant de financement, Pyongyang aurait décidé de réorganiser son réseau diplomatique, particulièrement en Afrique. C’est une page qui se tourne pour Conakry. De notre correspondant à Conakry,L’étoile rouge encadrée de deux bandes bleues flotte encore dans le ciel de la Bellevue. Dans ce quartier de Conakry, le drapeau nord-coréen est toujours hissé en haut d'un mât, devant le bâtiment désormais vide de l’ambassade. Dans le voisinage, on n’a même pas remarqué le départ des diplomates.« C'est la première fois que l'ambassade de Corée du Nord quitte la Guinée ! Ils ont quitté ou ils n'ont pas quitté ? » Souleymane, 62 ans, a besoin de reposer la question pour en avoir le cœur net. Il habite juste en face de l’ambassade. Est-ce que ça le rend triste d’apprendre qu’elle a fermé ? « [Rires] Ça ne me rend pas triste... C'est une bonne chose ! L'ambassade n'apporte rien à la population, au quartier... Rien, ça ne valait rien, ils peuvent partir ! » s'exclame-t-il.Du cinéma nord-coréen dans les années 70Ces dernières années, les diplomates se faisaient très discrets, vivaient quasiment en vase clos. Rien à voir avec la période faste des années 70. À l’époque, l’ambassade est très active dans le domaine culturel notamment.« Au début, ils invitaient les Guinéens pour venir regarder le cinéma, se souvient Souleymane. C'étaient leurs films sur l'agriculture, comment les gens obéissaient, comment les gens travaillent là-bas. »Dans le centre administratif de Conakry, une construction illustre la relation spéciale entre la Guinée et la Corée du Nord. Ronde et futuriste, c’est une sorte d’immense soucoupe volante posée en plein Kaloum.« Ruée des pays socialistes de l'époque vers la Guinée »« C'est le palais Mohammed V, anciennement appelé palais des Nations. » Boubacar Diallo a été conseiller économique à l’ambassade guinéenne en Chine dans les années 90. L’ambassade qui est chargée des relations avec la Corée du Nord : « C'est un bâtiment qui a été construit dans les années 80 pendant le régime du feu-président Ahmed Sékou Touré »Les architectes et les ouvriers sont nord-coréens. Le bâtiment a été construit pour accueillir un sommet de l’OUA qui n’a finalement pas eu lieu à Conakry. Aujourd’hui, le Palais Mohammed V abrite la présidence. Ce cadeau vient alors matérialiser 25 ans de coopération. « À l'accession de l'indépendance, le 2 octobre 1958, il y a eu une ruée des pays socialistes de l'époque vers la Guinée. Pour la soutenir, la République Populaire de Corée a été l'un des tout premiers pays à nouer des relations diplomatiques avec la jeune République de Guinée », explique Boubacar Diallo.Alors forcément, la fermeture de l’ambassade lui fait « un petit pincement au cœur », car, dit-il, les contacts directs sont toujours plus fructueux.À lire aussiLa Corée du Nord annonce la fermeture de plusieurs ambassades, notamment en Angola et Ouganda
12/20/20232 minutes, 29 seconds
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Éthiopie: à Dollo Ado, les réfugiés somaliens dans la désolation après les inondations [2/2]

Suite (et fin) de notre série de reportages dans le Sud-Est de l’Éthiopie, où les réfugiés somaliens qui fuient la guerre civile dans leur pays sont aussi affectés par le réchauffement climatique. Ils affrontent maintenant le phénomène El Niño. Des pluies diluviennes ont ravagé la zone à la suite d’une sécheresse qui durait depuis plusieurs années. Reportage à la frontière entre les deux pays, à Dollo Ado, où plus de 200 000 réfugiés somaliens subissent la double peine. De notre envoyée spéciale dans la région Somali,À Dollo Ado, autour d’une école réquisitionnée, les abris de fortunes, recouverts de bâches blanches et bleues siglées Nations unies, se multiplient… Ici, les réfugiés ont d’abord fui le conflit au Somaliland, il y a cinq mois, comme Amal Awil qui a fui pour sa vie avec quatre de ses enfants : « Le problème que nous avons maintenant, c’est que nous sommes touchés par les inondations. Nous avons tous quitté l’endroit où nous vivions. Nous n’avons rien, mais au moins, nous sommes dans un endroit sûr, où il y a la paix… »Sahara aussi a fui dans la panique : « On voyait l’eau qui venait sous nos pieds, le sol était imbibé d’eau. On a tout laissé. Il y avait aussi des serpents, des crocodiles. Je vais vous dire la vérité, si on ne peut pas avoir une meilleure vie, autant mourir. On n’a même pas d’eau potable, comment voulez-vous qu’on survive ? »Une pâte à partir de feuille pour unique repasSahara et Amal attendent d’être enregistrées pour avoir le statut officiel de réfugié et être relogées dans un des camps de Dollo Ado, comme Muhammud. Lui vit dans un camp depuis 12 ans. Au milieu des débris de sa maison, il raconte qu’il n’a jamais vu ça : « Il s’est mis à pleuvoir très fort, c’était incontrôlable et la maison s’est effondrée sur nous, ma femme et mes enfants. Des voisins sont venus nous secourir. »Le déluge, après quatre ans de sécheresse. Les réfugiés souffrent surtout de la faim. En guise de repas, ils mangent une pâte faite à partir de feuilles cueillies sur des buissons. Comme cette mère de famille : « Je les cueille près de la rivière et je les vends. Le reste, je le cuisine pour mes enfants, C’est tout ce que j’ai. »« L'eau n'est pas gérée »Dans une région où 80% de la population dépend de l’importation de nourriture, les ONG tentent de trouver des solutions pour réduire la vulnérabilité au réchauffement climatique. Yohannes Zech – chef du sous-bureau de Melkadida, UNHCR Éthiopie (Agence des Nations Unies pour les réfugiés) résume ainsi la situation : « Le peu qu’ils pouvaient faire pousser pour nourrir leur famille a été emporté par les eaux. Nous pouvons essayer de leur apporter de l’aide humanitaire, mais surtout, ce que nous voyons comme solution est vraiment de leur permettre de faire partie de la solution. Comment exploiter le soleil ? Pour permettre à cette population d'avoir accès à une énergie propre, car l'énergie est indispensable pour assurer le développement et l'adaptation au climat. Comment pouvons-nous mieux exploiter l'eau ? Car actuellement, l'eau n'est pas gérée. »Selon les Nations unies, seuls 35% des fonds nécessaires pour venir en aide à ces populations ont été versés pour l’année 2023. À lire aussiÉthiopie: les populations désemparées après des inondations dévastatrices [1/2]
12/19/20232 minutes, 19 seconds
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Éthiopie: les populations désemparées après des inondations dévastatrices [1/2]

Après la sécheresse, les inondations… Plusieurs pays de la corne de l’Afrique ont été frappés par le phénomène El Nino. Des pluies diluviennes s’y sont abattues à la suite d’une longue période de sécheresse. Le sol, très sec, n’absorbe plus l’eau, provoquant des inondations dévastatrices. En Éthiopie, plus de 1,5 million de personnes ont été affectées, 600 000 personnes ont été déplacées. Reportage. De notre envoyée spéciale dans la région Somali,Vu du ciel, les dégâts sont impressionnants : plus de 90 000 hectares, des champs et des villages entiers, baignant dans une eau marron, qui a débordé des rivières et s’est engouffrée dans les vallées. Les populations se sont réfugiées où elles le pouvaient, dans des zones difficiles d’accès où seul l’hélicoptère peut se rendre, comme à Firfir, où Ester Muhammad s’est construit un abri précaire : « Je ne connais pas la situation de ma maison, la dernière fois que j’y étais, il y avait tellement d’eau que je ne pouvais rien voir et je ne sais pas si ça a été emporté. »Après quatre ans de sécheresse, les réfugiés souffrent surtout de la faim : « Si on cuisine un jour, le jour d’après, nous n'avons plus à manger, nous demandons l’aide du gouvernement pour nous aider, car c’est une urgence. »Les flots ont tout ravagé Seuls 30% des personnes affectées ont reçu une assistance dans le pays. Plus au sud, à Kelafo, l’eau s’est retirée. Les habitants, de la boue jusqu’aux genoux, ne peuvent que constater les dégâts. « Je plantais beaucoup de choses : du maïs, de la papaye, des bananes, beaucoup de nourriture, explique un sinistré. Mais il ne reste plus rien, juste des arbres vides. » Une femme raconte les destructions : « Certains objets ont été abîmés, d'autres ont été emportés... L'eau est montée jusqu'au cou, c'était tellement dangereux. »Certains ont essayé de retenir les eaux jusqu’au bout. Comme cet homme, qui décrit les efforts collectifs déployés pour s'en sortir, en vain : « On utilisait des sacs de terre pour retenir l'eau, mais au bout de 20 jours, ce n'était plus possible de contrôler et ça a tout emporté. Beaucoup d’animaux sont morts, les poulets et tous les ustensiles, et quatre personnes âgées sont mortes, on a trouvé leurs corps dans l’eau. »Appel à la communauté internationale En tout, les inondations ont fait une quarantaine de victimes dans la région. Le gouverneur de la zone, Adan Ahmed Soyan, va au contact des habitants. Les discussions sont houleuses, les victimes espèrent recevoir l’aide, qui tarde : « Il n'y a plus école, les établissements de santé ont été dévastés ou emportés, les systèmes d'irrigations détruits... Nous utilisons des hélicoptères et des bateaux pour rejoindre les habitants. Nos ressources ne sont pas suffisantes face aux besoins, mais nous essayons de sauver des vies. »L’eau stagnante expose maintenant les habitants à de nombreuses maladies, comme le choléra, la malaria ou la dengue. Les Nations unies et le gouvernement éthiopien ont lancé un appel à la communauté internationale pour leur venir en aide. À lire aussiLa Corne de l'Afrique frappée par de violentes inondations
12/18/20232 minutes, 11 seconds
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Madagascar: à la Fondation H, plongée dans l'imaginaire de l'artiste tisserande Madame Zo

Direction Madagascar, à la Fondation H, institution culturelle privée d’art contemporain pour découvrir l’œuvre de Madame Zo, artiste tisserande peu médiatisée de son vivant, mais qui a laissé un héritage colossal. La Fondation H a choisi de mettre à l’honneur l’œuvre de la plasticienne, pour son exposition inaugurale intitulée Bientôt je vous tisse tous qui prendra fin le 29 février prochain. Il y a quelques jours, le tout premier catalogue de l’œuvre de Madame Zo a été lancé. Un ouvrage publié dans le cadre de cette exposition posthume émouvante. De notre correspondante à Madagascar,« Cette œuvre s’intitule "Nuages de fer". Là, Madame Zo a utilisé des pailles de fer et des bandes magnétiques », explique l’un des médiateurs du musée au public.En enfilade, suspendues, de monumentales pièces tissées à l’intérieur desquelles sont cachés des trésors que le visiteur peut s’amuser à dénicher. Ici des bandes de K7 audio, là des lanières de plastique, des os de poulet, des pattes de criquet, des circuits imprimés, du mica… Des centaines de matières à base desquelles Zoarinivo Razakaratrimo, dite Madame Zo, a tissé des histoires.« L’enjeu de cette exposition inaugurale, c’était de rendre visible la pratique, l’œuvre d’une immense artiste qui a transformé littéralement l’art du tissage avec un immense courage, et qui a vraiment métamorphosé la vision que l’on peut porter sur cette tradition encore extrêmement vivace à Madagascar », explique Bérénice Saliou la co-commissaire de l’exposition. « Elle a créé un métier à tisser de dimensions hors norme qui lui a permis de dépasser les limites imposées en termes de dimensions et de matières ».Une œuvre philosophique et spirituelleUne affranchie, en quelque sorte. Une femme libre, courageuse, qui a révolutionné l’art du tissage et en même temps transformé le visage de la scène artistique malgache. Et si la discrète Madame Zo discourait peu, explique Bonaventure Soh Bejeng Ndikung, second co-commissaire, ses œuvres s’exprimaient pour elle.« Tisser, c’est parler. Madame Zo était une "storyteller", ça veut dire qu’elle a raconté des histoires dans son travail qui nous amène dans ce concept de l’oraliture. Les titres de ses travaux sont tellement importants, ça nous donne la possibilité de les comprendre. C’est le côté philosophique et spirituel de son travail, voilà pourquoi elle dit "Je vous tisse tous". »Je me demande, Tsangatanana, Tais-toi et dors, des titres aux noms évocateurs qui invitent le spectateur à remonter les fils tissés et à s’immerger dans l’imaginaire de Madame Zo. Un imaginaire empreint de poésie, de fantaisie et de dureté aussi.« Dans cette salle, la thématique, c'est "Paysages". Elle parle de la pollution de l’environnement et de cette habitude qu’ont les humains de détruire la nature. C’est ce qu’elle veut nous dire avec cette œuvre. Après, l’interprétation dépend de chacun », détaille Bonaventure Soh Bejeng Ndikung.En brisant les conventions, en déconstruisant sans cesse son art pour mieux le réinventer, Madame Zo, décédée prématurément en 2020, laisse derrière elle une œuvre immense à découvrir absolument.À lire aussiMadagascar: le chœur ICanto interprète l’oratorio «Messiah» d'Haendel pour les fêtes de Noël
12/17/20232 minutes, 22 seconds
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Éthiopie: le grand barrage de la Renaissance au cœur de tensions avec l'Égypte et le Soudan

À Addis-Abeba, le troisième round des négociations est sur le point de reprendre entre l’Égypte, l’Éthiopie et le Soudan sur les modalités de remplissage et de mise en œuvre du grand barrage de la Renaissance. Ce barrage en construction dans l’ouest de l’Éthiopie, dans la région du Benishangul-Gumuz, est voué à devenir la centrale hydroélectrique la plus puissante du continent. Problème : il se trouve à la source du Nil bleu qui assure 75 % de l’approvisionnement en eau douce de l’Égypte, située en aval du fleuve. Le pays craint de perdre le contrôle sur cette ressource indispensable. Côté éthiopien, ce projet pharaonique est une fierté nationale et va permettre au pays de doubler sa production d’électricité. De notre correspondante à Addis-Abeba,Le site est colossal. Un lac bleu artificiel, immense, de 75 milliards de mètres cubes d’eau situé dans les paysages arborés et vallonnés de l’ouest de l’Éthiopie. L'eau est retenue par un barrage de 10 millions de mètres carrés de béton. En son cœur, d’immenses cylindres sont actionnés par la puissance de la pression.« Une fois que l’eau passe dans ce conduit, elle atteint la turbine et ainsi l’énergie devient mécanique et l’eau retourne dans la rivière », explique Ephrem Woldekidan qui est chef de projet adjoint.Pour le moment, deux turbines tournent sur les 13 qui devront produire au final 5 100 mégawatts. « La partie rotative est prête à être assemblée. C’est tellement grand qu’on ne peut pas la ramener directement de l’usine à cause du poids et de la taille donc la majorité sont assemblés ici. »Ce chantier pharaonique emploie 6 000 personnes dont 98 % d’Éthiopiens. Il doit permettre de doubler la production d’électricité du pays : « Plus de 50 % du territoire n'a pas accès à l'électricité donc cela va améliorer la couverture énergétique du pays et cela va aider à attirer de nouveaux investisseurs ».L'Égypte et le Soudan revendiquent un droit historique sur le NilL’eau est relâchée à un débit régulier, moins chargée en sédiments, et fait disparaître la crue saisonnière du Nil. Les autorités égyptiennes refusent de perdre le contrôle sur le fleuve, au centre de son identité nationale. Avec le Soudan, les deux pays revendiquent un droit historique sur les eaux, que refuse l’Éthiopie.« Si vous regardez l'accord de 1959 signé entre le Soudan et l'Égypte, vous verrez qu'il s'agit d'un "accord sur le Nil et sa pleine utilisation". L’expression "pleine utilisation" implique l'utilisation de toutes les eaux du Nil par les pays en aval, l'Égypte et le Soudan, sans aucune attribution d'eau aux pays en amont. Le grand barrage éthiopien de la Renaissance est donc un barrage qui va à l'encontre des fondements mêmes de l'ordre hydropolitique du Nil. Mais c’est une question de justice et d’équité », estime Gashaw Ayferam, chercheur à l'Institut des Affaires étrangères.L’Éthiopie ne compte pas renoncer à son projet. Un accord devra donc être trouvé en cas de tensions sur cette ressource précieuse. « L’export d’électricité aux autres pays de la Corne de l’Afrique va créer une paix énergétique, même s’il y a une longue période de sécheresse qui réduit la quantité d’eau ou d’autres problèmes liés au réchauffement climatique, il peut y avoir des inquiétudes et des contentieux », poursuit le chercheur.Les négociations, jusqu’ici infructueuses, se terminent à la fin du mois. Le chantier quant à lui doit se terminer en 2027.À lire aussiL’énergie à tout prix [3/5] Le barrage de la Renaissance, l'immense défi électrique éthiopien
12/16/20232 minutes, 25 seconds
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Côte d'Ivoire: la piscine de Bouaké, un projet de réhabilitation enrayé

Creusée par l’administration coloniale en 1939, puis municipalisée à l’indépendance, la piscine de Bouaké a fait la renommée de la ville jusqu’à la fin des années 1970. Lieu de fête et de prestige, les présidents du Zaïre et de la Centrafrique, Mobutu Sese Seko et Jean-Bedel Bokassa y ont été reçus avec faste par Félix Houphouët-Boigny. À l’abandon depuis la fin des années 1990, la mairie avait lancé un grand projet de réhabilitation en 2020, mais les travaux sont à l’arrêt depuis un peu plus d’un an, soulevant l’incompréhension de ceux qui militent pour sa réouverture.
12/15/20232 minutes, 31 seconds
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Tchad: des champions d'Afrique en route vers les JO de Paris

À quelques mois des JO de Paris 2024, les athlètes s’activent pour les compétitions de ce grand rendez-vous. C’est le cas des Tchadiens Hallas Maria Abaifouta et Israel Madaye. Sacrés champions d'Afrique par équipe mixte en novembre dernier en Tunisie, ils ont à cette occasion validé leur billet pour les Jeux. De retour à Ndjamena, Hallas Maria Abaifouta vient de reprendre l'entraînement, sans gros moyen, mais avec une grande détermination.  
12/14/20232 minutes, 8 seconds
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Tunisie: le premier festival du podcast met en lumière le format

En Tunisie, le format du podcast est encore tout nouveau, mais pour de nombreux néophytes, il est un moyen d’expression libre et intime, en particulier sur des sujets de société ou tabous. Le premier festival de podcast qui s’est tenu du 7 au 9 décembre à Tunis a permis de réunir différents podcasteurs au Maghreb, une première dans le pays et le deuxième festival du genre dans le monde arabe. Dans l’espace culturel du B7L9 à Bhar Lazreg à Tunis, entre débats, master-class et enregistrements publics, le premier festival du podcast en Tunisie met en lumière le format, encore à ses débuts dans le pays, mais très populaire. Raouia Kheder, journaliste radio et productrice de podcast, est l’organisatrice du festival : « On n'est pas si nombreux que ça, mais par contre, on est très actifs et comme les podcasteurs sont un peu éparpillés, on va dire, chacun travaille dans son petit coin, l’idée de ce festival, c'était de réunir tout ce monde, de voir qui est réellement la communauté de podcasteurs en Tunisie, qu’est-ce qu’ils peuvent faire ensemble ? », explique-t-elle. Malgré les pressions qui existent actuellement sur la liberté d’expression, le podcast est un format où la liberté de ton reste possible. « Ça a commencé pour le podcast avec tout ce qui touche à la santé reproductive, à la sexualité des jeunes, à l’orientation sexuelle, à la communauté queer, à la masculinité toxique ou positive, donc tous ces sujets-là aujourd’hui ont leur propre podcast en Tunisie », poursuit-elle.Libérer la paroleLe podcast a permis de libérer la parole sur certains problèmes. Bochra Triki a par exemple offert une plateforme aux femmes victimes de harcèlement via un podcast sur le site en ligne Inkyfada. « Le podcast, ça a été vraiment un outil magique pour pouvoir traiter de sujets qu’on aurait eu du mal à traiter en vidéo ou qui aurait été peut-être moins accessibles en article. Par exemple, on a suivi le mouvement Ena Zeda, donc c’est le #MeToo tunisien. Dès le début du mouvement, on a recueilli énormément de témoignages très difficiles et très lourds de femmes qui parlaient de violences sexuelles et autres. Et donc ce podcast pour moi avait permis aussi de créer une rencontre et une discussion autour de ces sujets-là », dit-elle.Un format en pleine ascensionOuerdia Ousmer, algérienne de 34 ans et co-créatrice du podcast Eclosion qui en est à sa 3ᵉ saison, a voulu montrer des parcours de femmes en Algérie. « L’idée était d’aller à la rencontre de ces femmes qui accomplissent des choses, qui sont cheffes d’entreprises, qui sont artistes, qui sont entrepreneuses et leur donner la parole. De raconter à la fois les succès, mais aussi les échecs et donc de permettre à d’autres femmes et même à des hommes parce que nous sommes écoutées par des hommes, de les inspirer, de les motiver à aller de l’avant », raconte-t-elle.Si le podcast n’a pas encore de modèle économique bien défini au Maghreb, le format est en pleine ascension. Rien qu’en Tunisie, il existe plus d'une soixantaine de podcasteurs indépendants... Les réseaux sociaux leur offrent des audiences élargies.
12/13/20232 minutes, 29 seconds
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Kenya: la lutte pour la dépouille de Dedan Kimathi [3/3]

À l’occasion des 60 ans de l’indépendance du Kenya, troisième volet de notre série sur les Mau Mau. Ces combattants qui se sont battus pour l’indépendance du Kenya dans les années 1950 ont été violemment réprimés par les colons britanniques. Plus d’un millier de personnes ont été pendues. Parmi elles, un des chefs Mau Mau : Dedan Kimathi. Considéré comme un terroriste et traqué par les Britanniques, il a été arrêté en 1956, puis pendu un an plus tard. Depuis, sa famille se bat pour obtenir sa dépouille et lui offrir une sépulture.  De notre correspondante à Nairobi,La statue de Dedan Kimathi trône dans le centre-ville de Nairobi. On le voit debout, en tenue de combat, un fusil à la main. Il porte des dreadlocks, coiffure emblématique des combattants Mau Mau. Le monument a été érigé en 2007, cinquante ans après sa pendaison. Evelyn Kimathi est une des descendantes de l'indépendantiste. « C’est bien, pour notre famille, mais aussi pour tous les combattants de la liberté, car Dedan Kimathi est un symbole pour beaucoup, cette statue a apporté une forme d’apaisement. Mais nous gardons en tête qu’il n’a toujours pas eu droit à un enterrement décent. Donc, la lutte continue », dit-elle.« Nous ne perdons pas espoir »L’on sait que Dedan Kimathi est enterré à la prison de Kamiti, en banlieue de Nairobi, où il a été pendu. Sa veuve s’est battue pour obtenir sa dépouille, jusqu’à son décès en mai dernier. Lors de son enterrement, le président kényan William Ruto s’est engagé à faire exhumer le corps du chef Mau Mau. « On attend toujours de voir cette annonce se concrétiser. C’est le cinquième gouvernement depuis l’indépendance et tous ont fait preuve d’un manque de volonté. Mais nous ne perdons pas espoir, nous en avons besoin pour aller de l’avant. Ce serait comme un tampon qui reconnaîtrait que les Mau Mau ont libéré le pays. Si nous sommes ici aujourd’hui, c’est grâce à eux ! », explique Evelyn.Pour expliquer ce surplace, certains dénoncent des enjeux politiques, alors que la mémoire des Mau Mau reste controversée aujourd’hui. Mais retrouver les restes de l'ancien chef n’est pas simple. C’est ce qu’explique David Anderson, professeur d’histoire africaine à l’université de Warwick au Royaume-Uni. « Sa dépouille a été enterrée au même endroit que celles de tous les Mau Mau qui ont été pendus à la prison de Kamiti : dans le terrain vague à l’arrière du bâtiment. Le problème auquel fait face le gouvernement kényan, c’est qu’il n’y a pas seulement Dedan Kimathi qui y est enterré. C’étaient des fosses communes, tous ceux qui ont été pendus ce matin-là ont été enterrés ensemble et les fosses ne sont pas identifiées. Donc, pour retrouver les restes de Kimathi, il faut d’abord avoir un bon échantillon ADN. Et puis, ensuite, déterrer plusieurs centaines de corps et effectuer des tests ADN sur tous. Personne ne s’est lancé dans le processus. C’est coûteux, difficile et sans garantie de succès. »Dans l’attente d’une sépulture, les hommages au célèbre chef Mau Mau se multiplient. En plus de la statue, une rue porte son nom dans le centre-ville de la capitale. Tout comme une université et un stade à Nyeri, dans la région du Mont Kenya, fief des Mau Mau.► À lire aussi : Kenya: la mémoire des Mau Mau [2/3]► À lire aussi : Kenya: les Mau Mau, figures de l'indépendance du Kenya [1/3]
12/12/20232 minutes, 19 seconds
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Kenya: la mémoire des Mau Mau [2/3]

Ce 12 décembre, le Kenya fête ses 60 ans d’indépendance. Suite de notre série autour des Mau Mau, ce mouvement d’insurrection qui s’est battu pour l’indépendance du Kenya dans les années 1950 et a été violemment réprimé par les colons britanniques. Soixante ans plus tard, la mémoire de cette période reste peu enseignée, au grand regret des historiens. De notre correspondante à Nairobi,Muhia Kamau connaît par cœur les chants des Mau Mau. Ce trentenaire est passionné par ces combattants. Déçu par l’information qu’il trouvait en ligne, il leur a même dédié une page Facebook. Il y décrypte des archives pour ses milliers d’abonnés.« C’est un pan de l’histoire qui est souvent refoulé. À l’école, on nous enseignait surtout l’histoire des six Kapenguria, six figures politiques qui ont été arrêtées lors de l’état d’urgence en 1952. Ces personnes ont été détenues pendant plusieurs années, puis Jomo Kenyatta est sorti de prison et est devenu le premier président. Mais sur les Mau Mau, on avait juste un petit paragraphe. D’ailleurs le commentaire que j’ai le plus sur ma page, c’est "Ah mais on ne nous a pas enseigné ça à l’école !" »Un mouvement illégal jusqu'en 2003 au KenyaÀ l’indépendance, beaucoup d’archives ont été détruites. D’autres emmenées à Londres et restées secrètes jusqu’à il y a une dizaine d’années. Surtout, il a fallu attendre 2003 pour que le mouvement Mau Mau ne soit plus considéré comme illégal au Kenya. Des aspects qui entravent la mémoire d’une période déjà controversée, explique Macharia Munene. Il est professeur d’histoire à l’université internationale des États-Unis à Nairobi.« Le mouvement Mau Mau a divisé des familles. Au sein du même foyer, il y avait des Mau Mau et il y avait des collaborateurs, ceux qu’on appelait les "home guards", qui ont trahi leurs proches. À l’indépendance, Jomo Kenyatta leur a dit d’éviter d’en parler, de ne pas faire remonter l’expérience traumatisante des années 50. C’était martelé et ça a créé une forme de silence, parce que c’était douloureux, parce que ça divisait la famille ou parce que ça pouvait apporter des ennuis. »La Constitution kényane de 2010 rend hommage à ceux qui se sont battus pour la liberté. Elle a instauré un jour férié dédié aux héros de l’indépendance, sans toutefois nommer les Mau Mau. De nombreux survivants aujourd’hui, ou leurs descendants, déplorent un manque de reconnaissance. Ils demandent toujours compensation, notamment pour la perte de leurs terres.« Lors des fêtes nationales, on se souvient des Mau Mau. C’est tout, fin de l’histoire. Ah et pendant les rassemblements politiques, on scande "On s’est battu !". En fait, les Mau Mau sont devenus un slogan politique qui ressort selon l’occasion. »Dans la capitale kényane, quelques initiatives tentent de faire perdurer la mémoire des Mau Mau, au travers de la photographie ou de la poésie.À lire aussiKenya: les Mau Mau, figures de l'indépendance du Kenya [1/3]
12/11/20232 minutes, 22 seconds
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Kenya: les Mau Mau, figures de l'indépendance du Kenya [1/3]

Le 12 décembre 1963, il y a soixante ans, le Kenya déclarait son indépendance de l’empire britannique. Cette déclaration était l’aboutissement d’un processus qui a mené dans les années cinquante à l’insurrection de ceux qu’on appelle les « Mau-Mau ». Les colons avaient alors fait passer plusieurs lois très impopulaires leur donnant les droits sur les terres, notamment celles très fertiles autour du Mont Kenya. Les Mau Mau, majoritairement issus des ethnies Kikuyu, Meru et Embu se sont battus pour leurs terres et pour l’indépendance du Kenya. De notre correspondante à Nairobi,Ils s’appelaient l’Armée pour la liberté et les terres du Kenya. L’origine du nom Mau Mau est contestée, mais c’est ce nom qui est resté. Pour Mavingo Nyaga, il est synonyme de courage. Ce Kényan de 31 ans s’est lancé dans un projet : photographier et filmer des survivants de l’époque coloniale. « Il y a le témoignage de Bernard. Il raconte comment il a été arrêté, car il n’avait pas ses papiers d’identité, mais il avait été jugé trop jeune pour être emprisonné, donc à la place les policiers l’ont battu. Il se rappelle n’avoir pas pu s’asseoir pendant trois semaines après ça ! C’est ce qui l’a poussé à rejoindre les Mau Mau. Il organisait la distribution de nourriture aux combattants et fabriquait des armes », raconte-t-il.En 1952, les Mau Mau, armés de machettes, attaquent ceux qu’ils jugent être une menace pour leur mouvement, africains compris, et investissent des fermes de colons pour y voler armes et ravitaillement. Les Britanniques déclarent l’état d’urgence en octobre. C’est le début de la guerre. David Anderson est historien, auteur d’un livre sur le sujet : « Les Mau Mau sont responsables de la mort de 32 européens au cours de tout le conflit, mais avant même le début officiel de leur insurrection, ils avaient déjà tué 300 africains. Les Britanniques avaient décidé qu’il fallait se débarrasser complètement du problème. Au pic du conflit, plus de 80 000 personnes étaient détenues sans procès. Des lois ont rendu passibles de peine capitale le fait d’avoir prêté serment aux Mau Mau ou de soutenir le mouvement. Plus de 1 000 personnes ont été pendues », explique-t-il.Un rôle crucial dans l’indépendance du paysPlusieurs milliers de Kikuyus se retrouvent enfermés dans des camps. Les Mau Mau se réfugient dans les forêts autour du Mont Kenya. Qualifiés de terroristes, ils sont traqués et perdent peu à peu la guerre. Mais la lutte continue dans les prisons. « Il y avait de la résistance dans les camps de détention, des détenus qui refusaient de travailler ou d’obéir aux ordres. En 1959, les Britanniques n’avaient pas l’intention d’accorder son indépendance au Kenya, du moins pas avant les années 1980. Mais, en mars cette année-là, il y a eu un massacre par les autorités dans le camp de détention d’Hola. Cela a créé des problèmes politiques à Londres et les Britanniques ont décidé dans la foulée de décoloniser le Kenya. Donc les Mau Mau ont eu un rôle crucial dans l’indépendance du pays », ajoute David Anderson.En 1960, l’état d’urgence est levé. Trois ans plus tard, le Kenya déclare son indépendance.
12/10/20232 minutes, 13 seconds
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Dix ans après sa mort, une exposition revient sur l'héritage de Nelson Mandela à Johannesburg

Cela fait dix ans que l'Afrique du Sud a perdu Nelson Mandela. Le père de la nation arc-en-ciel est décédé, à l’âge de 95 ans, le 5 décembre 2013. Célébré pour son œuvre de réconciliation, l’ancien prix Nobel de la paix laisse cependant derrière lui des rêves inachevés. Une exposition autour de son image et son héritage est en ce moment proposée par la Fondation Nelson Mandela de Johannesburg.  De longs panneaux transparents ont été temporairement installés dans deux lieux universitaires du pays. Les étudiants et les passants ont pu inscrire dessus, au marqueur noir, ce que signifie pour eux le fait que Nelson Mandela ne soit plus de ce monde. « On peut lire des choses comme "son héritage a permis que les pauvres restent pauvres, et les riches restent riches". Mais il y en a d’autres qui citent des extraits de la Bible pour comparer Mandela à Jésus par exemple. Il y a celui-là aussi, qui dit : "J’ai l’impression que c’est une figure surfaite", et c’est en effet intéressant d’observer qu’il y a autant de focalisations autour de Mandela, et moins sur le reste », explique Kneo.Ces panneaux font maintenant partie de l'exposition « Nelson Mandela is dead », clin d’œil au célèbre « Dieu est mort » du philosophe Nietzsche. Kneo Mokgopa, qui travaille pour la Fondation de l’ancien leader, a ainsi voulu réfléchir à la place que prend toujours cette figure dans la société, et le vide laissé derrière : « Cette idée de sauveur est un étrange concept de la politique sud-africaine. On voudrait que quelqu’un vienne, pour nous montrer le chemin, pour nous élever. Et très souvent, on nous pose la question : qu’aurait-il dit aujourd’hui, Mandela, qu’aurait-il fait ? C’est une forme de deuil, on aimerait qu’il soit toujours là, et qu’il nous sauve à nouveau, mais il ne le fera plus ! »« Mandela a joué le rôle qu’il pouvait »Menzi Mkiva, 28 ans, considère pour sa part qu’en pointant du doigt les erreurs de Mandela, la jeune génération reste trop passive et devrait prendre son destin en main. « Tout cela devrait nous pousser à l’action, à nous demander ce que cette génération fait pour sortir l’Afrique du Sud de cet état, avec les délestages, les tensions raciales, ces problèmes qui persistent après sa mort. Mandela a joué le rôle qu’il pouvait, et maintenant, il nous a laissé le relais. »Certains reprochent par ailleurs au lauréat du prix Nobel de la paix, d’avoir fait trop de concessions lors de la transition en 1994. Pour la plus ainée de ses petits-enfants, Ndileka Mandela, il faut maintenant aller de l’avant : « Si vous conduisez une voiture, et que vous regardez toujours vers l’arrière, vous allez entrer en collision. Le premier outil, pour décider de notre futur, était le droit de vote. Et leur génération y est parvenu, leur slogan c’était "la liberté, de notre vivant !" Ensuite, le deuxième bloc était de la responsabilité des générations après eux : qu’ont-ils achevé ? »Tous reconnaissent cependant que « Tata Mabida », comme il était affectueusement appelé, n’était pas un homme sans failles, et qu’il est sain que son héritage soit régulièrement revisité.
12/9/20232 minutes, 29 seconds
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Côte d'Ivoire: à Grand-Bassam, les mangroves en voie de disparition

La Côte d’Ivoire a perdu l’essentiel de son couvert de mangroves au cours des dernières décennies. Ces forêts d’arbres aquatiques, composées principalement des palétuviers, jouent pourtant un rôle essentiel dans la sécurité alimentaire des populations locales et dans la préservation de l’environnement. Reportage à Grand-Bassam, ville côtière à 30 km d’Abidjan. De notre envoyée spéciale à Grand-Bassam,Les mangroves étaient une composante essentielle du paysage de Grand-Bassam et des villages alentour. De 500 hectares, ces forêts amphibies n’en couvrent plus qu’une trentaine aujourd’hui. Au village d’Azuretti, le président des jeunes Crépin Akesse se souvient de leur splendeur passée.« Il y a encore 25 ans de cela, toute la berge était couverte de mangroves, toute la berge. Comme ces petites oasis que vous voyez là. Et à l’intérieur des terres, sur au moins 30 mètres, il y avait des mangroves partout. Mais quand il y a eu le développement de la ville ici, les promoteurs immobiliers sont arrivés et ont décapé beaucoup de terrains. Ils ont détruit toute la mangrove. On s’est opposés, avec les moyens qu’on a... Au niveau du village, on a mené des manifestations en 2017 et 2018, on est allé s'opposer à la coupe de mangroves, on a fait des courriers à l’administration… Mais ils sont restés lettre morte. »Des pratiques de pêche néfastesCertaines pratiques traditionnelles peuvent aussi menacer les mangroves. Les palétuviers sont parfois coupés pour être utilisés comme bois de chauffe, ou pour fumer le poisson. En mars dernier, l’Union européenne a financé une opération de sensibilisation et de plantage d’arbres à Azuretti. Le frère du chef du village, François Esou, qui vit sur cette parcelle de terre, doit protéger les jeunes palétuviers contre les pêcheurs, équipés de filets de type « épervier ».« C’est les pêcheurs, souvent quand ils viennent avec leurs pirogues, ils lancent leurs éperviers sur les mangroves… Moi, je leur défends de faire ça. Parce que quand ils les lancent dessus, en tirant les filets, ça déterre les palétuviers. Souvent, ils pêchent la nuit. La nuit, je ne suis pas là pour les surveiller, mais la journée, je m’occupe de ça, je veille sur eux. »Des zones essentielles pour la biodiversité localeLes conséquences de la destruction des mangroves sont dramatiques, à la fois pour les populations locales et pour l’environnement. Ce sont des zones de fret, explique le géographe Séka Fernand Ayenon, où les espèces aquatiques viennent se reproduire.« Ce sont des zones très importantes qui permettent une régénérescence des espèces aquatiques. Vous voyez, regardez au fond, on a une multitude de poissons. Si toutes ces zones de mangroves sont détruites, vous verrez qu’on n’aura même plus de poissons. En plus de cela, ce sont des zones qui captent le carbone. Les mangroves captent dix fois plus de carbone qu’une forêt terrestre. Et en plus de cela, elles empêchent l’érosion côtière. »La Côte d’Ivoire a signé en 1971 la convention internationale Ramsar pour la protection des zones humides, mais seuls deux territoires sont concernés : Fresco au sud-ouest du pays, et les îles Ehotilé près d’Assinie. Les défenseurs de l’environnement espèrent voir le gouvernement étendre cette protection à l’ensemble des mangroves ivoiriennes, pour sauver celles qui peuvent encore l’être.À lire aussiLes zones humides au Bénin, des alliées contre le changement climatique
12/8/20232 minutes, 17 seconds
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Kenya: à l'hôpital Aga Khan de Kisumu, la réduction des émissions carbone avance à grands pas

Dans la lutte contre le réchauffement climatique, tous les secteurs sont amenés à réduire leurs émissions de gaz à effet de serre, y compris le secteur de la santé. Le mois dernier, dans la perspective de la COP28 qui se tient actuellement à Dubaï, l'OMS a d'ailleurs dévoilé un nouveau cadre pour construire des systèmes de santé résilients face au changement climatique et à faible émission carbone. À Kisumu, dans l'ouest du Kenya, l'hôpital Aga Khan a déjà amorcé sa transition. De notre envoyée spéciale à Kisumu,Des rangées de panneaux photovoltaïques recouvrent une partie des toits de l’hôpital Aga Khan de Kisumu, d’où l’on aperçoit le lac Victoria. James Onguru, chef de projet, pointe du doigt l’installation la plus proche : « Ceux-là, on s’en sert pour produire de l’eau chaude. Elle est ensuite stockée dans les réservoirs noirs là-bas ».Un peu plus haut, d’autres produisent une partie de l’électricité consommée par le bâtiment : « Quand l’ensoleillement est maximal, ils peuvent couvrir jusqu’à 60 % de nos besoins en énergie ».Des besoins que l’hôpital tente de réduire grâce à des ampoules LED ou des détecteurs de mouvement dans certaines pièces. Mais certains appareils médicaux consomment beaucoup d'énergie. Dans le cadre de ses efforts de décarbonation, l’hôpital a aussi pris des mesures plus spécifiques.Les panneaux solaires servent aussi à faire tourner les machines de ce petit local blanc. Bashir Ahmad, responsable des équipements de santé de l’hôpital, explique de quoi il retourne : « C’est la pièce où l’on produit de l’oxygène. 21 % de l'air est composé d'oxygène. La machine prend l’air ambiant, capture l’oxygène et enlève les autres gaz. En le produisant nous-même, nous évitons des émissions carbone liées au transport ».La technologie comme principale difficultéLes efforts pour lutter contre le changement climatique s’invitent jusque dans le soin des malades : « En anesthésie, il y a aussi certains gaz comme le protoxyde d’azote. Il est utilisé comme un gaz porteur, mais c’est un gaz à effet de serre. Donc, on a réduit l’utilisation du protoxyde d’azote et on utilise de l’air à la place. Cela fonctionne de la même manière et c’est sans danger ».L'une des principales difficultés dans la route vers la décarbonation de l'infrastructure est la technologie, assure Pacifique Mukamusangwa, chargée du projet zéro émission nette : « Beaucoup de technologies qui sont recommandées ne sont pas encore ici sur le marché au Kenya. Et celles qui sont là sont un peu plus chères ».L’hôpital assure avoir déjà réduit de 40 % ses émissions de gaz à effet de serre depuis 2021. Il vise une baisse d'au moins 80 % d’ici à 2030.À lire aussiAu Kenya, le premier sommet africain sur le climat adopte la «Déclaration de Nairobi»
12/7/20232 minutes, 28 seconds
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Les zones humides au Bénin, des alliées contre le changement climatique

Marais, zones côtières, bords de rivière, lagunes, tourbières… Sur la planète, les zones humides sont souvent méconnues. Pourtant, elles jouent un rôle clé pour lutter contre le réchauffement climatique et ses effets de plus en plus dévastateurs. Des racines qui sortent de l’eau pour respirer et des feuilles qui recrachent le sel. Les capacités surprenantes du palétuvier noir racontent l’écosystème sans pareil que constituent les mangroves, ces forêts qui poussent dans l’eau saumâtre, à l’interface entre terre et mer.Depuis 2019 au Bénin, l’ONG CORDE a replanté 200 000 pieds de palétuviers sur les rives de la lagune côtière près de Ouidah.« La mangrove joue un rôle de frayère. Les poissons viennent déposer leurs œufs au niveau des racines échasses des palétuviers parce que c'est difficile pour les prédateurs d'entrer au niveau de ces racines », explique Ebenezer Houdjinou, coordinateur de l’ONG.Autre raison pour laquelle l’association et les communautés alentours protègent cette zone humide qu’est la mangrove : elle sert de rempart face aux tempêtes et aux vagues de submersion marine, de plus en plus fréquentes en raison du changement climatique.Et, bonus, la mangrove stocke le carbone atmosphérique – celui que nous émettons et qui entraine tous ces bouleversements – de manière bien plus efficace que les forêts continentales. « Ça devient un puits de carbone qu'il faut préserver parce que si on le laisse se détruire, c'est tout ce CO2 absorbé qui va remonter dans l'atmosphère », précise Ebenezer Houdjinou.Maintenir les zones humides est aussi vital en ville, car elles servent d’éponge en cas d’inondations.Avec Amos Adougbagui et d’autres riverains du marécage de Fifadji à Cotonou, l’association AGIR a réhabilité l’une de ces zones humides au cœur de la capitale économique.« Sans les zones humides, on est en train d'aller vers une noyade complète. Le refuge naturel de l'eau, ce sont les cours d'eau. À plusieurs endroits dans la ville, le cours d'eau a été entrecoupé par des ponts, par des rails, par des franchissements. C'est là où on parle d'inondations temporaires. C'est le moment de saisir l'importance des zones humides », affirme Alfred Houngnon, chercheur et fondateur de l’association AGIR.Et si les zones humides ont été préservées et entretenues, quand revient la saison sèche, elles restituent l’eau emmagasinée aux rivières et rafraîchissent la ville.À lire aussiSoudan du Sud: à Bentiu, un avenir incertain après les inondations [1/3]
12/6/20232 minutes, 17 seconds
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Soudan du Sud: à Bentiu, la peur d'une eau polluée par l'industrie pétrolière [3/3]

Le Soudan du Sud subit de fortes inondations depuis trois ans au nord du pays, à Bentiu. La population locale et les officiels témoignent d’un autre désastre écologique dont les causes et les effets restent méconnus : la pollution pétrolière. L’État d’Unité compte trois champs pétroliers où l’or noir est actuellement exploité. Des fuites sur des pipelines endommagées pendant la guerre civile ou du fait des inondations, auraient-elles conduit à une pollution de l’eau par des produits chimiques ? Avec notre correspondante de retour de Bentiu,Quand les inondations ont frappé en 2021, Mary a perdu tout ce qu’elle possédait. Elle témoigne des « maladies mystérieuses » qui sont arrivées avec l’eau des inondations. « Ces inondations, elles ont tué beaucoup de vaches et de chèvres, et pas seulement par noyade ou par manque d’herbage. Cette eau, elle est venue avec des maladies, déplore-t-elle. Si elle touche le bout des pattes de votre bétail, vous pouvez être sûr qu’il ne survivra pas. Même si vous l’emmenez sur de la terre sèche, il y a de fortes chances que les bêtes meurent. Je ne sais pas quelles sont ces maladies. Mais les inondations ont tué tout notre bétail. »Pour elle, « seul Dieu sait » ce qui a causé la mort de ses bêtes.Pourtant, ici à Bentiu, on parle facilement des craintes inspirées par une possible pollution liée à l’industrie pétrolière. Les champs pétroliers se trouvent seulement à une quinzaine de kilomètres au nord. Certains jours, selon les courants poussés par le vent, des nappes marron orangé se forment à la surface de l’eau des inondations.En bateau sur la rivière Naam, un affluent du Nil, l’ingénieur Gatwech Bipal, directeur au ministère des Transports, des Routes et des Ponts de l’État d’Unité, constate la « dévastation » causée par les inondations. Et affirme que cette eau a apporté avec elle un risque chimique.Des conséquences sur la santé« Au cours des trois dernières années, les habitants de l’État de l’Unité n’ont pas pu cultiver. Même leurs vaches sont mortes à cause des produits chimiques provenant du mélange de l'eau des inondations avec le pétrole. Vous savez que l’État d’Unité est situé dans les zones pétrolières. Ainsi, chaque fois qu’il y a une mauvaise gestion des déchets pétroliers, cela entraîne la mort du bétail. Les gens ont vraiment souffert ici à cause de cette eau », explique Gatwech Bipal.De fait, dans la région, on pêche, on se baigne, on fait tout dans cette eau depuis les inondations.« Quand l’eau va refluer, la fertilité de la terre aura disparu. Car cette eau est contaminée avec des éléments du pétrole. Et donc c’est possible qu’il y ait 3 ou 4 ans pendant lesquels il n’y aura pas de bonne récolte. Tout ça, ce sont les conséquences à long terme des inondations. De même qu’il y a déjà des conséquences sur les êtres humains. Nous pouvons constater dans différents hôpitaux des bébés qui naissent avec des difformités ou des parties manquantes de leurs corps. Tout ça, c’est l’impact de la présence du pétrole par ici », s'inquiète John Juan Buom, directeur de la commission humanitaire du gouvernement régional.Selon nos informations, des audits environnementaux ont été réalisés par le ministère du Pétrole, mais les résultats n’ont pas encore été rendus publics.À lire aussiSoudan du Sud: à Bentiu, face à la montée des eaux, la lutte des femmes pour la survie [2/3]
12/5/20232 minutes, 42 seconds
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Soudan du Sud: à Bentiu, face à la montée des eaux, la lutte des femmes pour la survie [2/3]

Le Soudan du Sud est l’un des pays les plus durement touchés par le changement climatique. Le pays subit des inondations depuis quatre ans, provoquant le déplacement de plus d’un million d’habitants, qui ont perdu leurs moyens de subsistance traditionnels. Dans la capitale de l'État d’Unité, Bentiu, les troupeaux ont été décimés et les champs sont toujours recouverts d’eau. Pour nourrir leurs enfants, les Soudanaises vont dans l'eau, prennent des risques considérables pour ramasser des nénuphars et coupent du bois.  Avec notre correspondante de retour de Bentiu,Sur la digue qui entoure le grand camp de déplacés accolé à la base de l’ONU à Bentiu, les bras se relaient pour décharger les canoës en provenance de la forêt inondée.Une femme coupe du bois. « Je m’appelle Nyagai Ter. J’ai 37 ans et sept enfants ». La mère de famille vend du bois de chauffe pour gagner sa vie, un travail éreintant. « Je vais en canoë jusqu’à l’endroit où il y a encore des branches aux arbres. Je les coupe à la hache, les mets dans le canoë et je les ramène ici pour les vendre. Ça me permet d’acheter de la nourriture à mes enfants. C’est très fatigant, mais je n’ai pas le choix, je fais ça pour survivre. »Quand les rations alimentaires du Programme alimentaire mondial s’arrêtent, comme c’était le cas en septembre et octobre, les femmes de Bentiu se démènent pour trouver de quoi nourrir leurs familles. Les nénuphars, dont le bulbe séché est transformé en farine, permettent de tenir. Encore faut-il s’aventurer dans l’eau pour les cueillir.Une situation dangereuse pour les mèresMary Nyaluony, une représentante des déplacés, insiste sur les nombreux risques auxquels il faut faire face. Elle se souvient du cas de cette femme dont le petit stand sur le marché en bord de route avait été emporté en août 2022, lorsque la digue a rompu. « Elle essayait de sauver ses affaires alors que l’eau était en train de tout emporter, lorsqu’elle a été mordue à la jambe par un serpent qu’on ne connaissait pas jusqu’ici. Et aujourd’hui, sa jambe est paralysée. »Mary Nyaluony n’en peut plus de voir que ces inondations se prolongent dans le temps. « On pensait que ça allait durer un an, mais ça fait déjà 3 ou 4 ans, et l’eau ne baisse pas ! C’est un cauchemar pour nous, les mères. On perd espoir de voir la situation s’améliorer. »Il est loin le temps où, se souvient Martha Nyayieya, « la vie était confortable ». La mère de sept enfants, déplacée en 2021 par les inondations, avait 22 vaches et des chèvres, et ne dépendait pas de l’aide humanitaire. Mais aujourd’hui, elle n’a pas d’autre choix.« Je veux faire passer un message aux humanitaires et à l’ONU. Il faut qu’ils nous aident. Car nous n’avons pas accès à la nourriture. Nous n’avons pas de terres à cultiver, pas de travail, pas d’argent. Nous souffrons beaucoup », déplore-t-elle.Mais les fonds nécessaires à la réponse humanitaire au Soudan du Sud sont en baisse, avec seulement 54% de la somme mobilisée en 2023.À lire aussiSoudan du Sud: à Bentiu, un avenir incertain après les inondations [1/3]
12/4/20232 minutes, 20 seconds
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Soudan du Sud: à Bentiu, un avenir incertain après les inondations [1/3]

Le Soudan du Sud est l’un des cinq pays au monde les plus vulnérables face au changement climatique, selon l’ONU. Depuis quatre ans, le pays se bat contre des inondations catastrophiques et des niveaux anormalement élevés dans le bassin du Lac Victoria, provoqués par des pluies torrentielles. La situation est très difficile à Bentiu, la capitale de l’État d’Unité, au nord du pays. Les habitants des villages alentours se sont réfugiés derrière des digues construites avec l’aide de l’ONU. Avec notre correspondante de retour de Bentiu,De l’eau jusqu’aux genoux, Nyanhial Luoy, 48 ans, se courbe pour ramasser des plantes dans l’eau stagnante près de Bentiu. Comme des dizaines de milliers d’autres déplacés, elle a tout perdu, et survit en mangeant du poisson et des nénuphars.« Les inondations sont arrivées pendant la nuit. Je me suis réveillée et j'ai découvert que l'eau était déjà dans la maison. Nous sommes partis en catastrophe avec mes dix enfants, mais la route entre notre village et Bentiu était sous l’eau. Sans bateau, nous n’avons rien pu emmener, même pas nos chèvres. Nous avons marché dans l’eau, c’était dangereux à cause des serpents. Nous avons eu beaucoup de mal à arriver ici. Il nous a fallu une semaine », déplore-t-elle.Sur la digue de l’immense camp de déplacés accolé à la base de l’ONU, des canoës accostent et déchargent leur marchandise. L’eau a recouvert la forêt, tout autour, à perte de vue.235 000 déplacés à cause des inondationsMakuei Kong, 40 ans, employé de l’ONG sud-soudanaise Coalition for Humanity, ne peut que constater les dégâts. « Les vaches sont mortes ! À cause des inondations, il n’y a plus d’herbe, il n’y a plus que de l’eau. Sans pâturages, les animaux ne peuvent que mourir de faim ! »Son père lui a raconté l’histoire des inondations qui ont frappé la région dans les années 1960. « Celles-ci sont bien pires ! Nous n’avons jamais fait l’expérience de telles inondations, avec des eaux aussi profondes. Elles ont tout détruit. Si vous demandez aux anciens, ils vous le diront : ces inondations sont énormes et seul Dieu sait quand la situation va s’améliorer », constate Makuei Kong.Une centaine de kilomètres de digues ont été érigés pour protéger de l’eau, pas moins de 235 000 déplacés. Des travaux de maintenance sont en cours, là où le niveau de l’eau est visiblement plus élevé que celui de la terre.Le major Saad Sultan supervise les opérations du contingent d’ingénieurs pakistanais de la Minuss, la Mission des Nations unies au Soudan du Sud. « Nous avons été préventifs tout au long de la saison des pluies et nous avons constamment réparé les digues. C’est pour cela que nous n’avons pas eu de brèche et que nous avons pu conserver cette route, qui est la seule disponible. »Mais c’est une lutte continue qui n’est pas près de se terminer, puisqu’on attend une nouvelle montée des eaux au Soudan du Sud en milieu d’année prochaine.À lire aussiSoudan du Sud: la Commission des droits de l’Homme de l'ONU pointe un manque de liberté d'expression
12/3/20232 minutes, 19 seconds
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Centrafrique: le PK5, à nouveau symbole du vivre ensemble [3/3]

Le PK5, quartier à majorité musulmane situé dans le troisième arrondissement de la capitale, renaît progressivement de ses cendres. Lassés par des années de crise, les habitants du secteur et les autorités locales avaient appelé au départ des groupes d'autodéfense en 2015. Après les élections présidentielles et législatives de 2016, l'État avait retrouvé son autorité et le quartier ses services publics. Aujourd'hui, on note la présence des forces de l'ordre et des casques bleus de la Minusca. De notre correspondant à Bangui,Il est 10 heures 30 et c'est l'heure de pointe au PK5. Coups de klaxon, embouteillages... commerçants et clients s'entremêlent, chacun dans ces courses.Des commerçants ambulants, appelés ici « Boubanguérés », se baladent partout avec leurs marchandises sur la tête ou dans des pousse-pousse. Parmi les clients, Hervé Aboubacar est flatté par les prix des produits écoulés à l'air libre. « Le marché revient de loin après cette crise. Nous avons beaucoup souffert. Il est temps de tourner la page. Comme vous pouvez le constater, il y a la paix, il y a de l'ambiance et il y a une parfaite cohabitation. Ça fait plaisir de voir comme le marché du PK5 a retrouvé ses couleurs. »À écouter aussiCentrafrique: les habitants du PK5 se souviennent avec mélancolie de la belle époque de leur quartier [1/3]Ici, c'est l'alignement des vendeurs de friperies. Au fond de la ruelle, des couturiers ont installé des machines à pédales. Ils ont pour principale activité les retouches des vêtements.« On a tout fait pour ramener nos habitants ensemble. C'est ce qui a fait que, après la crise, il y a des chrétiens qui ont reconstruit leur maison. Ils sont retournés dans le 3ᵉ arrondissement. Au niveau du marché, nous avons plaidé pour qu'il reprenne vie. Aux abords de l'avenue Koudoukou, c'est tout un tas de mélange qui est là », explique Marie-Joseph Fitalona, conseillère à la mairie du troisième. À l'autre bout du marché, on peut voir les étals des vendeurs de viandes et de légumes bien garnis. Non loin de là, on aperçoit des hommes et femmes qui tiennent des quincailleries. Le marché du PK5 est le véritable poumon économique de la Centrafrique, selon James Koursany, économiste. « Les activités du secteur primaire, du secteur secondaire et du secteur tertiaire se trouvent au sein de ce marché. Nous constatons des ventes en gros et des ventes en détail. Le capital qui circule au sein de ce marché peut être estimé à une centaine de millions par jour, comparativement aux autres marchés de bandits, aux autres marchés de la République centrafricaine », précise-t-il.Après des années de crises, le KM5 va visiblement mieux. Les Banguissois redécouvrent la densité du marché, le goût des méchouis, l'ambiance des orchestres et le vivre ensemble.À écouter aussiCentrafrique: les habitants du PK5 se souviennent de la guerre [2/3]
12/2/20232 minutes, 17 seconds
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Centrafrique: les habitants du PK5 se souviennent de la guerre [2/3]

Le PK5, ce quartier populaire, commercial et culturel, a été durement frappé pendant la crise militaro-politique de 2013. Considéré comme le poumon économique de la Centrafrique, c'est là que transitent tous les produits venant du Cameroun, du Tchad et du Soudan. Le coup d'État de 2013 de la coalition Séléka contre l’ancien président François Bozizé, a plongé ce quartier cosmopolite dans la violence. La paix est revenue, mais les habitants se souviennent de cette page sombre de l'histoire. De notre correspondant à Bangui,KM5. Nous marchons dans la rue Dido, autrefois appelée « Couloir de la mort ». Malgré l'ambiance qui y règne actuellement, l'endroit porte encore les stigmates de la crise.Quelques herbes ont poussé dans les allées bordées de magasins abandonnés, de maisons partiellement détruites, des impacts de balles sur des bâtiments et sur des poteaux électriques. Ousmane Dida, habitant du KM5, se remémore : « Les événements de 2013 étaient dramatiques. Il y avait le couvre-feu entre 20h et 5h du matin. Chaque soir, on entendait des coups de feu, on signalait des cas de braquages, d'assassinats, de viols et de pillages contre des musulmans, tout comme les chrétiens. Entre décembre 2013 et les mois de janvier, février et mars 2014, les milices Séléka et anti-Balaka semaient la désolation ».« Une prison à ciel ouvert »Au temps forts de la crise, les armes circulaient très facilement. Le KM5 échappait au contrôle des forces loyalistes. Certaines personnes le surnommaient « Poudrière » ou encore « Vatican », autrement dit un État dans l’État. Magalie est une habitante de PK5 : « J'ai perdu des parents, des amis et des proches. À cette époque, KM5 avait mauvaise réputation, presque toutes les écoles étaient fermées. Les commerçants et même les habitants étaient rançonnés par les groupes d'auto-défense. On vivait comme dans une prison à ciel ouvert, sans savoir de quoi demain serait fait ».Chapelet en main, grand boubou de couleur jaune, Aoudou Maïkano mâche la cola en sortant de la mosquée centrale. Même si aujourd'hui, il se promène librement, en 2014, il avait quitté le quartier pour se réfugier au Tchad : « KM5 était un quartier dangereux. Les gens étaient kidnappés, tués ou disparaissaient, tout simplement. Les commerces étaient fermés. À cause de l'insécurité, j’avais quitté le KM5 avec ma famille pour trouver refuge ailleurs. Mais aujourd'hui, je suis heureux de réintégrer ma communauté. Je ne souhaite plus revivre ce genre d'événements au KM5 ».Entre 2013 et 2015, plusieurs centaines de personnes avaient perdu la vie dans ce quartier. La crise avait aussi provoqué d'importants dégâts, estimés à plusieurs millions de FCFA. Plusieurs chefs de groupe d'auto-défense ont été tués, d'autres ont été condamnés, et d’autres encore ont fini à l’hôpital psychiatrique.  À lire aussiCentrafrique: les habitants du PK5 se souviennent avec mélancolie de la belle époque de leur quartier [1/3]
12/1/20232 minutes, 16 seconds
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Centrafrique: les habitants du PK5 se souviennent avec mélancolie de la belle époque de leur quartier [1/3]

Situé dans le 3e arrondissement de la capitale, ce quartier populaire de Bangui, majoritairement musulman, est à la fois appelé Km5 ou « Cinq-Kilos ». Entre les années 60 et 90, il était connu pour le dynamisme de sa population, sa diversité et sa densité. Un secteur cosmopolite où tout le monde se retrouvait pour partager le thé, le méchoui et suivre des concerts. De notre correspondant à Bangui,Appuyé sur sa canne, Aladji Cabara marche lentement en chantant l’un des vieux disques des années 70. En compagnie de quelques camarades, cet ancien conducteur de taxi nous amène à la découverte de l’ex-bar dancing Étoiles, construit dans les années 70 et détruit après des années de crises. Né en 1952, Aladji Cabara secoue la tête et verse des larmes nostalgiques : « L’ambiance du KM5 était pure et indescriptible. À l’époque de l’empereur Bokassa, le coût de la vie était moins cher. PK5 était le centre de l’ambiance, parce qu’il y avait une trentaine de bars dancing. Je peux citer entre autres les bars Punch Coco, Étoiles ou encore le Rex. Les grands orchestres comme Vibro Succès, Tropicale Fiesta, Centrafrica Jazz mettaient de l’ambiance partout. La Nostalgie ! »Malgré la chaleur, nous traversons tout le quartier pour visiter des endroits historiques. À côté de la mosquée centrale, assis sur des nattes, Amadou Roufaï partage le chai, une autre appellation du thé, avec ses amis : « Je suis fils des années 60. Pour parler de cette époque, je dirais qu’il y avait une ambiance totale. Les communautés chrétiennes et musulmanes vivaient en parfaite harmonie. Lorsque les Centrafricains de la diaspora arrivaient à Bangui, ils venaient d’abord manger le méchoui de KM5 avant d’aller chez eux. Le meilleur méchoui, c'est au KM5. Même aux heures tardives, les gens venaient manger le méchoui, prendre un verre avant de rentrer chez eux tranquillement. »Le KM5 au rythme de la musiqueDirection le terrain de football de Sagbado. Ici quelques enfants s’entraînent avec le ballon rond. Mais, dans les années 80, ce terrain était un carrefour de la sape. Aladji Ouananga Cabara : « C’est ici que les grands sapeurs de KM5 se retrouvaient avant d’aller aux soirées dansantes. Chacun prenait le soin d’imbiber ses cheveux avec de l’huile de karité avant de les peigner soigneusement. On portait des pantalons gabardine à pattes d’éléphant avec des chaussures très pointues appelées pointinini. La classe ! » À cette époque, il n’y avait pas de couvre-feu, les habitants pouvaient se promener du matin au soir et faire la fête jusqu’à l’aube. En ce temps-là, PK5 vibrait au rythme des styles de musiques tels que : Ndombolo, Rumba, Motenguènè ou encore le Jazz.
11/30/20232 minutes, 28 seconds
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Maurice: à Rivière des Galets, un mur pour lutter contre la montée des eaux

À Maurice, les effets du changement climatique ne sont pas seulement visibles, ils engendrent aussi un nouveau rapport entre les habitants des zones côtières et la mer. Alors que l'érosion impacte de manière significative tout le littoral, à Rivière des Galets, dans le sud de l'île, un mur a été érigé. Il sépare le village de la mer. La montée des eaux constitue un danger notamment pendant la saison cyclonique. « C’est beau ici, il m’est arrivée de voir des dauphins, des baleines depuis ma nouvelle maison. » Steffi, dans la trentaine, se remémore avec émotion les premières années de son mariage lorsqu'elle s'est installée à Rivière des Galets. Depuis sa modeste demeure, elle jouissait d'une vue captivante sur la mer. Cependant, les temps ont évolué.« Auparavant, ceux qui venaient des autres localités, quand ils nous voyaient vivant face à la mer, ils nous disaient : "Oui, on aimerait bien avoir une maison près de la mer". Mais maintenant, il y a un mur devant la maison, il faut faire le tour du mur pour voir la mer. »Depuis huit ans, un mur sépare en effet le village de la mer. Les modestes villageois ne se réveillent plus en face de l'océan. Maintenant, ils doivent grimper par-dessus le mur ou faire le tour. La montée des eaux a privé les villageois de leur plus grand bonheur ; une vue constante sur la mer. Pour les protéger des submersions fréquentes quand la mer est démontée, les autorités n'ont eu d'autre choix que d'élever une barrière de protection en béton.Une montée du niveau de la mer de 5,6 mm par anAssis sur le mur, Daryl, 18 ans contemple l’océan et nous indique les pierres disposées en contrebas pour atténuer la force les vagues.« Durant mon enfance, il y avait du sable ici. L’eau n’était pas si proche. On jouait au foot ici, on nageait. Maintenant, les enfants ne peuvent pas jouer ici. C’est dangereux. »Les pêcheurs doivent désormais amarrer leur pirogue à l’extrémité du village. Mais Prem, la cinquantaine, ne s’en plaint pas. Au contraire : « Maintenant, c’est mieux qu’avant. Le mur nous protège. Avant, l'eau entrait dans la cour et la maison, partout ».Maurice enregistre une accélération de la montée du niveau de la mer. Elle atteint désormais 5,6 mm par an et dépasse la moyenne mondiale qui est de 3,3 mm. L’érosion impacte toutes des zones côtières, avec certaines régions perdant jusqu’à 20 mètres de plage. Selon Météo Maurice, la température moyenne de l’île, des années 1960 à ce jour, a augmenté de 1,40 degré Celsius.À lire aussiLes digues, un exemple de mauvaise adaptation au changement climatique?
11/29/20232 minutes, 13 seconds
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Sénégal: les cahiers de Ponty, témoignages précieux ou matériel pour les colons? (2/2)

Suite et fin de notre série de reportages au Sénégal consacrés à l'école normale William-Ponty. Dans les murs de l’Ucad à Dakar sont précieusement conservés ce que l’on appelle les cahiers de Ponty. Ces devoirs étaient rédigés par les élèves venus de toute l’AOF, l'Afrique-Occidentale française, à partir des années 1930. Ce sont des témoignages riches des rites et coutumes dans ces pays, mais ils s’abîment avec le temps. De notre correspondante à Dakar« Les cahiers sont là ». Dans une armoire métallique, de grandes pochettes en cartons sont ouvertes méticuleusement par El Hadj Birame Diouf, documentaliste à l’Institut Fondamental d'Afrique Noire (Ifan). Des informations précieuses...À partir de 1937, les brillants étudiants de l’école William Ponty les rédigeaient l’été, lorsqu’ils retournaient chez eux aux quatre coins de l’AOF. L’idée était d’africaniser la formation, dans une école dirigée par des professeurs français et avec un enseignement très eurocentré : « En tout cas, on a situé les cahiers. C’était juste pour montrer les réalités africaines, le vécu quotidien des anciens pensionnaires dans les villages les plus reculés », détaille le documentaliste. Dedans, les cahiers de Ponty décrivent en détail de nombreuses coutumes de l’Afrique de l’Ouest : « Par exemple, il y a des cahiers qui parlent de la cuisine, sur l’alimentation, sur les rites funéraires, comment toutes ces manifestations-là étaient organisées. » À écouter aussiSénégal: partager les archives, construire la mémoire... utiles à l'administration colonialePour l’universitaire et critique littéraire béninois Guy Ossito Midiohouan, il faut cependant remettre ces productions dans leur contexte historique, celui de la colonisation française, pour les comprendre : « Cela visait d'abord à faire de ces Africains inscrits des agents de renseignement de l'autorité administrative. Ces élèves permettaient une connaissance plus intime, une connaissance de l'Intérieur du pays à administrer. » La valeur historique des cahiers a été retenue par l’Unesco qui les a intégrés au fonds « Mémoire du monde » en 2015, qui répertorie les archives remarquables du monde entier. Car ils ont aussi été rédigés par des jeunes hommes qui devinrent pour certains de grandes figures politiques en Afrique : « Là, on a aussi l'autre cahier de Diallo Telli, c'est un Guinéen qui a travaillé sur l'alimentation indigène à Poredaka, explique El Hadj Birame Diouf. Boubacar Diallo Telli a été le premier secrétaire général de l'Union africaine ».À écouter aussiDiallo Telli, l'ascension d'un jeune diplomate (1&2)Des cahiers « uniques » et fragilesLes cahiers de Ponty sont régulièrement consultés par des auteurs et des chercheurs, mais ils sont très fragiles : « Il y a certains cahiers écrits sur du papier qui est assez cassant et jaunissant. Ensuite, l'encre qui est utilisée est une encre délébile qui peut s'effacer avec le temps. Ce sont des cahiers qui sont uniques, donc si vous perdez un cahier, c'est pratiquement tout le vécu qui a été raconté par son auteur qui disparaît en même temps. » Les documentalistes de l’Ifan sont en train de les numériser progressivement pour préserver ce patrimoine écrit. À lire aussiDiallo Telli, premier secrétaire général de l'OUA, étoile filante panafricaine
11/28/20232 minutes, 15 seconds
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Sénégal: quel projet de réhabilitation pour l'ancienne école William Ponty?

Pendant une grande partie du XXe siècle, le Sénégal a abrité la fabrique à élites de l’AOF, l’Afrique occidentale française. Un projet colonial français pour former ses cadres localement, mais qui a ensuite permis l’émergence d’une génération de leaders africains. Aujourd’hui, le site qui a abrité l’école le plus longtemps tombe en ruines, et les anciens rêvent de le réhabiliter. De notre correspondante à Dakar,Face au grand amphithéâtre en ruines, Mamadou Kandji, ancien doyen de la faculté de lettres de l’université Cheikh Anta Diop, a des étoiles plein les yeux. Il se souvient de ses années d’étudiant, au milieu des années 1960. « Ce bâtiment date de 1938. Il y avait une salle de conférences en haut, un laboratoire de recherche et d'expérimentation avec des microscopes en bas », décrit Mamadou Kandji.L’école William Ponty est créée en 1903 par la France. C’est alors un instrument pour former ses cadres dans les colonies de l’AOF, l’Afrique occidentale française. « L'école était faite pour former des cadres moyens de l'administration coloniale, parce que la conception qui était faite au nom de la supériorité raciale, les Européens occupent tout ce qui est commandement et aux Africains, on laisse donc ce qu'on appelle les postes subalternes », indique Gana Fall, historien et spécialiste de l’administration.À écouter aussi«Les hussards noirs de la colonie»: les instituteurs avant les indépendancesUn « esprit de Ponty »L’école a vu passer beaucoup de futurs dirigeants africains à partir des années 1930, tels que Modibo Keita pour la Guinée, Abdoulaye Wade, ou encore Hamani Diori au Niger, puis les cadres et professeurs qui feront émerger les pays nouvellement indépendants.On parle d’un « esprit de Ponty » qui liait ces jeunes hommes, qui entraient à l’école vers 18 ans. « Le bâtiment détruit justement, ça a toute une histoire pour moi parce que j'ai logé dans ce dortoir-là, c'était la camaraderie et la bonne camaraderie. Mais sur fond de travail et de saine rivalité », souligne Mamadou Kandji.Aujourd’hui, difficile d’imaginer qu’une fabrique à élites était installée ici à Sébikotane, à une quarantaine de kilomètres de Dakar. L’amphithéâtre et les dortoirs sont détruits. Certains bâtiments ont disparu ou ont été transformés en prisons.Des promesses pour réhabiliter l'ancienne écoleL’Amicale des anciens, créée en 1991, se bat pour la réhabilitation du site. Un projet qui avait failli se réaliser sous Abdoulaye Wade, l’un des illustres anciens élèves. « Je me souviens que, quand on a soumis le projet au président Wade, il s’en était émerveillé et il avait proposé qu'on en fasse une université du futur africain », se rappelle Modou Ndiaye, le président de l’Amicale.Financé par Taïwan, le projet d'université tombe à l’eau à la rupture diplomatique avec le pays. Désormais, les anciens Pontins rêvent d’un nouveau complexe ambitieux bâti sur le site de l’ancienne école. « Il y aura un musée qui va amener des indices sur l'histoire. On n'écarte pas des implantations de locaux fonctionnels d'éducation et de formation, d'animation culturelle et intellectuelle », imagine Issakha Gueye, trésorier de l’amicale.L’Amicale a rencontré l’actuel ministre de la Culture qui leur a promis de plancher sur le sujet. Les anciens organisent aussi des conférences pour réfléchir sur les politiques éducatives au Sénégal.
11/27/20232 minutes, 19 seconds
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RDC: «Le Retour des Fantômes», un spectacle autour de la restitution des restes humains

En 1950, un médecin suisse, Boris Ade, a pour des raisons de recherche, procédé à l'exhumation de 7 corps des membres de la communauté Mbuti et emmené les dépouilles en Europe. La communauté de ces Pygmées vit toujours dans le territoire de Wamba, à l’est de la RDC. 60 ans après, ces squelettes sont encore conservés au laboratoire de l'université de Genève, même si un accord de cession a été signé avec l'université de Lubumbashi en RDC. Faut-il faire revenir les corps, comment organiser le retour ? Des artistes du Groupe 50-50 veulent faire bouger les lignes à travers un spectacle intitulé, le Retour des Fantômes. 
11/26/20232 minutes, 20 seconds
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Afrique du Sud: Body Moves, la danse pour tous les corps

En Afrique du Sud, le centre d’arts de Sibikwa à Benoni, à l’est de Johannesburg, accueille jusqu’à ce dimanche la 2ᵉ édition d’un festival de danse inclusive. Plusieurs compagnies professionnelles, d’Afrique du Sud, du Kenya, de Madagascar et d’Europe, composées de danseurs valides et handicapés, sont venus échanger autour de leurs techniques, et présenter leurs créations au public. Des pas, des mouvements et des chorégraphies, pour montrer que la danse peut être célébrée par tous les corps. De notre correspondante à Johannesburg,Avec agilité et rythme, Tebogo Lelaletse fait virevolter son fauteuil et enchaîne les acrobaties. Cela fait cinq ans que le jeune Sud-Africain handicapé s’est mis à la danse, et lorsqu’il se produit, il donne tout pour son public.« Ce que je ressens surtout, c’est de l’énergie », explique Tebogo Lelaletse. « Quand je suis sur scène, je fais juste ce que je suis censé faire. Je me jette, je ne réfléchis pas, car je sais ce que je dois faire. Et je le fais avec amour et grand plaisir. La danse, c’est pour tout le monde. Même avec un handicap, il ne faut pas rester assis, en se disant “oh mon Dieu, cette personne arrive à faire ces mouvements, j’aimerais tant pouvoir le faire”. Il suffit juste de tout adapter. »Le festival permet aux différentes compagnies de partager comment le handicap se fond dans leurs danses. C’est au tour d’Andile Vellem de montrer que même sans son, le mouvement peut naître. Sourd depuis son enfance, il a développé des chorégraphies autour du langage des signes. Mpotseng Shuping interprète pour nous ses explications signées. « Voici comment je procède : d’abord, j'enseigne le langage des signes, et ensuite, je transforme cet alphabet en mouvements du corps. »Une nouvelle dimension pour les créationsDes techniques qui entrent en écho avec les recherches de la compagnie malgache Lovatiana, qui a pour sa part travaillé autour d’une adaptation de l’alphabet braille. Pour Nacelle Somoh, danser sans voir demande juste davantage de préparation :« J’ai besoin de passer plus de temps sur la scène, pour sentir la scène et tous les coins, s’il y a des petites choses à retenir, et de compter les pas », indique Nacelle Somoh. « Peut-être qu’il nous faut plus de temps pour faire la répétition sur scène. Nous, on fait de la danse contemporaine, c’est de la danse du cœur, de la danse de l’émotion. Ça vient plutôt de l’intérieur. Et tu danses à partir de ton corps, à partir de ta sensation à l’intérieur. »Et selon la chorégraphe Lovatiana Rakotobe, le travail avec des danseurs valides et handicapés apporte une nouvelle dimension à ses créations : « Contrairement à ce qu’on pense, moi, j'ai beaucoup appris avec les danseurs non-voyants, parce qu’ils m’ont donné aussi de l’inspiration. Ça m’a ouvert en fait d’autres possibilités, dans l’exécution des mouvements. Et aussi au niveau de la forme, ça a abouti à de nouvelles propositions. »Cette diversité au sein de la danse avait déjà été sous le feu des projecteurs un peu plus tôt dans l’année, lorsque le danseur unijambiste sud-africain Musa Motha avait fait sensation au cours de l’émission Britain’s Got Talent.
11/25/20232 minutes, 20 seconds
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Guinée: les femmes victimes du 28 septembre 2009 créent une maison des survivantes

Ce samedi 25 novembre, c’est la Journée internationale pour l’élimination de la violence à l’égard des femmes. En Guinée, une initiative originale a vu le jour. Il y a 14 ans, plus d’une centaine de femmes étaient violées au grand stade de Conakry par des militaires guinéens venus interrompre, les armes à la main, un meeting de l’opposition. Pour permettre aux victimes de se reconstruire, des associations guinéennes et une ONG internationale ont créé une maison des survivantes. Inaugurée le 28 septembre dernier, elle se met en route tout doucement. De notre correspondant à Conakry,Il est 7 h du matin, dans la cour de sa concession, la poule et les poussins sont déjà réveillés. Oumou Barry s’apprête à rejoindre la maison des survivantes. Cette grand-mère est une rescapée du stade de Conakry.« J’avais 50 ans quand j’étais au stade. Ce que j’ai subi, c’est inexplicable. Tu vois un enfant qui a le même âge que ton propre garçon qui te fait du mal... », raconte-t-elle. À mots couverts, Oumou Barry raconte son viol.Sans politique de réparation, les femmes ont dû se prendre en main. « Personne ne nous a assistées. Même le gouvernement », dénonce Oumou Barry. « Il faut qu’on soit fortes maintenant. Il n’y a plus de pleurs, si tu pleures, qu’est-ce qu’il y a ? Qui peut t’aider ? »La maison des survivantes est née de cette prise de conscience, de cette révolte. Les femmes ont pu alors compter sur quelques soutiens : celui de l’Association des victimes du 28 septembre 2009, l’Avipa, celui de l’OGDH, l’Organisation guinéenne de défense des droits de l’homme, et puis une ONG les a aidées : le Global Survivors Fund, fondé par les prix Nobel de la paix Nadia Murad et Denis Mukwege.Une aide médicale, psychologique et juridiqueIl faut un peu plus d’une heure à Oumou Barry pour rejoindre le centre implanté dans le village de Moribayah, à 70 kilomètres de Conakry. Ici, les survivantes ont un local pour leurs activités économiques, mais pas seulement, elles vont pouvoir bénéficier, à terme, d’une aide médicale, psychologique, mais aussi d’une clinique juridique.  Ce jour-là, six femmes fabriquent du savon qui sera vendu sur les marchés. « Après les événements du 28-Septembre, je ne peux pas dire que cela nous a rendues complètement pauvres, mais on a été pour beaucoup des victimes », confie Idiatou Baldé. « Beaucoup d’entre nous ont perdu leur boulot, renvoyées par leur mari, et jusqu’à présent, il y a ces conséquences qui agissent sur nous »Idiatou Baldé répond aux questions avec aplomb. Cette maison des survivantes a permis à toutes ces femmes de reprendre confiance en elles. Les survivantes attendent désormais que l’État prenne le relais et s’engage dans un véritable programme de réparation.
11/24/20232 minutes, 14 seconds
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RDC: à Kisangani, la problématique de l'accès à l'électricité

Alors que la campagne électorale pour la présidentielle et les législatives du 20 décembre se poursuit en RDC, l’essentiel des 100 millions de Congolais, dont les 44 millions d’électeurs attendus aux urnes, se heurtent à la problématique de l’accès à l’électricité. Moins de 20 % de la population ayant seulement accès à l’électricité, c’est l’un des taux les plus bas du continent. C’est l’un des sujets de campagne.  De notre envoyé spécial à Kisangani,Au cœur de la commune de Makiso, centre-ville, André et ses employés d’un atelier d’ajustage sont dans une véritable course derrière la montre. Ferrailles, baguettes de soudures, bar de fer... le travail doit vite s’exécuter, car après des jours de coupure de l’électricité, le courant peut être interrompu à tout moment de la journée. « Nous n’avons aucune minute à perdre. Imaginez que notre ligne est l’une des plus privilégiées, mais nous sommes fournis en électricité une à deux fois par semaine. Pour éviter des problèmes avec les clients, nous employons un groupe électrogène. Le litre d’essence se négocie présentement à 4 dollars. Un travail sans bénéfice à cause du manque de l’électricité. Nous souffrons ici et personne ne nous écoute », déplore André.À écouter aussiÉlectricité en RDC: comment donner la lumière aux Congolais?Le manque d'électricité, « le socle de la pauvreté » à KisanganiMême si sa fourniture est médiocre, la Société nationale d’électricité (SNEL) ne se prive pas de facturer ses clients. Derrière un mini-transformateur, Assumani. « C’est malheureux. Ils viennent ici avec des factures sur base de rien. Nous considérons cela désormais comme une taxe. En octobre, nous avons été alimentés deux fois, mais ils nous ont facturé comme si nous étions fournis 30 jours complets », indique Assumani.Les tenanciers des chambres froides et leurs clients en sont les plus grandes victimes. Chaque semaine, Espérance, près du marché central, jette des kilos de chinchards, poulet et autres vivres stockés. « Ce sont d’énormes pertes et c'est tous les jours. Le manque de l’électricité est le socle de la pauvreté dans cette ville. Peut-on imaginer qu'on laisse nos congélateurs branchés et juste espérer qu'on ait de l’électricité la nuit ? Ils nous alimentent pendant 30 minutes et après, plus rien. Il y a de cela quelques mois, les autorités avaient pourtant amélioré la situation, mais en fait cela n'a duré qu'un mois, juste pour nous flatter. »À écouter aussiRDC: dans les rares villages électrifiés, l'activité se développeDélestage impossibleLa ville de deux millions d’habitants dépend de la centrale hydroélectrique de la Tshopo héritée de l’époque coloniale. Kisangani a besoin de 48 mégawatts, mais la centrale n’en fournit que huit actuellement, selon les autorités. Impossible même d’assurer un délestage, estime Gentil Sefu du mouvement citoyen Lutte pour le changement.« La SNEL privilégie d’abord la Bralima qui produit la boisson, cette société a besoin de deux mégawatts sur les huit. Les six restants, on les donne, selon la SNEL, là où il y a les rizeries, postes des soudures et les officiels, alors que ces autorités-là, ce sont celles qui ont des moyens d’acheter des groupes électrogènes, carburant… Les paisibles citoyens manquent même de quoi allumer leurs lampes à la maison. Nous considérons que la ville est dans le noir. Même le délestage, c’est impossible. »Les députés pointés du doigtToute la colère est dirigée contre les députés. Qu’ils soient du pouvoir ou de l’opposition, ils sont accusés de n’avoir pas suffisamment porté haut la voix de leurs électeurs.« Nous avons lancé la campagne “Zéro élu réélu pour un Congo fort”, parce que nous nous sommes rendu compte que les élus de 2018 ont failli à leurs missions », assène Maître Christian Kambi de la nouvelle dynamique de la société civile de Kisangani. « Nous ne savons même pas les raisons qui les ont poussés à être députés. Tous sans exception ont failli à leur mission »Les militants demandent la construction d’une autre centrale près du centre-ville ou la réhabilitation complète de celle déjà vétuste installée sur la rivière Tshopo.À lire aussiRDC: des projets de production d'électricité pour aider le secteur minier
11/23/20232 minutes, 49 seconds
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RDC: à Lubumbashi, la hausse des prix des produits de première nécessité n'épargne personne

Dans son discours du 14 novembre dernier devant le Parlement qui était réuni en congrès, le président congolais, Felix Tshisekedi, a reconnu que la RDC connaissait une inflation de plus de 19%. Une inflation qui a des conséquences sur le pouvoir d’achat de ses concitoyens De notre correspondante à Lubumbashi,La commune de Kamalondo à Lubumbashi est réputée pour son ambiance animée, la musique envahit quotidiennement le quartier. Pourtant, sur l’avenue Lunda c’est plutôt calme. Il est 11 heures, et certains élèves sortent déjà de l’école. Gloria, une jeune femme d’une vingtaine d’années est assise au coin de sa maison de deux pièces. Devant elle se trouve son brasero, qu’elle dit avoir allumé il y a quelques heures, mais qui semble désormais éteint : « Nous avons déjà préparé un peu de riz que nous avons mangé le matin. On ne mange le foufou que le soir. »Ne manger le foufou qu’une fois par jour, c’est devenu le quotidien de plusieurs familles à Lubumbashi. Depuis le mois de janvier, le prix de la farine de maïs a doublé, il est passé de 25 000 francs congolais (9,26 euros) à 50 000 francs (18,52 euros). M. Kasongo est réparateur de pneus dans le quartier Karavia, situé à l’ouest de la ville. Aujourd’hui, les clients étaient rares et avec une recette de moins de 10 dollars, il se demande comment il va pouvoir nourrir ses six enfants : « Ici chez nous, l'aliment de base, c’est la farine de maïs. Lorsque j’en ai en stock, je suis sûr que les enfants vont manger et je serai tranquille. Mais le prix du sac de farine est élevé. La vie coute cher surtout avec la dépréciation du franc congolais. »Les prix ont pour la plupart doubléPlus loin, dans le centre-ville de Lubumbashi, Micheline a fini son travail. Elle est femme de ménage dans un centre culturel. Elle aussi se plaint du cout élevé de la vie : « C’est très dur. Aujourd’hui, si j’ai 10 000 francs et que je vais au marché, je ne peux me procurer qu’une portion de farine et du poisson. Impossible d’avoir le charbon, du bois et de l’huile. »Cette situation n’épargne personne, explique également Christelle Ntanga, une informaticienne. Assise derrière son bureau, cette consultante tente toutefois de relativiser : « Je vais donner un exemple simple. La boite de lait que j’achetais au prix équivalant 15$, coute aujourd’hui 17$. » Vous continuez d'en acheter ? « On n’a pas de choix, il faut vivre. »Depuis le début de l’année 2023, les prix de tous les produits de première nécessité sont, pour la plupart, passés, du simple au double.
11/22/20232 minutes, 15 seconds
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RDC: le mauvais état des routes du Sud-Kivu, principale préoccupation des habitants de la région

La République Démocratique du Congo est en campagne électorale depuis dimanche. Et ce qui inquiète les habitants de Bukavu, la capitale du Sud-Kivu, c’est le mauvais état des routes de la province, malgré les nombreuses promesses réitérées depuis les élections de 2006. Ils espèrent cette fois-ci que les engagements pris par les candidats seront tenus. De notre correspondant à Bukavu,Au volant de son taxi jaune, sueur au front, Aganze Mirindi Romain a multiplié les manœuvres sur cette route, l’une des principales de la commune de Kadutu, mais encore une fois rien ne va : « Mon véhicule est tombé en panne sur cette même route récemment. Il sort du garage, j'ai même des photos, mais regarde, le moteur vient de déboîter encore. Et c’est presque toutes les semaines que nos voitures ont ce genre de problèmes. Nos routes sont dans un état très dégradé. D’ailleurs, je prie Dieu pour qu’il ne pleuve parce qu’il suffit de quelques gouttes de pluie pour que la circulation s’arrête ! »Sur la route nationale numéro 2, non loin du Lycée Wima qui surplombe Bukavu, il existe un endroit que les habitants ont surnommé « Yesu - Yesu », « Jésus - Jésus » en français. Les accidents de la route y sont fréquents. Tony Milinganyo est chauffeur de taxi : « Les gens crient Jésus-Jésus à cause des manœuvres que font les voitures lorsqu’elles passent par là. Ils ont peur de l’accident. C’est pourtant une route nationale. On ne comprend pas que les autorités ne voient pas tout ça ? D’ailleurs, je me demande comment ils comptent faire campagne à l’intérieur de la province. Est-ce que les habitants des milieux enclavés auront le courage d’aller voter ? Car là où il n’y a pas d’accès, la vie doit être chère, et ça ajoute de la souffrance à la souffrance ».Seulement 13% des voiries sont en bon état dans le Sud-KivuUn peu plus loin, Cizungu Nyangura Baïgon, la soixantaine, est désabusé :  ​« C’est regrettable de voir que ceux qui ont des postes stratégiques au gouvernement sont originaires de Ngweshe ; lorsqu’ils sont à Bukavu ils passent par ici pour aller chez eux. C’est cette route qui mène au village natal de la Première dame par exemple ! Quelle honte ? Ne me demandez pas d’aller voter pour ces gens-là. »Dans le centre-ville de Bukavu, les conducteurs roulent à gauche ou à droite, c’est selon l’état de la route, car il faut éviter les nids de poules. Georges Onembo est le directeur provincial de l’Office de voirie et drainage du Sud-Kivu. Il s’en remet au Fonds national d’entretien routier FONER qui, depuis quelque temps, s’active pour financer quelques travaux. « La province du Sud-Kivu a 162 311 kilomètres de voirie à entretenir. À peine 13% sont en bon état, 6% sont un état moyen et le reste en mauvais état. Avec le financement du FONER, on commence l’entretien des principaux axes. Nous faisons les réhabilitations en fonction des moyens qui sont mis à notre disposition. »L’office des voiries et drainages précise que les routes à réhabiliter en priorité pour le gouvernement provincial du Sud-Kivu sont notamment les avenues Kibombo, Vamaro, du plateau à Nguba, et les avenues du lac 1 et 2 à Labotte. À lire aussiRDC: la route entre Baraka et Uvira réhabilitée, mais encore dangereuse
11/21/20232 minutes, 31 seconds
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Dans l’est de la RDC, l’obsession sécuritaire

Dans l’est de la RDC, nombreux sont ceux qui ne pourront pas voter le 20 décembre à cause de la situation sécuritaire. Le président Félix Thsisekedi a confirmé en interview sur RFI que le vote n’aura pas lieu dans plusieurs territoires du Nord Kivu. La rébellion du Mouvement du 23 mars, le M23, occupe, contrôle et administre une partie de cette province. Dans la capitale de la région et dans les environs, tous réclament le retour de la paix et la sécurité. Reportage Coralie Pierret. De notre correspondante à Kinshasa, À Kanyaruchinya, dans leur cour d’école, les écoliers côtoient les déplacés. Ils sont près de deux millions et demi à avoir fui la guerre entre M23 et troupes pro-gouvernementales. Ils ont trouvé refuge dans des abris de fortune près de Goma. Parmi eux, Vainqueur, dont le prénom a été modifié. Il vient d’une zone sous contrôle du M23, mais a réussi, malgré l’insécurité, à obtenir une carte d’électeur : « Je suis venu ici à Goma pour m’enrôler parce que je voyais que le futur était sans issue. Je cherchais une carte d’électeur et je l’ai eue. » Dans son village, il n'était pas possible de se faire enrôler : « les machines d’enrôlement n’ont pas pu arriver chez nous, car c’est une zone contrôlée par les rebelles. »  Le 20 décembre, il devrait donc pouvoir voter. Mais dans les camps de déplacés, son cas fait figure d’exception.Difficile d’estimer le nombre d’exclus, mais la plupart des habitants de Rutshuru, Masisi et Nyiragongo n’ont pas reçu de cartes. Qu’à cela ne tienne puisque les préoccupations sont ailleurs, explique sous une pluie battante Innocent Tumaini, chef du site de déplacés CEPAC : « Nous sommes découragés, les dirigeants que nous avons élus ne nous ont pas rendu service. Depuis que nous les avons élus, ces dirigeants restent à Kinshasa et ne font rien pour nous. De ce fait, nous n’avons pas le courage de participer aux élections. »« Ils sont là pour cambrioler »Dans les environs, mais aussi à Goma, tous réclament le retour de la paix. Dans la ville, sous contrôle gouvernemental, le contexte électoral est propice à l’augmentation de l’insécurité, affirme Emmanuel Kubuya Sitatsi chef de quartier adjoint de Ndosho où sévissent régulièrement des bandes armées : « Ce sont des inconnus qui arrivent en bandes et volent. Ils sont en tenue de militaire, bien armés et sont là pour cambrioler. »L’insécurité est l’une des thématiques centrales de cette élection. À Goma, les affiches ont fleuri dans les rues, mais aucun candidat n’est encore venu y faire campagne.À lire aussiRDC: la machine à voter fait à nouveau polémique
11/20/20232 minutes, 12 seconds
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À Kinshasa, le combat des autorités contre l'urbanisation sauvage

À Kinshasa, les autorités s'efforcent de combattre le fléau de l'urbanisation anarchique et sauvage. La capitale de la RDC est confrontée à une croissance urbaine quasi chaotique et non réglementée. Des habitations sont parfois construites sans les autorisations légales nécessaires, engendrant ainsi une absence totale de planification pour les infrastructures. Ce phénomène est aussi souvent à l'origine d'incidents tragiques. De notre correspondant à Kinshasa, Jean-Marie réside à proximité du cimetière de Kinsuka. Il constate que des habitations, parfois construites en matériaux durables, voient le jour dans cette nécropole, pourtant officiellement fermée depuis 2015. « Ce cimetière que vous voyez est régulièrement vandalisé pendant la nuit. Des individus viennent le casser. Regardez là-bas, vous pouvez même voir les restes de certains cercueils. »Blandine est profondément attristée. Elle se sent désorientée et n'arrive même plus à localiser les tombes de certains membres de sa famille. « Mon beau-frère a été inhumé dans ce cimetière il y a moins d'un an, mais ces individus ont tout saccagé pour ériger des habitations sur ce terrain. »En octobre de l’année dernière, le gouverneur de Kinshasa s'est rendu en personne sur place avec des engins de chantier pour ordonner la démolition de ces maisons. Un an plus tard, d'autres habitations sont toujours présentes.Des répercussions du drame au marché de Matadi KibalaKinsuka n’est pas le seul site concerné. En février 2022, une pluie battante à Matadi Kibala a provoqué la rupture d'un câble haute tension, entraînant la mort de 26 personnes dans un marché et des zones résidentielles. Malgré les annonces de mesures fortes de l'État, notamment la délocalisation du marché, celui-ci persiste aujourd'hui, avec des échoppes qui reprennent leur activité comme si rien ne s'était passé.« Ce qui s’est passé à Matadi Kibala n’est pas un accident comme tel. C’était prévisible. On interdit d’avoir des habitations en dessous de ces câbles, ainsi si le câble cède, on aurait une certaine marge de sécurité. Ces zones sont habitées et certaines autorités octroient des autorisations de bâtir, c’est un problème. C’est ça qu’on appelle urbanisation sauvage », explique Nicolas Patience Basabose, architecte et urbaniste. Sa firme est présente à Kinshasa, à Johannesburg et à Singapour.Au début de cette année, l’hôtel de ville a procédé à la démolition de certaines habitations dans les quartiers populaires. Une décision jugée nécessaire, mais critiquée pour son manque d'application équitable, selon Nicolas Patience Basabose. « C’était nécessaire. Il faut continuer à le faire, mais malheureusement ce sont des opérations politisées. Certaines zones ne sont pas touchées parce que les autorités y vivent. »À cette problématique s'ajoute la pression démographique. Avec environ 2,6 millions d'habitants en 1984, la ville a vu sa population passer à près de 20 millions d’âmes aujourd’hui. Cependant, pour Nicolas Patience Basabose, ce n'est pas le véritable problème. « Il y a des villes qui grandissent. Tokyo et New York ont grandi avec le temps. Seulement, là-bas, la croissance s’est faite dans les règles avec un document qui définit ou va-t-on construire. Ici, on improvise souvent. »La superficie de la ville de Kinshasa est d'environ 10 000 kilomètres carrés, mais les activités se concentrent sur un rayon d’à peine 20%.À écouter aussiEst de la RDC: comment les combats affectent des centres de santé comme celui de Kanyaruchinya
11/19/20232 minutes, 18 seconds
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Côte d'Ivoire: la pression monte à Bouaké avant la CAN

Branle-bas de combat à Bouaké avant la CAN. Les hôtels se préparent à recevoir les supporters, sans pour autant réussir à anticiper leur affluence. Les gérants de maquis sont appelés à assister à des réunions publiques concernant l’hygiène et la mise en place de nouvelles taxes. La cité CAN à Bouaké, construite spécialement pour la coupe d’Afrique, ne satisfait les délégations des équipes du groupe D. Des flammes dansent sous les écailles d’une dizaine de poissons piqués. Nous sommes dans le quartier « poulet chaud », au centre de Bouaké. Renommé ainsi pour ses multiples restaurants de plein air. Un quartier où, à coup sûr, les supporters venus pour la CAN iront s’enjailler. Par conséquent, les autorités surveillent les commerçants en amont de la compétition, raconte Félix Sibabi, gérant du Tontonwa.« On se sent mis sous une pression trop forte, j'ai déjà participé à trois réunions. Notre secteur est sous contrôle des différents ministères de l’État, donc on nous dit d’être en règle, il faut être une bonne visibilité pour l’État. Et si tu n’es pas dans les normes, tu vas devoir fermer, ça, c'est clair », déplore-t-il.Obligation de posséder un frigo pour conserver le poisson, et d’avoir un système d’évacuation des eaux usées, par exemple. Des règles que le Tontonwa observe déjà et accepte. Le gérant se dit davantage surpris par l’instauration d’une nouvelle taxe sur les consommations.« La CAN s’approche, mais il y a tout un tas de choses qui ne concernent pas directement la CAN, comme les impôts. On paie déjà des taxes aux impôts, impôts sur les taxes qu’on va délivrer aux clients. À chaque facture, tu devras prélever 100 francs pour l’État », explique Félix Sibabi.Problèmes logistiquesDans ce quartier, les vendeurs ambulants, non enregistrés, seront également priés de plier boutique.Autre point sensible, à deux mois de la compétition, l’accueil des équipes : l’Algérie a déjà annoncé son intention de ne pas résider dans la cité CAN, construite spécialement pour l’occasion, mais jugée trop petite et inadaptée. Les autres délégations, Burkina Faso, Angola et Mauritanie s’interrogent. Mais auront-elles le choix ? Bouaké comprend 240 hôtels et 3542 chambres disponibles, mais très peu ont la capacité de recevoir une délégation de 50 personnes. Et parmi ceux qui le pourraient, certains y rechignent, comme l’Hôtel Mon Afrik. « Logistiquement parlant, c’est aussi très compliqué de recevoir une équipe, bien que financièrement parlant, c'est plus avantageux. Mais pour un événement de cette ampleur, nous, on est plus intéressés de recevoir des supporters, des gens qui viennent voir les matchs », précise Marushka Prochazka, la directrice de l'hôtel.À Bouaké, un nouvel hôtel de 40 chambres est en construction, tandis que l’Hôtel du Stade, en pleine réfection, devrait accueillir l’équipe d’Algérie. Ailleurs, comme ici à l’Hôtel de l’Art, on s’active pour finaliser les travaux à temps.À lire aussiÉliminatoires Mondial 2026: La Côte d’Ivoire, le Cameroun, la Tunisie et le Mali tiennent leur rang
11/18/20232 minutes, 24 seconds
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Tunisie: une exposition qui célèbre l'histoire du textile traditionnel

En Tunisie, l’exposition Hirafen propose une plongée dans l’artisanat tunisien, revisité par des artistes contemporains. Leurs travaux montrent l’importance patrimoniale, sociale, économique et environnementale de l’artisanat dans le pays. C’est à Denden, à l’ouest de Tunis, dans un complexe de l’Office national de l’artisanat tunisien, que l’on peut voir les œuvres de l’exposition financée par Talan, un groupe international de conseil spécialisé dans la transformation et l’innovation, grâce à la technologie. De notre correspondante à Tunis,Dans un espace de 2 000 mètres carrés, des installations d’art contemporain accueillent les visiteurs. Un coup de neuf apporté à cet ancien centre public de tissage et de textile, qui a aussi été un complexe de filature de laine puis une station de lavage de tapis. Lors d’une visite guidée, Nadia Jelassi, l’une des commissaires de l’exposition, raconte la rénovation des lieux : « Il n'y avait pas de toit d’abord ici, tout était crado parce que c’était un nid de pigeon. Donc, on a refait le toit, les fenêtres, toute l’étanchéité. »L'urgence de transmettre les savoir-faire traditionnelsCette restauration est en lien direct avec la thématique de l’exposition qui pousse des artistes contemporains à faire sortir de l’oubli l’artisanat tunisien, matière première de leurs travaux. Comme l’indique le titre, Hirafen, un néologisme entre « Hirafi », qui veut dire artisan en arabe, et « fan », le mot qui signifie l’art.À lire aussiTunisie: l'exposition «Regard sur la foi», une invitation à la toléranceAïcha Gorgi, galeriste, a chapeauté le projet : « Je vois que les artistes tunisiens ont une méconnaissance totale de leur propre culture, c’est-à-dire de leur propre artisanat. Donc, c’était intéressant de les confronter avec leur propre savoir-faire. L’artisan, je trouve aussi qu’il ne collabore pas. Il a collaboré pendant très longtemps avec des artistes et plus du tout aujourd’hui. Donc, il y a une espèce de perte d’un côté et de l’autre ».Une « question écologique »En Tunisie, le secteur de l’artisanat représente 5% du PIB et assure près de 400 000 emplois, mais ces savoir-faire ancestraux disparaissent peu à peu faute de transmission, selon Nadia Jelassi, l’une des commissaires de l’exposition : « Par exemple, pour tout ce qui est le travail de la Jebba, le plus jeune artisan de la Jebba a 76 ans. Donc, si on ne documente pas tout, ce sera problématique, donc j’espère que cette exposition va aider un petit peu à créer ce choc ».Dans l'une des deux salles sont suspendues des îlots tissés en alfa, une fibre végétale. L’œuvre représente l’archipel de Kerkennah, à l’est du pays. Pour Ludovic Delalande, un des commissaires, il faut aussi s’interroger sur l’après, car les matériaux utilisés par les artisans sont aujourd’hui menacés par le réchauffement climatique : « Ce qui est intéressant, c'est qu’il y a vraiment cette question écologique qui est très présente. Comment travailler, tisser, si on n'a plus les matières avec lesquelles on a toujours travaillé ». Près d’une vingtaine d’artistes de 13 nationalités différentes sont à découvrir à l’exposition jusqu’au mois de mars 2024.À écouter aussiMaître-bottier à Cotonou au Bénin
11/17/20232 minutes, 28 seconds
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Diasporas africaines à Dubaï [3/3]: Joe, le serial entrepreneur panafricain

À l’approche de la COP 28 qui se tient du 30 novembre au 12 décembre 2023 à Dubaï, RFI vous propose d’aller à la rencontre des diasporas africaines installées dans la capitale économique des Émirats arabes unis. Des petites mains aux cadres supérieurs en passant par les entrepreneurs : les Africains sont de plus en plus nombreux à vivre dans l’émirat. Troisième et dernier épisode de notre série : Joe, le serial entrepreneur panafricain. Entre deux rendez-vous, Joe nous rejoint pile à l’heure, une main dans la poche et l’autre tenant sa veste de costume par-dessus son épaule. Lunettes rondes, le bouc barbe bien taillé, ce Nigérian de 55 ans aime se définir comme un serial entrepreneur : « J’ai grandi au Nigeria. J’ai passé une grande partie de ma jeunesse là-bas. Je viens d’une famille plutôt aisée. Ma mère était militaire. Elle a quitté l’armée comme capitaine dans les années 1970. Mon père était comptable. Ils ont tous les deux commencé plus tard leur business dans lesquels j’ai été impliqué très jeune. »Sa mère a en effet ouvert une boulangerie. Son père lui a créé sa propre entreprise automobile. C’est là que Joe, encore étudiant, a vécu sa première expérience de directeur général. Il a ensuite créé ses propres affaires au Nigeria, notamment dans le secteur des télécoms.À lire aussiDiasporas africaines à Dubaï [2/3]: Mohamed et le défi de l’identitéUne communauté d'entrepreneursAprès plusieurs succès entrepreneuriaux, il a décidé de s’installer à Dubaï : « Quand je suis venu ici en 2013, c’est amusant, je suis venu pour presque partir à la retraite. J’ai joué au golf dans tous les émirats pendant six mois. Mais je me suis vite ennuyé, donc j’ai commencé à chercher quelque chose à faire. J’ai eu de la chance, grâce à mon ADN d’entrepreneur, j’ai lancé une affaire dans l’immobilier que j’ai géré pendant quelques années. Après, un ami a lancé un restaurant, mais il a déménagé au Canada. J’ai donc décidé de le reprendre et c’est mon bébé depuis. On a créé une communauté fantastique pour les Africains. Avec ce restaurant, ils peuvent se sentir comme à la maison tout en vivant à l’étranger. »« Montrer l'exemple » à la prochaine génération Ce restaurant, situé en plein cœur de Dubaï, dans le quartier financier, propose une cuisine panafricaine. Au menu, des plats tanzaniens, kényans ou encore sénégalais. C’est une manière selon Joe de raconter l’histoire du continent, mais aussi d’inspirer les plus jeunes « Oh oui, ce qui est important pour nous, c’est l’héritage. On veut donner à la prochaine génération et montrer l’exemple. Les choses peuvent être réalisées de manière excellente. Ça peut leur donner l’audace de dire : oh, mon grand frère a fait ça, donc je peux le faire même mieux. Ici, il y a des Africains dans tous les domaines : de la finance aux institutions, dans l’industrie du pétrole. On a des professionnels très qualifiés qui viennent ici. »De plus en plus d’entrepreneurs africains s’installent à Dubaï. Cette ville est souvent perçue comme un eldorado malgré les conditions qui peuvent parfois être difficiles. Les échanges commerciaux entre l’émirat et le continent ne cessent d’ailleurs de croître.À lire aussiDiasporas africaines à Dubaï [1/3]: Julie, en quête «d’une meilleure vie»
11/16/20232 minutes, 13 seconds
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Diasporas africaines à Dubaï [2/3]: Mohamed et le défi de l’identité

À l’approche de la COP 28 qui se tient du 30 novembre au 12 décembre à Dubaï, RFI vous propose d’aller à la rencontre des diasporas africaines installées dans la capitale économique des Émirats arabes unis. Des petites mains aux cadres supérieurs en passant par les entrepreneurs : les Africains sont de plus en plus nombreux à vivre dans l’émirat. Aujourd’hui, le deuxième épisode de notre série : Mohamed et le défi de l’identité. C’est entouré de ses deux chatons blancs que Mohamed nous accueille dans son appartement. Avec sa voix rauque et sa carrure imposante, ce Soudanais de 39 ans surnommé « Beegee » s’est fait une petite renommée dans le milieu de l’évènementiel à Dubaï. Il raconte son parcours : « Je viens du Soudan, mais je suis né et j’ai grandi ici aux Émirats. À Sharjah plus précisément, et après, on a déménagé à Dubaï. Mon père est venu ici depuis le Soudan, mais avant ça il était à Beyrouth. À cause de la guerre civile, il a dû rentrer au pays puis trouver un travail ici aux Émirats en 1976. »« Comme un extraterrestre qui a perdu sa planète »Comme ses parents, nombreux sont les Soudanais à avoir migré à Dubaï dès les années 1970 pour fuir des « situations malheureuses », comme le dit Mohamed. Bien souvent, ils ont occupé des postes d’enseignant ou encore de médecin. La culture islamique commune, mais aussi la langue qu’ils partagent, ont facilité leur intégration. Mais pour leurs enfants, tout n’a pas été facile.En cause, le sentiment d’appartenance à un pays qui les a vu naître et grandir, mais auquel ils n’appartiennent pas non plus complètement. Mohamed connaît bien ce sentiment antinomique : « Disons que je me sens comme un extraterrestre qui a perdu sa planète. C’est ce que je dirais. Je n’appartiens pas vraiment à mon pays, le Soudan. Parce que là-bas, je suis comme un touriste. Et ici, je connais tout de A à Z, j’appartiens au pays, mais je ne suis pas Émirien. C’est un gros problème au Moyen-Orient. Même s’ils te traitent comme la famille, qu’ils prennent soin de toi, encore une fois, c’est une question d’identité. »Partagé entre son lieu de vie et son héritage culturelAux Émirats, obtenir la nationalité est un véritable casse-tête quasi impossible à résoudre. Sans ce passeport, son visa de résidence de trois ans pourrait très bien ne pas être renouvelé. Les parents de Mohamed l'ont donc toujours poussé vers ses racines soudanaises. Comme une bouée de sauvetage en cas de malheur : « Ma mère mettait toujours ce parfum, l’encens à la maison. Le vendredi, on mettait la musique soudanaise. On voyageait souvent au pays aussi. La nourriture, tout ça. C’est toujours ici dans mon sang. Je comprends ce que c’est le Soudan, je connais la culture. Je connais tout ça. L’identité est en moi. C’est dans mon sang, ma couleur de peau. Mais comme je te l’ai dit, la terre, c'est la terre. »Mohamed n’est pas retourné au Soudan depuis 2019. Ses plans de vacances ont été contrariés, d’abord par la crise sanitaire mondiale, puis par la guerre qui sévit dans le pays depuis le début d’année.À lire aussiDiasporas africaines à Dubaï [1/3]: Julie, en quête «d’une meilleure vie»
11/15/20232 minutes, 17 seconds
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Diasporas africaines à Dubaï [1/3]: Julie, en quête «d’une meilleure vie»

À l’approche de la COP 28 qui se tient du 30 novembre au 12 décembre 2023 à Dubaï, RFI vous propose d’aller à la rencontre des diasporas africaines installées dans la capitale économique des Émirats arabes unis. Des petites mains aux cadres supérieurs en passant par les entrepreneurs, les Africains sont de plus en plus nombreux à vivre dans l’émirat. Aujourd’hui, le premier épisode de notre série de portraits : Julie, en quête « d’une meilleure vie ». C’est lors de son seul jour de congé de la semaine que nous retrouvons Julie. Debout, les bras croisés, elle nous attend le long d’une route dans un quartier populaire de Dubaï.Julie est originaire de Kampala, la capitale ougandaise. Elle a 41 ans et explique les raisons de son départ : « Avant de quitter l’Ouganda, j’avais une petite pharmacie. Mais l’argent que je gagnais avec ce business, ce n’était pas assez pour subvenir aux besoins de membres de ma famille et éduquer mes bébés... »Des agences qui facilitent le départFace à cette situation, Julie a donc souhaité partir. Elle ne voulait pas que ses « bébés », comme elle le répète, aujourd’hui âgés de 15 et 17 ans, aient la même enfance que la sienne. Elle en a donc parlé à ses parents qui ont accepté sans avoir trop le choix. Dubaï s'est vite imposé comme la destination idéale : ni trop loin, ni trop cher. Et puis, après tout, environ 100 000 autres Ougandais vivent déjà ici, s'est-elle dit : « Je suis venue ici avec une agence. Le visa m’a été fourni, je n’ai pas eu à payer. Le billet d’avion aussi, je ne l’ai pas payé, car j’avais trouvé un employeur. Je travaillais comme nounou et je gagnais environ 250 euros par mois. Mais après deux ans, j’ai dû arrêter. Depuis, je travaille comme serveuse dans un café. Ma situation financière est meilleure maintenant. Parce que je gagne un peu moins de 800 euros. Tous les mois, je dépense environ 350 euros : avec le transport, le logement et l’alimentation. »Un « sacrifice » pour une « meilleure éducation »Depuis six ans dans cet émirat, ses dépenses se limitent au strict nécessaire. Tous les mois, Julie arrive à mettre de côté un peu moins de 400 euros. De l’argent qu’elle envoie systématiquement au pays pour sa famille : « Ils savent la situation par laquelle je passe. Maintenant, mes bébés sont avec ma mère. Mais la bonne chose, c’est que je peux me permettre de les mettre dans une bonne école. Je paye les frais de scolarité à temps. Je fais un sacrifice en travaillant pour eux, mais ils auront une meilleure éducation et ils pourront trouver un bon travail plutôt que de devoir venir ici. »En attendant, Julie rejoint quatre autres de ses compatriotes dans la petite chambre qu’elles occupent ensemble. C’est là que ces petites mains du pays passent la majeure partie de leur temps libre.À écouter aussiCanal de Suez / corne de l'Afrique : enjeux stratégiques majeurs
11/14/20232 minutes, 2 seconds
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Sénégal: la difficile réinsertion des migrants de retour d'exil

Au Sénégal, beaucoup de candidats à la migration reviennent au pays de manière forcée ou volontaire. Beaucoup ont honte de ce qu’ils voient comme un échec et ont du mal à se réinsérer, d’autant qu’ils se sont endettés pour partir. Les autorités sénégalaises ont créé des bureaux d’accueil pour leur venir en aide mais les financements sont pour l’instant insuffisants face au nombre de migrants de retour.
11/13/20232 minutes, 14 seconds
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Sénégal: après 10 ans de fermeture, une usine de textile se relance à Louga

Alors que le drame de l’immigration clandestine se poursuit, comment retenir les Sénégalais dans leur pays ? Il faut créer de l’emploi mais c’est loin d’être une tache à facile. À Louga, dans le nord du pays, le chômage explose et les jeunes regardent vers l’Europe. Une grosse usine de textile tente de se relancer après 10 ans de fermeture et d’embaucher, mais avec beaucoup d’obstacles. 
11/12/20232 minutes, 9 seconds
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La galère des Brazzavillois face aux coupures répétées d'électricité

Dans un communiqué, Énergie électrique du Congo (E2C), principale compagnie de fourniture de courant au Congo, a annoncé que jusqu’au 4 décembre prochain, les Brazzavillois devront faire face à des perturbations répétées d’approvisionnement en courant électrique. Raison avancée : les travaux de maintenance à la centrale électrique du Congo qui fournit à elle seule 70% de l’énergie. Les effets de ces désagréments se font déjà sentir chez ceux qui exercent les petits métiers. De notre correspondant à Brazzaville,Rond-point de la pâte d’oie au cœur de Brazzaville. En cette mi-journée, le soleil frappe fort. Les policiers qui régulent la circulation sont sur les nerfs. Les files de voitures sont longues. Faute de courant, aucun feu de signalisation ne marche. À plusieurs dizaines de mètres de là, en face de la direction des examens et concours, des jeunes étudiants sans emploi tiennent des machines à photocopier qui sont toutes à l’arrêt. Boris, 27 ans, qui ne dépend que de cette activité, est désemparé. « Nous devons avoir le courant en permanence. Donc, la situation actuelle ne nous arrange pas. Il serait mieux qu’ils (les fournisseurs) corrigent ces perturbations », se désole-t-il.Son voisin, assis et le dos contre le mur du stade Marchand, est aussi désabusé.« Sans courant, on ne peut pas vivre. Dans un pays comme le nôtre, on rencontre des situations pareilles, cela nous empêche de bien vivre », tempête-t-il.À lire aussiCongo-B : des villageois dans le noir malgré la présence du pétrole et du courantDes quartiers entiers sont plongés dans l’obscurité à la nuit tombée. Ce qui étonne les Brazzavillois, c’est le fait que les réparations à la centrale électrique du Congo, basée à Pointe-Noire et qui fournit plus de 480 mégawatts, interviennent chaque année ou presque. « C’est une question qu’on devait proprement poser au gouvernement. Je pense que cela ne peut pas s’expliquer. Comment ? C’est bizarre », rumine de colère un autre citoyen.La situation agace et inquiète tous les consommateurs. Certains décrivent leurs difficultés quotidiennes, presque les larmes aux yeux. « Je suis arrivé à la maison et j’ai demandé aux voisins. Ceux-ci m’ont fait comprendre qu’il y avait eu coupure depuis le matin : entre 8h et 9h. Je suis rentré chez moi à 20h. Et, jusqu’à 23h quand j’ai fermé l’œil, il n’y avait pas de courant. Donc, j’ai dormi dans le noir. Je ne sais pas à quel moment le courant s’est rétabli. C’est la merde. On vit le chaos. Autrement dit, c’est chaotique », déplore encore un citoyen.Cette situation chaotique, les Brazzavillois vont la vivre jusqu’au 4 décembre prochain, date annoncée pour le retour des choses à la normale.
11/11/20232 minutes, 7 seconds
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Centrafrique: une école sous paillote pour que les enfants de Ngougoua reprennent le chemin de l’école

En Centrafrique, la plupart des établissements scolaires publics de la capitale ont été pillés ou partiellement détruits durant les multiples crises militaro-politiques qui ont secoué le pays. C’est le cas de l’école mixte la fontaine de Ngougoua située à 17 km à l’est de Bangui. Cet établissement construit dans les années 2000 a été complètement détruit en 2020 par des hommes armés. Cette année, le chef du village et certains parents d’élèves ont décidé de construire une école sous paillote, ce qui a permis à certains élèves de reprendre leur scolarité après trois ans d’absence. Rolf Steve Domia-Leu De notre correspondant à Bangui, Au fond de la cour, un élève fait raisonner avec un bâton une jante de voiture accrochée à un manguier. Cette cloche improvisée annonce la fin de la récréation pour les 150 élèves de l’école mixte de Ngougoua. Les pieds blanchis par la poussière, les visages colorés par la craie, les élèves de CP1 et CP2 sont rassemblés sous un même hangar. Ils n’ont pas eu besoin de franchir de porte puisqu’il n’y en a pas. Il n’y a pas de murs non plus, on aperçoit la brousse, des chiens, des coqs et des chèvres qui passent. Dans cette classe d’une vingtaine de mètres carrés, la toiture en paille est maintenue par des morceaux de bois fixés par des fils d’écorce.Assise à même le sol, Sephora 10 ans, rêve de devenir médecin. « J’étais en classe de CP1 lorsque mon école a été détruite par des hommes armés. L’année qui a suivi, mon père n’a pas voulu m’inscrire parce que l’école la plus proche se trouvait à 10 km. J’ai perdu trois ans à la maison. Je remercie les personnes qui nous ont construit ce hangar même si les conditions sont difficiles », raconte-t-elle.À lire aussiRCA: des petits Centrafricains privés d'école par la guerreCet établissement est tenu par Gladys Ndabalé, une jeune femme dont c’est la première expérience dans l’enseignement. À peine a-t-elle quitté les bancs de l’école de formation qu’elle retrouve un autre banc, cette fois sous un hangar : « Les enfants ont la volonté d’étudier, mais ils avaient perdu trois années sans étudier. C’est difficile pour eux d’avoir un bon niveau après cette longue rupture. Je suis obligée de leur dispenser les cours en langue nationale pour faciliter la compréhension. Je regroupe les élèves de CPI et CP2 sous cette paillote ».À midi, le cours s’achève. Dehors, les parents d’élèves réunis autour d’un tas de briques attendent leurs enfants. Simon est venu chercher sa fille : « Il n’y a pas de tables, pas de bancs dans cette école. Le hangar menace de s’écrouler à tout moment. Les élèves de CP1 et CP2 étudient sous le même hangar. Ils n’ont pas de tableau. Quand il pleut, les enseignants sont obligés de les libérer. Les serpents et d’autres reptiles sont partout dans la brousse. L’éducation doit être la priorité du gouvernement ».Malgré l’insécurité, la peur et les incertitudes sur la réalisation des programmes scolaires, les 150 élèves de l’école mixte de Ngougoua ont soif d’étudier, car ils sont convaincus que l’école représente l’avenir.
11/10/20232 minutes, 12 seconds
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Madagascar: la crise de la vanille plombe l’économie de l’ile [5/5]

À six jours du scrutin présidentiel, l’effondrement des prix de la vanille a laissé des traces dans le nord de l’île. Toute la région de la Sava est affectée et en particulier la ville de Sambava, centre de l’activité de la vanille. Les autorités d’Antananarivo auraient aggravé les effets de la surproduction avec la récente réforme du secteur sur les prix et les exportations.
11/9/20232 minutes, 22 seconds
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Madagascar: la Céni aux commandes de la plateforme d'alerte participative I-Report

Dans la bataille pour la présidentielle malgache – tendue et inédite du fait du refus de la plupart des 13 candidats à participer à cette campagne –, la société civile et ses observateurs, plus que jamais, peuvent jouer un rôle de garde-fou. En observant, en reportant et en dénonçant les cas de fraudes et d’irrégularités authentifiés, les différentes organisations assermentées ont un vrai rôle à jouer dans la crédibilité du scrutin. Plusieurs mécanismes ont été mis en place pour faciliter la surveillance et la remontée des informations comme la plateforme « I-Report », un « système d'alerte et de réponse précoce » déployé pour le suivi des élections de 2023 et de 2024 sur la Grande île (présidentielle, communales et législatives) et financé par le PNUD. De notre correspondante à Antananarivo,Au bout du téléphone, un membre de l’observatoire des élections Safidy signale un nouvel incident qui est immédiatement enregistré sur la base de données de l’organisation. Mais depuis dix jours, explique Diamondra Andrimbolarisoa, responsable juridique de l’observatoire, les opérateurs reportent également ces manquements sur une seconde plateforme, appelée I-Report. « Certes, ça peut faire doublon, mais ça ne nous dérange pas de reporter deux fois les signalements, si c’est un moyen pour nous de faire savoir à la Céni en temps réel qu’il existe des irrégularités partout à Madagascar », souligne Diamondra Andrimbolarisoa.Car c’est bien la Commission électorale nationale indépendante pour la transition (Céni), souvent décriée ces derniers mois pour son manque d’impartialité par l’opposition et des organisations non gouvernementales, qui s’est vu attribuer le pilotage de la plateforme par le PNUD. Dans d’autres pays, c’est généralement à la société civile qu’est confié ce rôle. « Non, ce n’est pas paradoxal », explique Tianahanantsoa Rastimandresy, la directrice de la communication, de l’éducation et de la sensibilisation électorale de la Céni.« À travers cette plateforme, nous voulons montrer que nous collaborons avec tous les acteurs pour pouvoir apporter des réponses rapides à chaque incident. L’historique est non effaçable, et chaque incident rapporté est visible par les organisations de la société civile partenaires (Safidy, KMF-CNOE, CNIDH). Nous voulons cette transparence-là pour rassurer l’opinion publique sur ce qu’on fait vraiment », insiste Tianahanantsoa Rastimandresy.À écouter aussiMadagascar: au marché aux zébus d’Antsirabe, les éleveurs promettent un «vote de détresse»La Céni obligée de traiter ces signalementsLa loi impose en effet à la Céni de traiter ces signalements et de saisir les juridictions compétentes en cas d’irrégularités constatées. Au siège de l’organe électoral, dix analystes vérifient et recoupent les informations. L'un d'eux explique la procédure si une irrégularité est avérée :« C’est là que nous décidons d’agir soit directement, soit d’appeler les institutions concernées, parfois les forces de l’ordre ou parfois des sociétés civiles également sur le terrain pour rectifier le tir. C’est le secrétariat exécutif qui décide d’y apporter une réponse, ainsi que le bureau permanent. »Des réponses qui seront évidemment scrutées à la loupe, prévient la société civile. « Et nous, notre rôle en tant qu’observateurs, ce sera aussi de publier un rapport à l’issue des élections qui constatera si oui ou non les responsabilités de chacun ont été prises et si la loi a bien été respectée », explique-t-on.À écouter aussiMadagascar: à Antsirabe, un espace pour sortir les femmes de la précaritéLa Céni plaide pour des signalements dans un cadre réglementéLa Céni semble donc vouloir montrer patte blanche, à une semaine du premier tour. Face aux violences commises par les forces de l’ordre mercredi 8 novembre et samedi lors des manifestations, la Commission regrette cependant que les signalements se fassent essentiellement sur Facebook et encourage donc les organisations de la société civile partenaires à enregistrer ces infractions sur « I-Report » pour que des réponses soient apportées. Et des sanctions soient prises, si faute il y a eu.La Céni affirme également vouloir élargir l’accès à sa plateforme à d’autres organisations, « habituées à faire les signalements sur les réseaux sociaux », afin que la remontée d’information « se fasse dans un cadre réglementé pour que nous puissions réagir vite et de manière adéquate ».À écouter aussiMadagascar: à Antananarivo, la quête des besoins primaires éclipse la campagne présidentielle
11/8/20232 minutes, 24 seconds
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Madagascar: au marché aux zébus d’Antsirabe, les éleveurs promettent un «vote de détresse» [3/5]

À Madagascar, un vent de colère souffle sur le marché aux zébus d’Ivohitra à Antsirabe. Le climat des affaires n’est pas bon pour les éleveurs de bovins… Conséquence de l’inflation : il est de moins en moins intéressant de vendre, et de plus en plus difficile d’acheter une bête. Loin de bouder l’élection présidentielle, ces paysans promettent de se faire entendre le 16 novembre. De notre correspondante à Antananarivo,À l’entrée du marché, 200 bêtes agglutinées : des zébus, reconnaissables à leurs cornes dressées et leurs bosses, mais aussi des taureaux, des vaches et même des porcs. Peu importe l’animal, ici, la question de la hausse des prix, fait consensus entre acheteurs et vendeurs.Edmond, entouré de ses 33 bêtes, possède l’un des plus gros troupeaux du marché. « Le plus gros zébu là-bas coûte 1 700 000 ariarys. Avant, c'était entre un million et 1,2 million d'ariarys. Le coût de la vie a augmenté, c’est pareil pour le prix de bovin. Alors les vendeurs, comme moi, réalisent parfois un léger bénéfice. Mais malheureusement, cela pénalise vraiment les acheteurs, qui souvent sont obligés d’y renoncer », indique Edmond.Quelques mètres plus loin, impossible de louper la silhouette de Janson. Le tee-shirt orange vif de ce vendeur, à l’effigie du président sortant attire l’œil. Mais il ne s'agit en rien d'un tee-shirt d'adhésion, assure-t-il. « Oh non. En vérité, ce tee-shirt ne m'oblige en rien à voter pour Rajoelina, chacun son choix. Le mien, c'est un de mes proches vivant en ville qui me l'a donné après sa distribution gratuite », dit-il.À lire aussiMadagascar: à Antananarivo, la quête des besoins primaires éclipse la campagne présidentielle« On exploite les éleveurs »Pourtant, Janson est loin de se détourner de l’élection présidentielle à venir. Vu la flambée du prix des aliments de base pour ses bêtes, l’insécurité dans les campagnes, il promet un vote de colère : « L'élevage souffre actuellement, la terre est devenue sèche, on n’a presque pas d’eau pour arroser le fourrage ! Le gouvernement ne fait rien pour les éleveurs, au contraire, on les exploite. Vous voyez, par exemple, le carnet du bovin, on doit le changer chaque année en payant 12 000 à 15 000 ariarys. Un carnet dure normalement cinq ans ! », s'exclame-t-il.Martial, lui, slalome avec prudence entre chaque petits groupes, suivi de près par ses bêtes. Le regard inquiet de celui qui n’a pas vraiment l’habitude du marché. « Moi, je débute toute juste dans le métier. Alors ce que j’attends du prochain président, c’est que le gouvernement m’aide à être égal aux autres éleveurs, pour devenir plus professionnel. Ce qui est sûr, j’irai voter, on a ce devoir en tant que citoyen », explique Martial.Au contraire de Martial, de nombreux éleveurs ont dû abandonner leur bétail, frappés de plein fouet par les tensions politiques de 2009, 2018, puis récemment le Covid. Ceux qui restent espèrent aujourd’hui un soutien à la hauteur de leur poids : à Madagascar, les éleveurs bovins représentent plus d’un tiers des ménages.À lire aussiMadagascar: à Antsirabe, un espace pour sortir les femmes de la précarité
11/7/20232 minutes, 27 seconds
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Madagascar: à Antsirabe, un espace pour sortir les femmes de la précarité [2/5]

« Des emplois décents pour tous » et en particulier pour les femmes. C’est le cap fixé par le président sortant Andry Rajoelina dans le Plan émergence Madagascar, document stratégique adopté sous son mandat pour le développement du pays. Mais les avancées sont timides. Bas salaires, sous-emploi, chômage déguisé… Les femmes restent la catégorie la plus touchée par la précarité. Alors comment s’en sortir ? À Antsirabe, la capitale agro-industrielle du pays, l’association Mazava offre à ces femmes un espace de soutien moral et du travail. De notre correspondante à Antananarivo,Un salon de coiffure à l’entrée, une laverie, un poulailler au fond de la cour… Ces espaces abrités par l’association Mazava sont tous dédiés à employer des femmes en difficulté quelques heures par semaine. Marie-Abeline, elle, tisse un panier en raphia, vendu ensuite par l’association. Elle ne quitte pas son crochet des yeux.« Si vous êtes rapides, vous pouvez vous en sortir. Par exemple, ce sac, je le termine en quatre ou cinq jours. Je le vendrai 35 000 ariarys. Je tricote dès que j’ai un temps libre après les tâches ménagères. Je le fais pour ne pas rester dans l’oisiveté et pour renforcer le revenu de mon mari », explique Marie-Abeline.Dans ce quartier, 95 % des femmes seraient sous-employées. Pas assez d’heures de travail pour un revenu décent. Résultat, elles restent au foyer, et là souvent exposées à la violence. En parler, briser le tabou pour s’en sortir, c’est aussi l’un des objectifs de l’association.« Les femmes qui restent au foyer, c’est ça le fond du problème », pointe Sahondraniaina, présidente de l’association Mazava. « Les violences se créent automatiquement quand le couple est dans une impasse économique. Il y a des paroles blessantes du mari et certaines femmes ne supportent plus les violences conjugales, elles préfèrent s’enivrer et deviennent alcooliques. Elles finissent par perdre le contrôle. »À écouter aussiMadagascar: à Antananarivo, la quête des besoins primaires éclipse la campagne présidentielle« C’est le minimum pour survivre »Fandresena, 22 ans, est l’une des plus jeunes du groupe cet après-midi. Ce qu’elle a appris ici ? « Rendre belles » les femmes en les coiffant, résume-t-elle fièrement, en entrant dans son local.« Voici mon petit salon », nous indique Fandresena. « Cela ne rapporte pas beaucoup parce qu’on est à la campagne, n’y a pas beaucoup de gens qui viennent. Ça m’aide juste à gagner pour la nourriture comme ça, mais à part, d’autres activités, je ne peux pas y faire, c’est juste le minimum pour survivre. Quand j’ai eu mon bac, j’ai eu un peu de difficultés à continuer mes études, donc j’ai intégré l’association. »Avec 10 000 ariarys par jour environ, son activité complète pour l’instant le revenu de son mari, laboureur. Mais Fandresena voit plus grand pour l’avenir. « Si c’est possible, j’aimerais bien faire un peu plus que ça, peut-être aller dans les villes pour y faire ma petite entreprise », imagine-t-elle.Des projets que la majorité des femmes rencontrées cet après-midi disent n’avoir jamais osé envisager. Selon une enquête d’Afrobaromètre, deux tiers des Malgaches estiment que les hommes devraient être prioritaires à l’emploi lorsque celui-ci se fait rare.
11/6/20232 minutes, 17 seconds
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Madagascar: à Antananarivo, la quête des besoins primaires éclipse la campagne présidentielle [1/5]

À Antananarivo, la nuit est devenue synonyme de quête d’eau. Une quête qui met les nerfs des habitants à rude épreuve, déjà exténués par les difficultés quotidiennes. Car si la saison des pluies a bien démarré, l’eau, elle, ne coule toujours pas dans les robinets. Aussi, pour les plus démunis, l’élection présidentielle s’annonce comme un événement banal tant la satisfaction des besoins vitaux occupe déjà pleinement le quotidien. De notre correspondante à Antananarivo,« Là, il est 2h50. On est une vingtaine à faire la queue. 2, 4, 6, 9... tous [ces bidons] sont à moi. Il reste une cinquantaine de bidons avant que je puisse remplir mon 3e bidon. » Voilà deux ans désormais que Jacqueline et ses voisins d’infortune du quartier d’Andraisoro passent leur nuit devant la borne fontaine.« On en souffre, on en souffre, parce qu’on attend depuis 20h. Des fois, l’eau n’arrive qu’à minuit et on ne peut remplir qu’un bidon par personne. Et des fois il n’y a rien, alors qu’on veille jusqu’au petit matin ! », s'exclame Jacqueline. « Je suis épuisée... Je ne peux pas récupérer parce qu’en journée, je dois vendre mes poissons séchés au marché pour trouver ensuite de quoi manger. Avant, l’eau coulait régulièrement la nuit, mais là, c’est devenu invivable depuis un an. »Incertitude permanente quant à l’accès à l’eau, manque de sommeil, sensation que tout va de mal en pis. Un cocktail idéal pour que chaque soir, des disputes éclatent entre habitants. « Ce n'est même pas rempli à ras bord ! Et tu arrêtes de remplir ? », demande Jacqueline en interpellant le gardien de la borne. « Si, c’est rempli ! », répond-t-il. « Ne rentre pas dans ce jeu, parce que moi, j’observe ! Tu crois que je ne te vois pas ? », s'emporte Jacqueline.Alors, quand on questionne Jacqueline sur l’élection imminente, la réponse est cinglante : « Je n’ai pas le temps de penser à autre chose. La propagande, les manifestations, tout ça, c’est pas ma priorité. Parce que je suis déjà tellement fatiguée de me battre au quotidien, pour ma survie ... »« Nous, les petits, on nous ignore »A un kilomètre de là, dans le quartier de Nanisana, dans la nuit noire et sous une pluie battante, une ombre frêle s’active. Célestine, porteuse d’eau, empile les bidons qu'elle vient de récupérer sur le palier de porte de ses clients, devant une fontaine où aucune goutte ne coule encore. « Le 16 novembre, oui, je sais qu’il y a l’élection. Mais je ne sais pas qui sont les candidats », explique Célestine, qui ajoute : « Je suis trop occupée à trouver de l’argent pour nourrir ma famille. Je n’ai pas le temps de me renseigner sur eux... »À l’aube, à côté d’une autre file de bidons jaunes vides, madame Perle a installé son maigre étal de légumes sous un parasol flambant neuf, un don de l’un des candidats.« Je vends rarement ma marchandise ces temps-ci. Ce n’est plus comme avant. Tout a augmenté, les gens sont pauvres. Mon bénéfice journalier est descendu à 5 000 ariarys, alors qu’on est 10 à la maison... » déplore madame Perle. « Les politiciens ? Ils ne pensent qu’à conserver leur chaise. Et nous, les petits, on nous ignore. Alors, le parasol n’a rien à voir avec tout ça. Si j’en ai un, ça ne veut pas dire que je soutiens qui que ce soit. Je suis vendeuse : j’ai besoin d’un parasol. On me l’a donné. Je le prends. »Jamais une campagne présidentielle n’aura été aussi éloignée des préoccupations des habitants de la capitale.
11/5/20232 minutes, 27 seconds
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Tunisie: l'Envirofest, un festival pour sensibiliser à la cause environnementale

En Tunisie, depuis six ans, un festival de cinéma environnemental fait sa tournée dans différentes villes de Tunisie pour sensibiliser les enfants aux enjeux du réchauffement climatique et à un comportement éco-responsable. Le pays est en stress hydrique, fait face à des périodes de sécheresse de plus en plus longues et il est le 13ᵉ producteur de produits plastiques en Méditerranée avec un milliard de sacs plastiques produits par an, dont 80 % ne sont pas recyclés, selon des chiffres du Fonds mondial pour la nature. Autant de problématique que le festival Envirofest essaye d’aborder de manière cinématographique et ludique. De notre correspondante à Tunis, Dans le jardin du parc Essaadaa à la Marsa, en banlieue nord de Tunis, parents et enfants jouent à tester leurs connaissances sur les déchets les plus polluants. Mayssa Chabouh, 31 ans, est responsable qualité et environnement dans une entreprise, elle est venue avec ses deux enfants.« Je veux que mes enfants s’habituent à faire des actions qui protègent l’environnement », explique-t-elle. Pour Mayssa Chabouh, la Tunisie manque en sensibilisation. « Je pense que ça manque beaucoup, les gens ne sont pas encore conscients. Par exemple, je travaille dans le domaine de l’environnement dans mon entreprise, ils n'arrêtent pas de me dire : "mais qu’est-ce que tu es en train de faire ?" »Regrouper les militantsC’est pour sensibiliser petits et grands qu’Hisham Ben Khamsa a créé un village environnemental où sont installés des ateliers ludiques et des artisans écologiques. Il fait partie intégrante de Envirofest, un festival cinématographique dédié à l’environnement.« Le village est venu après, ce n’était pas mon idée première, il s’est imposé d’une certaine façon parce que j’ai découvert qu’il y avait pas mal de gens qui militaient, mais qui militaient chacun dans son coin, individuellement », relate Hisham Ben Khamsa. « L’idée de les regrouper pouvait être une bonne idée par rapport au public, mais aussi par rapport à eux-mêmes, pour qu’ils se rencontrent, qu’ils se croisent, qu’ils se reconnaissent. »Festival itinérantIl a choisi de faire un festival itinérant entre les mois de juin et novembre, avec une programmation de films internationaux. « On tourne et on va à l’intérieur du pays », ajoute-t-il. « Entre autres, j’ai choisi d’être dans le bassin minier, je vais à Gabès aussi et à Sfax parce que ce sont des zones extrêmement touchées par la pollution. »Ce jour-là, le film projeté à la fin de la journée est Le Château dans le ciel, du cinéaste japonais Hayao Miyazaki. « C’est une ville qui est entièrement engloutie par la fumée des cheminées et commandée par un inquisiteur qui a décidé que tout le monde devait être la tête baissée et ne pas penser à voir les étoiles. » Un film à la fois sur l’environnement et sur la politique. « S’il y a des messages pour les enfants, il y a des messages pour les adultes aussi », souligne Hisham Ben Khamsa.Une projection sous les étoiles de Tunis, en attendant les autres éditions dans d’autres villes du pays.
11/4/20232 minutes, 25 seconds
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Le slam, genre artistique incontournable à Abidjan

Au croisement de la poésie et de l’art de la scène, le slam s’est imposé en Côte d’Ivoire comme un genre artistique incontournable, à la popularité solide. Pour comprendre ce succès, RFI a tendu son micro aux slameurs d’Abidjan, sur scène et en dehors. De notre correspondante à Abidjan,Le public du slam est un public fidèle. Il donne la réplique aux artistes, connaît leurs gimmicks et leurs mélodies. Car le slam, c’est de la poésie, mais pas seulement : des interactions avec le public, de l’improvisation parfois, des textes murmurés, scandés ou rapés, une mise en scène, de la musique…Le slam connaît à Abidjan un succès jamais démenti depuis le début des années 2000, et s’est progressivement professionnalisé. « Ça évolue bien ! Nous, on a commencé avec deux spectateurs, et aujourd’hui, on arrive à faire 600 places, 800 places, 1500 places, fait valoir le doyen Bee Joe, slameur depuis 1990 et président de la Fédération ivoirienne de slam. Et quand on va en compétition internationale, on se classe parmi les meilleurs. On a été 3ᵉ au niveau mondial, demi-finalistes cette année. Je pense que c’est dû à notre diversité. D’un slameur à un autre, le champ est large. Ici, il y a du rythme, de l’impact, de la percussion. »À lire aussiAutorité orale: le slam de microMega« Ça slame du tonnerre ! »Le secret de son succès ? Parvenir à se réinventer sans cesse. Ainsi, ce milieu très masculin a vu naître ces dernières années une nouvelle étoile, une jeune femme, Amee, qui porte sur scène des textes politiques et féministes. « C’était rare à l’époque de voir une femme prendre la parole sur cet angle. Et puis, le fait que j’ai des textes très engagés, qui parlent de la condition de la femme, c’est juste le reflet de ce que j’ai vécu, de ce à quoi j’ai assisté au quotidien. C’est assez masculin, mais étrangement, c’est l’un des milieux où les femmes sont le plus respectées, le plus à leur aise », explique-t-elle.Le collectif Au Nom du Slam, présidé par Amee, organise tous les ans le festival Babi Slam, qui attire des artistes internationaux. Cette année, pour la 7ᵉ édition, une jeune Française, Chloé M, était invitée à participer au jury : « À partir du moment où on m’a dit “Tu vas aller slamer en Côte d’Ivoire”, j’ai dit oui dans la seconde ! Je trouve ça génial, parce qu’en France, le slam n’est pas forcément très développé, tout le monde ne connait pas encore. Je me disais déjà qu’il fallait faire connaître le slam en France, et je ne me rendais pas compte que dans plein d’autres pays, il y avait des slameurs ! Notamment les pays d’Afrique, ça slame du tonnerre en fait ! »La scène en Côte d'Ivoire compte près de 200 artistes répertoriés par la Fédération. Auquel s’ajoutent des centaines de slameurs amateurs et de passionnés.À lire aussiRFI Musique: Les reflets intimes de Grand Corps Malade
11/3/20232 minutes, 38 seconds
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Le REJI, nouveau réseau du journalisme d'investigation sur le continent africain

Le Réseau Dupont-Verlon pour le journalisme d’investigation est une association créée mercredi 1ᵉʳ novembre 2023 par les lauréats de la Bourse Ghislaine Dupont et Claude Verlon. Porté par la quête incessante de l’information, le REJI accueille les 18 lauréats et une centaine de stagiaires et ouvre sa porte aux professionnels des médias qui travaillent à la recherche de la vérité en Afrique et dans le monde. C’est un moment historique, chargé en émotion. La salle de conférence de l’Institut supérieur de technologie de Côte d'Ivoire accueille ce mercredi 1ᵉʳ novembre 2023 les lauréats, les stagiaires, les proches de Ghislaine Dupont et Claude Verlon, des professionnels des médias et une équipe de France Médias Monde. Et pour commencer, une minute de silence est observée.C’est un instant émouvant et pour certains, difficile de retenir ses larmes. Toute la journée, témoignages et partages d’expériences vont se succéder. Lauréate de la bourse en 2016 dans la catégorie journaliste, Cécile Goudou, robe en pagne multicolore et cheveux courts, est la première présidente du REJI : « Tous les lauréats de la bourse qui ont adhéré au REJI sont membres, tous les stagiaires sont membres. Même ceux qui n'ont pas été stagiaires, les journalistes et techniciens qui n'ont pas été stagiaires de la bourse peuvent adhérer au REJI. C'est ouvert à tous les professionnels qui ont simplement envie de partager et d'informer. »Des sujets qui touchent la population africaineLes 18 lauréats, originaires de 10 pays africains francophones, sont unis autour d’une devise : se former, former et informer. Pour valoriser leurs productions, ils ont créé une plateforme en ligne baptisée Ond'actives. « Nous nous sommes dotés de cette plateforme-là afin de pouvoir atteindre un grand nombre de publics, explique Marina Djava, lauréate de l’édition 2018. L'investigation est le cœur même de cette association. Nous voulons mettre en lumière certains sujets qui touchent particulièrement la population africaine, qui sont importants sur le continent, mais également pour le monde entier. »Le REJI s’investit aussi pour la liberté de la presse et la lutte contre les infox sur le continent. Toutes les productions de ce réseau sont disponibles en ligne sur Ond’actives. « Ond'actives est une plate-forme sur laquelle on a des podcasts, des éditos, tout ce que l'on fait dans la presse écrite, tout ce que l'on fait à la radio, développe Sidi Mohamed, lauréat 2014 dans la catégorie technicien de reportage. Mais aussi d'autres médias où nous menons des reportages, mais cela serait déposé sous forme de podcast. » Dix ans après la disparition de Ghislaine Dupont et Claude Verlon, le REJI est porteur d’espoir pour le continent. Le projet a obtenu le parrainage de Marie-Solange, la maman de Ghislaine Dupont.À lire aussiEn hommage à Ghislaine Dupont et Claude Verlon: «Journalisme en Afrique, la rançon du métier»
11/2/20232 minutes, 22 seconds
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L'Afrique à l'honneur du salon du livre d'Alger

La 26e édition du Salon international du livre d'Alger se poursuit. La plus grande manifestation culturelle du pays est marquée par une forte affluence. Le salon est une occasion de faire connaître de nouveaux auteurs et d'évoquer les difficultés de l'édition en Algérie et en Afrique.  À lire aussiAux origines de la littérature algérienne: cinq questions à Hervé Sanson
11/1/20232 minutes, 13 seconds
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Kenya: des victimes exigent des compensations après un incendie causé par l’armée britannique

Au Kenya, la visite du roi Charles III marquée par plusieurs controverses. Dont, celle autour de la présence d’un camp d’entrainement britannique dans la ville de Nanyuki, à 200 kms de Nairobi. Des soldats anglais viennent s’y entrainer avant d’être déployés à l’étranger. Mais leur présence est entachée par plusieurs scandales. Il y a notamment cet incendie déclenché en mars 2021 lors d’un entrainement dans la réserve privée de Lolldaiga. 4 800 hectares de terrain ont brûlé, avec des conséquences sur le mode de vie des communautés pastorales et agricoles vivant aux alentours. Depuis, elles se battent pour obtenir des dédommagements. De notre correspondante de retour de Nanyuki,Saituk Kaituto Kaparo vit près de la réserve de Lolldaiga. Cet éleveur masaï de 68 ans était aux premières loges lors de l’incendie de mars 2021. Il a tout fait pour tenter de sauver son bétail, mais sur ses 200 vaches, il ne lui en reste plus que 4. Il en garde un souvenir amer : « Le feu venait de cette colline juste derrière, on le voit, on vit à côté. Tout ici était recouvert par de la fumée, on ne pouvait rien voir. Les soldats britanniques avaient tous les équipements nécessaires, mais pour nous c’était différent, précise l’éleveur, on récupérait des branches et on essayait de combattre le feu avec. Quand ça devenait incontrôlable, on se mettait à courir ».Saituk dit ne presque plus voir aujourd’hui à cause de la fumée qui a abimé ses yeux. Il n’a pas les moyens de se payer les soins nécessaires. Il fait partie des 7 000 plaignants qui demandent une compensation aux autorités britanniques. Une compensation pour répondre aux problèmes médicaux et à la perte des récoltes et de bétail. L’affaire est entre les mains d’un comité de médiation, avec des représentants des deux pays. Mais le processus stagne, explique Saituk Kaituto Kaparo : « Ils doivent nous payer des dédommagements avant de reprendre leurs entrainements, la situation est très difficile pour beaucoup d’entre nous aujourd’hui, qui avons beaucoup perdu dans l’incendie. C’est particulièrement douloureux de voir les soldats, les responsables de l’incident, continuer à s’entrainer ici. »« Une stratégie tirée de l'époque coloniale »En 2002, Londres avait déjà versé plus de 4 millions de livres sterling, soit environ 5 millions d’euros, à plus de 200 familles masaï dont les proches avaient été blessés ou tués par des munitions abandonnées. Kelvin Kubai a grandi à Nanyuki, en côtoyant ces soldats. Ce jeune avocat défend pro-bono les victimes de l’incendie : « Leur stratégie est tirée de l’époque coloniale. On retarde le processus encore et encore et on espère que les victimes vont se fatiguer. Certains de ces soldats britanniques sont très jeunes, ils arrivent au Kenya avec des préjugés racistes, avec un complexe de supériorité, ils ne considèrent pas les locaux comme leurs égaux. On les retrouve dans des bagarres dans les bars du coin et finalement, ils sont protégés. »Les plaignants ont adressé une lettre ouverte au gouvernement britannique. Ils l’appellent, ainsi que le roi Charles III à, je cite, « cesser de traiter le Kenya comme un avant-poste colonial ». Le gouvernement britannique, de son côté, affirme que seule les terres de la réserve privée de Lolldaiga ont été affectées, et qu’une étude, financée par le gouvernement britannique, a conclu que l’incendie n’avait « pas eu d’impact significatif permanent sur la terre, l’eau ou l’air ».À lire aussiPour Charles III, «il ne peut pas y avoir d'excuse» aux abus coloniaux des Britanniques au Kenya
10/31/20232 minutes, 14 seconds
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Rwanda: des étudiants en médecine soudanais poursuivent leurs études à Kigali

Après le début du conflit le 15 avril dernier à Khartoum, ils ont dû fuir leur pays et mettre sur pause leurs études en médecine. Mais depuis presque deux mois, plus d’une centaine d’étudiants soudanais ont posé bagage au Rwanda, à Kigali, où un partenariat avec leur université leur permet de poursuivre leur apprentissage dans des hôpitaux de la capitale. De notre correspondante à Kigali,Dans l’une des salles de l’hôpital King Faisal, Mehaira Ahmed consulte les dossiers de ses patients. Après avoir quitté le Soudan au début du conflit pour rejoindre sa famille aux Émirats arabes unis, elle craignait de ne pas pouvoir poursuivre sa 4ᵉ année d'études en médecine.« Quand je suis arrivée aux Émirats, le problème de ce qui allait se passer ensuite se posait. Les transferts pour des étudiants en médecine sont presque impossibles. Heureusement pour nous, notre université a trouvé des solutions. »La solution, un partenariat avec l’université du Rwanda pour accueillir quelque 160 étudiants soudanais pendant les huit mois de leur année universitaire. Au programme : une immersion dans différents hôpitaux de Kigali la semaine et des cours en ligne le week-end. Dans son service, Mehaira participe activement aux activités de soins.« On fait les rondes dans les chambres, on enregistre les patients, puis il y a également des réunions, des séminaires, et l’enseignement au chevet du patient, donc on est assez chargé ! L’idée est qu’on passe un mois dans chaque spécialité. Nous avons déjà terminé la pédiatrie, et maintenant, on est en médecine interne. »« L'un des obstacles, c'est la barrière de la langue »Après plus d’un mois à Kigali, dans son appartement, Alfaisal Salah s’est rapidement habitué au fonctionnement des établissements rwandais. Assigné à l’hôpital militaire, le jeune homme de 23 ans se réjouit de la confiance accordée aux étudiants soudanais.« Au Rwanda, un étudiant en médecine est considéré comme un docteur et il est responsable de tout ce qu’il fait. Mais l’un des obstacles pour nous, c’est la barrière de la langue qui est l’une de nos plus grandes difficultés. Donc, nous essayons de demander de l’aide à un autre collègue, ou un étudiant rwandais pour qu’il traduise pour nous. »Pour le docteur Suzan Homeida, installée depuis trois ans à Kigali et membre du conseil d’administration de l’université de Sciences et de Technologie de Khartoum, difficile pour le moment de réfléchir à un retour rapide au Soudan.« Malheureusement notre campus est depuis le premier jour occupé par les miliciens. De ce que nous voyons en ce moment au Soudan, et la situation actuelle du pays, je ne pense pas que ces étudiants puissent revenir maintenant, alors nous espérons qu’ils vont continuer leur éducation jusqu’au jour où ils pourront rentrer en sécurité. »Des étudiants en dernière année sont également accueillis en Tanzanie. L’université soudanaise est désormais en contact avec différents pays afin de trouver des solutions pour les autres niveaux de formation.
10/30/20232 minutes, 19 seconds
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Tunisie: l'inquiétude des étudiants palestiniens, coupés de leurs familles à Gaza

En Tunisie, 519 étudiants palestiniens font leurs études dans le pays qui octroie le plus gros quota de ses bourses internationales pour ces derniers. Beaucoup viennent de Gaza et sont envoyés après leur baccalauréat poursuivre leurs études en Tunisie. Les formations médicales, paramédicales, mais aussi le journalisme sont parmi les formations très demandées. Avec la guerre, les bombardements continus sur Gaza et les annonces quotidiennes des pertes humaines et du nombre de blessés qui augmentent, beaucoup vivent dans la peur permanente de perdre leurs proches.  De notre correspondante à Tunis,Mohamed Abu Jabal et Mohamed Shafi discutent autour d’une boisson gazeuse dans le café adjacent à leur foyer universitaire de la Manouba, à l’ouest de Tunis. Les deux jeunes hommes étudient le journalisme depuis trois ans à Tunis, mais leur quotidien a été bouleversé depuis les bombardements sur Gaza après l’attaque du Hamas.Mohamed Abu Jabal raconte le quotidien de sa famille sur place : « Ma famille est partie rejoindre ma sœur à une douzaine de kilomètres de chez nous, car nous habitons dans le nord, la partie la plus bombardée, mais leur quotidien reste très dur », explique-t-il. « Ils n’ont pas d’eau ni d’électricité. Dès qu’ils sortent dehors, ils sont face à la destruction de la ville et aux martyrs de ceux qui ont été tués lors des bombardements. Il y a également un début de famine, car les ressources pour trouver à manger se font de plus en plus rares. Certains membres de ma famille font la queue près de cinq heures durant la journée pour trouver du pain et de quoi manger. »À lire aussiGuerre Israël-Hamas: au Chili, la communauté palestinienne entre colère et inquiétudeMohamed Shafi, lui, se réveille chaque jour sans pouvoir se concentrer pour aller en cours, inquiet du sort de sa famille.« On dit toujours que nous, en tant que Palestiniens, dès que la nuit tombe, on dort en se sentant coupable, car on pense à nos familles qui sont là-bas. Personnellement, je n’arrive plus à dormir depuis le début des bombardements, je dors seulement deux à trois heures par jour maximum. Et dès que je me réveille, mon premier geste, c'est d’aller sur mon téléphone pour essayer d’appeler ma famille que j’ai souvent du mal à joindre », raconte Mohamed Shafi.Une assistance psychologique mise en placeFace à l’ampleur de la guerre, le ministère de l’Enseignement supérieur à Tunis a pris des mesures d’exception pour les étudiants palestiniens, comme l’explique Malek Kochlef, directeur de la coopération internationale« L’assistance psychologique fait partie des mesures phares prises par le ministère, en particulier parce que nous avons eu un retour d’information du terrain sur des situations réellement dramatiques. Nous avons des étudiants qui ont perdu des membres de leur famille, proche ou éloignée suite aux bombardements, et beaucoup parmi les non-boursiers ont et auront des difficultés financières. »Le ministère a ouvert les foyers universitaires gratuitement pour les étudiants de Gaza, ne pouvant plus payer leur loyer et une extension de bourse au niveau Master a été proposée, face à l’incertitude d’un retour à Gaza ou même la possibilité de revoir un jour leurs proches.
10/29/20232 minutes, 20 seconds
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Le Ti-Î Festival, un événement culturel majeur de la scène centrafricaine

Dans le but de revaloriser les cultures centrafricaines des années 1980-1990 et promouvoir le vivre ensemble, l'icône de la musique centrafricaine Idylle Mamba a rassemblé ses compatriotes autour du Ti-Î Festival qui s'est tenu du 26 au 28 octobre pour une troisième édition.
10/28/20232 minutes, 20 seconds
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Boxe: sur les traces de Francis Ngannou dans son premier club parisien

La star du MMA Francis Ngannou passe de la discipline des arts martiaux mixtes à la boxe anglaise. Le Camerounais affronte ce 28 octobre un monument : le Britannique Tyson Fury, multiple champion du monde et considéré comme l’un des meilleurs boxeurs de l’histoire. Ce genre de combat, Francis Ngannou en a rêvé depuis le début de son ascension. Une trajectoire qui s’est accélérée au moment de son arrivée Paris il y a une dizaine d’années, notamment dans son club : le Kajyn.
10/27/20232 minutes, 15 seconds
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L'humour en Afrique de l'Ouest: «On rit des choses de la vie !»

Qu’est-ce qui fait rire l'Afrique de l'Ouest ? Peut-on rire de tout et surtout des mêmes choses d’un pays à l’autre ? Pendant trois jours, une quinzaine d’humoristes se sont frottés à ces questions lors d’une Masterclass organisée par le Dycoco Comedy Club ivoirien à Dakar.
10/26/20232 minutes, 18 seconds
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Madagascar: le quotidien des habitants d'Antananarivo perturbé par les grèves

Depuis plus d’un mois, Antananarivo vit au rythme des manifestations du « Collectif des 11 ». Mercredi 25 octobre, les candidats de l’opposition ont donné rendez-vous à leurs partisans à Anosizato, à l’ouest de la capitale. Le quartier a vécu quelques heures inhabituelles. De notre correspondante à Antananarivo,À l’entrée du quartier, habitants et commerçants sont suspendus aux va-et-vient des militants. Certains se réjouissent d’avoir aperçu les candidats à leur arrivée. Pourtant, cette effervescence n’est pas une bonne nouvelle pour Tsisimalahelo, vendeur de noix de kola et de pistache : « On n’a plus de quoi s’acheter à manger quand ils passent par là ! Parce qu’on n’arrive plus à vendre, à cause de la manifestation qui distrait les clients. Moi, vous savez, peu m’importe la politique, j’ai juste besoin de gagner mon pain. En temps normal, mon chiffre d’affaires c’est 70 000 ariary, mais aujourd’hui je n’ai vendu que pour 25 000 ariary ! »Devant la pharmacie d’Anosizato, les moteurs de bus et voitures grondent. Erick est le chef du personnel de l’officine. Il assiste aux embouteillages formés depuis ce matin, mais surtout, impuissant, à la fuite de sa clientèle : « Notre clientèle a beaucoup baissé. Les gens n’osent pas venir, ils ont peur des échauffourées, ils préfèrent aller dans d’autres pharmacies loin de la manifestation. Je comprends les revendications des candidats. Il n’empêche que c’est toujours le petit peuple qui paye alors que les leaders, eux, ont les moyens. »À écouter aussiAndry Rajoelina, président de Madagascar: «L'opposition essaye de manœuvrer pour qu'il n'y ait pas d'élection»Le long de la route empruntée par le collectif, certains ont tout de même profiter d’une affluence exceptionnelle pour ce quartier périphérique de la capitale. Hantavola, gérante d’une échoppe, a vendu près d’une soixantaine de bouteilles d’eau. « D’habitude, on peine même à vendre une ou deux bouteilles d’eau par jour. Aujourd’hui, ça a vraiment très bien marché, on a presque épuisé notre stock d’eau. En plus de ça, on a écoulé tout ce qui est jus de fruits... et même des glaces ! »Qu’ils aient été perdants ou gagnants, il ne s’agissait pour les habitants que d’une parenthèse de quelques heures. La société civile s’inquiète en revanche de conséquences à plus long terme pour la population. Ce jeudi, la plus grande plateforme syndicale de Madagascar a menacé de bloquer le pays si le président sortant et l’opposition ne parvenait pas à dialoguer.À lire aussiMadagascar: l’opposition exige un nouveau report de la présidentielle  
10/25/20232 minutes, 5 seconds
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En Guinée, les journalistes menacés: «Il pointe son fusil sur mon visage et dit: "Je vais te tuer"»

Lundi 16 octobre, en Guinée, une manifestation de journalistes a été violemment dispersée par les forces de sécurité. Les protestataires réclamaient la levée des restrictions d’accès au site d’informations Guinée Matin. Depuis la mi-août, il est en effet impossible de se connecter au journal en ligne. Lors de l’intervention des autorités, des journalistes ont été malmenés, y compris ceux qui étaient venus couvrir l’évènement. Ce n’est pas la première fois que cela arrive. Ces derniers mois, sur le terrain, les cas de journalistes pris à partie par les forces de sécurité se sont multipliés. Témoignage d’Abdoulrahmane Bah, correspondant de TV5 Monde en Guinée. Au mois de mai, il a été agressé par des militaires.
10/24/20232 minutes, 29 seconds
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Congo-Brazzaville: une exposition pour témoigner de la métamorphose du paysage urbain

La capitale de la République du Congo célèbre en ce mois d’octobre son 143e anniversaire. Pour célébrer cet événement, l’Institut français du Congo accueille une exposition de photographies qui montre l’évolution de l’architecture urbaine congolaise depuis 60 ans. À titre d’illustration, les plus hautes tours jumelles de Brazzaville ont été mises en service lundi 23 octobre par les autorités congolaises. De notre correspondant à Brazzaville,Hall de l’Institut français du Congo. Edwige, la trentenaire en tee-shirt et jean, baskets aux pieds, slalome entre les grands tableaux sur lesquels sont affichées les photographies. Elle est frappée par la façon dont la capitale s’est transformée en s’enrichissant de différents apports africains. « Il y a beaucoup d’immeubles qui ont poussé par-ci par-là. Il y a aussi l’architecture qui nous vient de la mixité avec l’Afrique de l’Ouest, parce qu’il y a beaucoup de commerçants ouest-africains installés ici. Brazzaville, c'est beaucoup de facettes. C’est un mixage de beaucoup de choses. Brazza est un ensemble. »Principal auteur des photographies de l’exposition, le photographe congolais, Lebon Chansard Ziavoula, alias Zed, est également d’avis que la ville bâtie sur la rive droite du majestueux fleuve Congo n’a cessé de se métamorphoser sur le plan architectural : « Au fil du temps, certains bâtiments ont subi des modifications, vu l’évolution de la société. »« Mixité architecturale »Les deux grandes tours jumelles de Brazzaville, par exemple, culminent à plus de 135 mètres de hauteur. Jean-Omer Ntadi, expert en patrimoine, a suivi l’évolution des constructions ces dernières années. « À partir des relations que nous avons établies avec certains pays, notamment la Chine et l’ex-URSS, nous avons eu de nouveaux bâtiments du genre : palais des congrès, l’Enam (École nationale d’administration et de magistrature).  En passant, il y a aussi la maternité mère et enfants, Blanche Gomes. Ce sont des courants architecturaux nouveaux », se réjouit-il.Jean-Omer Ntadi cite là pêle-mêle des édifices publics. Mais les particuliers ont fait également bouger les choses. « La tendance est de copier toutes les innovations qui font jour. Il se trouve qu’à un certain moment un courant était né : la tendance de faire des toits en pente, explique le spécialiste du patrimoine. Maintenant, nous sommes répartis vers un autre courant : les toits coniques. Il y a une espèce de cônes au milieu (des maisons). Généralement, ce sont deux ou quatre pentes qui se croisent au sommet. »Actuellement, dans les quartiers résidentiels de Brazzaville, les maisons à étages poussent comme des champignons, tandis que les nouvelles zones d’habitation connaissent une urbanisation anarchique. Le cadastre est presque dépassé.À lire aussiCongo-Brazzaville: l’urbanisation accélérée à l'origine de la crise du logement
10/23/20232 minutes, 22 seconds
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La Mauritanie organise son premier festival du film international à Nouakchott

La première édition du Festival International du Film de Nouakchott présidé par le célèbre réalisateur international mauritanien Abderrahman Lahi s'est tenu du 15 octobre au 17 octobre dans la capitale mauritanienne. Un évènement culturel plutôt rare dans la capitale. Au programme : 28 longs et courts métrages de réalisateurs venus d’une douzaine de pays dont celui d’un jeune réalisateur mauritanien prometteur : Abdoulaye Sall. La soirée a débuté à Nouakchott par la projection du court métrage jeune réalisateur mauritaniens, d’Abdoulaye Sall, accueilli par les applaudissements du public. Présenté au dernier festival de Cannes, son court métrage raconte entre autres les difficultés au quotidien d’un vendeur ambulant revenu travailler au pays pour nourrir sa famille. Une fiction quelque peu inspirée du vécu du cinéaste mauritanien d’origine peul : « C’est l’histoire d’amour entre un couple peul et aussi des jeunes qui partent et qui ont envie de rester…. C’est l’histoire de mon enfance, de mon quartier, toutes ces choses-là que j’essaie de retracer. En tant que réalisateur, j'ai aussi eu des doutes, rester ou partir ? »Une fierté et une consécration pour ce passionné qui a suivi une formation de monteur dans un prestigieux centre de post-production au Sénégal. L’occasion selon lui de promouvoir le cinéma mauritanien à l’international et de le développer davantage dans son pays : « J’ai compris une chose c’est que je pouvais rêver. Au départ, je me suis auto-produit. Avec des amis on a cherché des fonds et on a fait le film. On voit rarement des films mauritaniens et rarement des subventions. Il y a un gros travail à faire pour que le cinéma mauritanien soit représenté. »L’occasion aussi, selon Mohamed El Moustapha El Bane, président du Festival international du film de Nouakchott, d’encourager la formation de jeunes talents locaux.  Sur les 28 films projetés pendant le Festival 7 ont été réalisés lors d’ateliers spécialement mis en place pour l’occasion. « C’est nous qui avons organisé les formations pour les jeunes. À la fin du stage, ils ont réalisé sept films pour cette jeunesse des 7 moughataas de Nouakchott.  En Mauritanie il y a beaucoup de talents, il faut aider ces jeunes. Et le public de Nouakchott et nous, cinéastes, nous avons besoin du festival pour voir les films. »Le festival international du film de Nouakchott a été interrompue jusqu'à nouvel ordre pour deuil national dans le pays en hommage aux victimes de l'hôpital de Gaza. Il s’achèvera par la remise des prix des meilleurs courts et longs métrages internationaux. Mais aussi de ceux réalisés sur place au smartphone et lors des ateliers. 
10/22/20232 minutes, 6 seconds
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En Tunisie, une résistance culturelle pour la cause palestinienne

En Tunisie, les Journées cinématographiques de Carthage, le plus vieux festival de cinéma en Afrique, ont été annulées en solidarité avec la situation en Palestine. La Tunisie a pourtant toujours été un vivier culturel pour la cause palestinienne. Et jusqu’à aujourd’hui, les deux pays partagent une histoire culturelle très riche qui permet de résister, d’une autre manière. De notre correspondante à Tunis,C’est un concert où l’ambiance n’est pas forcément festive, mais plutôt commémorative. Des chansons autour de la cause palestinienne résonnent dans la salle de l’Opéra à la Cité de la Culture à Tunis, pour ce concert de soutien, vendredi 20 octobre, devant un public ému.Les bénéfices du concert vont être entièrement reversés au Croissant-Rouge tunisien afin de soutenir l’effort humanitaire. Mais pour Samar Tlili, professeure universitaire, il s’agit aussi d’un autre combat. « Nous essayons de faire connaître à tout le monde la réalité des Palestiniens à travers la traduction des informations, la création de contenus et le partage de leur culture. C’est pour cela que je suis venue aujourd’hui. Il n’y a plus beaucoup d’espaces d’expression libre en Tunisie, mais au moins, ici, c'est une forme de militantisme pour la cause palestinienne », confie-t-elle.Elle rejette l’annulation des Journées cinématographiques de Carthage (JCC), décidée par le ministère des Affaires culturelles le jeudi 19 octobre. « Je ne comprends pas cette décision. Au début, l’annulation des évènements en marge des JCC, qui ont un caractère festif, je pouvais la comprendre. Mais annuler le festival, je trouve que c’est n’importe quoi. On aurait pu saisir l’opportunité pour le transformer en une session dédiée à la cause palestinienne, justement. Surtout que c’est un festival qui a toujours été très engagé politiquement », déplore Samar Tlili.À lire aussiTunisie: le festival de Carthage officiellement annulé en soutien à GazaDes actions culturelles en soutien à la cause palestiniennePour Teycir Kerkenni, future avocate, assister à des évènements culturels qui soutiennent la cause palestinienne renforce la mobilisation dans la rue. « En fait, je trouve que cela permet de s’interroger, de réfléchir à l’histoire de ce peuple à travers d’autres médiums, et cela peut convaincre les plus réticents d’aller soutenir aussi les Palestiniens dans des manifestations », propose-t-elle.D’autres ont modifié leur programmation, comme le CinéMadart à Carthage, qui a remis à l’affiche le film Alam du réalisateur palestinien Firas Khoury, sorti au printemps dernier. « Notre seule arme, ce sont les images que l’on peut montrer, les voix que l’on peut donner à entendre. On l’a programmé tous les jours pour essayer aussi d’offrir un espace, un lieu et une occasion de débattre, et de voir d’autres images que celles que l’on voit dans les médias », explique Kais Zaied, le responsable du cinéma.Autant d’actions culturelles qui se joignent aux manifestations politiques en solidarité avec la cause palestinienne. Elles réunissent des centaines de personnes presque chaque jour depuis le début des bombardements sur Gaza.
10/21/20232 minutes, 33 seconds
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Le Musée National de Guinée fait peau neuve

Bâtiments en chantier et collection en cours de numérisation… Le Musée National de Guinée fait peau neuve. Dans son histoire, il n’a jamais connu de modernisation aussi rapide. Les autorités de transition ont décidé de refonder cette institution installée à la pointe de la péninsule de Conakry depuis la fin des années 1970, pour qu’elle redevienne un haut lieu de la culture guinéenne. De notre correspondant à Conakry,Les parpaings sont montés au rythme des chansons populaires. Hamza Kaba salue les ouvriers, il est le directeur du Musée National de Guinée. À son arrivée, il a découvert un site en décrépitude. « Comme vous le voyez, nous sommes en chantier, nous avons voulu retaper la salle d'exposition. Quand on a enlevé la toiture le 22 octobre 2022, tout le bâtiment s'est écroulé », explique-t-il. Alors, il a fallu repartir de zéro et les autorités ont vu les choses en grand. 800 mètres carrés pour la future salle d'exposition qui doit être inaugurée en janvier. C'est le triple de la surface de l'ancien édifice. L'aménagement global du musée a coûté un peu plus d'un million d'euros. « Le Musée National de Guinée connaît aujourd'hui une nouvelle ère, pas seulement vis-à-vis des travaux ou des rénovations. Nous sommes en train de faire la numérisation », précise Hamza Kaba.Des œuvres exposées dans un musée virtuelGrâce à la numérisation, des œuvres seront d'ici à un an et demi exposées sur Internet dans un musée virtuel. Une entreprise française, Archéovision, a été choisie pour commencer le travail, qui sera poursuivi par les cadres guinéens du ministère de la Culture. Mikaël Rouca est venu transmettre les techniques de numérisation 2D et 3D. « Il y a deux volets pour la numérisation, il y a une partie que l'on va dire "muséale", dans le but de valoriser des objets pour aller présenter éventuellement sur Internet. Et il y a une partie technique qui va permettre à d'éventuels scientifiques de pouvoir étudier l'objet sans forcément les déplacer pour la sécurité de l'objet, etc », indique-t-il.Les objets sont photographiés sous toutes les coutures. Le ministre de la Culture, Alpha Soumah, suit de près les opérations. « Cette phase de numérisation est une phase importante parce que ça nous permet d'abord de mettre côte à côte les biens que nous avons ici en Guinée et puis dans d'autres pays. Une fois que tout cela est numérisé sur un portail virtuel, on peut voir tout de suite notre richesse culturelle. »Des œuvres guinéennes se trouvent aujourd'hui dans des musées étrangers, en France notamment. L'objectif pour Conakry est de favoriser leur restitution. « Il y a des préalables pour récupérer un bien qui a séjourné des années ailleurs, il faut déjà sécuriser là où on le reçoit. La première étape, c'est déjà de réhabiliter ce musée, de faire l'extension pour un musée plus grand et un autre projet de musée est prévu [dans le quartier de] Koloma, à 15 km d'ici, où l'on va faire un musée des civilisations », annonce Alpha Soumah.
10/20/20232 minutes, 25 seconds
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Francophonie en Afrique: à Maurice, le français a toujours la cote sur l’île du multilinguisme [5/5]

Si l’anglais est la langue des institutions et de l’administration, après le créole, c’est le français qui est le plus parlé à Maurice. La langue de Molière a su résister à plus d’un siècle et demi de présence britannique. Et elle conserve une grande vitalité, qui passe, dans cette île multiculturelle, par un métissage avec les autres langues.  De notre correspondant à Port-Louis,Lorsque Dan Maraye, ancien gouverneur de la Banque de Maurice, s'adresse aux journalistes lors d'une séance d'échanges au siège du Défi Média Group, à Port-Louis, il utilise naturellement le français, malgré une formation professionnelle et une pensée académique fondamentalement britanniques. Un choix courant dans les milieux d'affaires et éducatifs mauriciens, où il est bien vu d'utiliser le français à l'oral. La Constitution mauricienne ne prévoit pas de langue officielle. Mais difficile ici d’oublier que Maurice, colonisé près d’un siècle par les Français, s’appelait autrefois l'« Isle de France ». Car malgré sa capitulation face aux Anglais en 1810, la langue de Molière a tenu bon face à celle de Shakespeare. Selon l'Organisation internationale de la Francophonie (OIF), le français est aujourd’hui parlé par les trois quarts de la population mauricienne.Emprunts, métissage et « faux amis »Pendant la conversation, le vétéran de la finance utilise également des termes anglais avec la même aisance. Pas de quoi affecter son auditoire, au contraire. À l’oral, les Mauriciens sont habitués à cette gymnastique entre deux langues internationales. Elle est le reflet du bagage académique des locuteurs.Le même phénomène existe à un degré moindre à l’écrit. Le choix de termes anglais est intentionnel et assumé, car il permet d'éviter les ambiguïtés. Une pratique courante, en particulier dans la presse. Par exemple, pour évoquer une « avancée majeure » dans le contentieux territorial entre Port-Louis et Londres concernant l'archipel des Chagos, l'éditorialiste Lindsay Rivière, qui maîtrise à la fois l'anglais et le français, parle d'un « breakthrough » dans un article en français. « Cela fait partie de notre identité », souligne Lindsay Rivière, auteur de Redevenir l'Isle de France ? Un Récit politique, publié en 2021. De son point de vue, les emprunts dans les différentes langues dans le français écrit mauricien constituent un enrichissement et une ouverture. Car en réalité, dans cette île multiculturelle où se mêle une population de 1,2 million aux ancêtres d’origine indienne, africaine, européenne ou chinoise, le multilinguisme fait partie intégrante de l’identité mauricienne. Ainsi, le français, langue des médias par excellence, cohabite aujourd’hui avec l’anglais, qui est celle du Parlement et de l’administration, et le créole, la langue maternelle parlée par 90% des Mauriciens. Après le créole, le français est considéré comme la langue la mieux comprise et parlée par les Mauriciens.Assez répandue, mais moins visible, l'utilisation de « faux amis » et autres anglicismes et créolisme dans le français mauricien témoigne également de l’influence de l’anglais. L'interaction entre l'ancien gouverneur de la Banque centrale de Maurice et les journalistes en offre encore une illustration. En se présentant, les jeunes journalistes présents, pour la plupart formés dans des universités anglophones locales, déclarent détenir un « degré » en communication et journalisme. Utilisé en lieu et place du mot « diplôme », ce terme pourrait créer la confusion pour un francophone natif, mais pas pour les Mauriciens. Créolisé et prononcé « dégré » le terme s'est imposé dans le français mauricien. « Nous pensons en créole, nous écrivons en français en empruntant à l’anglais »Même Jean-Claude de l'Estrac, réputé dans l'île pour sa culture, la qualité de son verbe et la finesse de sa plume en tant qu'ancien éditorialiste et écrivain, n'échappe pas à cette influence des « faux amis ». Comme lorsque celui qui fut candidat au poste de secrétaire général de l’OIF parle de « fonction » pour évoquer la cérémonie de lancement de son nouveau livre Un dimanche sur le quai de Manikarnika. Un anglicisme issu du terme « function » (en français, « réception », « cérémonie »). Un usage répandu dans la presse mauricienne, comme lorsqu'on dit qu'un ministre était présent à une « fonction ».« Nous confondons également le mot anglais “academic” avec “académicien” », observe Christina Chan-Meetoo, une universitaire parfaitement à l'aise en français comme en anglais. Dans la presse mauricienne, l'expression « éducation tertiaire » est souvent utilisée à la place d’« éducation supérieure », un autre faux ami qui a migré de l'anglais « tertiary education » vers le français. Et la liste est longue.« Il fut un temps où de telles erreurs en français suscitaient des réactions indignées des lecteurs. Mais ce temps est révolu. Nous pensons en créole, nous écrivons en français en empruntant à l'anglais », déplore Pradeep Daby, journaliste au Défi Quotidien et partisan d’une « écriture française plus conforme » dans la presse mauricienne. Dans le registre journalistique, « le plus important est que les Mauriciens comprennent. Le message passe », souligne pour sa part Yvan Martial, ancien rédacteur en chef du quotidien L'Express, qui dirige aujourd'hui une impressionnante collection appelée Répertoire de la Presse mauricienne.À lire aussi«Plus de 60% de ceux qui utilisent le français au quotidien se trouvent en Afrique»Faut-il s'inquiéter de ces influences ou y voir un joyeux mélange ? « Plus de 150 ans de présence britannique n’ont pas effacé la langue française à Maurice », répond Yvan Martial. La colonisation britannique a duré de 1810 à 1968, date de l'indépendance de Maurice. Mais des clauses dans le traité de cession de l'ancienne Isle de France à la Grande-Bretagne en 1814 garantissaient le respect de la religion, des lois et de la langue des habitants. Dans l’île plurilingue, le français mauricien a trouvé de nombreux raccourcis en s'appuyant sur ce qu'il y a de plus intelligible dans les différentes langues pratiquées. Il n'est pas étonnant de croiser dans les rues de la capitale des jeunes en pleine conversation dans un créole agrémenté de mots français, d'anglais, voire de bhojpuri, une langue indienne très présente dans les localités rurales de Maurice. Cette manière de s'exprimer n'est pas nouvelle, mais elle s'accentue avec l'influence des réseaux sociaux sur les nouvelles générations, notamment dans les milieux estudiantins.Les expressions anglaises, en particulier, prennent progressivement le pas sur le créole et le français. « Les mots anglais nous viennent plus naturellement, car nos études ont été en anglais à l'école et à l'université. De plus, la communication sur les réseaux sociaux nous semble plus directe en anglais, surtout qu'il n'y a pas d’accents », explique Avishka, une trentenaire employée d'une société de distribution à Pailles. Depuis son indépendance, Maurice a maintenu le modèle éducatif britannique. Avishka a utilisé l'expression « more straight forward » pour dire « plus direct ».  Au cours de la conversation, elle a également utilisé à plusieurs reprises l'expression « like », qui se traduit ici par « vous voyez ».Langue de la presse et de la littératureMalgré ces métissages, le français reste la langue de choix des Mauriciens. La presse mauricienne, qui célèbre cette année ses 250 ans d'existence, témoigne de cette vitalité. De même, la littérature mauricienne est dominée par des écrits en français. Un dimanche sur le quai de Manikarnika (Pamplemousses Éditions), de Jean-Claude de l'Estrac, en est la preuve concrète pour la plus grande satisfaction de l’ambassadrice de France d’alors, Florence Caussé-Tissier, présente lors du lancement.Le français s'impose même comme la langue de l'économie. L'économiste Eric Ng Ping Cheun a choisi d'écrire Maurice la cigale (Pamplemousses Éditions) en français en 2019. L’ouvrage vise à alerter l'opinion sur une île qui vit désormais au-dessus de ses moyens et s'endette de plus en plus en puisant dans ses réserves financières.Dans la littérature francophone contemporaine, des auteurs tels qu'Ananda Devi, Natacha Appanah et Barlen Pyamootoo jouissent d'une belle reconnaissance alors que de nouvelles voix se font entendre. Davina Ittoo, enseignante de littérature française, fait partie de ces autrices. Elle a remporté trois prix pour ses ouvrages : La proscrite et autres nouvelles, Prix Jean Fanchette 2015, Misère (Atelier des Nomades), Prix Indianocéanie 2019 et Lorsque les cerfs-volants se mettront à crier, prix Vanille 2022. « C'est une littérature vivante et riche, mais c'est très dommage que les auteurs mauriciens ne soient pas enseignés dans les écoles », déplore Barlen Pyamootoo. « Ils sont enseignés ailleurs, mais pas à Maurice », ironise Alain Gordon Gentil, écrivain et éditeur. Il est très rare en effet qu'un auteur mauricien soit invité dans une école publique mauricienne pour parler de son œuvre. Les Mauriciens ont bien conscience que leur multilinguisme est une chance. « C'est un atout dans leur CV, et le bilinguisme explique pourquoi ils sont recrutés à travers le monde », souligne Rama Sithanen, ancien ministre des Finances. Cette polyglossie fait partie intégrante de l’identité mauricienne. Il n'est pas surprenant de rencontrer des Mauriciens à l'aise dans quatre langues : le créole (parlé aujourd'hui par 90% de la population), le français (langue médiatique par excellence), l'anglais (langue parlementaire et administrative) et une langue asiatique, notamment le bhojpuri, l'hindi, l'ourdou, le tamoul, l'arabe, ainsi que les dialectes chinois hakka et mandarin.Dans Écrits sur les Langues, publié en 2015 et préfacé par Louis-Jean Calvet, le linguiste Issa Asgarally expliquait ainsi avoir voulu « raconter comment des hommes et des femmes relèvent quotidiennement à Maurice le défi de Babel ».
10/19/20232 minutes, 25 seconds
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Francophonie en Afrique: au Sénégal, le wolof monte en puissance face au français [4/5]

Langue officielle du Sénégal, le français n’est maîtrisé que par un tiers des Sénégalais. Au pays de Leopold Sedar Senghor, la langue de Molière s’est laissée progressivement distancer au profit du wolof, la langue nationale la plus partagée par les Sénégalais. De notre correspondante à Dakar,À 13 heures tapantes, le jingle de Sud FM est lancé. Après une longue inspiration, le présentateur Maodo Faye se lance dans les titres de son journal en langue wolof. De l’autre côté de la vitre du studio, en régie, les journalistes s’agitent pour finaliser le mixage d’une traduction. « Le ministre Samba Ndiobène Ka s’est exprimé en français, nous devons le doubler en wolof pour cette édition », explique la rédactrice en chef, Ndeye Mareme Ndiaye.Sud FM, première radio privée du Sénégal créée en 1994, a été précurseur en diffusant des journaux en wolof, langue nationale la plus parlée dans le pays, signe d’une perte de vitesse de la langue de l’ancien colon, pourtant officiellement inscrite dans la Constitution. « À l’époque, il y avait une seule radio d’État, la RTS, il fallait démocratiser l’accès à l’information et faire participer les populations au débat public. Et cela passait par l’introduction du wolof », remet dans le contexte Baye Oumar Gueye, directeur général de Sud FM depuis cinq ans.Toute la journée, pendant les moments forts d’information, les présentateurs des journaux alternent entre le français et le wolof. Le reste du temps d’antenne est occupé principalement par des programmes en langue nationale, même si des émissions de grandes écoutes comme Objection sont toujours en français. « Nous avons des courbes qui démontrent que l’audience monte dès que nous sommes dans le journal en wolof, c’est toujours un pic d’audimat, car c’est plus clair dans cette langue pour les auditeurs, qui maîtrisent ainsi davantage les sujets », observe M. Gueye.À lire aussi«Plus de 60% de ceux qui utilisent le français au quotidien se trouvent en Afrique»Et cela s’explique, car tout le monde parle et comprend le wolof dans toutes les régions du Sénégal, alors que beaucoup ne parlent pas le français, surtout dans les villages à l’intérieur du pays où le taux d’analphabétisation est élevé. « Nous avons introduit d’autres langues nationales dans les stations régionales, comme le diola, le sérère ou le peul. Mais c’est le wolof qui domine au niveau national », explique le patron de la radio, M. Gueye, qui rappelle que le français avait été imposé par le colonisateur.« J’utilise des mots étymologiquement français qui sont wolofisés »À la présentation, Maodo Faye – El Hadj Malick Faye de son vrai nom – reprend en wolof le même journal que l’édition en français. C’est dans cette même langue qu’il s’occupe d’une émission qui ouvre le micro aux auditeurs et du desk religieux. « L’islam a une place capitale dans notre société à 95% musulmane, et les khalifes généraux à la tête des confréries parlent le wolof », explique le présentateur, fidèle de Sud FM depuis plus de vingt ans.Mais il est parfois difficile de tout traduire. « J’utilise des mots étymologiquement français qui sont wolofisés, car il n’existe pas de réelle traduction comme pour les mots comme “la montre”, “l’avion” ou des termes économiques », admet M. Faye. Sans compter les sujets tabous qu’il est plus difficile d’aborder dans la langue locale. « En français, on peut parler de tout, comme de la sexualité. Mais en wolof, les mots sont trop tabous », estime-t-il.Alors pour construire une matinale et des journaux, la rédactrice en chef Ndeye Mareme Ndiaye, qui coordonne la rédaction dans les deux langues, compte sur une équipe de journalistes entièrement bilingue. « Parfois, nos reporters reviennent avec des témoignages uniquement en wolof, car les gens sont plus à l’aise et s’expriment mieux dans leur langue maternelle. Nous sommes donc obligés de faire une traduction pour l’édition en français », témoigne la journaliste, qui a commencé à Sud FM en 2001.« Parfois, nous ne connaissons pas certains mots en wolof, donc nous devons utiliser des mots en français au milieu d’une phrase, mais je pousse aussi les journalistes à se performer, à chercher la traduction précise en utilisant une paraphrase, explique la rédactrice en chef. Nous avons aussi des collaborateurs qui ont étudié le wolof à l’université et nous faisons appel à eux pour qu’ils nous corrigent. » « Le rôle des médias est important dans le développement et l’enrichissement d’une langue et de son vocabulaire », renchérit le directeur général, M. Gueye.Le niveau de français en déclinCe ne sont pas que les journaux et l’information qui sont en wolof, mais tout l’univers radiophonique de l’antenne, que ce soient les jingles, les bandes-annonces ou les publicités commerciales. « Les émissions avec des invités comme des maires ou des députés se font généralement en wolof », note Mme Ndiaye, alors que la politique connaît le même phénomène de déclin du français. Car pour se faire comprendre et pour gagner en légitimité, les hommes politiques prennent l’option du wolof afin de gagner la confiance des électeurs.« La meilleure façon de faire passer un discours politique, c’est de passer par la langue véhiculaire [langue qui permet les échanges entre des groupes parlant des langues différentes, ndlr] majoritaire qui est le wolof compris un peu partout au Sénégal », analyse Adjaratou Oumar Fall, chercheuse au laboratoire linguistique de l'Institut fondamental d’Afrique noire (Ifan) de l’université Cheikh Anta Diop de Dakar.À lire aussiLe fran-wolof sur les réseaux sociauxElle observe alors que le phénomène est global : « Dans le paysage linguistique actuel, le français a perdu en vitesse, notamment à l’université où le niveau d’écriture et de rédaction a beaucoup baissé. » Dans les couloirs du campus, elle entend désormais les étudiants parler entre eux en wolof. De même dans les salles de classe, où les instituteurs expliquent le programme d’abord en langue nationale avant de passer au français. Une tendance qui s’observe aussi sur les panneaux publicitaires ou sur les réseaux sociaux, où les jeunes ont délaissé le français pour écrire principalement en wolof.« Cette expansion s’observe dans toutes les régions, même en Casamance ou à Kédougou qui étaient très attachées à leurs langues régionales », observe Mme Sall. Selon elle, le wolof a pu s’imposer, car il est ouvert et contient beaucoup d’emprunts. La chercheuse d’analyser : « Les Wolofs sont des commerçants, donc c’est une langue de mouvement qui est beaucoup plus facile d’accès que le français, compliqué à apprendre ».À lire aussiLa Wolof Académie promeut l'enseignement du wolof, la langue la plus parlée au Sénégal
10/18/20232 minutes, 15 seconds
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Francophonie en Afrique: en Algérie, la langue française, un «butin de guerre» en mauvaise posture? [3/5]

En Algérie, depuis septembre 2022, l'anglais est enseigné dès l'école primaire, faisant perdre au français son statut de seule « langue étrangère » des programmes scolaires aux côtés de l’arabe et du tamazigh. Alger a-t-il décidé de rompre avec l'héritage de la colonisation ? De notre correspondant à Alger,« Good morning ! », « hi ! ». Moussa, Nassim et Wafa, élèves de la troisième année de primaire, s'appliquent à répéter. Wafa, 9 ans, a déjà une longueur d'avance puisque sa grande sœur est diplômée en littérature anglaise de l'université d'Alger. « Je sais comment dire les chiffres de 1 à 10 », annonce-t-elle fièrement.« L'anglais est une langue très importante. C'est la langue du monde, s'enthousiasme la professeure. Elle est parlée dans tous les pays, en Grande-Bretagne, aux États-Unis. Dans la classe, j'ai trouvé les élèves très excités à l'idée d'apprendre l'anglais. » Sakina, enseignante à l'école Hussein-Dey, à Alger, a été recrutée pour enseigner l'anglais après une brève formation. Comme elle, ils sont 5 000 enseignants contractuels à avoir été engagés par le ministère de l'Éducation nationale pour la rentrée de septembre 2022 après la décision, à peine trois mois avant, du président Abdelmadjid Tebboune d'introduire l'anglais dès le cycle primaire. Jusque-là, le français, était la seule « langue étrangère » enseignée dès l'école primaire au côté de l'arabe et du tamazight, les deux langues officielles en Algérie.Troisième pays francophone en nombre de locuteursC'est dans les années 1960 que la langue française a été adoptée dans le système scolaire. « Paradoxalement, c'est après l'Indépendance que l'usage du français s'est étendu. Les immenses efforts de scolarisation déployés par le jeune État algérien expliquent aisément l'expansion de la langue française depuis 1962. Le recours à tous les Algériens diplômés ou instruits (et, dans leur grande majorité, ils l'étaient en langue française) et à la coopération étrangère (surtout française), a entraîné l'institution d'un état de bilinguisme de fait, sinon de droit, dans le système éducatif et dans la société en général », précisait la linguiste Khaoula Taleb Ibrahimi, dans une étude parue en 1995.Ce n'est qu'en 1978 qu'a commencé l'arabisation graduelle de l'école. Et depuis la fin des années 1980, le français est enseigné comme langue étrangère, au même titre que l'anglais, l'espagnol ou l'allemand dans les cycles moyen et secondaire.Selon l'Unesco, l'Algérie est le troisième pays francophone au monde après la France et la RDC avec près de 15 millions de personnes maîtrisant la langue française, soit 33% de la population. Mais le pays, qui n'est pas membre de l'Organisation internationale de la francophonie (OIF), considère désormais comme prioritaire l'usage de l'anglais dans le système scolaire. « L'Algérie doit rejoindre le mouvement du monde. Il est vrai que la langue française est un “butin de guerre”, mais l’anglais est une langue internationale. C'est la langue de l'économie », justifiait Abdelmadjid Tebboune en juillet 2022.« Pas d'hostilité » envers la langue françaiseEn août 2023 encore, le président algérien affirmait que la question de l'enseignement de l'anglais à l'école primaire était posée depuis plusieurs années. « Si l'on veut aller à la création des start-ups, à la science, il faut utiliser la langue anglaise. L'anglais est la langue des chiffres et des théories physiques. Les parents d'élèves veulent que leurs enfants apprennent l'anglais », a appuyé Tebboune.Alors qu'avant l'enseignement de l'anglais commençait seulement au collège, désormais il cohabite avec le français dès le primaire. Une décision qui ravive le débat linguistique dans le pays sur la place de la langue française, encore grandement associée à sa dimension coloniale.Défenseur de la « fierté linguistique », le linguiste Salah Belaid, président du Haut conseil de la langue arabe (HCLA), estime que plus de 60 pays utilisent la langue de William Shakespeare. « Il faut donc s'ouvrir davantage sur la langue anglaise et en faire un support pour la langue arabe, tout en préservant nos particularités », soutient-il. Même si celui qui est membre de l'Académie de langue arabe de Sharjah (Émirats arabes unis) et enseignant à l'université de Tizi Ouzou se défend de toute hostilité envers la langue française, il déclarait dans une interview, le 18 décembre 2022, Journée mondiale de la langue arabe : « Nous sommes contre la francisation et contre la Francophonie qui est un organisme politique sous couvert linguistique. »L'écrivain et dramaturge Kateb Yacine, auteur entre autres du célèbre roman Nedjma, considérait le français comme « un butin de guerre ». « L'usage de la langue française ne signifie pas qu'on soit l'agent d'une puissance étrangère, et j'écris en français pour dire aux Français que je ne suis pas Français », déclarait-il en 1966, quatre ans après l'indépendance de l'Algérie.« La langue de Molière jouit d’une place prestigieuse dans notre société. Elle fait partie du paysage linguistique algérien. Néanmoins, ce butin de guerre est perçu par certains comme un signe d’aliénation culturelle », commente le journal en ligne Dzair Daily, après ces décisions.La bataille linguistique se mène aussi dans les ambassades. François Gouyette, ex-ambassadeur de France à Alger et arabophone, célébrait cette journée avec le personnel de la représentation diplomatique et avec les étudiants. Une première. De son côté, l'ambassade des États-Unis travaille pour « le renforcement » de l'enseignement de l'anglais en Algérie. Le 10 juin 2023, elle organisait à Alger la finale d'un « concours national d'orthographie anglaise » avec la participation d'une vingtaine de candidats.La loi sur la « généralisation de la langue arabe » réactivéeLe pouvoir algérien veut-il en finir avec l'héritage de la langue française ? Difficile en tout cas de ne pas y voir de volonté politique. D'autant que cette décision n'est pas sans rappeler la politique d'arabisation menée par le président Houari Boumédiène dans les années 1970. Un mouvement qui se poursuit. Fin 2021, à la suite d'une crise diplomatique entre Paris et Alger déclenchée par les propos d'Emmanuel Macron sur l'histoire de l'Algérie, les ministères de la Jeunesse et des Sports, du Travail et de la Formation professionnelle ont interdit l'usage du français dans les documents administratifs, les communications, les correspondances et les courriers. « C’est un secteur qui est géré par des jeunes appartenant à la génération de l’indépendance, donc ils maîtrisent tous l’arabe », a soutenu Abderrezak Sebgag, ex-ministre de la Jeunesse et des Sports.À lire aussiAlgérie: «Le français, c'est une belle langue, mais l'anglais la devance»Le ministère de la Culture et des Arts a pour sa part exigé, en 2022, l'utilisation exclusive de la langue arabe dans toutes les activités et les correspondances, à l'exception des échanges avec l'étranger. L'usage du français est désormais « interdit » dans ce département. Une note interne a rappelé les dispositions de la loi 05/91 du 16 janvier 1991 portant « généralisation de la langue arabe », et l'article 3 de la Constitution qui stipule que « l'arabe est la langue nationale et officielle » en Algérie. Les frontons de plusieurs départements ministériels, dont celui de la Défense nationale, sont écrits en arabe et en anglais depuis deux ans.Quant au ministère de l’Enseignement supérieur et de la Recherche scientifique, il a décidé de remplacer progressivement l’enseignement des programmes en français par l’anglais dans les universités. Un plan de formation des enseignants recourant aux techniques de l'apprentissage intensif a été lancé à cet effet. Jusque-là, les sciences techniques (médecine, technologie, informatique, génie mécanique, architecture, hydraulique, biologie, etc) étaient toujours enseignées en français alors que les sciences humaines ont été complètement arabisées (sociologie, philosophie, histoire, psychologie, économie, etc.).« On est encore loin de l'idée d'une dernière génération de francophones en Algérie »Pourquoi un tel rejet de la langue française ? « La langue française est victime de son "statut" social avant tout, répond Adlène Meddi, journaliste et écrivain algérien, établi à Alger. C’est la langue de ceux qu’on présente comme "dominants". Pratiquer l’anglais est une sorte de revanche sociale de la périphérie suburbaine et de la jeune génération. Au-delà des décisions politiques – par ailleurs mal préparées – il y a une transition générationnelle qui soutient ce "switch" vers l’anglais. »Waciny Laredj, écrivain, auteur d'une douzaine de romans en langue arabe, et enseignant à Alger puis à la Sorbonne à Paris, minimise la volonté affichée par les autorités algériennes de s'éloigner progressivement de la langue française. « L'algérien est tellement imprégné de la langue française qu'il est difficile de penser autrement. On peut toujours faire appel à l'anglais comme troisième langue avec l'arabe et le français. Ce n'est pas contradictoire, ça enrichit la pensée, ça permet aux Algériens de voir autrement au-delà de la langue française. Mais la langue française est là. Je partage l'idée de Kateb Yacine », confie-t-il.Le journaliste arabophone Kada Benamar estime que la décision de donner plus de place à l'anglais dans l'enseignement ne relève pas d'une volonté de « se séparer » du français ni de mettre les deux langues en concurrence. « Tout le monde est d'accord que l'anglais est une langue internationale et que le français est toujours présent ici. On est encore loin de l'idée d'une dernière génération de francophones en Algérie. Il faut aborder la question des langues à partir d'un angle culturel, intellectuel et linguistique. Il est préférable de s'éloigner autant que faire se peut de la politisation de cette question et de la débattre avec une certaine neutralité », plaide-t-il. Ahmed Cheniki, ancien maître de conférences de littérature de langue française à l'université de Annaba, va dans le même sens en soulignant la nécessité de « consulter » les linguistes avant toute décision politique se rapportant aux langues. « Les linguistes ont un autre rapport avec les langues, analyse-t-il. L'anglais est parlé en Grande-Bretagne, aux États-Unis et ailleurs. Finalement, l'anglais est la langue nationale de quel pays ? Le français n'est pas la langue de la France. Il n'y a pas de langue coloniale. » 
10/17/20232 minutes, 18 seconds
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Francophonie en Afrique: au Rwanda, de nouveaux efforts pour relancer l'apprentissage du français [2/5]

Après avoir semblé vouloir en terminer avec l'héritage francophone, le réchauffement des relations avec la France a relancé l'intérêt du Rwanda pour la langue française, avec de nouveaux programmes d'apprentissage et une nouvelle stratégie gouvernementale. De notre correspondante à Kigali,« Maître corbeau sur un arbre perché, tenait en son bec un fromage », récite difficilement en français l’une des élèves du club francophone du Teacher Training Centre (TTT) de la ville de Muhanga, à l’ouest de la capitale Kigali. Sur l’estrade du large hall où sont réunis tous les apprenants de cette école publique, également centre de formation pour enseignants, les élèves en niveau secondaire du professeur sénégalais Mohamed Coly défilent pour réciter chansons, poèmes et débats, préparés en classe pour être présentés devant leurs camarades, dans un événement animé en trois langues : le français, l’anglais et la langue nationale, le kinyarwanda. Le professeur, installé au Rwanda depuis 2022, fait partie de la cinquantaine de volontaires employés par l’Organisation internationale de la francophonie (OIF) et répartis dans des établissements des différentes régions du pays pour développer l’apprentissage du français au Rwanda. Programme inédit, lancé en 2020 par l’institution dirigée par l’ancienne ministre des Affaires étrangères rwandaise Louise Mushikiwabo, l’objectif est de renforcer et d’accompagner les effectifs de professeurs de français du pays des Mille Collines. À peine 6% de locuteurs francophones« Nous partageons avec nos collègues rwandais les méthodes d’enseignement du FLE [français langue étrangère NDLR], plus adaptées au niveau des élèves que l’enseignement du français comme langue secondaire jusqu’ici utilisé, trop poussé pour la plupart des apprenants », détaille Mohamed Coly. Depuis l’abandon du français comme langue d’enseignement en 2008 au profit de l’anglais, et face à la prédominance du kinyarwanda, les locuteurs francophones au Rwanda se font rares. En 2018, l’OIF estimait que seuls 6% de la population nationale parlait français. « Comme très peu d’élèves ont des membres de leur famille avec qui ils peuvent pratiquer, c’est un handicap dans leur processus d’apprentissage », poursuit l’enseignant.Une affirmation partagée par Védaste Ntibarikure, l’un des professeurs rwandais de français d’une école secondaire de Muhanga suivi par le volontaire de l’OIF. « Le grand défi, c’est que les élèves n’ont pas de bases. Ils nous disent qu’à l’école primaire, ils n’ont rien appris en français. Alors c’est difficile d’adapter les cours à leur niveau », regrette-t-il. Si plusieurs heures de français par semaine sont au programme dans les différentes années de primaire, de nombreuses lacunes sont observées à leur entrée en secondaire. « Certains professeurs ne maîtrisent pas bien la langue, alors c’est difficile d’enseigner la matière », justifie l’enseignant.Réchauffement diplomatiqueDepuis quelques années, de nouvelles mesures ont été mises en place pour renforcer l’apprentissage de la langue française dans le pays. En mai 2021, la visite du président français Emmanuel Macron au Rwanda marque le réchauffement des relations diplomatiques entre les deux pays, souligné par la reconnaissance du chef d’État de la « responsabilité accablante » de la France dans le génocide contre les Tutsis en 1994. Le Centre culturel francophone de Kigali est inauguré durant son séjour, sept ans après la fermeture de l’Institut français et la nomination de l’ambassadeur de France au Rwanda, Antoine Anfré, est validée par le conseil des ministres quelques semaines plus tard, six ans après le départ de son prédécesseur.  Moins d’un an plus tard, le 1er avril 2022, le ministère rwandais de l'Éducation lançait un plan national de développement de l’apprentissage du français. « C’est une volonté politique du gouvernement rwandais, également suite à la visite d’Emmanuel Macron », explique Johann Robinet, employé par Expertise France pour accompagner le ministère dans la mise en place de ce plan. Objectif principal : développer des tests de niveau et des formations par pallier pour les professeurs de français, dont le lancement est prévu en début d’année prochaine. « On espère que tous les enseignants à moyen terme pourront en bénéficier », affirme-t-il. À lire aussi«Plus de 60% de ceux qui utilisent le français au quotidien se trouvent en Afrique»Un engagement renouvelé par les autorités rwandaises le 20 mars dernier pour la Journée internationale de la Francophonie.« Nous sommes fiers d'être membres de la communauté francophone et j’encourage tous les enseignants de français à développer et à moderniser leurs méthodes d’enseignement pour que cette langue soit parlée par la plupart de nos enfants et pour le développement économique du pays », affirmait la ministre de l’Éducation, Dr Valentine Uwamariya.Pour le Rwanda, au carrefour entre l’Afrique francophone et anglophone, l’objectif est également de devenir un hub plurilinguistique, réunissant, en plus du français et de l’anglais, le swahili, parlé par plus de 200 millions de personnes, principalement en Afrique de l’Est et centrale. « Le mieux, c’est de commencer par les plus petits, à la racine. Maintenant, on a pris les cours en chemin, mais si c’était possible de commencer au primaire, dans un long processus, dans le durable, nous pourrions asseoir un changement qui serait consistant », conclut le volontaire Mohamed Coly.À lire aussiFrancophonie en Afrique: en RDC, l'avenir du français tout tracé? [1/5]
10/16/20232 minutes, 26 seconds
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Francophonie en Afrique: en RDC, l'avenir du français tout tracé? [1/5]

En République démocratique du Congo, le français est la seule langue officielle au milieu de centaines de dialectes. Une position qui fait, sur le papier, de l'ancienne colonie belge le deuxième pays francophone au monde après la France. Pourtant, la langue de Voltaire n’est plus perçue comme un passeport assurant l'ascension sociale. De notre correspondant à Kinshasa,Il est presque 8h sur le boulevard du 30-Juin, au pied d’un des « sauts-de-mouton » de Kinshasa, comme l’on désigne ici ces ponts urbains censés aider à décongestionner la capitale congolaise. À proximité du Congo American Language Institute (CALI), les parkings sont déjà saturés, les véhicules occupent une partie du trottoir, empiétant sur la chaussée. Des dizaines de personnes se pressent pour assister aux cours. « Ma journée, je la commence ici, indique Nathalie Sekabuhoro, foulard autour du cou, la trentaine révolue. J'ai pris la vacation 8h-10h. Je suis mes cours, et après, je vaque à d’autres occupations. » Depuis environ un an, sa vie est rythmée par ce programme qu’elle juge capital après 17 ans passés sur les bancs de l’école, entre le primaire et l’université.Les cours sont onéreux, mais l’école, vieille de 60 ans, a vu ses chiffres exploser ces cinq dernières années, s’enthousiasme le directeur du CALI, Dodo Mbenga. « On avoisine les 10 000 élèves par an. En 2021, on était autour de 1 600, 1 700 apprenants. Les gens viennent pour plusieurs raisons. C’est vrai que la RDC est un pays francophone, mais l’environnement professionnel est plus anglophone. La plupart des investisseurs dans ce pays sont des anglophones dans presque tous les secteurs, le monde humanitaire a aussi renforcé ce phénomène : dans toutes ces organisations, la langue de travail, c'est l’anglais. Apprendre l’anglais est donc devenu une nécessité », explique le responsable.S’il n’existe pas de données officielles concernant l’engouement des Congolais pour l’anglais, ces dernières années, les formations comme celle dispensée au CALI ont fleuri partout. On y rencontre des travailleurs, des étudiants, mais aussi des chômeurs à la recherche d’un emploi. Et même des hommes politiques.À lire aussiLe français à Kinshasa: une langue vivante et turbulenteDans l’un des pays les plus pauvres du monde, où le chômage des jeunes est très élevé, l'anglais est perçu comme un passeport pour une meilleure intégration professionnelle. « Je suis une femme entrepreneure, et dans le monde des affaires, on regarde beaucoup plus les anglophones », assure Nathalie alors que les cours commencent. « L’anglais, c'est un atout majeur de nos jours. Lorsque vous ne parlez pas anglais, c’est comme si vous étiez “analphabète”. Je suis ici pour booster ma carrière. Dans le monde du travail aujourd’hui, on exige de vous d’avoir une certaine connaissance en anglais. Sinon, vous êtes disqualifié d’office. »Langue commune de communicationDepuis la colonisation belge il y a un siècle et demi, le français est la seule langue officielle en République démocratique du Congo, aux côtés des quatre langues nationales reconnues par la Constitution – le kiswahili (parlé dans l’est du pays), le lingala (parlé dans le Nord), le tshiluba (parlé dans les zones centrales) et le kikongo (parlé surtout dans l’Ouest) et des dizaines de langues locales.Aucune n’étant parlée sur toute l’étendue de ce territoire grand comme quatre fois la France, la langue de Molière a été utilisée comme langue commune de communication et choisie comme langue d’enseignement, bien qu'elle ne soit pas comprise par l'ensemble de la population.À lire aussi«Plus de 60% de ceux qui utilisent le français au quotidien se trouvent en Afrique»Selon l’Observatoire de la langue française (OIF), 78% des 100 millions d’habitants parlent aujourd’hui le français, ce qui fait de la RDC, sur le papier, le deuxième pays francophone au monde en nombre de locuteurs. Le français ne semble donc pas avoir de souci à se faire, d’autant que, toujours selon les données de l’OIF, il affiche l’un des plus gros taux de progression du nombre de francophones.Néanmoins, quand on évoque l’évolution de cet idiome en RDC, les réactions ne sont pas si optimistes. Sans parler de désaffection, on s’alerte souvent d’une baisse du niveau. « Le français est perçu comme une science complexe, il donne plus de fil à retordre aux jeunes, avec les accords, la ponctuation, le vocabulaire et les figures de style, affirme Laurent Makiese, enseignant d’anglais dans un collège catholique. L’anglais est plus simple à enseigner et à apprendre. Les règles ne sont pas aussi compliquées qu’en français. Il est possible d’avoir des gens qui ne savent ni lire, ni écrire en français, mais qui s’en sortent pas mal en anglais. »L’enseignant assure avoir connu « beaucoup d’étudiants qui s’expriment toujours mal en français malgré plus de dix ans passés à l’école et qui parlent mieux l’anglais au bout d’une année et demie de formation ».Pour Raoul Ekwampok, professeur à la faculté des lettres de l’université pédagogique nationale, le français est « en perte de vitesse ». « Il n’y a pas de décision politique, mais il y a un grand engouement pour l’apprentissage de l’anglais. Le français n’est plus bien maîtrisé, il n’est plus prisé comme avant. Quant aux langues locales, précise-t-il, elles sont dans un processus de créolisation : quand on les parle, elles sont truffées de mots français. »En finir avec l'hégémonie du françaisLe français a beau avoir été adopté comme langue commune au Congo après l’indépendance, pour beaucoup ici, il reste la langue du colonisateur, celle des élites aussi. Son usage n’est pas neutre. La volonté de se démarquer en parlant une autre langue, locale ou étrangère comme l’anglais est réelle.Au Parlement, où les députés et sénateurs sont autorisés à intervenir en langue nationale lors des séances plénières, cette question linguistique est prise au sérieux. Même si aucune initiative d’envergure n’a été entreprise, la sénatrice Francine Muyumba, elle-même polyglotte, murit l’ambition de faire de l’anglais une autre langue officielle. Mais il faudrait pour cela réviser la Constitution. « En attendant, nous sommes en train de voir les voies et moyens de permettre à nos enfants de pouvoir étudier en anglais, explique-t-elle. J’aime beaucoup la langue française parce que nous sommes dans la francophonie, néanmoins nous avons également le droit d’ajouter d’autres langues qui peuvent permettre à la RDC de décoller. Le Rwanda préside la Francophonie alors que le pays a le kinyarwanda comme langue officielle, puis l’anglais et le français. »La sénatrice plaide, elle aussi, pour promouvoir les langues nationales dans cette tour de Babel qu’est le Congo. « Chez nous, les gens considèrent parfois que bien parler français, c'est être intelligent. Mais ça n’a rien à voir ! », s’agace-t-elle. « Nous sommes aussi en train de voir comment promouvoir nos langues nationales et permettre que les services administratifs puissent les utiliser. »La concurrence de l’anglais ne date pas d’hier, estime Laurent Makiese. Mais pour lui comme pour d’autres, c’est l’hégémonie du français dans l’enseignement qu’il faut remettre en question. « Dans les écoles privées, l’anglais s’apprend dès l’école primaire jusqu’à l’université. Dans les écoles publiques, qui comptent le plus grand nombre d’élèves, les langues nationales ne sont enseignées qu’au niveau du primaire, l’anglais prend le relais au secondaire jusqu’à l’université. Cette concurrence doit avoir provoqué chez les élèves ou étudiants un goût d’inachevé qui les poussent à envahir les centres d’apprentissage devenus aussi un business florissant à travers le pays », commente-t-il.Pour Raoul Ekwampok comme pour les autres linguistes congolais, l’avenir du français en RDC passera par la cohabitation avec les autres langues. Pour cela, « il est important que la francophonie revoie ses méthodes pour voir comment faire cohabiter la langue française avec les autres langues, notamment les nôtres ». Depuis 2012, le programme Elan de l’OIF, expérimenté dans certaines régions, vise à favoriser l’apprentissage de base dans une langue nationale en parallèle du français dès les premières années de l'école primaire. Un enseignement bilingue, jugé bénéfique pour l’ensemble de la scolarité, qui doit se généraliser. Mais passé les premières années, les langues locales tendent à disparaître de l’enseignement.Si le français a encore de beaux jours devant lui en RDC, son avenir est intimement lié à celui du système éducatif, en crise. Depuis quatre ans, une réforme a rendu l’enseignement primaire gratuit. Les autorités espèrent ainsi réduire le taux d’analphabétisme. Quand on sait que, selon un rapport du Programme des Nations unies pour le développement (PNUD) datant de 2020, près de 30% des Congolais ne savent ni lire ni écrire, le défi à relever est de taille.
10/15/20232 minutes, 28 seconds
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Centrafrique: réhabilitation du parc Saint Floris, portrait d'une écogarde [3/3]

Dans la réserve animalière de Manovo-Gounda Saint Floris au nord-est de la Centrafrique, le quotidien atypique d'une écogarde. Une femme dans un contingent d'hommes dont le métier est de protéger la faune et la flore. Dans cette réserve animalière de 17 400 km2, elle effectue des patrouilles, pourchasse les braconniers et protège les espèces animales qui reviennent petit à petit dans le parc. Qui est cette femme qui risque sa vie pour protéger celles des animaux en voie de disparition   Dans ce camp de deux hectares, les écogardes disposent chacun d’un abri. Des cases sommaires construites avec du bois de la forêt et de la paille. Ce matin, Bertille, 20 ans, ferme soigneusement sa porte et se dirige vers le lieu du rassemblement. 1 mètre 60, cheveux courts, tenue de camouflage, ses compagnons d'arme l’ont surnommée Bamara, lionne en français. Bertille porte un sac de 30 kg dans lequel on trouve une tente, une natte, une torche, une boussole, des bouteilles d'eau et quelques boîtes de conserves : « Je commence toujours ma journée avec le sport. Ensuite, je fais quelques travaux ménagers. Après le petit déjeuner, je pars directement au travail. Chaque équipe effectue des patrouilles pédestres par rotation dans tout le parc pendant une semaine. C'est difficile, mais je n'ai pas peur. »Ce matin, elle rejoint son équipe dont la mission est de rechercher des empreintes d'éléphants et des traces de braconniers. Même si c'est dur, c'est tout ce qu'elle aime : « J'ai 20 ans et depuis deux ans, je consacre ma vie à la sauvegarde de ce patrimoine. Nous avons certains animaux qui sont uniques au monde, qui peuvent être un pilier pour le développement de notre pays grâce au tourisme. »« C'est une guerrière ! »La saison des pluies inonde de nombreuses zones du parc, obligeant les écogardes à marcher plusieurs heures dans des endroits marécageux. Ludovic, un écogarde, admire la bravoure de Bertille : « C’est un travail difficile et, habituellement, les femmes ne sont jamais motivées pour le faire. Pour protéger notre vie et celles des animaux, nous avons suivi une formation quasi-militaire. Nous affrontons régulièrement des braconniers armés, mais elle se défend toujours bien. C'est une guerrière ! »Bertille se souvient de son frère qui rêvait de devenir écogarde pour préserver ce patrimoine, mais il a été tué dans la fleur de l'âge en 2013 par des hommes armés dans le champ de ses parents : « Ce qui est certain, c'est que mon frère décédé voulait être un héros de la conservation. Pour honorer sa mémoire, j'ai décidé de poursuivre le combat jusqu'au bout. Je pense qu'il est fier de moi là où il est. »Alors que le parc Manovo-Gounda Saint Floris est classé au patrimoine mondial de l'Unesco en péril, Bertille et ses compagnons travaillent d'arrache-pied pour sauver ce joyau.À écouter aussiReportage Afrique - Centrafrique: la lutte du parc national Manovo-Gounda Saint Floris contre le braconnage [2/3]
10/14/20232 minutes, 9 seconds
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Centrafrique: la lutte du parc national Manovo-Gounda Saint Floris contre le braconnage [2/3]

La réserve animalière du parc national Manovo-Gounda Saint Floris, situé au nord-est de la Centrafrique, est en phase de restructuration depuis trois ans. En partenariat avec l’Unesco et l’ONG Wildlife Conservation Society Program, le gouvernement centrafricain, grâce au financement de la Norvège, fait de son mieux pour sauver la faune et la flore. Des écogardes s’impliquent également pour protéger ce parc des braconniers étrangers et des chasseurs locaux. Il est 1h du matin, derniers préparatifs pour les écogardes avant leur mission nocturne. Un groupe de braconniers armés vient d'être filmé par les caméras de surveillance. L'équipe se rassemble sous le drapeau pour recevoir les consignes du chef. Dans cette forêt profonde et dense, la météo annonce des pluies torrentielles dans les prochaines heures. Mais les écogardes ont un mental d'acier. Sabone Fortus est chargé de la lutte anti-braconnage. « Là, c'est notre travail, on organise des patrouilles partout dans le parc. La faune et la flore sont des richesses, et une richesse mérite d'être protégée. Si on n'arrive pas à protéger cette richesse, nous ne rendons pas service à notre pays. »Arrestation de braconniersÉquipés de kalachnikovs, d’appareils de communication satellitaire et de lampes torches fixées sur la tête, ces hommes ont reçu l’ordre de capturer les braconniers. Les armes chargées en position de tir, les éclaireurs balaient la zone et surprennent les traqueurs.Ces écogardes – hommes et femmes – possèdent une excellente connaissance du territoire. Dans sa tenue couleur kaki, Bertille est satisfaite de la mission accomplie. « En tant qu'écogarde, je me dois de protéger les animaux de mon pays jusqu'aux trois dernières gouttes de mon sang. Si les braconniers tentent, ils m’auront sur leur chemin. »Sous le ciel étoilé, les trois braconniers arrêtés sont amenés vers la zone d'extraction où un véhicule 4×4 les attend. Alain Camille est le chef de troupe. « Ils seront transférés à la justice pour être sanctionnés en fonction de leurs fautes. Nous avons fait notre travail, c'est à la justice de faire le reste. »Chaque année, les écogardes arrêtent une centaine de braconniers locaux et étrangers venus du Tchad, du Yémen, du Niger et du Soudan qu’ils remettent aux gendarmes. Et même si les conditions de vie sont dures, ces hommes savent qu'ils sont les yeux, les oreilles et les gardiens de ce patrimoine.À écouter aussiReportage Afrique - Centrafrique : la difficile renaissance du parc national Manovo-Gounda Saint Floris [1/3]
10/13/20232 minutes, 3 seconds
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Centrafrique: la difficile renaissance du parc national Manovo-Gounda Saint Floris [1/3]

Créée en 1933, la réserve animalière Manovo-Gounda Saint Floris a été inscrite au patrimoine mondial de l’Unesco en 1988. Mais depuis le coup d’État de 2013 et la longue période d’insécurité qui a suivi, les braconniers étrangers, les groupes armés et les chasseurs locaux y déciment les espèces protégées de ce parc et poussant l’Unesco à le classer parmi les patrimoines en périls. En 2019, grâce au financement de la Norvège, le gouvernement centrafricain, en partenariat avec l’Unesco et l’ONG Wildlife Conservation Society Program (WCS), a lancé un vaste projet pour sauver ce patrimoine. Le jour se lève progressivement sur la réserve animalière du Manovo-Gounda Saint Floris. Comme par enchantement, un calao vient se poser sur la pancarte de l'entrée du parc et chante la bienvenue.Ce joyau de la nature s’offre sur une étendue de 17 400 km2. Abandonné après la crise militaro-politique de 2013, il est aujourd’hui classé parmi les patrimoines en péril de l'Unesco. Lui redonner une seconde vie, c’est à quoi se sont attelés le gouvernement et ses partenaires. Jérémie Ndallot-Olobanda est expert à la direction Générale des Eaux, Forêts, Chasse et Pêche.« L'état a jugé mieux de signer un accord de partenariat public et privé avec WCS pour gérer durablement le complexe des aires protégées, qui était un écosystème fragile. WCS est en train de faire un travail soigné et les animaux qui avaient fui le parc commencent à revenir. Nous sommes en train d'aller vers une gestion durable de nos biodiversités, notamment la faune et la flore. »Mais sur le terrain, la mission de la Wildlife Conservation Society s'avère difficile. Felin Twagirashyaka, directeur Pays de WCS RCA évoque les défis à relever.  « Le parc étant déjà abandonné depuis plusieurs années, nous sommes en train de le récupérer petit à petit. Nous espérons que d'ici à deux ou trois ans, nous allons récupérer la totalité. Parce que si on ne fait pas ça, le site risque de perdre son statut. Notre principal défi reste la sécurité parce qu'elle est encore volatile dans la zone. »« Un retour progressif de la faune »L'équipe de l'Unesco a constaté des avancées significatives. Aujourd'hui, le site est sécurisé sur un rayon de 8 000 km2, le braconnage a baissé grâce au travail des écogardes, les infrastructures détruites sont en cours de réhabilitation. Des caméras de surveillance ont même signalé le retour de populations d'éléphants, de lions, de léopards, de girafes, de buffles et autres.« Ce sont des signes probants qui témoignent du retour progressif de la faune. Lors de la 45e session du patrimoine mondial, l'échéance a été donnée jusqu'en 2025 à la RCA pour évaluer l'état de la faune et le progrès réalisé, et surtout d'avoir un programme réaliste pour le retrait du parc Saint Floris de la liste du patrimoine mondial en péril », confie Dodé Houehounha, Chef du Secteur Culture de L'Unesco pour l’Afrique centrale. Mais un autre défi majeur s'impose. Dans cette zone, les communautés vivent essentiellement de chasse, de pêche et de cueillette. Grâce au financement de la Norvège, L'Unesco et WCS continuent de sensibiliser les autorités locales ainsi que les habitants sur la préservation de la faune et de la flore tout en développant des activités socioprofessionnelles pour donner du travail à cette population démunie.
10/12/20232 minutes, 20 seconds
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Sénégal: en Casamance, des épis pour lutter contre l'érosion

Sur les côtes de la Casamance, au sud du Sénégal, et sur les nombreuses îles du fleuve Casamance, des dizaines de mètres sont grignotés chaque année par l’érosion. Une nouvelle méthode douce est expérimentée pour limiter ce phénomène avec de bons résultats : des épis à base de bois et de feuilles de palmier sont installés sur le rivage pour retenir le sable.
10/11/20232 minutes, 21 seconds
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Nettoyage ethnique à l'ouest du Darfour: les viols comme arme de guerre [3/3]

Au Darfour occidental, dont la capitale El-Geneina borde le Tchad voisin, la guerre a pris une tournure ethnique. Alors que l’armée régulière est restée cantonnée dans son quartier général, la zone est sous le contrôle quasi intégral des paramilitaires et des milices arabes qui leur sont affiliées. La plupart des 420 000 réfugiés qui ont fui au Tchad sont Massalit. Ils dénoncent une opération de nettoyage ethnique. Parmi eux, de nombreuses femmes ont été victimes de viol. De notre correspondant dans la région,Dans la cour d’une école désaffectée, nous retrouvons Rabab. Elle ne donnera pas son vrai prénom. La jeune femme de 23 ans est artiste. Elle peignait des fresques révolutionnaires sur les murs de sa ville. Alors que les combats faisaient rage à El-Geneina, elle s’est réfugiée sous un lit dans l’internat de l’université. « Des soldats sont entrés dans l’internat. Ils avaient une liste. Ils cherchaient des gens en particulier. Mon nom était sur la liste », raconte-t-elle. « Ils portaient l’uniforme des Forces de soutien rapide, des armes et des turbans. Ils m’ont embarquée dans leur voiture. Sur le chemin, ils nous frappaient. Ils disaient « ta famille, tu ne les retrouveras plus jamais ». Ils nous avaient bandé les yeux. Je me suis retrouvée dans un « furgan », un campement des Arabes nomades. Nous étions 50 filles. Ils faisaient du commerce de filles avec d’autres miliciens. Certaines étaient violées, d’autres détenues contre une rançon, et certaines étaient mariées de force. »À lire aussiNettoyage ethnique à l'ouest du Darfour: des fossoyeurs pour cacher des crimes de guerre« J'étais au milieu d'eux. Je ne pouvais pas m'échapper »Au bout de 10 jours de captivité, Rabab, est parvenue à s’échapper. D’autres victimes témoignent. Mariam a été ciblée, car son mari était un militant des droits de l’homme. « Le 15 juin au matin, les Forces de soutien rapide sont venues avec leurs voitures. Ils ne viennent pas au hasard. Ils savaient où étaient les maisons des activistes. Moi, depuis 10 jours, je ne savais pas où était mon mari, s’il était vivant ou mort », se souvient-elle. « Ce matin-là, j'étais juste avec la famille, mes grands-mères, des enfants. Ils ont mis le feu à la maison, pillé nos affaires. Ensuite, ils sont venus vers moi. Me demandaient : “où est ton mari ?! On va te brûler vivante”. Il y avait quatre soldats autour de moi. L’un d’eux m’a mis un couteau sous ma gorge. J’étais au milieu d’eux. Je ne pouvais pas m’échapper. »« Le viol fait partie d'une stratégie »Dans les camps de réfugiés, presque aucune aide psychologique n’existe pour ces victimes. Zahra est l’une des rares à proposer son soutien. Elle travaille depuis 15 ans dans une organisation qui lutte contre les violences faites aux femmes.« Ils utilisent le viol comme un outil de nettoyage ethnique. C’est un acte de provocation envers les communautés qu’ils jugent inférieures », explique Zahra. « Ils se targuent d’avoir violé dans telle tribu 100 ou 200 femmes, c’est une fierté pour eux. Le viol fait partie d’une stratégie. Ils utilisent tous types de violence pour atteindre les gens psychologiquement, pour toucher leur futur, leur famille, leur communauté. »À lire aussiNettoyage ethnique à l'ouest du Darfour: témoignages de rescapésDu 24 avril au 20 mai, Zahra et ses collègues ont recensé 60 cas de viols. Puis, il leur était impossible de compter face à la violence des combats. Dans les camps se trouvent des centaines de victimes, estime Zahra. Beaucoup se terrent dans le silence. Depuis 2003 au Darfour, le viol a été systématiquement utilisé comme arme de guerre. En toute impunité. 
10/10/20232 minutes, 34 seconds
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Nettoyage ethnique à l'ouest du Darfour: des fossoyeurs pour cacher des crimes de guerre [2/3]

Au Darfour occidental, dont la capitale El-Geneina borde le Tchad voisin, la guerre a pris une tournure ethnique. Alors que l’armée régulière est restée cantonnée dans son quartier général, la zone est sous le contrôle quasi intégral des paramilitaires et des milices arabes qui leur sont affiliées. Dans les camps de réfugiés au Tchad, notre correspondant a rencontré plusieurs témoins qui racontent comment les paramilitaires ont organisé l’enterrement de centaines de corps dans des fosses communes. De notre correspondant dans la région,Nous l’appellerons Ahmed. Cet étudiant d’El-Geneina, réfugié au Tchad, craint pour sa sécurité. Au mois de juin, il a fait partie du groupe de personnes chargées de ramasser les cadavres qui jonchaient les rues de la ville.   « Il y avait des corps le long des routes, dans les maisons aussi. Il y avait beaucoup d’enfants, des femmes, des vieillards, mais surtout des jeunes hommes », explique-t-il. « Moi, je travaillais chaque jour entre 8h et 14h. J’ai ramassé une quantité inimaginable de corps. Chaque jour, on remplissait la benne d’un camion pouvant transporter plus d’une cinquantaine de cadavres. On en remplissait jusqu’en haut. Certains jours, le camion faisait plusieurs allers-retours. »Selon plusieurs témoins qui ont tous souhaité rester anonymes, des chefs de milices arabes, en coordination avec les Forces de soutien rapide, ont missionné les équipes du Croissant-Rouge soudanais pour nettoyer la ville. Les équipes de fossoyeurs avaient l’interdiction de prendre des photos et de décompter le nombre de morts. « Un jour, je me suis échappé jusqu’à la fosse commune. Je me suis faufilé entre la cabine du chauffeur et la benne du camion. Les gardes des Forces de soutien rapide ne m’ont pas vu », ajoute Ahmed. « Le chauffeur a pris la direction d’un site appelé Turab el-Ahmar, à l’ouest d’El-Geneina. Il y avait une pelleteuse qui creusait le trou. Puis, un camion arrivait, levait la benne, et déversait les corps et ainsi de suite. »À lire aussi Nettoyage ethnique à l’ouest du Darfour : témoignages de rescapésAu moins 13 fosses communesLes Nations unies ont affirmé détenir des preuves crédibles de l’existence d’au moins 13 fosses communes autour d’El-Geneina. Arbab Ali, membre d’une organisation de défense des droits humains, estime que plus de 4 000 cadavres auraient pu être ensevelis. Sur son téléphone, une vidéo montre un camion déversant des dizaines de corps, jetés comme des ordures sans aucun rite funéraire.  « À partir du 20 juin, les FSR et les milices arabes ont commencé une opération de dissimulation des crimes commis. Ils ont formé un comité qui avait l’ordre de collecter les cadavres et de les enterrer dans des lieux éloignés des regards », dit Arbab Ali. « Aujourd’hui, grâce aux satellites, il est possible d’identifier certains lieux. Il va être très compliqué pour les FSR de nier les crimes commis alors qu’il y a des milliers de témoins, de photos et de vidéos. Ce sera à la Cour pénale internationale ou bien à une Cour nationale de trancher, si un jour, elle est constituée pour faire la lumière sur les crimes commis à El-Geneina. »La Cour pénale internationale a annoncé en juillet l’ouverture d’une nouvelle enquête pour crimes de guerre au Darfour. Elle vient s’ajouter aux investigations démarrées en 2005 suite au conflit précédent qui avait fait plus de 300 000 morts dans la région. Mais les réfugiés ici dans les camps sont sceptiques face à la lenteur de la justice internationale. 20 ans plus tard, aucune condamnation n’a encore été prononcée. Ils craignent que l’histoire se répète. 
10/9/20232 minutes, 31 seconds
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Nettoyage ethnique à l'ouest du Darfour: témoignages de rescapés [1/3]

En un peu plus de cinq mois, la guerre qui oppose l’armée régulière soudanaise du général al-Burhan aux Forces paramilitaires de soutien rapide du général Hemetti, a fait des milliers de morts civils et déplacé plus de 5 millions de personnes. Si Khartoum est l’épicentre des combats, les affrontements se sont étendus à presque tout le pays, et notamment au Darfour, région meurtrie par les conflits depuis 2003. Au Darfour occidental, dont la capitale el-Geneina borde le Tchad voisin, la guerre a pris une tournure ethnique. Alors que l’armée régulière est restée cantonnée dans son quartier général, la zone est sous le contrôle quasi intégral des paramilitaires et des milices arabes qui leur sont affiliées. Plus de 420 000 personnes ont franchi la frontière du Tchad. Dans les camps de réfugiés, les rescapés racontent les massacres et dénoncent un « nettoyage ethnique ». De notre correspondant dans la région,Dans l’enceinte de l’hôpital d’Adré, un homme se tient péniblement sur des béquilles. Sa jambe est enroulée de bandages. Il s’appelle Al-Saddiq, il était pompiste à el-Geneina dans une station essence du quartier Jamarik. Le 15 juin, deux soldats des Forces de soutien rapide ont défoncé la porte de sa maison et lui ont tiré dessus. Une balle a traversé sa cuisse. Pendant cinq jours, il s’est vidé de son sang. « Au début, la guerre a commencé entre l’armée et les paramilitaires. Mais à el-Geneina, c'est devenu un conflit où les tribus arabes, les Janjawids, se sont unies avec les paramilitaires, pour cibler une seule communauté : la tribu Massalit. Et plus largement, tous ceux qui ont la peau noire et qu’ils considèrent comme des esclaves », raconte-t-il.À lire aussiAu Tchad, les réfugiés disent l'horreur du Darfour: «Notre quotidien, c’étaient les tirs, le viol et la mort»Rassembler des preuves qui attestent des crimes de guerreConstitués en groupes d’auto-défense, certains Massalit ont pris les armes pour défendre leur communauté. Ils ont été dépassés en nombre, à court de munitions, et le conflit a pris la tournure d’un véritable carnage entre le 15 et le 17 juin, après l’assassinat du gouverneur Massalit détenu par les paramilitaires. En quelques jours, près de 100 000 personnes ont pris la fuite vers le Tchad. Des centaines de blessés affluaient dans les hôpitaux.Sous un préau en paille, Arbab Ali fait défiler des photos sur son téléphone. On y voit des corps jonchant les rues, des images d’obus et de mortiers tombés sur des habitations et quartiers peuplés de civils. « Nous réunissons tout type de preuves nous permettant d’attester que des crimes de guerre ont été commis contre des civils dans cette région du Darfour occidental et que les communautés Massalit ont subi une opération de nettoyage ethnique et de génocide pour la deuxième fois depuis 2003 en un temps record. Nous mettrons ces informations à disposition de la justice, le jour où elle se penchera sur cette question et que sonnera l’heure pour les criminels de rendre des comptes », explique Arbab Ali.À lire aussiGuerre au Soudan: une situation humanitaire alarmante dans la ville tchadienne d'AdréUn registre des morts, blessés et disparusSur des feuilles volantes, ces activistes tiennent un registre des morts, des blessés, des disparus au cours des évènements. Des milliers de noms sont recopiés soigneusement à la main. Parmi eux, apparaissent ceux de personnalités influentes de la communauté Massalit, systématiquement visées, dénonce Taha Abdallah, membre de l’association Juzur. « Pendant les évènements, nous avons été témoins d’une opération d’élimination ciblant les activistes, les défenseurs des droits humains, les élites dans différents domaines : qu’ils soient médecins, professeurs ou ingénieurs », décrit Taha Abdallah. « Les miliciens avaient constitué des listes présentes à chaque check-point des Forces de soutien rapide. Ils avaient les photos et les noms des personnes recherchées. S’ils trouvent ton nom sur la liste, c’est fini pour toi. »Les Forces de soutien rapide du général Hemetti nient toute implication dans ce qu’ils décrivent comme un conflit tribal. Pourtant, ils contrôlent aujourd’hui une ville, el-Geneina, vidée de la plupart de ses habitants.
10/8/20232 minutes, 34 seconds
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Élections au Liberia: le regard de la jeunesse sur la politique [3/3]

Au Liberia, selon la Commission nationale électorale, près de la moitié des électeurs sont des jeunes. Parmi eux, certains n’ont jamais voté avant. Comment cette génération post-guerre civile va-t-elle se positionner ? Quelles sont ses attentes ? De notre envoyée spéciale à Monrovia,Abednego a 21 ans. Il fait partie de ces jeunes, qui n’ont pas connu la guerre civile. Cet étudiant ira voter pour la première fois mardi : en parallèle, il veut s’investir personnellement dans le développement de son pays. « Au Liberia, souvent, les gens qui travaillent dans le secteur public, n’ont pas une bonne application correcte des consignes instruites par le gouvernement. J’ai donc choisi d’étudier l’administration publique pour que les programmes du gouvernement soient effectivement mis en œuvre, afin que tous les Libériens en bénéficient ».  « C'est important de voter »À près de deux heures de route, parsemée de nid de poules, au nord-ouest de Monrovia, se dresse Brewerville. Georgina Kouso a 21 ans : baccalauréat en poche, cette jeune a dû interrompre sa scolarité, suite à la naissance de sa fille, âgée maintenant de deux ans et qu’elle continue d’éduquer, avec l’aide ses parents. « C’est important de voter. C’est un droit de citoyen. Après le vote, j’espère qu’il y aura des changements, notamment en matière d’éducation. J’espère que l’on va construire des routes et relancer l’économie. »À écouter aussiLiberia: un système de santé toujours à bout de souffleÀ quelques encablures, à l’abri d’une boutique en tôle, Edouard Johnson, un jeune diplômé au chômage, joue aux dames avec d’autres jeunes sans emploi. Pour lui, quelle que soit la personne élue, il/elle devra assainir l’environnement. « Nous avons besoin d’un nouveau Liberia. Pour cela, il nous faut lutter contre la corruption, poursuivre les personnes qui ont vidé les caisses de l’État depuis plusieurs années déjà ». Des jeunes divisésEn 2017, de nombreux jeunes avaient soutenu le président sortant. Mais aujourd’hui, le contexte a changé, comme le constate le politologue Abdullah Kiatamba.« Les jeunes majeurs seront divisés. Comment cela va se répartir : je ne le sais pas encore. Il y a d’un côté, les jeunes qui admirent l’image de Weah comme étant une icône du football. De l’autre, lors des meetings de campagne, j’ai constaté que de nombreux jeunes ont basculé du côté de l’opposant Joseph Boakai, parce qu’il y a un fort sentiment de déception parmi ces jeunes vis-à-vis du président sortant. » Signe de cet intérêt des jeunes pour la politique : ils étaient nombreux sur le terrain, à se mobiliser, pour animer les meetings lors de cette campagne électorale.À écouter aussiAu Liberia, l'absence de justice hante les victimes des guerres civiles
10/7/20232 minutes, 16 seconds
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Liberia: un système de santé toujours à bout de souffle [2/3]

Après l’électrochoc causé par l’épidémie du virus Ebola en 2014 qui avait révélé les insuffisances des structures hospitalières, le Liberia s’est confronté à la pandémie de Covid-19. A-t-on tiré les leçons de ces crises ? Reportage au centre de santé de Benson ville, à une vingtaine de kilomètres à l’est de Monrovia. De notre correspondante à Monrovia,Visite guidée du centre de santé de Bensonville. Tenneh Brochius, la responsable de cette structure nous conduit d’abord vers la sage-femme : ici, les consultations se font trois fois par semaine. Nous entrons ensuite dans la section de la médecine interne. Et comme tous les services de cette structure, le personnel se heurte à un blocage : le manque de matériel. « Les conditions de travail ici sont difficiles, témoigne un médecin qui a voulu garder l'anonymat. Il y a d’abord la distance. Ensuite, nous n’avons pas tous les outils de travail. Quand il nous manque des médicaments, nous devons les acheter. Si les médicaments ne sont pas disponibles, nous donnons aux malades une ordonnance pour qu’ils aillent les acheter eux-mêmes. »      « Nous sommes dans la salle des vaccins. Voici deux congélateurs. Ce sont des dons de l’Unicef. » Ces deux congélateurs sont les seuls acquis de la crise Ebola. Car depuis, ce centre de santé manque de tout, malgré l’appui du gouvernement, qui vient ponctuellement faire la liste des besoins. « Concernant le paludisme, c’est une maladie prise en charge par le gouvernement, et nous sommes sûrs à 80-90 % que nous serons pourvus en traitement. En revanche, les médicaments essentiels ne sont pas toujours disponibles », regrette Tenneh Brochius, responsable de la structure. Un manque de personnel qualifiéCette situation préoccupe les professionnels de ce domaine. « Depuis la crise du virus Ebola, seulement 17% des personnels de santé ont été formés, se désoleDeemit Dearzrua, secrétaire général des travailleurs de la santé. Nous voulons suivre des formations continues. Car toutes les maladies ont leurs propres propriétés. »   Depuis l’épidémie d’Ebola, les autorités affirment miser sur la prévention, mais elles se heurtent à des difficultés. « Nous ne parvenons pas à instituer des frais : les consultations sont gratuites. Par ailleurs, l’état des routes est un facteur de blocage. Parfois, nous avons des approvisionnements de médicaments dans le centre de Monrovia, mais la distribution pose parfois problème », signale Varfee Tulay, vice-ministre de la Santé chargé de la Planification au ministère de la Santé. Le ministère de la Santé libérienne a déposé une proposition de loi, afin d’améliorer la couverture médicale dans le pays.  À lire aussiLes Libériens en difficulté face à l'inflation avant les élections générales
10/6/20232 minutes, 25 seconds
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Au Liberia, l'absence de justice hante les victimes des guerres civiles [1/3]

Si des procédures judiciaires ont été enclenchées en Suisse, en France et aux États-Unis, les survivants des guerres civiles qui ont déstabilisé le Liberia entre 1989 et 2003 restent traumatisées et frustrées de ne voir qu’aucun ancien chef de guerre n’a été jugé dans leur propre pays. De notre correspondante à Monvoria,Esther Dahn se déplace difficilement sur ses deux béquilles. Cette vieille femme de 68 ans a perdu une jambe lors du massacre survenu le 29 juillet 1990 dans l’église luthérienne Saint-Pierre de Monrovia. Ses deux bras, blessés par balles, sont toujours fragiles. De ce massacre, où près de 600 personnes ont été tuées par les hommes des Forces armées du Liberia, une seule image reste dans sa tête : « Avec mon mari et mes six enfants, nous nous sommes réfugiés dans l’église luthérienne Saint-Pierre, pensant y être en sécurité. Mais les hommes armés y sont entrés, ils ont tué mon mari et quatre de mes enfants. »Esther Dahn tremble encore de douleur en évoquant cet épisode. Elle ose à peine envisager un procès de ses agresseurs. « Je ne me souviens plus de leur visage. Je ne pense pas qu’on puisse les juger. De toute façon, j’ai trop peur. Je souffre encore de tout ça. »À lire aussiUn ancien militaire libérien placé en détention provisoire en FranceL'impunité des anciens chefs de guerrePeterson Sonyah a perdu son père dans cette église. Il avait 16 ans. Aujourd’hui, il dirige l’association des survivants de la guerre civile, qui soutient 4 800 victimes. Son combat : plaider pour la création d’une Cour capable de juger ces crimes au Liberia. « Les leaders politiques qui ont dirigé le pays jusqu’à présent ont évité de résoudre cette question de la justice. La culture de l’impunité règne dans le pays. Le système judiciaire ne fonctionne pas. Il faut créer une Cour pour juger les crimes de guerre : les survivants en ont besoin. »Les anciens chefs de guerre jouent encore un rôle dans la vie politique et ne semblent pas inquiétés par la justice. Le rapport de la Commission vérité et réconciliation est resté lettre morte. Résultat : la culture de l’impunité s’est banalisée. « Tant que l’on ne résout pas la question des crimes commis pendant la guerre civile, la culture de l’impunité va continuer de se développer, affirme Adama Dempster, défenseur des droits de l’Homme. L’État de droit n’est pas appliqué. Il y a de plus en plus de cas de morts suspectes et il n’y a pas d’enquête. Le fait que d’anciens enfants-soldats ne soient pas passés par un processus de réhabilitation, cela a eu un impact négatif sur la jeune génération, qui s’est habituée à consommer de la drogue. »Sur 20 candidats à l’élection présidentielle, au moins deux ont mentionné le devoir de justice dans leur programme de campagne.À lire aussiLiberia: une histoire douloureuse
10/5/20232 minutes, 19 seconds
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Présidentielle à Madagascar: la politique est loin d'être la priorité des étudiants

Le vote des jeunes devrait être, comme en 2018, convoité par les 13 candidats à l'élection présidentielle prévue le 9 novembre prochain à Madagascar. Et pour cause : sur la Grande Île, 65% de la population a moins de 25 ans. Mais pour nombre d'entre eux, la politique est loin d'être la priorité. C'est le cas des étudiants de l'université d'Antananarivo, durement touchés par la hausse du coût de la vie et le manque de moyens alloués à l'enseignement supérieur. Et sur le campus d'Ankatso, la rentrée a été particulièrement difficile. De notre correspondante à Antananarivo,Téléphone à la main, les étudiants photographient les affiches qui tapissent les murs de l’université. Les résultats des examens de l’année passée sont tombés. Mitantsoa, 18 ans, est étudiante en médecine. Elle fait partie des déçus du jour : « J’ai déjà eu les résultats, je redouble la première année. J’ai pleuré aux résultats. Je ne m’y attendais pas du tout. »Une incompréhension et un certain sentiment d’injustice. Entre la hausse du coût de la vie, des bourses distribuées en retard, Luc, président de l’Association des étudiants en droit, pointe des conditions intenables : « Il y a des étudiants qui viennent le ventre vide, seulement avec un peu d’eau. Donc ils sont obligés de trouver une autre source de revenus. Ils cherchent une alternative de survie, pour ne pas mourir à la fac. Alors, ils doivent délaisser un peu les études. Ils ne peuvent pas étudier complètement. »« Ils ne vont pas aller voter »À quelques mètres seulement des couloirs de l’université, Léonce, étudiant en deuxième année d’économie, enfile une tout autre casquette. Il est à la tête d’un multiservice, un centre d’impression et de photocopie accolé à la faculté. Cette activité lui rapporte 7 000 ariary par jour, juste de quoi financer ses fournitures scolaires. « Pour l’instant, cette situation me convient, car je peux à la fois étudier et travailler, confie-t-il. J’envisage de recruter une autre personne qui assurera le service quand je dois aller en cours. Je survis grâce à ce travail, mais quand j’obtiendrai mon diplôme, je trouverai un emploi mieux rémunéré. »Léonce ne compte pas sur l’élection présidentielle pour améliorer sa situation. Un sentiment largement partagé à l’université, estime, de son côté un autre responsable d’association étudiante, qui pointe une instrumentalisation du vote des jeunes : « Je ne cache pas qu’il y a des politiciens qui viennent ici pour nous parler, ils nous proposent de l’argent pour faire des manifestations. C’est un phénomène récurrent ici à l’université. En ce moment, en contexte présidentiel, ça prend beaucoup plus d’ampleur. Mais les étudiants, eux, nous sommes sûrs et certains qu’ils ne vont pas aller voter. »Le 9 novembre prochain, les 18-35 ans représenteront à eux seuls près de la moitié des électeurs, selon les chiffres de la Commission électorale nationale indépendante.À lire aussiMadagascar: les candidats à l’élection présidentielle s'affrontent par médias interposés
10/4/20232 minutes, 20 seconds
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À Tunis, le musée du Bardo rouvre ses portes après deux ans de fermeture

Le plus grand musée de Tunisie, le deuxième d’Afrique et surtout l’une des plus grandes collections de mosaïques antiques au monde rouvre ses portes. Le musée du Bardo avait été fermé en juillet 2021, au moment où le président Kaïs Saïed s’était emparé des pleins pouvoirs. Jouxtant le Parlement, le site était considéré comme sensible. Sa réouverture fait la joie des visiteurs, mais surtout de sa directrice. De notre correspondante à Tunis, En cette matinée de début de semaine, les visiteurs arrivent par petites grappes. Des Tunisiens établis à l’étranger, quelques étudiants et des touristes. Puis arrive Fatma Naït Yghil, la directrice du musée. Impossible de la rater, elle et son grand sourire : « Dès le premier jour, c’était un grand bonheur, on a eu une croisière, on a accueilli à peu près 800 voyageurs. Il y a eu 14 bus de touristes. Il y a des Tunisiens aussi qui sont venus, on a eu tous les âges. Les enfants, les adultes, les retraités. C’était un vrai bonheur d’assister à cette renaissance. »Fermé à la suite de la prise des pleins pouvoirs par Kaïs Saïed en 2021, endeuillé par un attentat en 2015, le musée du Bardo – installé dans un ancien palais beylical – a une histoire intimement liée à celle de la Tunisie. Pas question de parler politique, la directrice préfère insister sur le fait qu’elle et ses équipes ont su transformer l’épreuve de la fermeture en opportunité : « On en a profité pour faire les travaux d’entretien, de rénovation qu’on ne pouvait pas faire quand il était ouvert au public. Et vous allez découvrir cela avec nous, vous allez voir qu’il y a eu beaucoup de rénovations, souligne la directrice du musée. Il n’y avait pas ces vitrines avant. C’est la poterie de Sejnene qui est classée sur la liste du patrimoine immatériel de l’Unesco. »À lire aussiL’Afrique des musées: Le musée national du Bardo en TunisieUne fermeture pour une nouvelle jeunesseLumières, peintures, scénographie, le musée s’est refait une jeunesse. De nouvelles salles ont également été ouvertes. Dans les dédales du musée, les époques se mêlent. Les langues aussi. Dès qu’ils ont appris que le musée rouvrait enfin, Jean-Michel et son épouse, deux touristes venus de la Drôme en France, n’ont pas résisté à la tentation de le découvrir. « On vient de passer une heure avec notre guide et là il nous a laissé un petit moment tranquille pour prendre des photos et revoir certaines pièces qui nous intéressaient. Il y avait bien sûr Ulysse attaché à son mât avec les sirènes, Neptune. Je trouve ça extrêmement riche en histoire. Les mosaïques sont magnifiques, je suis même étonné qu’on puisse marcher sur certaines. C’est un travail d’entretien et de restauration qui est vraiment très bien fait », s’enthousiasme Jean-Michel.Avant la fermeture du musée, l’établissement tablait sur un million d’entrées par an. Des chiffres probablement trop ambitieux désormais. Pas de quoi éclipser le sourire de la directrice, trop heureuse de voir, comme elle dit, « la vie revenir » dans son musée.
10/3/20232 minutes, 30 seconds
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Sénégal: ces pêcheurs qui plongent avec des bouteilles d'oxygène malgré les risques

Au Sénégal, chaque jour, les pirogues clandestines continuent de partir vers l’Espagne. Certaines arrivent à destination, d’autres sont interceptées par les autorités ou disparaissent en mer. L’une des raisons de la recrudescence des départs cette année est la raréfaction du poisson, et la difficulté à faire face à la montée des prix. À Dakar, certains pêcheurs prennent le risque de chasser les poissons en plongée sous-marine avec des bouteilles d'oxygène, malgré les nombreux accidents, et l’impact négatif sur l’environnement. 
10/2/20232 minutes, 22 seconds
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«Et vint la liberté», le film mythique de l'indépendance guinéenne, conté par son réalisateur

C’est un film mythique que tous les Guinéens ont déjà vu. Et vint la liberté est un documentaire de 40 minutes, une fresque historique qui raconte la longue lutte des Guinéens contre le colonialisme français et pour l’indépendance de leur pays. Chaque 2 octobre, à l’occasion de la fête de l’indépendance, le film est diffusé à la télévision nationale. Rencontre avec Sékou Oumar Barry, son réalisateur, l'un des pionniers du cinéma guinéen. 
10/1/20232 minutes, 33 seconds
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Côte d'Ivoire: les pagnes commémoratifs, de véritables morceaux d'histoire

Imprimés à l’occasion de grands événements, les pagnes commémoratifs déroulent chacun un pan de l’histoire africaine. De notre correspondante à Abidjan,Inutile de chercher des pagnes commémoratifs dans les rues d’Abidjan. Les étals des vendeuses sont réservés au neuf ! C’est ce qu’explique madame Anno, une couturière qui tient boutique aux II Plateaux, à Cocody. Pour trouver des pagnes des grands événements, une seule solution : « On peut les trouver chez nos mamans ! Nos mamans, ce sont les dames d’avant, elles gardent toujours les vieux souvenirs. Ce genre de pagnes, nos mamans en ont beaucoup dans leurs placards… »Ce sont les femmes ivoiriennes de la génération de l’indépendance, du parti unique, puis des débuts du multipartisme, qui ont gardé les pagnes de ces événements historiques dans leurs cantines, avec les tissus de la dot et les bijoux de famille.Marie-Thérèse Camille N’Guessan est l’une d’elles. Dans son appartement d’Adjamé, elle déplie des tissus impeccables, à peine marqués aux pliures par le passage du temps… Orné d’un portrait de Henri Konan Bédié, un pagne édité à l’occasion de son accession au pouvoir.« C’est deux morceaux de pagne. J’ai cousu un ensemble avec ça. Il y a le haut, et puis le bas fendu, là. Bon, ce modèle-là, c’est un modèle de grand-mère ! Ça date de 1994 ? 1995 ? Je l’ai porté pour la cérémonie, puis je ne l’ai plus jamais porté, je l’ai gardé dans mes affaires. Et voilà que l’occasion se présente pour que je le sorte à nouveau de ma valise ! »La forte charge symbolique du pagneDes supports historiques, chargés de valeur affective, mais aussi d’une forte charge symbolique. Norbert Yao Kouassi est dessinateur chez Uniwax depuis 40 ans. C’est lui qui a créé le premier pagne du président de l’indépendance, Félix Houphouët-Boigny.« J’ai fait le portrait du président, vous voyez là ? Voilà comment je l’ai travaillé. En trame, à la main. Et quand je l’ai fini, on a essayé de construire la maquette, en mettant le café-cacao comme contre-fond. Quand on dit contre-fond, c’est le dessin qui va habiller le motif. En ce moment, c’était le parti unique. C’était un hommage au président Houphouët-Boigny, qui a développé le café-cacao. Tous les paysans ont porté ce pagne, en son temps. »La pratique a perduré, et s’est démocratisée… Les partis politiques, les Églises et même les particuliers, à l’occasion des grands événements comme les enterrements et les mariages, éditent des tissus à leurs couleurs… La CAN de football 2024, organisée par la Côte d’Ivoire, aura aussi droit à son propre pagne !À écouter aussiRDC: le pagne, toute une histoire
9/30/20232 minutes, 14 seconds
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RDC: le pagne, toute une histoire

Les pagnes en RDC, c’est toute une histoire. C’est souvent l’histoire, voire la tradition de tout un peuple que ces étoffes racontent à travers leurs différents motifs. Quelques femmes africaines nous racontent.  De notre correspondant à Kinshasa,Elle a été l’une des figures les plus marquantes du régime du président Mobutu Sese Seko. Vice-présidente du comité central du Mouvement populaire de la révolution, le parti unique, Catherine Nzuzi wa Mbombo, a aujourd’hui 77 ans. Pour elle, le pagne, c'est, depuis la nuit des temps, une mode propre à la femme congolaise. « Le pagne, c'est notre accoutrement. C'est notre façon de nous habiller. Depuis l'indépendance, c'est une tradition », souligne-t-elle.Madame Catherine Nzuzi wa Mbombo rappelle qu’il y a des pagnes frappés à l’effigie des personnalités qui ont marqué l’histoire du pays. « Lorsqu'on voulait faire plaisir au président de la République dans le cadre de la propagande, on faisait les tissus avec son effigie pour distribuer aux militants, pendant les grandes manifestations », se souvient-elle. « On pouvait les porter, et cela faisait plaisir. Le pagne du maréchal, j'ai mes propres pagnes. J'en porte toujours de temps en temps quand j'ai envie de penser à eux, de penser à lui, je porte le pagne à son effigie. »Des pagnes pour connaître l'histoireBlandine Kasongo appartient à une autre génération. Elle travaille pour le mécanisme national de suivi de l’accord d’Addis-Abeba et, pour elle, le pagne, c’est aussi une manière de faire connaître l’histoire à la population.« En voyant une maman porter un pagne avec cette effigie, ça pourrait d'emblée être une curiosité pour d'autres femmes. Elles pourraient se poser la question “c'est qui sur le pagne ?” Cela donnerait peut-être cette envie-là d'expliquer “celui-ci c'est le roi belge, celui-là c'est Lumumba”, etc. », estime Blandine Kasongo.Mais qu’en est-il des pagnes à l’effigie des personnalités étrangères que l’on trouve au Congo ? Catherine Nzuzi wa Mbombo a sa petite idée : « Le roi Baudoin est parti depuis longtemps. Et puis je ne suis pas Belge pour pouvoir continuer à porter le pagne avec l'effigie d'un Belge », dit-elle.Autres générations, autres vêtementsAncienne hôtesse de l’air, Vichy Ngalula évoque d’autres souvenirs. Le pagne a, selon elle, permis de faire avancer certains sujets de société. « J'étais encore trop jeune à l'époque. Les choses changent. Ça, c'était l'époque de nos mamans. »C’est ainsi que la robe courte, le cycliste, la mini-jupe et le pantalon, qui avaient été interdits sous le régime de Mobutu, ont pu faire leur retour au Congo.
9/29/20232 minutes, 11 seconds
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Guinée: optimistes au début de la transition, les journalistes dénoncent une liberté de la presse malmenée

Quelques mois après l’arrivée de la junte au pouvoir, la Guinée gagnait 25 places dans le classement de Reporters sans frontières, passant de la 109ᵉ place l’année précédente à la 84ᵉ, en mai 2022. Un an plus tard, en 2023, elle perdait un rang. Si les militaires avaient suscité des espoirs chez les journalistes, certains dénoncent aujourd’hui les atteintes à la liberté de la presse. Depuis le mois d’août, deux sites d’information sont inaccessibles en Guinée. ► Pour aller plus loin : Pour contourner les difficultés d’accès à Guinée Matin et à l’Inquisiteur, Reporters sans Frontières a créé des sites miroirs :LiensGuinée Matin L'Inquisiteur
9/29/20232 minutes, 14 seconds
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Dans l'Extrême Nord du Cameroun, la formation professionnelle comme remède au terrorisme

Au Cameroun, des centaines de jeunes sont formés sur des chantiers dans la région de l'Extrême Nord, marquée par un contexte économique fragile et une situation sécuritaire dégradée due à la récurrence des conflits armés autour du bassin du lac Tchad. Dans le Logone et Chari, les jeunes apprennent un métier pour éviter le piège du terrorisme. Dans le village de Arkis, à une dizaine de kilomètres de Kousseri, une bâtisse imposante faite de briques de terre cuite, se dresse majestueusement au milieu des cases. Le bruit de la table vibrante trouble le calme habituel du Sahel. Ousmanou est apprenti. Il fabrique les derniers pavés de la journée. « J'ai besoin d'une quantité de sable, d’une quantité de gravier, de ciment. Je dois mélanger tout ça ensemble, ajouter de l’eau, avant de placer le tout dans un moule qui va lui donner cette forme. Avant d'arriver ici, je ne savais pas faire tout ça. »Nous sommes sur le futur site du magasin de stockage de Arkis. Au moins 150 jeunes déscolarisés et sans emploi du Logone et Chari ont été formés pendant six mois et ont participé à la construction de ce magasin. Ils ont été initiés à la fabrication des pavés, des blocs de terre cuite et des tuiles. « Au vu de ce que nous avons observé, ces jeunes sont opérationnels, témoigne Camille Bounkeu, l'un de leurs formateurs, membre de la Mission de promotion des matériaux locaux. À les voir faire ce qu'ils ont appris, nous pouvons dire qu'ils sont prêts à exercer le métier. Qu’il s’agisse de produire les matériaux, ou de les assembler. Apprendre un métier est un privilège dans cette zone quasi désertique où les opportunités sont rares. »Réduire la pauvretéLutter contre le terrorisme et encourager l'entrepreneuriat, telle est l'ambition du Programme national de développement participatif (PNDP) dans la région de l'Extrême Nord du Cameroun. Depuis près de dix ans, le Programme occupe des jeunes avec la construction de mares, de routes ou de maisons. « L'objectif est de réduire la pauvreté à la base. Il a été mis en place pour que les jeunes ne soient pas attirés par l'appât du gain de la secte Boko Haram », explique Roger Eyenga, qui coordonne le PNDP dans la région.Sur les rives du Logone, des jeunes désœuvrés cèdent parfois à l'appel du terrorisme. La secte Boko Haram a déjà perpétré plusieurs attaques dans cette partie du pays. La mairie de Kousseri souhaite que de telles initiatives soient multipliées. « Si le gouvernement permet l’implantation de ce type de projets dans tout le département, c’est une bonne chose parce que nos jeunes ne seront plus désœuvrés, car ils seront employés dans ces différents projets. Et surtout voir le terrorisme reculer », avance Toudjani Alifa, adjoint au maire.Au total, plus de 6 000 jeunes ont bénéficié de ces programmes ces dix dernières années, selon le PNDP. Des programmes financés à hauteur de 1,4 milliard de FCFA, soit environ 2 millions d'euros.Cameroun : Sur les traces de Boko Haram  
9/27/20232 minutes, 14 seconds
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Dans le nord du Bénin, la gestion des parcs nationaux dans un contexte de pression terroriste [3/3]

Depuis 2019, le nord du pays a été le théâtre d’attaques, d’abord contre les forces de sécurité, puis contre les civils. Selon le bilan global donné par l’armée, elles ont tué 25 soldats et une quarantaine de civils. 63 terroristes ont été neutralisés. Les militaires de l’opération Mirador, déployée début 2022 pour lutter contre les terroristes et sécuriser les frontières, ont récemment accepté d’emmener plusieurs médias avec eux dans le Nord, dont RFI. De notre envoyée spéciale,Près de l’entrée du W Bénin, une plaque en pierre. Dix noms y sont inscrits, dont ceux de plusieurs rangers d’African Parks, l’ONG chargée de la gestion du parc, tués lors d’attaques il y a moins de deux ans : « Vous savez que nous sommes dans le parc national du W Bénin, dans la base opérationnelle d’Alpha Boira, à partir de laquelle nous déployons les opérations de conservation. »Le nom du W vient de la forme que prend le fleuve Niger, tout au nord. Dans sa partie béninoise, ces 7 000 km2 de nature constituent une zone sauvage dont les terroristes peuvent tirer profit et qui est donc surveillée par l'armée. La formation des rangers a dû être adaptée. « Nous ne pouvons pas rester dans un contexte qui a changé sans aussi changer un peu notre façon de fonctionner, mais aussi donner aux équipes, surtout aux rangers, des attitudes pour pouvoir opérer dans un contexte aussi particulier en toute discrétion et en évitant les zones dangereuses », explique Abdelaziz Bello, le directeur du parc.   Faune exceptionnelle Le parc de la Pendjari, plus à l'ouest, est également confronté à ce nouveau contexte sécuritaire. Il y a moins de deux semaines, African Parks annonçait la mort d'un de ses rangers dans une attaque qui a aussi tué deux soldats, à la limite de la Pendjari. Mais là aussi, l'ONG poursuit ses actions de conservation d'une faune exceptionnelle. « Nous avons plus de 360 espèces d’oiseaux et plus de 160 espèces de mammifères, décrit Orlus. En termes d’animaux phare, nous avons le lion, nous avons également les dernières populations de guépards, mais aussi de léopards, nous avons aussi la plus grande population d’éléphants en Afrique de l’Ouest. »Les populations, un aide préciseuseUne peau de guépard sèche sur le sol, devant un bâtiment orangé presque comme la terre. « Pour le moment, même s'il n'y a plus de touristes temporairement, nous faisons en sorte que les activités de conservation se poursuivent. Et que les communautés locales comprennent l'utilité de ces activités, indiqueHabteyesus Mathewos, le directeur du parc. Nous travaillons toujours avec les communautés, parce qu'elles peuvent parfois faire partie des problèmes, mais elles peuvent aussi être d'une grande aide, à condition qu'elles en tirent des bénéfices. »Parmi les défis, dans les grands parcs du Bénin et les alentours : l'accès aux ressources naturelles pour les populations. Pour éviter que naissent des conflits qui peuvent constituer un terreau fertile pour les terroristes.À écouter aussiDans le nord du Bénin, l’opération militaire Mirador face à la pression terroriste
9/26/20232 minutes, 24 seconds
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Dans le nord du Bénin, l’impact économique du spectre terroriste [2/3]

Depuis 2019, le nord du pays a été le théâtre d’attaques, d’abord contre les forces de sécurité, puis contre les civils. Selon le bilan global donné par l’armée, elles ont tué 25 soldats et une quarantaine de civils. 63 terroristes ont été neutralisés. Les militaires de l’opération Mirador, déployée début 2022 pour lutter contre les terroristes et sécuriser les frontières, ont récemment accepté d’emmener plusieurs médias avec eux dans le Nord, dont RFI. De notre envoyée spéciale,« Je ne suis pas guide touristique, mais lorsque l’on veut sécuriser un lieu, il faut savoir au moins ce que l’on veut sécuriser. » Un militaire de l’opération Mirador, en treillis, nous fait visiter le Pendjari Lodge pendant que des soldats patrouillent dans cet hôtel emblématique du parc, désormais vide.La terrasse offre une vue saisissante sur l’immensité verte et ses nombreux animaux mais il n’y a plus de visiteurs pour les observer. Depuis le début de l’année dernière, l’activité touristique est suspendue en raison du contexte sécuritaire dans le parc de la Pendjari, qui accueillait en moyenne 6 000 visiteurs par an.Pour y arriver, nombre d’entre eux passaient par Natitingou et ses collines verdoyantes. C’est dans cette ville du nord-ouest que Sanny Kassim tient un restaurant. Pour lui, qui gérait aussi une agence de tourisme, l’impact de la fermeture du parc se fait sentir : « Actuellement, c'est tendu. La fermeture du parc nous a grillés 92% de notre activité. J’ai dû revendre toutes mes voitures safari. Mais d’un côté, j’ai financé des formations pour mieux me relancer quand les activités reprendront. »Tourisme et agriculture perturbésAfrican Parks, l’ONG chargée de gérer la Pendjari, estime les pertes de revenus à 300 millions de FCFA par an, en moyenne, soit environ 460 000 euros. Dans ce département agricole, l’insécurité perturbe aussi l’accès aux champs, comme le confie ce cultivateur de Koalou, zone litigieuse entre le Bénin et le Burkina Faso où l’armée béninoise a installé une position, il y a quelques mois pour qu’elle ne serve plus de base arrière aux terroristes. « Cela va faire maintenant deux  ans qu'il n'y a pas la paix, à cause des gens de brousse. Ils posent des mines, nos gens vont au champ et ils marchent dessus. Depuis l'an passé, on n'a pas pu vendre parce qu'il n'y a pas de bonnes récoltes. Parfois, quand tu veux aller récolter, on te dit que ces gens de brousse sont venus et donc tu ne peux pas y aller. Maintenant, il y a beaucoup de choses qui se sont gâtées dans les champs.», explique-t-il.En attendant de pouvoir reprendre une vie normale, des travaux sont en cours dans la Pendjari pour relancer le tourisme dès que possible. Un secteur dans lequel l’État béninois a réalisé d’importants investissements. À écouter aussi aussiDans le nord du Bénin, l’opération militaire Mirador face à la pression terroriste   
9/25/20232 minutes, 15 seconds
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Dans le nord du Bénin, les populations inquiètes face au retour des jihadistes [1/3]

Depuis 2019, le nord du Bénin a été le théâtre d’attaques contre les forces de sécurité, puis contre les civils. Le bilan global donné par l'armée fait état de 25 soldats et d'une quarantaine de civils tués, et de 63 terroristes neutralisés. Les militaires de l'opération Mirador, déployés début 2022 pour lutter contre les terroristes et sécuriser les frontières, ont récemment accepté d'emmener plusieurs médias avec eux dans le nord, dont RFI.  De notre envoyée spéciale à Banikoara,Face à un groupe de journalistes, le capitaine Pascal Syota, commandant du sous groupement tactique interarmes de Banikoara, raconte les attaques qui ont eu lieu dans la zone. Celle qui a visé les forces de défense et de sécurité, il y a moins de deux ans, près du pont de Mékrou, juste devant nous, et la dernière en date, cette fois contre des civils. « C'était la nuit du 2 au 3 mai 2023. J'ai été alerté par un riverain, et il me faisait comprendre qu'il y a des éléments qui sont rentrés dans un hameau et très tôt, on a réagi. À notre arrivée, ils avaient déjà pris la fuite et on a constaté qu'ils avaient tué trois personnes. Je me dis que c’est pour, peut-être, faire mal à l'État ou au Bénin. Ils s'en prennent donc aux populations qui ne sont même pas armés. » À Banikoara, ces violences, même si elles n'ont jamais touché la ville même, ont marqué les esprits. « Les terroristes ont trop frappé Banikoara. En ce temps-là, il y a un village qu’on appelle Gimbagou, les terroristes sont venus, ils ont tué. Et depuis ce jour-là, les gens ont quitté Gimbagou pour venir au centre, ici. ». Madjid travaille dans le centre-ville de Banikoara. Le mécanicien reçoit ses clients dehors, pour réparer leurs motos, à l’ombre des arbres : « Avant, je travaillais jusqu'à 23h ici. Maintenant, ce n'est pas bon... Les militaires sensibilisent les gens pour qu’ils ne restent pas dehors jusqu'à minuit ou 1h. » Malgré le couvre-feu, les civils prudentsÀ quelques mètres de là, nous croisons André. Le jeune commerçant est venu se ravitailler en carburant, avant de retourner dans le quartier Aviation où il travaille. Lui aussi ferme maintenant plus tôt le soir, en raison du couvre-feu : « Dans la ville de Banikoara, il y a du stress quand on entend le mot terroriste. Banikoara est proche du parc W. On entend qu'ils sont là-bas. Avant, j’y allais régulièrement, parce que j'avais des amis et autres. Mais maintenant… » Maintenant, André ne s’aventure plus là-bas. La présence des militaires, dit-il, le rassure, mais il ne se sent pas à l’abri, même s’il n’a jamais pensé à quitter Banikoara : « Je dirais que c'est à l'État de mener les actions pour lutter contre ce fléau. Il y a aussi la population qui est là. Il faut communiquer avec la population. » L’armée béninoise a lancé cette année un recrutement exceptionnel de 5 000 hommes pour renforcer encore ses effectifs, pour une durée de cinq ans. À lire aussiComment le Bénin répond depuis 2022 aux activités terroristes au nord de son territoire
9/24/20232 minutes, 20 seconds
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Centrafrique: le fléau de la prostitution chez les jeunes filles mineures [3/3]

En Centrafrique, la prostitution est considérée comme un sujet tabou. Mais de plus en plus de jeunes filles dont l’âge varie de 12 à 16 ans la choisissent comme moyen de subsistance. Il n’est pas rare de se promener la nuit dans la capitale centrafricaine et de rencontrer des adolescentes prostituées. Orphelines pour la plupart, elles ont perdu leurs parents pendant les crises militaro-politiques et se retrouvent sans repères. Nombreuses d’entre elles ont abandonné le chemin de l’école et vivent essentiellement du plus vieux métier du monde. Conséquence : le taux des maladies sexuellement transmissible en milieu jeune grimpe à plus de 30% dans la capitale.  De notre correspondant à Bangui,La nuit tombe sur Tiringoul. Situé dans le 5e arrondissement de Bangui, ce croisement abrite de nombreux kiosques, buvettes et maquis à forte fréquentation. C’est aussi l’un des endroits de la capitale ou la prostitution est particulièrement développée. Peu après 20h, une vingtaine de jeunes filles âgées de 12 à 16 ans envahissent les lieux. Vêtues de robes très courtes, on les voit au bord de la route et à l’entrée de maisons inachevées.Bouteille de whisky dans la main droite, cigarette dans l’autre, Achetou, 14 ans, est en quête de potentiels clients. « Ça fait six ans que j’ai perdu mes parents dans la crise et il n’y avait personne pour s’occuper de moi. La prostitution est devenue mon gagne-pain. Pendant les fêtes, je peux coucher avec sept hommes. Ce que je gagne varie entre 25 000, 20 000, 15 000, voire 40 000 FCFA (environ 61 euros) en une seule journée », explique-t-elle. Presque toutes ces jeunes filles ont des histoires similaires. Elles sont persuadées que c’est le seul moyen pour elles de retrouver une place au sein de la société. Mais elles s’exposent aux maladies sexuellement transmissibles. Gisèle, 13 ans, a été testée séropositive en 2021. « Présentement, je dors chez une amie. Après la mort de mon père, ma mère s’est remariée, mais son nouveau mari me déteste sans raison. Il me traite de sorcière, me frappe et me maltraite tous les jours. J’ai décidé de m’enfuir. Et pour survivre, je dois vendre mon sexe », confie-t-elle.    Tenter de « changer la mentalité de ces jeunes filles »Le taux de VIH-Sida en milieu jeune est de 30% selon une étude de l’Association centrafricaine de marketing social (Acams). Pour lutter contre le fléau de la prostitution, l'association Soleil de Centrafrique propose des activités génératrices de revenus à ces filles. « Nous souhaitons vraiment les encourager à quitter le milieu dans lequel elles se trouvent et de les ramener à la raison, explique Epiphanie Nambozouina, coordonnatrice de l'Acams. Nous souhaitons les accompagner et les intégrer dans les activités génératrices de revenus qu'on va leur proposer. Par exemple, fabriquer des sacs avec des perles, faire de l'hôtellerie, faire de la couture, tout cela selon la vocation de la fille en question. Mais le plus important, c'est de changer la mentalité de ces jeunes filles. » Même si la loi centrafricaine assimile la prostitution des mineurs à la pédophilie, il est difficile de mettre la main sur les clients afin de les traduire en justice.
9/23/20232 minutes, 18 seconds
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Centrafrique: à Bangui, des jeunes dans la spirale de la consommation de chanvre indien [2/3]

Comme dans d’autres pays d'Afrique ou du monde, la Centrafrique est confrontée à une hausse inquiétante de la consommation du chanvre indien. Vendu à bas prix au marché noir, facile d'accès, très addictif et surtout très dangereux, il fait des ravages, notamment chez des mineurs. Certains consomment le chanvre indien par suivisme tandis que d’autres le prennent pour se sentir fort.
9/22/20232 minutes, 3 seconds
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Centrafrique: à Bangui, l'appel de victimes pour mettre fin aux «voleurs jaguars»

En Centrafrique, ils sont devenus un cauchemar pour les Banguissois, car ils ont l’habitude d’arracher téléphones et sacs à main. Il s’agit des voleurs jaguars, une expression courante pour désigner le vol à l’arrachée. Des braqueurs utilisant des motocyclettes pour agresser les passants dans les rues à la tombée de la nuit. Cette forme de banditisme s’est accentuée ces dernières semaines dans la capitale. Dépassées, les victimes appellent les autorités judiciaires et militaires à une action rapide pour y mettre fin.  De notre correspondant à Bangui,Il n’est pas encore 20 heures. Alors qu’il revient d’une visite familiale, Brillant Ndakpanga marche tout seul sur l’avenue Conjugo de Bangui. Il s’apprête à traverser le pont de l’Unité lorsqu’une moto arrive derrière lui. Parvenu à sa hauteur, le conducteur tente de lui arracher son téléphone pendant qu’il est en pleine conversation téléphonique. Choqué, Brillant raconte cette mésaventure.« J’ai échappé à ça parce que j’ai été prudent. J’en appelle à la prudence de tout un chacun afin de ne pas en faire les frais », alerte-t-il. « En tout cas, c’est de la délinquance. La manière à laquelle ils opèrent doit nous interpeller. Étant donné que c’est un vol, si jamais ils tombent dans le filet de la justice, je pense que le mode opératoire pourrait servir dans le cadre d’une circonstance aggravante. La sanction pourrait servir de leçon aux autres. » À la nuit tombéeCes voleurs jaguars opèrent tous les soirs, avec des stratégies dignes d’un film d’action. Ils se postent généralement sur une ruelle, une avenue ou dans un couloir dans le noir avant d’attaquer leurs proies. Stève a déjà assisté à une scène pareille.« Ils étaient deux sur une moto. En passant, le conducteur a coincé une fille qui était au bord de la route », explique-t-il. « Ils ont arraché son sac et la fille a crié au voleur. Heureusement qu’on a pu les attraper. On a récupéré le téléphone et ça s’est tourné en vinaigre parce que les voleurs ont été sauvagement battus. Je pense que la police doit faire son travail. Nous sommes dans un État de droit. Ils doivent s’organiser pour mettre de l’ordre dans la ville et mettre ces jeunes voyous hors d’état de nuire. »Les femmes, cibles privilégiéesCertains voleurs jaguars utilisent également des armes pour menacer leurs victimes. Les femmes sont les cibles privilégiées, car elles sont les plus vulnérables. Début septembre, Myriam a été victime. « Ce jour-là, je rentrais du travail », se souvient Myriam. « Il nous a agressées, moi et ma grande sœur. Il a pris mon téléphone et il nous a battues. En tout cas, ce n’est pas normal et c’est triste parce qu’il n’y a que les jeunes qui font ça. Présentement, j’ai peur de me promener la nuit, on peut toutefois me violer, car dans l’insécurité tout est permis. »Tous les soirs, une dizaine de vols à l'arraché sont signalés dans les rues de Bangui. Ces bandits sont souvent traqués par l'Office centrafricain de répression du banditisme (OCRB). Pour cette année 2023, selon une source judiciaire, plus de 20 présumés voleurs jaguars inculpés à la prison centrale de Ngaragba attendent d'être jugés.
9/21/20232 minutes, 18 seconds
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Congo-Brazzaville: les principales artères de Brazzaville de plus en plus obscures

Ces 20 dernières années, Brazzaville a multiplié ses sources de production d’électricité et augmenté ses capacités. Mais la capitale congolaise vit un grand paradoxe : bon nombre de ses artères manquent d’éclairage. Ce qui rend la tâche de plus en plus difficile aux automobilistes, notamment à la nuit tombée. De notre correspondant à Brazzaville,Place du célèbre rond-point Mazala, centre-ouest de Brazzaville. Il est 20 heures passées. Le taxi qui embarque pour le Centre national de radio et de télévision (CNRTV) parcourt les sept kilomètres de l’avenue de l’Union africaine dans une obscurité indescriptible.Tous les lampadaires installés le long de cette artère sont hors d’usage. Ils sont alimentés par l’énergie solaire. Ce qui étonne Bienvenu, notre chauffeur taxi : « En pleine ville de Brazzaville, il y a des panneaux solaires. Ce n’est pas normal. Les panneaux solaires sont réservés pour la campagne », dit-il.Une possible cause d’accidentsL’avenue de l’Union africaine n’est pas la seule voie qui est dans cet état. Nombreuses sont celles qui présentent ce triste décor, selon Éric, un autre chauffeur. « Les yeux nous font mal parce qu’on force la vue (faute de lumière, NDLR). Je prends le cas de l’avenue de l’OUA qui part du CCF (ex-Centre culturel français, actuellement Institut français du Congo) : jusqu’au pont du Djoué, il n’y a pas assez de lumière ; l’avenue de la Base jusqu’à la mairie de Mfilou, on a des problèmes ; de la mairie de Mfilou à Moukondo, il n’y a pas de lumière. On s’efforce tous, y compris même les piétons », décrit-il.Pour Bienvenu, le manque d’éclairage cause des accidents au même titre que l’excès de vitesse ou encore l’abus de l’alcool. « Quand on est au volant et que celui qui vient en face vous donne des phares, c’est une cause d’accident. Or, s’il y a assez de lumière, il n’y aura pas beaucoup d’accidents sur la voie publique », explique-t-il. Cyr Sylvestre Batina tient une carrosserie. Son travail au quotidien ? Remettre en état les voitures accidentées. « Nous avons constaté qu’il y a trop d’obscurité à telle enseigne que les véhicules que nous recevons sont accidentés à cause du manque d’éclairage sur la voie publique », confirme-t-il.Aménager la lumière sur la voie publiqueLes transporteurs, eux, demandent plus d’attention aux autorités. « Avec tout le respect, nous demandons à notre gouvernement de faire plus d’efforts pour aménager la lumière sur la voie publique », plaide l’un d’eux. Cyril Ndzoundou, président du syndicat des transporteurs, est très inquiet. « Aujourd’hui, nous avons constaté que partout, même les petites avenues qui étaient éclairées sont en train de devenir obscures. Nous ne pourrions pas travailler dans l’obscurité. Il y a non seulement les accidents, mais aussi l’insécurité qui s’oppose à nous », s’alarme-t-il.L’obscurité est d’autant plus dangereuse pour les véhicules que les transporteurs font également face à des nids de poule géants, véritables obstacles notamment pendant grande saison pluvieuse qui approche.
9/20/20232 minutes, 26 seconds
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Mauritanie: la saison des pluies, l'occasion pour les citadins de renouer avec la nature

De juillet à octobre, pendant la saison des pluies qu'on appelle aussi « l’hivernage », les Mauritaniens quittent les grandes villes comme Nouakchott pour prendre l'air et se reconnecter à la nature, à la vie de bédouin : c’est la saison de Lekhriv. À Tiguent, petite ville à une centaine de kilomètres de la capitale, des milliers de citadins affluent chaque week-end. De notre correspondante à Nouakchott,À quelques kilomètres de la ville de Tiguent, Mohamed Lemine, Nouakchottois, se réveille en musique avec ses proches au sommet des dunes recouvertes de végétations. Comme des milliers de Mauritaniens, il a déserté la capitale et son humidité le temps d’un week-end pour dormir à la belle étoile et profiter de la nature en cette saison.« Changer d'air un peu, loin de Nouakchott, des moustiques et des mauvaises odeurs... Boire le thé sur cette couverture végétale sous le ciel clair. Voir la vie bédouine, la vie natale, la vie primaire, là où les gens sont simples, loin des grandes villes », explique-t-il.Des moments simples très appréciésLa saison des pluies, ou Lekhriv en hassania, est l’occasion pour ces vacanciers de se reconnecter aux traditions nomades. Souvent sous les khaimas, les tentes mauritaniennes, ils peuvent ainsi partager le mouton, le thé et boire le lait frais fraichement traité par les éleveurs comme Ahmed, éleveur de chameaux.« Pendant la saison des pluies, l’alimentation du bétail est de meilleure qualité grâce à la végétation abondante qui remplace l’alimentation industrielle, ce qui donne un meilleur goût au lait », souligne l'éleveur. « Comme il fait très chaud, les Mauritaniens aiment boire le lait de chamelle avec des glaçons pour se rafraîchir. » Des moments simples très appréciés par les visiteurs venus de tout le pays. « J'adore les traditions de la brousse : boire du lait frais de chamelle ou de vache. Je suis sortie de Nouakchott pour ça, pour me reposer et profiter », raconte Leila, une citadine.Mena, originaire de Rosso, vient « pour l'hivernage, pour le repos. » Il dit également avoir acheté un petit mouton pour sa famille. « La campagne, c’est la vie ancienne : la nature, la liberté », ajoute Mohamed Lemine. « Tous les Mauritaniens, bien que sédentarisés, rêvent toujours de revivre un peu la vie ancienne. »Une aubaine pour le secteur du tourismeChaque week-end, pendant la saison, Tiguent, ville d'environ 15 000 habitants selon le dernier recensement, voit sa population tripler. Un tourisme essentiel pour les professionnels du secteur comme Ali, gérant d’une auberge.« Aujourd’hui, nous sommes encore complets, même s’il y a quelques départs », constate l'aubergiste. « Pendant l’hivernage, les gens recherchent de la fraîcheur, du repos, changer de climat. Les autres périodes de l’année, il y a beaucoup moins de passage. » Des campements éphémères ont même été installés aux mois de juillet et août pour accueillir les vacanciers. La saison se prolongera jusqu’en octobre, date de la rentrée scolaire mauritanienne.
9/19/20232 minutes, 19 seconds
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En Afrique du Sud, des jeunes de milieux défavorisés se forment aux métiers du vin

En Afrique du Sud, le marché du vin et les terres restent, en très grande majorité, entre les mains de la population blanche minoritaire. Pour aider à transformer le secteur, la Pinotage Youth Development Academy (PYDA) forment les jeunes des townships et des milieux défavorisés aux métiers du vin, pour que ce monde leur devienne accessible.  De notre envoyée spéciale à Stellenbosch,Ce matin, le nez des étudiants de la Pinotage Academy est mis à contribution. Ils ont en leur possession de petites fioles, et doivent deviner les arômes qui s’en échappent. Okuhle, 23 ans, se penche sur son flacon : « On va sentir celui-là. Je crois que ça sent les clous de girofle. » Mais il n’est pas évident pour lui de reconnaître certains arômes.« Il faut dire que c’est dur de reconnaître des choses qu’on a jamais mangées. Quand on parle de groseilles, je me dis : "Wahou, c’est quoi des groseilles ?" Ce n’est pas évident quand on vient de milieux défavorisés. Mais ici, à l’école, ils nous encouragent à essayer des aliments que l’on ne connait pas », explique-t-il.  Pendant neuf mois, l’école forme chaque année une cinquantaine d’étudiants qui n’ont pas eu les moyens de poursuivre leurs études après le secondaire. Un pas dans la bonne direction pour transformer le secteur, selon Rudy Oosterwyk, en charge de l’innovation au sein de l’académie : « Plus de 390 millions de litres de vin sont produits par an dans un rayon de huit kilomètres autour de cette école. Les Sud-Africains noirs en possèdent moins de 1%. Sur ces 30 dernières années, il n’y a pas eu de vrais changements structurels au niveau économique. Il y a eu bien sûr quelques exemples de réussites, et c’est super, mais ces exemples n’ont pas permis de vraiment transformer le secteur en profondeur. Notre rôle consiste à proposer des travailleurs sud-africains les mieux formés possibles, pour qu’ils ne soient pas pris parce qu’ils sont noirs, mais parce qu’ils sont très bons. »À lire aussiAfrique du Sud : les vins sud-africains connaissent un rebond à l'exportDu vin sud-africain par les Sud-africainsDésormais, Okuhle n’hésite pas à rêver en grand. « J'adore tout ce qui a trait au vin, et je peux déjà imaginer la suite alors que je vous parle. Continuer mes études ici, aller à l’étranger, et puis un jour avoir ma propre marque et mon domaine », confie-t-il.Tout juste diplômée, Ziyanda Njalo encadre pour sa part la fabrication du vin de l’académie, l'Ulutsha, le vin « des jeunes », un pinotage vinifié en partenariat avec un vignoble local. « Lorsque j’ai commencé à annoncer aux gens autour de moi que l’on allait créer notre propre marque de vin, tout le monde était très fier, étant donné que le secteur est dominé par des professionnels plus âgés et blancs. Nous, nous sommes jeunes et noirs. Nous avons de nouvelles idées à apporter », assure-t-elle.Depuis sa création, l’académie a déjà formé près de 500 étudiants aux métiers du vin, et propose d’autres programmes dans les secteurs touristiques et agricoles. 
9/18/20232 minutes, 20 seconds
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Guinée: entre la junte et la jeunesse de Hamdallaye, l'échec d'une réconciliation

Entre les habitants de la route Le Prince et la junte au pouvoir, le divorce est consommé. Aux premières heures de la transition, Mamadi Doumbouya avait multiplié les signes d’apaisement en direction des quartiers frondeurs de cette voie rapide qui traverse le nord de Conakry. Deux ans plus tard, les Forces vives de Guinée, alliance d’opposition, tiennent la comptabilité macabre de la répression sur « l’Axe ». Selon les FVG, plus d’une trentaine de personnes ont été tuées, majoritairement par balle et lors de manifestations. Hamdallaye est le quartier le plus touché, il concentre un tiers des victimes. Matthias Raynal s’est rendu sur place pour donner la parole aux manifestants.
9/18/20232 minutes, 14 seconds
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En Éthiopie, la crise économique met fin à l'âge d'or du khat

Dans l’est de l’Oromia, des villes entières dépendent de la vente du khat. En 2020, la production de cette plante psychotrope, aux effets proches de l’amphétamine, représentait 4% des recettes d'exportation du pays et 9,4% des exportations totales de marchandises. Désormais, les prix ont chuté et beaucoup d’agriculteurs se retrouvent sans revenus.  De notre envoyée spéciale à Aweday, Dans l’est de l’Oromia, les arbustes de khat recouvrent les paysages vallonnés. La petite feuille verte produite ici est l’une des plus réputées au monde. Mais depuis quelques mois, les prix ont chuté presque de moitié, et les agriculteurs luttent pour leur survie. « Une collecte n’est même pas suffisante pour acheter un sac de riz, se désole Haron Oumar, cultivateur de khat de génération en génération. Un seul sac de riz vaut 1 900 birr. Avant, on vendait un seul kilo entre 10 000 et 20 000 birr. Maintenant, c'est 2 000. »La plante cultivée est envoyée à Awaday, puis vers toute l’Éthiopie et exportée dans les pays frontaliers grands consommateurs, Djibouti et la Somalie. Dans la ville, tous le disent, la crise vient du doublement des taxes à l’export imposé par les autorités régionales en octobre dernier et prélevé sur les routes. « Dans le business du khat, la principale revendication est d’enlever les checkpoints. On ne peut plus exporter aux endroits où on le faisait avant à cause de ça », explique Tofik Muktar, livreur de khat.« Le khat, c'est notre vie »Les exportateurs se retrouvent étranglés par les taxes et achètent donc moins de khat aux producteurs. Comme Ramzi Abdallah qui est passé de quatorze à sept employés. Pour lui, le khat est un mode de vie qui fait tourner toute l’économie locale : « Ce ne sont pas seulement les acheteurs et les vendeurs qui en vivent. Il y a ceux qui nettoient qui en vivent, ceux qui portent les sacs. C’est pour ça qu’on a l’habitude de dire que le khat, c'est notre vie. » La production du khat n’est pas subventionnée par l’État à la différence des denrées alimentaires. Face à la crise, des alternatives sont possibles, selon Muluguta Girma, chercheur à l’université de Diredawa : « C'est un défi, mais le gouvernement peut encourager la culture d'aliments, de légumes et d'autres plantes qui peuvent facilement pousser dans la région d'Harare. Cela nécessite un dialogue avec la communauté, à long terme et à court terme, pour initier un projet avant de décider de la fin du khat ou de faire pousser quoi que ce soit d’autre dans cette région. »La crise, aggravée par l’inflation, marque la fin d’un âge d’or qui avait permis à de nombreux vendeurs de khat de faire fortune.À écouter aussiChronique des matières premières : en Éthiopie, le khat supplante le café
9/16/20232 minutes, 14 seconds
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Au Togo, un programme contre le risque d'exclusion sociale des jeunes déscolarisés

Au Togo, les autorités s’efforcent de lutter contre les problèmes d’insertion citoyenne et professionnelle des jeunes à travers le programme « Volontaires d’engagement citoyen » (VEC), ouvert à des jeunes déscolarisés ou sous-scolarisés, que l'on retrouve à la tâche dans les 117 communes du pays. Dans la commune Lacs 1, ces jeunes volontaires entretiennent l’environnement.  De notre envoyé spécial à AnéhoÀ côté du pont de Zébé, dans l’espace vert aménagé, c’est munis de râteaux et de crocs qu’ils sont au travail. « Nous sommes appelés à nettoyer la ville, rendre propre les endroits qui sont sales », explique une jeune femme prénommée Godly.Plus loin, à l’entrée de Glidji, un petit village après la localité d’Aného, un groupe de jeunes reconnaissables par leurs gilets orange, bottes et matériel de travail débroussaillent à l’aide de coupe-coupes. Après un an de formation, ils sont déployés sur le terrain pour six mois. « Nous faisons le désherbage, le sarclage et nous entretenons aussi des jardins publics, des espaces verts et des forêts urbaines. Nous ramassons aussi des déchets plastiques », détaille Essodewedeou, engagé comme volontaire d’engagement citoyen dans la commune Lacs 1.Le programme des volontaires d’engagement citoyen vise à faire face à un problème croissant au Togo : celui de la déscolarisation d’un nombre de plus en plus important de jeunes avec un risque d’exclusion sociale. Alors se pose le problème de prise en charge. « Les jeunes qui abandonnent le cursus scolaire sont des charges. Ils rentrent dans la délinquance donc ils sont désorientés et ils abandonnent », observe le professeur Bernard Atchrimi, sociologue, directeur de l’institut Afrique-Europe de l’innovation et des métiers à l’université de Lomé.Permettre aux jeunes d'être utiles « au sein de leur commune »Face à ces difficultés, le programme des volontaires d’engagement citoyen propose à des jeunes sous-scolarisés ou déscolarisés une opportunité de se former sur la citoyenneté, les valeurs républicaines, mais aussi d’acquérir des compétences professionnelles.Ce sont des jeunes envoyés sur le terrain pour participer à des activités d’intérêt public, explique Omar Agbangba, directeur de l’agence nationale du volontariat au Togo : « Nous avons voulu traduire tout ce qu'il y a comme opportunité de travail à faire. Les jeunes aussi qui existent, qui n'aspirent qu'à faire quelque chose, les mettre à contribution pour faire quelque chose d'utile au sein de leur commune. »  Ils sont ainsi près de 6 500 jeunes déployés dans les 117 communes du pays. Le programme leur attribue une allocation qui leur permet de vivre quand ils sont sur le terrain. Certains observateurs regrettent le manque de suivi des jeunes une fois leur période d'engagement terminée.À lire aussiAu Togo, 255 écoles pourraient ne pas ouvrir à la rentrée
9/15/20232 minutes, 19 seconds
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Maroc: Tafeghaghte, un village ravagé par le séisme

Le village de Tafeghaghte a été balayé comme tant d’autres par le séisme du 8 septembre. Situé sur les hauteurs d’Amizmiz, à flanc de colline au sud de Marrakech, les habitants de ce hameau tentent de sauver ce qui peut l’être. Reportage.
9/14/20232 minutes, 13 seconds
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Sénégal: malgré les naufrages, les pirogues clandestines continuent de voguer jusqu'aux Canaries

Au Sénégal, les départs de pirogues clandestines vers les îles espagnoles des Canaries continuent ainsi que les naufrages et sauvetages. Quelque 168 sénégalais secourus au large de la Mauritanie viennent d’être rapatriés le 30 aout au Sénégal. Parmi les régions touchées par le phénomène de la migration irrégulière : celle de Thiès et particulièrement sur le littoral comme dans le village de pêcheur de Fass Boye, à 150 km au nord de Dakar.
9/13/20232 minutes, 20 seconds
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RDC: quand les habitants d'un quartier de Kolwezi creusent chez eux à la recherche de cobalt [3/3]

Les habitants d’un quartier de Kolwezi, dans l'est de la RDC, se sont transformés en mineurs artisanaux. Ils creusent chez eux dans leur jardin à la recherche de cuivre et de cobalt. La demande pour ces minerais – utilisés dans les batteries – a fortement augmenté ces dernières années, avec le marché des véhicules électriques. Il y a un an encore, un kilo de cobalt pouvait atteindre les 100 dollars, ce qui a poussé de nombreux habitants du quartier de Mutoshi, à proximité d’une mine officielle, à se lancer dans cette activité.
9/12/20232 minutes, 30 seconds
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RDC: à Kamilombe, une coopérative minière œuvre pour des conditions décentes [2/3]

La majeure partie du cobalt congolais est extraite de mines industrielles géantes, mais 10 à 20% de ce cobalt provient de mines artisanales. Une production qui a parfois mauvaise presse, associée au travail d’enfants, à des violations de droits de l’homme. Reportage à Kamilombe, une mine artisanale collée à la ville de Kolwezi, gérée par la Coopérative minière pour le développement social.
9/11/20232 minutes, 27 seconds
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RDC: les compagnies minières polissent leur image [1/3]

La République démocratique du Congo produit plus de 70% du cobalt mondial. La très grande majorité de ce minerai (80%) est exploitée par de grosses compagnies minières : chinoise, suisse, kazakh, indienne... souvent accusées par la population locale de ne pas contribuer au développement du pays. Les compagnies minières se défendent. De notre envoyée spéciale dans la région,TFM – Tenke Fungurume Mining – est l'une des plus grandes concessions minières de la RDC, avec 1 600 km2, exploitée par la société chinoise CMOC. Le groupe emploie plus de 17 000 personnes dont 90% de Congolais. Et pourtant, à Kolwezi, les retombés économiques ne sont pas visibles, dénonce Aimé Banza Mwapé, de la société civile.« Où vont tous ces revenus ? Nous sommes dans une province qui se dit capitale mondiale du cobalt, mais dans les faits, les citoyens que nous sommes n'en bénéficions pas. La ville manque d'eau, ou encore d'électricité... », déplore-t-il.Un Code minier en faveur du développement du paysLe Code minier – revu en 2018 – oblige les compagnies minières à participer au développement du pays. Redevance minière, fond sociaux pour des projets communautaires, cahier des charges, les exemples sont multiples, explique le professeur Éric Swana, directeur de développement communautaire chez TFM.« Nous avons signé le cahier des charges avec les deux entités territoriales décentralisées, à savoir la commune de Fungurume et la chefferie de Bayeke pour la période de 2021 à 2025 pour un budget global de plus de 31 millions de dollars et qui couvrent les secteurs de la santé et de l'éducation, des infrastructures... Nous avons déjà construit deux centres de santé de référence que nous allons visiter... »Mélissa, infirmière généraliste, indique qu'il existe différents services, de la pédiatrie à la clinique en passant par les urgences, par exemple. Pour le docteur Jean Jacques, « ce partenariat a été une aide. [Nous] avons plus de 20 malades par jour parce que nous sommes un hôpital de référence. Parfois, on nous amène des cas difficiles. »« Le consommateur est devenu beaucoup plus exigent »À quelques kilomètres de là, le groupe minier suisse Glencore finance lui aussi des projets similaires : écoles, hôpitaux et même une pépinière pour reboiser des sites qui ne sont plus utilisés, explique Marie-Chantal Kaninda, présidente de Glencore RDC.  « Aujourd'hui, le consommateur est devenu beaucoup plus exigent et nous devenons également beaucoup plus exigent. Tous les programmes d'environnement que l'on met sont pour nous assurer qu'il n'y a aucun effet négatif par rapport aux communautés. On parle beaucoup plus de responsabilité sociétale », déclare la présidente.Toutes les compagnies minières se plient-elles à la loi ?  Non, seules les plus importantes qui font attention à leur image, se désole la société civile qui ajoute que l’argent issu de l’exploitation minière est souvent mal géré ou détourné par les autorités aux dépens de la population.
9/10/20232 minutes, 28 seconds
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Tunisie: les jeunes mariés se détournent de l'or en raison de la crise économique [3/3]

En Tunisie, pendant plusieurs décennies, les futurs époux avaient pour habitude d’offrir de l’or à leur promise. Une parure ou plusieurs bijoux traditionnels du patrimoine, selon les régions, chacun sa coutume. Il s’agissait d’un capital pour le couple qui peut revendre ensuite l’or en cas de coup dur dans la vie. Aujourd’hui, avec la crise économique et le prix du gramme d’or qui a triplé, cette pratique se fait de plus en plus rare. De notre correspondante à Tunis,Dans la Médina de Tunis, un samedi midi, le souk El Berka où les bijoutiers proposent aux passants de leur acheter de l’or, les rues sont peu animées. Cette année, la saison des mariages n’a pas été fructueuse pour les commerçants.Sadok, 62 ans, travaille depuis quatre décennies dans le souk. « Normalement, pendant le week-end, on a du mouvement. On voit des fiancés venir chercher des parures. Là rien. On sent que le citoyen tunisien a un budget de plus en plus restreint avec la crise. Avant, j’arrivais à vendre deux ou trois parures par semaine. Maintenant, j’ai de la chance si j’en vends une. »Pour Mohamed Nasfi, 51 ans, qui répare une bague dans sa boutique, ce n’est pas seulement le budget qui manque, mais aussi les mentalités qui ont changé. « Vous avez des gens qui n’hésitent pas à dépenser des milliers d’euros pour la cérémonie de leur mariage, mais qui ne vont plus investir dans l’or. Alors que c’est un vrai capital. La cérémonie dure une soirée alors que l’or va vous durer toute une vie et vous aider en cas de problème. »À écouter aussiTunisie: quand la crise économique affecte les mariagesManque de moyensPour beaucoup, préserver les apparences de richesse dans les mariages est plus important même si les moyens manquent. « J’ai des jeunes couples qui rentrent dans la boutique, achètent juste la bague de fiançailles puis regardent les parures et me demandent où ils peuvent se procurer le même modèle en argent ou carrément du faux », poursuit Mohamed. « Ils me disent que pour eux, ce n’est pas important, mais que c’est pour maintenir l’illusion auprès des familles, le jour de la cérémonie. »Dans le souk, à défaut d’acheteurs potentiels, les bijoutiers voient défiler l’ancienne génération qui vient revendre des bijoux en or, pour faire face à la crise. « Là, pour le coup, des revendeurs, j’en ai qui viennent tous les jours », souligne Mohamed. « Ce sont des gens qui justement vendent leurs pièces en or petit à petit ces dernières années. Ils viennent en général, avant une occasion comme la fête de l’Aïd ou le baccalauréat de leur enfant, pour pouvoir échanger de l’or contre de l’argent en cash. »À écouter aussiEn Tunisie, malgré la crise, le boom de la mise en beauté pour le mariageL'argent plutôt que l'orLes bijoutiers confient que la seule clientèle qui achète encore, habite à l’étranger. Il s’agit de Tunisiens de la diaspora qui achètent des modèles précis pour leur mariage. Au sud tunisien, à Djerba, les parures traditionnelles sont très importantes lors des noces.Feiza, 50 ans, vient de négocier pour 40 euros une parure traditionnelle brodée sur du tissu, mais en argent trempé dans de l’or. « En fait, je suis obligée d’acheter ça pour le mariage d’une amie, car lors de la cérémonie de la Jelwa à Djerba, une sorte de parade qui marque la seconde journée du mariage, la mariée a des habits traditionnels recouverts de parures en or et en argent, c’est un passage obligé. Donc on achète en argent faute d’acheter de l’or. »Si dans le sud, certains investissent encore, à Tunis, les ventes de parures ont baissé de 50% cette année, selon les bijoutiers du souk El Berka.
9/9/20232 minutes, 36 seconds
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En Tunisie, malgré la crise, le boom de la mise en beauté pour le mariage [2/3]

En Tunisie, l’écosystème autour du mariage s’est beaucoup développé avec les maisons de robes de mariées haute couture et les forfaits « spécial mariage » proposés par les salons de beauté. Si les futures mariées font moins de soirées qu’autrefois, les femmes dépensent plus pour la mise en beauté le jour J. Plusieurs enseignes tunisiennes sont devenues célèbres ces dernières années grâce à la saison des mariages. De notre correspondante à Tunis,C’est dans un show-room de marbre et de murs immaculés sur trois étages que Fatma Bouchiba styliste et fondatrice de la maison de couture du même nom, reçoit les visiteurs. Les essayages se font uniquement sur rendez-vous. L’enseigne propose des tenues de mariage à la location dont les prix s’élèvent à plusieurs centaines d’euros. Des tenues sophistiquées, mais différentes des costumes traditionnels de mariage à l’ancienne.« On sent que c’est traditionnel, mais on n’a plus le traditionnel d’autrefois. Donc, on a allégé la pièce, on a allégé la matière. D’ailleurs, en dessinant ou en imaginant le modèle, je pense directement au côté pratique. De nos jours, les mariées aiment bouger, aiment danser, aiment s’éclater. » Fatma a remarqué une émancipation de la mariée durant cette dernière décennie.« Les cérémonies du mariage, avant, c’était pour la famille. D’ailleurs à mes débuts, la mariée venait avec ses parents et il fallait que la maman valide. Et là, avec le temps, après une quinzaine d’années, je me rends compte que la mariée vient toute seule, avec ses amies, et après seulement, elle ramène sa maman pour lui faire plaisir. Mais elle a déjà choisi sa robe, donc la mariée pense à elle-même. »« Les idées ont changé »En s’adaptant à la mode et aux nouveaux goûts, Fatma Bouchiba a quand même gardé une marque de fabrique tunisienne : les broderies faites à la main, un hommage au patrimoine vestimentaire tunisien. Dans l’atelier, au sous-sol, les pièces en cours sont disposées sur des plans de travail. « C’est la nouvelle collection, elle est entièrement faite à la main, c’est la robe perlée. Pour la broderie, ce sont des femmes d’un certain âge, mais malheureusement, elles n’ont pas pu faire passer le savoir. Les jeunes apparemment manquent de patience. »À quelques encablures, le salon de beauté Feryel Studio gère en moyenne trois à sept mariées par jour pour la mise en beauté. Là aussi, les désirs ne sont plus les mêmes qu’avant, comme l’explique la fondatrice Feryel Ben Hou Hou : « C’est sûr que les idées ont changé. Le maquillage artistique, il s’impose plus. Le nude, le no make-up, la simplicité. »Les forfaits mariage qui incluent maquillage, coiffure et soins coûtent entre 400 et 600 euros. Un budget important pour la future mariée en période de crise économique. Mais malgré l’augmentation des prix de 30% sur les produits cosmétiques dans le pays, Feryel a maintenu les mêmes tarifs ces dernières années.À écouter aussiReportage Afrique : Tunisie : quand la crise économique affecte les mariages
9/8/20232 minutes, 26 seconds
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Tunisie: quand la crise économique affecte les mariages

En Tunisie, la saison des mariages touche à sa fin. Chaque été, de nombreux couples se marient dans des fêtes qui allient souvent tradition et modernité. Dans le pays, il est fréquemment de coutume de faire plusieurs fêtes et de célébrer en grandes pompes l’union sacrée. Mais la crise économique pèse de plus en plus sur les familles et les couples. Ces contraintes redessinent les budgets et envies de chacun. Le son de la fête s’entend depuis la rue de la maison de Manel. Dans le quartier de l’Ariana, au nord de Tunis, la famille de la jeune mariée célèbre les préparatifs. Manel revient tout juste du Hammam, une étape traditionnelle des noces avec uniquement les femmes proches de l’épouse. Elle porte une tenue typique de Mahdia, la région dont ses parents sont originaires.« J’aime tout ce qui est traditionnel et relié à ma région, pour moi, c'est essentiel de mettre ces tenues. Là ce que je porte contient plusieurs couches. Il y a une sorte de chemise avec un pantalon large et un tissu avec des broderies dans lequel je suis enveloppée, et après pour la soirée, je change encore de tenue. »Pour son père, Jamel Belhaj Fradj, 65 ans, entrepreneur en construction, malgré la crise économique dans le pays, il faut consacrer un budget conséquent pour le mariage de sa fille et préserver cette tradition.« Nous, dans notre famille élargie, pour les mariages, tout le monde s’entraide. Même ceux qui n’ont pas trop d’argent. Ils aident par leur présence ou en aidant aux préparatifs. Moi, je suis l’aîné dans la famille et j’ai financé en partie les mariages de sept frères, donc pour celui de ma fille, chacun aide. »« Même en achetant un an à l’avance, les prix avaient déjà augmenté de 30% »À Zaghouan, au nord de la Tunisie, Inès Mnirsi, 35 ans, a également choisi de faire un hammam avec son entourage avant son mariage : « Je pense que pour les futures épouses, ça reste un moment important où l’on prend soin de soi et on s’entoure des femmes qui vont ensuite rester avec nous pendant tout le déroulé du mariage. C'est un peu comme un moment de recueillement où la mariée peut s’amuser et aussi se relaxer. »Mais le hammam coûte cher, comme d’autres fêtes. C'est pourquoi à Tunis, Maha Boulai, designer de 29 ans, a décidé de répartir autrement son budget pour son mariage avec Ayoub Hidoussi, producteur. « Rien que la salle de fête pour la cérémonie, si vous ne voulez pas avoir quelque chose de moche avec des chaises cassées, c’est au minimum 2 400 euros, sachant que les prix augmentent entre l’hiver et l’été. Concrètement, tout était cher par rapport à ce que nous avions évalué. »Pour Ayoub et elle qui n’ont pas voulu s’endetter en démarrant leur vie à deux, le coût du mariage a également représenté une charge mentale parce qu’il est coutume que les couples, en se mariant, investissent aussi dans le mobilier de leur futur foyer. « Nous nous sommes pris à l’avance en allant acheter par exemple des meubles à la foire annuelle où il y a les prix d’usine, et même en achetant un an à l’avance, les prix avaient déjà augmenté de 30% par rapport à l’année précédente. »À écouter aussi8 milliards de voisins - Quel sens donner au mariage dans nos sociétés actuelles ?Même Si Maha et Ayoub ont fait un mariage à leur image, simple, sans artifices, la pression reste bien là : « Notre génération a un vrai problème avec le paraître. Vous aurez toujours un ami qui va venir dans votre appartement de jeune marié et qui sera étonné que vous n’ayez pas pris l’écran de télévision dernier cri. »Dans le pays, un mariage coûte en moyenne 10 000 euros et le taux des unions a considérablement baissé ces dernières années avec une baisse de 33% des contrats de mariage en 2022.
9/7/20232 minutes, 31 seconds
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Centrafrique: à Bangui, une église orthodoxe financée par la Russie

En République Centrafricaine où les habitants pratiquent majoritairement le catholicisme, différentes formes de protestantisme, l’islam et l’animisme, une nouvelle forme de chrétienté a fait son apparition : l’orthodoxie. Fondée en 2013 dans un quartier périphérique de la capitale Bangui, L'église Saint-André, toute première paroisse orthodoxe de Centrafrique, connaît un élan de vitalité depuis le déploiement de la société militaire privée Wagner dans le pays comme un nouveau signe de l’influence grandissante de la Russie.  De notre correspondant à Bangui,Les cantiques s’élèvent dans les fumées d’encens, les fidèles embrassent la croix sous les icônes. Monseigneur Régis Sinclair Voyemawa baptisé « Sergueï » découvre l'orthodoxie lors de ses études au Cameroun. Il est alors choisi pour devenir le premier « pope » de Centrafrique.« Mais l'église appartient déjà à l'Église orthodoxe russe, donc nous sommes des Russes Centrafricains parce que nous avons notre siège. Et à Moscou, sur le plan religieux, nous sommes les représentants de l'Église orthodoxe russe en Centrafrique. »Elisabeth, fidèle de l’église Saint-André : « Vous savez, la RCA a traversé des périodes difficiles. Et en ce moment, on n'en a pas fini. Il y a les rebelles un peu partout, et je crois que la Russie est intervenue, et intervient encore en ce moment. Donc le groupe Wagner nous aide un peu à faire fuir les rebelles. Pourvu qu'on soit en paix. »À lire aussiCentrafrique : un cadre de Wagner assure que les activités du groupe se poursuivent dans le paysSergueï se défend de tout lien avec les mercenaires dont les exactions sur les civils sont aujourd’hui largement documentées. C’est « une campagne de désinformation », dit-il. Mais depuis son allégeance au patriarcat de Moscou l’an dernier, les finances de son église se portent nettement mieux.« Allez dans les écoles, vous allez voir. Vous qui êtes des médias, qu'est-ce que la France fait de concret en Centrafrique ? Rien. Et aujourd'hui, je suis devenu orthodoxe russe, mais j'ai eu un bâtiment en moins d'un an, un petit bâtiment. Déjà ça, c'est un geste. »La Russie finance également les bourses de deux étudiants en théologie, les salaires des enseignants ainsi qu’une aide sociale aux plus démunis, dont une douzaine d’orphelins qu’il recueille à son domicile.« Les Centrafricains sont comme les orphelins de la France, abandonnés à leur propre sort. Et c'est vrai que les gens peuvent dire l'influence russe sur la France, mais ce n'est pas la faute des Centrafricains. On est totalement abandonné à notre propre sort. Si vous avez un enfant qui ne mange pas bien, il n'est pas en sécurité, il peut se retrouver chez le voisin, ce n'est pas la faute du voisin. »Opération d’influence ou simple coopération religieuse, la première paroisse orthodoxe de Centrafrique revendique aujourd’hui plus de 700 fidèles.
9/6/20232 minutes, 20 seconds
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Jeux vidéo: au Cameroun, l'e-sport se professionnalise

Un premier club e-sport professionnel a été créé à Yaoundé. Un champion d'Afrique fait partie de la quinzaine de joueurs de ce club. Malgré les préjugés sur les jeux vidéo de compétition, ces athlètes d'e-sport veulent croire en leur discipline.Par Richard Onanena De notre correspondant à Yaoundé,Dans cette salle sombre, le générique à fond dans les oreilles, Arex 16 ans répète ses gestes techniques comme le ferait tout sportif. Les yeux rivés sur un écran, ses doigts pianotent à toute vitesse sur une manette. « C'est à travers la Coupe du monde Fortnite que j'ai pris cette passion pour le jeu. Pour un jeune de mon âge, l'e-sport permet d'entrer dans les milieux compétitifs, même si on ne fait pas dans le basket et le foot… », explique-t-il.Arex s'entraîne 5 jours sur 7 au club Insomnia à Bastos, un quartier huppé de Yaoundé. Souvent sous le regard attentif de Boris, son entraîneur. Boris a pour mission de le préparer avant les compétitions e-sport comme c'est le cas en ce moment.« C'est une sorte de répétition, comme tout sport l'e-sport a des athlètes, soutient Boris. Là maintenant, nous sommes en train d'effectuer des simulations. Vous êtes à la base un joueur ou un stratège ? Je suis plutôt une personne passionnée m'y connaissant très bien dans le milieu avec pour vocation d'accompagner les personnes capables de faire le travail mieux que moi sur ce plan. »À lire aussiFortnite, les raisons d'un cartonOusseyni Sali, la fierté d'InsomniaInsomnia est le premier club professionnel de e-sport au Cameroun. Il compte une quinzaine de joueurs pro, à l'instar de Ousseyni Sali, double champion d'Afrique. Un jeune homme timide qui se déchaine quand retentit le générique de Street Fighter, son jeu favori. Ce champion est une fierté du club.« J'ai commencé depuis que je suis très petit. En continuant dans ma passion, cela m'a mené à des choses formidables », raconte Ousseyni Sali qui poursuit : « Être champion d'Afrique ouvre d'autres perspectives. J'aimerais qu'au Cameroun il y ait un peu plus d'infrastructure, et que le gouvernement essaye de faire en sorte que les joueurs camerounais puissent participer à plus de compétition parce qu'on a beaucoup de mal à faire les déplacements. »À écouter aussiE-sport et jeux vidéo, la nouvelle passion africaineUne discipline d'avenir au potentiel économique non négligeableOlivier Nkotto est le premier manager de carrière professionnel e-sport au Cameroun, il manage le potentiel du joueur, trouve des compétitions et s'occupe du volet administratif. Pour lui, le e-sport est encore embryonnaire au Cameroun, il estime que les entreprises devraient s'investir dans l’e-sport, car il s’agit d’une discipline d'avenir qui peut générer dans certaines conditions autant d'argent que le cinéma.« Le e-sport au Cameroun est malheureusement encore inexistant. On voit toujours le gamer comme une espèce de voyou, or dans d'autres pays, c'est quelque chose qui rapporte presque comme le cinéma. »Loin de l'engouement médiatique et sans soutien des autorités du pays, les athlètes e-sport camerounais creusent leur sillon. Il y a peu de temps, deux joueurs camerounais ont brillé dans une compétition internationale en Arabie saoudite, en terminant cinquième et septième sur une soixantaine de nations présentes.À lire aussiParis Games Week: «Le jeu vidéo africain, c'est possible !»
9/5/20232 minutes, 19 seconds
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Quand la Chine investit dans le numérique au Sénégal

La Chine est l’un des principaux investisseurs dans le secteur du numérique au Sénégal. Depuis la reprise de leurs relations diplomatiques en 2005, la Chine a construit l’intranet gouvernemental, a installé 4 500 km de fibre optique et a construit les réseaux 3G et 4G, et peut-être bientôt la 5G. Dernier gros projet en date financé par la coopération chinoise : le « data center », l’un des plus gros centres publics de stockage de données en Afrique de l’Ouest, en service depuis deux ans.
9/4/20232 minutes, 23 seconds
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Comment la Zambie s'est rendue dépendante aux prêts chinois

En Zambie, la Chine a prêté énormément d'argent pour aider le pays à développer ses infrastructures. Routes, aéroport, stades... Ces projets profitent à la Chine qui les finance et les construit pour accentuer son commerce avec la Zambie. Problème : la Zambie a fait défaut sur sa dette en 2020, incapable de rembourser ses créanciers en plein Covid-19. La Zambie a-t-elle été trop gourmande ? De notre envoyé spécial de retour de Lusaka,Le boom des infrastructures devrait réjouir Diego Casilli. Ce promoteur immobilier, très bon connaisseur de l'économie zambienne, y voit pourtant une forme de gaspillage. « C'est une bonne décision d'investir dans les infrastructures, mais beaucoup d'argent est parti dans les mauvais projets », déplore Diego Casilli. « On n'avait pas besoin de routes goudronnées partout. Et puis le prix au kilomètre, le coût de ces infrastructures était probablement trois fois plus cher que ce qu'on aurait pu obtenir du secteur privé, on n'avait pas besoin de se tourner vers les Chinois pour obtenir de très chères infrastructures. »Si l'ancien gouvernement s'est tourné vers la Chine, c'est pour obtenir des prêts aux conditions avantageuses. C'est ce que défend le député Mulenga Francis Fube, du Front patriotique qui a perdu les élections en 2021. Il nous reçoit dans le hall de l'Assemblée nationale lors d'une session parlementaire. « Les prêts chinois étaient meilleurs que les prêts soumis à de rudes conditions », souligne Mulenga Francis Fube. « Comme ceux du FMI, dont les conditions étranglent l'économie. Le FMI exige que vous mettiez fin aux subventions des carburants, alors que c'est vital pour l'économie ! »À lire aussiLa Zambie espère une restructuration de la dette la plus rapide possibleDes prêts chinois sous quelles conditions ?Mais ces prêts chinois, si faciles à obtenir, cachent-ils des conditions défavorables pour la Zambie et qui n'ont pas été dévoilées ? « Le nouveau gouvernement avait l'habitude de mentir en disant que les Chinois allaient s'emparer de notre souveraineté parce qu'on leur a vendu des entreprises étatiques... Mais maintenant qu'ils sont au pouvoir, ils sont bien incapables d'appuyer leur propos », avance Mulenga Francis Fube. « Si les prêts étaient accompagnés de conditions défavorables cachées, les Zambiens seraient au courant aujourd'hui. »Pourtant, si la Chine prête de l'argent facilement, ce n'est pas sans arrière-pensées, insiste l'économiste Trevor Hambayi rencontré dans un grand hôtel de Lusaka. « Ils veulent avoir accès aux matières premières qui sont essentielles pour leur développement, comme nos minerais, mais aussi le bois qu'ils importent, donc ils veulent pouvoir signer des accords commerciaux bilatéraux entre les deux pays », explique Trevor Hambayi. Des échanges commerciaux qui profitent principalement à la Chine qui exporte massivement ses produits vers la Zambie.À lire aussiLes «Nouvelles routes de la soie» en Chine, dans les yeux du correspondant de RFI
9/3/20232 minutes, 12 seconds
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Tunisie: des technologies virtuelles pour former le personnel médical

Au sein de l’université centrale, un centre de simulation médicale offre des formations aux étudiants et personnels paramédicaux. Il s’agit du Medical Simulation Center du réseau Honoris United Universities. Au cœur du cursus : des simulations sur des mannequins améliorés par la technologie et la réalité virtuelle. Des malaises, des arrêts cardiaques et même des accouchements sont reconstitués pour éviter que le jeune paramédical ne fasse sa première expérience sur un patient en vie. Reportage de notre correspondante à TunisLa chambre est exactement comme celle d’un hôpital, le matériel et le patient qui transpire semblent réels tout comme l’infirmière qui s’apprête à faire une piqûre.Derrière une vitre teintée, une personne simule la voix du patient, pilote le mannequin et déclenche différents symptômes. L’infirmière est une étudiante en pleine formation. Ibrahim Amara, technicien en pédiatrie au centre de simulation médicale, explique cette mise en scène :« La simulation médicale permet de créer dans n’importe quel moment des situations de soins complexes ou rares. Donc, l’étudiant ne peut pas voir ces situations dans ses stages par exemple. La simulation permet donc de gérer le stress. »Gérer le stress et la communication émotionnelle dans une situation plus vraie que nature. Alors que l’étudiante peine à réagir face au malaise vagal de sa patiente, sa supérieure rentre dans la chambre pour l’aider.« Elle va lui dire qu’elle a fait une erreur ?- Oui, elle va dire qu’il faut aider la patiente, surélever les jambes, c’est la prise en charge correcte. »Une fois le scénario exécuté, la scène a été filmée en direct et les étudiants dans une salle mitoyenne débriefent avec leur professeur.« Vous avez expliqué vos gestes à la patiente à chaque fois que vous faites le badigeonnage, vous serrez le garrot, vraiment on vous a suivi ici. Quelle était la difficulté dans votre gestuelle ?- Mon problème, c’est que je n’ai pas tout de suite trouvé la veine. »Cette formation, dispensée aux professionnels, fait partie du groupe Honoris Universities, qui regroupe 60 campus en Afrique. Depuis sa création en 2018, le centre a vu défiler près de 5 000 apprenants. Mais malgré sa qualité, la formation ne permet pas de retenir dans le pays les jeunes diplômés. La majorité d'entre eux partent exercer à l’étranger une fois leur diplôme en poche. En 2022, ils étaient 1 250 cadres médicaux et paramédicaux à partir pour de meilleurs salaires et conditions de travail.
9/2/20232 minutes, 26 seconds
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Sénégal: à Thiaroye-sur-Mer, on rêve toujours d'Europe

Avec l’arrivée de la saison des pluies au Sénégal, les départs de pirogues clandestines ont repris de plus belle vers l’Espagne. Quelque 260 Sénégalais en détresse ont été secourus dans les eaux marocaines début juillet. Mais de nombreuses pirogues disparaissent des radars. À Thiaroye-sur-Mer, un port de pêche proche de Dakar, c’est un phénomène bien connu et qui ne faiblit pas. Un ancien candidat à la migration essaye difficilement de décourager au départ.
9/1/20232 minutes, 30 seconds
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Kenya: quel accès à la santé pour les jeunes marginalisés?

Une partie de la population de Mombasa, deuxième ville portuaire la plus importante du Kenya, à majorité musulmane, est marginalisée dans l’accès aux soins de santé. C’est le cas notamment des jeunes vivant à la rue, des travailleurs et travailleuses du sexe, des personnes transgenres ou autres minorités sexuelles. Une exclusion qui a des conséquences sur leur santé, notamment sexuelle et reproductive. Médecins sans frontières, en collaboration avec le département de la Santé du comté de Mombasa, tente de combler cette carence.  De notre correspondante de retour de Mombasa,Quelques chaises et tables en plastique. Des espaces de consultation derrière des rideaux. Et du personnel de santé aux petits soins. Pour quelques heures, cette place du quartier populaire de Ganjoni à Mombasa a été transformée en dispensaire éphémère.« Le thème principal du jour, c’est la contraception et l’hygiène menstruelle », relate Caroline Mugun, infirmière, responsable des activités médicales pour MSF. « Ici, le clinicien peut recevoir le patient et avoir une consultation en privé. Aujourd’hui, nous avons fait pas mal de dépistages du cancer du col de l’utérus, des retraits d’implants contraceptifs et d’injections de contraceptifs longue durée, ce qui correspondait à des demandes que nous avions reçues. »À écouter aussiKenya : comment la pandémie a pénalisé la lutte contre le VIH et le paludisme« Nous arrivons à déconstruire »Les soins sont gratuits pour les patients âgés de 10 à 24 ans. Venir directement au contact d’une jeunesse marginalisée, c’est l’objectif de cette délocalisation. « Ce lieu est très stratégique parce qu’il y a beaucoup de personnes à la rue, de toxicomanes et de travailleurs et travailleuses du sexe. Ces personnes ont souvent peur d’aller dans certains centres de santé où il y a beaucoup de stigmatisation », explique Caroline Mugun. « En voyant par exemple un homme qui a des relations sexuelles avec des hommes, certains cliniciens peuvent se dire “ma religion ne valide pas ça”, ou alors, il y a une peur de devenir séropositif, d’être converti… Tout ça, au final, ce sont des appréhensions personnelles liées à un manque de connaissances, mais dès que nous échangeons avec eux, nous arrivons à les déconstruire. »« À l’hôpital, je ne me sens pas bien traitée… »Husna Aisha est venue chercher des contraceptifs et faire des tests de dépistage de maladies sexuellement transmissibles. Âgée de 23 ans, elle est travailleuse du sexe depuis sept ans, après s’être retrouvée à la rue au décès de ses parents. Mère de quatre enfants, la jeune femme privilégie désormais ces espaces adaptés à ses besoins. « À l’hôpital, je ne me sens pas bien traité. Ils disent “Ah... Husna est travailleuse du sexe, elle est jeune, pourquoi elle fait ça, elle devrait être à l’école”. Je me sens humiliée, je n’aime vraiment pas la façon dont je suis reçue », ressent Husna Aisha. « Donc même si j’attrape le VIH, je préfèrerais ne pas y aller, il y a trop de discriminations de la part des médecins. Alors qu’ici, c’est plus privé, ne serait-ce que parce que les cliniciens viennent directement là où nous sommes. »À écouter aussiAu Kenya, la pilule qui révolutionne le traitement du VIH chez les enfantsAvec ces actions, MSF et le comté de Mombasa espèrent reconnecter ces jeunes marginalisés au système de santé. Quelques dispensaires de la ville offrent aussi désormais des services adaptés avec du personnel sensibilisé aux vulnérabilités de cette jeunesse.
8/31/20232 minutes, 16 seconds
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Afrique du Sud: la popularité des films d’arts martiaux sous l’apartheid [4/4]

Les films d’arts martiaux venus de Hong-Kong ont connu un grand succès dans les townships en Afrique du Sud à partir des années 1970 1980. Des films qui  parvenaient à se frayer un chemin sur les écrans malgré la censure mise en place sous l’apartheid. Et ils ont connu beaucoup d’échos au sein des populations réprimées par le régime. De notre correspondante à JohannesburgDans le quartier de Mofolo, au sein de Soweto, se dresse toujours une façade emblématique. Le Eyethu cinema, désormais en rénovation, était, sous l’apartheid un des rares lieux de divertissement de la zone, et a permis à des générations du township de découvrir des films sur grand écran. Lindi Tshabalala est la fille du fondateur de ce cinéma historique, et elle se souvient très bien de l’arrivée des premiers films d’arts martiaux.« Il y avait beaucoup de petits magasins chinois, et c’est comme ça que ma sœur trouvait ces films et les ramenait à Soweto. Les gens adoraient ces combats, surtout les enfants. Oh Jackie Chan ! Bruce Lee ! Surtout eux ! On mettait des pubs sur les murs, et ils pouvaient voir que Jackie Chan allait arriver, avec ses jambes dans les airs ! Notre cinéma était alors plein à craquer, c’était incroyable, vraiment. C'étaient toujours les plus populaires. »Des films qui ont su échapper à la censure du régime de l’apartheid, comme le rappelle le chercheur Cobus van Staden qui s’est penché sur le sujet : « C’était une censure à la fois sur le plan de la morale, où les images sexuelles étaient proscrites ainsi que la violence, mais aussi sur le plan politique, où il fallait bloquer les messages révolutionnaires. Beaucoup de films de Bruce Lee étaient assez anti-coloniaux, de façon explicite, mais parce qu’ils étaient perçus comme une forme de divertissement bas de gamme, ces messages ont pu passer sous les radars. »À 72 ans, Abraham garde encore de très bons souvenirs des films de cette période, qu’il regardait pour sa part sur cassettes : « Pour nous, la communauté noire, c'étaient nos héros, ils nous divertissaient beaucoup plus que les autres films. » Et ses fils, Medupi et Thato, qui ont grandi avec ces films d’arts martiaux, se rappellent encore des gestes qu’ils tentaient de reproduire dans les rues de Soweto.Des films toujours programmés sur le petit écran« Les Chinois nous prouvaient que l’on pouvait vaincre toute une armée juste avec nos mains. Ils nous inspiraient beaucoup, se souvient son fils Medupi. Ceux perçus comme inférieurs nous montraient qu’ils étaient capables battre les meilleurs grâce à leur intelligence et juste avec ce qu’ils avaient. »Pour Thato : « Moi, je me souviens d’avoir regardé le film où un combattant américain doit combattre Bruce Lee. Devinez qui ils ont choisi ? Chuck Norris ! Bruce Lee est le seul homme capable de battre Chuck Norris. »Signe de leur popularité, encore aujourd’hui : les films d’arts martiaux, anciens et récents, continuent d’être programmés le vendredi soir, sur l’une des chaînes publiques de la télévision sud-africaine.À écouter aussiOuganda: les films d'arts martiaux de Wakaliwood, un cinéma d'action à budget serré [3/4]
8/30/20232 minutes, 26 seconds
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Ouganda: les films d'arts martiaux de Wakaliwood, un cinéma d'action à budget serré [3/4]

En Ouganda, ils ont inventé un nouveau style de films d’arts martiaux. Les Ramon Films Productions sont plus connues sous le nom de Wakaliwood, du nom du bidonville de Wakaliga où ils sont situés à Kampala. Lancé en 2005, Wakaliwood, ce sont des films d’action où le kung-fu prend une place de choix.  De notre correspondante de retour de Kampala,Des bandits contre un jeune héros masqué. Devant la caméra, les acteurs échangent quelques coups avant de se lancer dans une course poursuite dans les rues de Wakaliga : « On fait un film d’action, on tourne l’une des scènes qu’on a travaillée, et le film sera bientôt sur le marché », nous confie Ronald Ssebagenyi qui joue l’un des criminels. Acteur des Ramon Films Productions depuis plus de cinq ans et coach sportif de profession, le jeune homme a découvert les arts martiaux à travers les films d’action de Wakaliwood quand il était enfant : « Le kung-fu, à l’origine, c’est de la self-defense, de la discipline, et maintenant, on l’utilise dans les films. Moi, je voulais être une star du cinéma. Et maintenant, je fais aussi des compétitions, c’est très important pour moi. »La suite de Who killed Captain Alex est en cours de tournageÀ la caméra, Isaac Nabwana, fondateur des studios de Wakaliwood, des studios rendus célèbres en 2010 par le succès de Who killed Captain Alex, production au budget minimaliste d’une centaine de dollars mais comptant plus de huit millions de vues sur YouTube. Après une pause durant la longue période de pandémie de coronavirus, le réalisateur a repris les tournages cette année « Je commence avec Clan Leader, que je tourne maintenant. Mais je travaille aussi sur Who Killed Captain Alex 2. J’ai déjà tourné quelques scènes. J’ai l’habitude de tourner deux ou trois films en même temps, pour ne pas être dans la monotonie », précise le réalisateur.Fausses armes et accessoires faits maisons, longues scènes d’actions explosives et de combats sanglants inspirés des films de Bruce Lee : la recette du succès wakaliwoodien n’a pas changé. L’objectif pour Isaac Nabwana : créer un nouveau genre pour son audience : « Moi et les gens de mon âge, on a grandi avec Schwarzenegger et d’autres. Nous n’avons jamais vu de films ougandais, ou même africains quand on était jeune. C'étaient toujours des films occidentaux. Ce qui m’est venu à l’esprit, c’est, pourquoi ne pourrait-on pas créer une nouvelle scène pour que, quand les enfants grandissent, ils puissent voir des acteurs qui leur ressemblent. »Dans les studios, les plus jeunes viennent désormais s’initier aux différentes techniques d’arts martiaux, dans l’espoir, eux aussi, de devenir des stars du grand écran ougandais.À lire aussiOuganda: Wakaliwood, le cinéma des bidonvilles de Kampala
8/29/20232 minutes, 17 seconds
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Centrafrique: les films d’art martiaux toujours très populaires dans les salles de Bangui

En Centrafrique, ceux qui aiment le cinéma asiatique et qui ont grandi dans les années 70, 80 et 90 ont tous été bercés par les films d'arts martiaux. Cette attirance envers ces films se transmettent de génération en génération. De nos jours, beaucoup de jeunes centrafricains regardent les films d'arts martiaux à longueur de journée dans les « Dâ ti film » les « maisons de film » en français, des petites salles dans lesquelles on se retrouve autour d'une vidéo sur cassette VHS ou sur DVD. Découvrons les raisons de ce grand intérêt dans ce reportage de Rolf-Steve Domia-Leu.  De notre correspondant à Bangui,Dans la « maison de film » baptisé « Kung Fu » au quartier Fouh, il y a quelques adultes et beaucoup de jeunes, une cinquantaine de personnes en tout. Il est 14 heures précises et c'est l'heure où un film d'arts martiaux est projeté.Les téléspectateurs prennent place sur une trentaine de bancs de 4 mètres, alignés les uns derrières les autres en trois rangées. Adelphe est passionné des films d'arts martiaux :« Ces films sont très populaires parce qu'il y a des gestes attrayants et des actions sensationnelles que nous aimons. Les techniques de combats sont vraiment approfondies et bien pratiquées par des acteurs comme Jean-Claude Van Damme, Arnold Schwarzenegger, Jet Li pour ne citer que ceux-là. Moi-même, j'ai pratiqué les arts martiaux quand j'étais très jeune, donc c'est très bien de regarder ces films. »À écouter aussiCôte d'Ivoire: comment les films d'arts martiaux ont créé le mouvement Ziguéhi?Au premier rang, Allayam, 23 ans est entouré de ses camarades. Les yeux rivés sur l’écran situé à deux mètres, celui qui rêve de devenir policier, ne manque jamais les films d'arts martiaux :« J'aime beaucoup les films d'arts martiaux parce que je rêve de devenir policier. Quand on veut devenir policier, on doit maîtriser les tactiques qui relèvent de ces arts martiaux. Si un jour, dans l'exercice de notre travail, on se confronte à un bandit qui est plus colossal que nous, à travers ces techniques, on peut se défendre. Ces films éloignent de moi le stress, les ennuis et les mauvaises réalités de la vie. »Des films qui ont du succèsCes films sont projetés avec des DVD ou des cassettes. À chaque fois qu'il programme des films d'arts martiaux, Alain, propriétaire de cette salle, gagne beaucoup d'argent : « Quand je programme des films d'arts martiaux, ça marche très bien. Les gens adorent vraiment ce genre de films. Ils préfèrent les acteurs comme Jet Li, Nico, Van Damme et même ceux des anciens films d'arts martiaux. À force de regarder ces films, beaucoup de personnes se sont engagées dans le sport. Chaque jour, je programme six films d'arts martiaux et la salle est toujours remplie. »Ce genre de salle, on en compte un millier dans tous les quartiers de Bangui. Beaucoup de jeunes regardent ces films pour se forger un caractère et surtout d'avoir un équilibre psychologique et physique.
8/28/20232 minutes, 15 seconds
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Côte d'Ivoire: comment les films d'arts martiaux ont créé le mouvement Ziguéhi?

Le mouvement ziguéhi naît dans les rues d'Abidjan, en Côte d'Ivoire, dans les années 1980. Il s’inspire des films d'action popularisés à l'époque par Sylvester Stallone, Bruce Lee ou autre Jean-Claude van Damme. Beaucoup de jeunes urbains ivoiriens désœuvrés s'adonnent à la musculation et aux arts martiaux pour se faire un nom et « briller » dans la rue. Au fur et à mesure, des groupes s'organisent à la manière de gangs américains et se lancent dans des guerres de territoire. De notre envoyé spécial à Abidjan,C’est dans la commune de Treichville que l’association Ziguehi Force One s’est installée. Coincée entre le grand marché et le pont Charles de Gaulle, la petite salle de musculation est investie par des jeunes et moins jeunes, qui se relaient sur les machines en comparant leur biceps.À bientôt 50 ans, le secrétaire général adjoint Youssouf Sidibé, dit Baya, fait partie des premières générations de Ziguéhis. Il se souvient que c’est dans les années 80 qu’émergent les premiers groupes qui se livrent des guerres de territoire : « Les bagarres de rue, c’est par quartier, avec Treichville, Marcory, Abobo… Nous partions défier les gens qui étaient les plus forts de là-bas. On partait les défier. On s’est bagarrés avec des machettes, couteaux, tout ! On se battait souvent et d'autres "restaient dedans". Quand je dis "restaient dedans", c’est qu’il y avait mort d'homme. Un chef doit montrer qu'il est le chef. Quand on dit que telle personne, qui est là-bas, a la force, toi, tu dois aller le défier pour lui dire que c'est un enfant. Et une fois qu’il y a une victoire, c’est la joie. »« Nous sommes des hommes au grand cœur »Aujourd’hui père de famille, Baya est devenu entraîneur de rugby et de muay-thaï. Pendant son temps libre, il participe aux activités de l’association et vient faire de l’exercice dans la salle. Il y a aussi des athlètes, comme le jeune – mais massif – OB Champion, professionnel de powerlifting (force athlétique, en français). Il incarne la nouvelle génération de Ziguéhis, pour qui le culte du corps a remplacé la violence : « Il y a des Ziguéhis qui sont avocats, d’autres qui sont gendarmes. Le Ziguéhi n'est pas synonyme de banditisme. Il défend, il protège. Si tu ne fais pas ça, tu n’es pas un Ziguéhi, tu es un bandit, on doit te frapper. Nous sommes des hommes au grand cœur. »À lire aussiCôte d’Ivoire: le festival de Blockhaus, l'occasion d'initier les visiteurs à la culture atchanHistoriquement, le mouvement ziguéhi naît au tout début des années 1980. Après deux décennies d’un développement fulgurant, la Côte d’Ivoire traverse une grave crise économique. Avec la hausse de la criminalité, des groupes d’autodéfense s’organisent dans les quartiers d’Abidjan. Dans le même temps, des salles de cinéma apparaissaient à travers le territoire. Les films d’action cartonnent et imprègnent l’imaginaire des jeunes.Un mouvement désormais intégré aux cultures urbainesSéverin Kouamé est sociologue à l’université de Bouaké : « C’était aussi une sorte de connexion au monde. Donc justement, on voyait ce qui se passait aux États-Unis avec les guerres de gangs. On voyait bien comment, par exemple, on construisait la masculinité, de la virilité et certaines compétences personnelles à travers les arts martiaux. Donc tous les Jacky Chan, les Bruce Lee, étaient les modèles de l'époque, et ces jeunes gens se sont construits à travers ces modèles-là. C'était une forme de culture urbaine qui s'enracinait malgré tout dans une forme de violence contestataire de l'ordre social. »De nos jours, le mouvement ziguéhi est considéré comme précurseur des cultures urbaines ivoiriennes. À tel point que les légendes et les mythes du phénomène sont célébrés bien au-delà des frontières du pays.À lire aussiMusiques: en Côte d'Ivoire, comment le rap local a supplanté un coupé-décalé en perte de vitesse
8/27/20232 minutes, 26 seconds
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Le takkball, un sport inventé en Côte d'Ivoire

Ce sport aérobic créé en 2022, inspiré du badminton, du tennis et et du tennis de table, a su séduire les établissements scolaires. Fort de 500 licenciés, la jeune fédération nationale de takkball, dirigée par son créateur, l’entrepreneur ivoirien Charles Abycé, espère conquérir toute la sous-région.
8/26/20232 minutes, 25 seconds
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Centrafrique: le trou de Maïgaro, lieu de culte à l'histoire atypique

Reportage Afrique nous emmène en Centrafrique, à la découverte du très impressionnant trou de Maïgaro (village situé à 7 kilomètres de Bouar dans la Nana-Mambéré), dans l’ouest du pays. La cavité fait la particularité de la région, avec son histoire atypique, fondée sur des pratiques ancestrales : selon les sages, cette fosse représente le tombeau de leurs ancêtres. Chaque année, les habitants de Bouar et des villages environnants y célèbrent des cultes, pour obtenir la faveur des ancêtres (afin d’éviter la sècheresse, la malédiction ou encore le mauvais sort).
8/25/20232 minutes, 3 seconds
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Centrafrique: le CICR au secours des groupements agricoles de la Nana-Mambéré

En Centrafrique, la situation de la sécurité alimentaire demeure inquiétante à la suite des violences armées. Le calendrier agricole est sévèrement perturbé ces cinq dernières années dans plusieurs préfectures. Ce qui ne favorise pas un meilleur rendement. Pour y faire face, le CICR vole au secours des groupements agricoles de la Nana-Mambéré, préfecture située dans l'ouest du pays, pour la multiplication des semences dans l'optique d'en avoir de bonnes qualités et favoriser une meilleure production pour lutter contre l'insécurité alimentaire. De notre correspondant à Bangui,Sous un ciel nuageux, la pluie se fait menaçante dans l'immense forêt du village Kpockté à 15 km dans l’est. Dans le sillage des pistes qui serpentent, on peut voir 12 hectares de terre irrigués. À perte de vue, des plantations de manioc.Chapeau de paille sur la tête, combinaison bleue, Albert Adamou, superviseur du groupement « Tabita » et ses membres nettoient les champs de manioc avec des machettes et des houes. « Ce sont des boutures qui totalisent seulement un an, mais comme vous voyez, elles dépassent déjà deux mètres », explique Albert Adamou. « Le manioc a beaucoup d’avantages. On peut obtenir des tubercules, faire des couscous de maniocs, des beignets et on peut même cuire les tubercules et on les mange directement. »« Le champ, c'est ma vie »En voiture, nous prenons la direction du village Zegonta à l'ouest. Un peu plus loin, au milieu des hautes herbes et sur des terrains accidentés, s'étendent sept hectares d’arachides, six hectares de maïs et cinq hectares de manioc. Ces plantations qui produiront des semences sont celles du groupement « Yong né her ».Deka Alice, 60 ans, est très motivée : « Tous les jours, je travaille ici. Le champ, c’est ma vie », assure-t-elle. « Dans notre groupement, on produit des variétés de maniocs, de maïs et d’arachide. Nous sommes déterminés de relever ce défi parce que notre pays a beaucoup souffert de l’insécurité alimentaire. »Des formations dispensées pour une meilleure productionTous les groupements ont bénéficié en amont d'une formation sur les techniques d'agriculture avant le semis. Pacifique Habonimana, du CICR, présente les statistiques de production annuelle.« Sur une superficie de 14 hectares seulement, on a pu produire jusqu'à 12 000 kilos de semences de maïs, 4 000 kilos de semences d'arachide. Tout cela a permis d'avoir auprès de ces groupements des revenus avoisinants les 17 millions [de francs CFA]. C'est vraiment très important pour ces communautés qui essaient d'avoir une activité génératrice de revenus tout en restant dans leur terroir pour produire des bonnes choses pour la population. »Après la récolte, le CICR va racheter ces semences pour les distribuer aux cultivateurs de la Nana-Mambéré et ceux des autres régions du pays.
8/24/20232 minutes, 16 seconds
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Kenya: les communautés Kipsigi et Talaï toujours en quête de réparations

Au Kenya, les communautés Kipsigi et Talaï, violemment chassées de leurs terres ancestrales par les colons britanniques dans les années 1940, réclament toujours justice. Il y a un an, des représentants de ces communautés déposaient une plainte gouvernement britannique devant la Cour européenne des droits de l’homme dans le but d’obtenir des excuses et des réparations, sans avancées pour le moment. Parmi les victimes et leurs descendants, les blessures sont pourtant toujours vives. De notre envoyée spéciale à Kericho,De sa maison, Elizabeth Chepkwony, 84 ans, aperçoit au loin les hauts plateaux fertiles qui l’ont vue naître et dont elle fut chassée une nuit avec ses parents par des colons britanniques. Elle avait 7 ans.« Ils ont tout brûlé : nos maisons, nos affaires… Ils avaient des armes à feu et des fouets », se souvient Elizabeth. « Ils ont battu mon père et ma mère sous mes yeux. Ils ont aussi tué tout notre bétail et j’ai été frappée pour avoir essayé de protéger une chèvre. Regardez, j’ai encore la trace », montre-t-elle.Sur ces terres fertiles ainsi accaparées au prix d’incendies, de meurtres et de viols, les colons ont planté du thé, toujours exporté aujourd’hui dans le monde entier par des multinationales britanniques. Elizabeth et sa famille, eux, ont été relégués comme des milliers d’autres dans ce qu’on appelait alors une « réserve autochtone ». Des terres peu cultivables.« Je ressens beaucoup d’amertume quand je pense aux terres de mes ancêtres. Cela me fait de la peine de voir qu’elles rapportent tant d’argent, mais que nous, nous n’en bénéficions absolument pas. Parfois, je retourne sur place et je pleure, car depuis qu’on nous en a chassé, nous vivons dans la pauvreté », se désole la vieille femme.« Les Britanniques essaient de fuir leurs responsabilités »Elizabeth fait partie des 150 000 victimes que représente l’avocat kenyan Joel Kimutai Bosek. C’est lui qui a porté l’affaire devant la Cour européenne des droits de l’homme l’an dernier, sans résultat pour le moment. L’ONU a eu beau dénoncer en 2021 « l’échec » des autorités britanniques à affronter ses crimes coloniaux, l’avocat affirme que Londres continuer à les ignorer.« Les Britanniques essaient de fuir leurs responsabilités, mais nous disons aussi que le gouvernement britannique et les multinationales tirent profit de crimes et de violations des droits de l’homme depuis trop longtemps, et qu’ils doivent rendre des comptes », assène l’avocat.Les victimes pointent aussi la responsabilité du Kenya. Joel Kimeto est l’un des représentants de la communauté Kipsigi. Selon lui, Nairobi aurait dû rétrocéder ces terres à son peuple à l’indépendance du pays en 1963. « Les terres qui ont été spoliées représentent presque la moitié des terres kipsigis. Nous voulons que ces terres reviennent à leurs propriétaires légitimes », ajoute Joel Kimutai Bosek.« C’est une bombe à retardement », assure-t-il, car le ressentiment se transmet de génération en génération. En mai dernier, une centaine de jeunes ont été arrêtés pour avoir envahi des plantations de thés et incendié une partie des routes, des outils de productions.
8/24/20232 minutes, 21 seconds
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Diasporas africaines en Afrique [3/3]: en RDC, les Tanzaniens de Lubumbashi

La diaspora tanzanienne est l’une des plus importantes diasporas africaines basées à Lubumbashi, dans le sud de la RDC. La plupart des Tanzaniens vivant à Lubumbashi sont dans le petit commerce, la petite restauration et surtout dans le transport. Et pour renforcer les relations entre la Tanzanie et le sud de la RDC, il y a plus de deux ans, un consulat tanzanien a ouvert ses portes à Lubumbashi. Une compagnie aérienne et une autre routière permettent par ailleurs la liaison directe entre Lubumbashi et Dar es Salaam. De notre correspondante à Lubumbashi,Le Sekela Restaurant, avenue M’siri à Lubumbashi, est le lieu de rencontre de la communauté tanzanienne.Il est 10 heures du matin, quelques clients sont déjà attablés. Certains commandent de la soupe au poulet, un plat typiquement tanzanien. « Si tu veux un bon plat tanzanien avec tous les ingrédients de chez nous, c’est ici chez Mme Sekela. Cet endroit est unique dans la ville, il n’y en a pas deux comme ça », assure l'un deux.Les réticences des débutsLa propriétaire, Mme Sekela Mandela, a ouvert son restaurant il y a plus de dix ans. Le gros des aliments et des épices provient de son pays d’origine. « Au début, j’ai eu des difficultés, car les Congolais ne voulaient manger que du foufou alors que chez nous, l’aliment principal, c’est le riz, se souvient-elle. Mais là, ils sont devenus friands du riz, plus que les Tanzaniens ! Voilà, j’ai des clients aussi bien tanzaniens que congolais. »À écouter aussiDiasporas africaines en Afrique[1/3]: en Égypte, les Soudanaises du CaireBeby Manyanya, une jeune femme rencontrée au restaurant, vend divers articles en provenance de Tanzanie. Pour s’intégrer, elle a dû apprendre quelques mots de français.« Les relations sont parfois compliquées avec les Congolais qui ne sont jamais venus chez nous, ils nous traitent comme des personnes de basse classe, déplore-t-elle. Nous leur faisons comprendre que Tanzaniens et Congolais sont pareils. »Un lien économique entre Lubumbashi et Dar es SalaamÀ quelques kilomètres de là, au quartier Kisenvere, M. Chenza Habiri, un autre Tanzanien, travaille dans les transports. Son entreprise, Chenza Agri Congo, assure le convoi des marchandises entre son pays et la RDC, mais également autour de Lubumbashi.Les échanges économiques entre la Tanzanie et la RDC sont pour lui essentiels au développement de son activité. « Entre Lubumbashi et Dar es Salaam, notre capitale, les activités commerciales marchent bien, car le gros des marchandises qui inondent le marché de Lubumbashi transite par le port de Dar es Salaam, explique-t-il. Et le gouvernement tanzanien a ouvert ici à Lubumbashi la représentation du port. Donc un Congolais peut faire des opérations de dédouanement de sa marchandise sans avoir à se rendre physiquement à Dar es Salaam. »Malgré l’hospitalité de la RDC, la plupart de ces Tanzaniens retournent dans leur pays au moins deux fois par an, surtout en période de fêtes.À écouter aussiDiasporas africaines en Afrique [2/3]: en Côte d’Ivoire, les Guinéens d’Abidjan
8/22/20232 minutes, 15 seconds
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Diasporas africaines en Afrique [2/3]: en Côte d’Ivoire, les Guinéens d’Abidjan

Près de 3 millions de Guinéens vivent en Côte d’Ivoire, selon Kaba Sekou, le président du Haut Conseil de la diaspora section Côte d’Ivoire. Guinéens et Ivoiriens sont proches par la géographie, la langue, la culture et même la gastronomie. Reportage à Adjamé, l’un des quartiers de prédilection de la diaspora guinéenne d’Abidjan. Avec notre correspondante à Abidjan,Mariam Diallo vit en Côte d’Ivoire depuis 20 ans. Dans ce coin de rue d’Adjamé, au centre d’Abidjan, elle vend des plats bon marché qu’elle maintient au chaud sur son petit stand. Les Guinéens sont nombreux dans ce quartier populaire, raconte-t-elle, ainsi qu’à Yopougon et à Treichville. Leurs secteurs de prédilection ? Le commerce, la couture et surtout, la restauration. « Je me sens bien ici, les affaires vont bien. J’ai mon petit restaurant où je vends du riz, des sauces feuilles, du mafé. C’est de la cuisine guinéenne. Mais j’ai des clients ivoiriens, des clients guinéens, des clients nigériens… Tout ! »Les Ivoiriens associent le nom de « Diallo », l’un des plus répandus en Guinée, aux boutiquiers et surtout aux kiosquiers. Ils servent le matin du pain et du café, et toute la journée, des spaghettis, des rognons et des petits pois. Une tradition culinaire qui n’est ni totalement guinéenne, ni totalement ivoirienne, mais née précisément dans cette diaspora. Un symbole de l’intégration, se félicite Abdoulaye Sow, résident de Côte d’Ivoire depuis 1992, qui tient l’un de ces kiosques. « Les débuts étaient difficiles pour nous ici, les étrangers subissaient des tracasseries policières, mais les choses se sont améliorées et maintenant les Guinéens et les Ivoiriens vivent en bonne intelligence : "Sans problème". »Pendant les différentes crises politiques de Côte d’Ivoire, les Guinéens ont moins été ciblés que les autres ressortissants de la sous-région, comme les Burkinabés et des Maliens, explique Ahmadou Lamarana Diallo, 39 ans, commerçant et professeur de fulfulde à l'Académie ivoirienne des langues maternelles. En revanche, la Guinée n’est pas membre de l’Uemoa, et ses ressortissants peuvent parfois en pâtir. « La Guinée, c’est un pays voisin de la Côte d’Ivoire, mais d’une certaine manière, un peu éloigné. Appeler à Conakry, c’est plus cher qu’appeler au Niger. Les étudiants guinéens ici, qui sont hors Uemoa, nous payons parfois six fois plus cher que les Ivoiriens. Pour un master ici, il faudra débourser 400 000 francs CFA, tandis qu’un Ivoirien, c’est 60 000, et un Malien, c’est 100 000. Pour une licence, le Guinéen paie 300 000 et le Malien, 100 000. Nous souhaiterions que cela se règle. Il y a beaucoup de jeunes ici, qui ont le bac ivoirien, qui sont nés et ont grandi ici, ils ne peuvent pas continuer leurs études dans les institutions de l’enseignement supérieur public au même titre que leurs voisins maliens ou nigériens. »Les premiers Guinéens de Côte d’Ivoire étaient des intellectuels et des réfugiés politiques, raconte Ahmadou Lamarana Diallo, qui fuyaient le régime de Sékou Touré. Mais aujourd’hui, la plupart des membres de la diaspora s’y sont installés pour des raisons économiques. Ils rêvent de retourner finir leurs jours en Guinée, en laissant leurs enfants en Côte d’Ivoire, pour poursuivre leurs activités.À écouter aussiDiasporas africaines en Afrique: en Égypte, les Soudanaises du Caire [1/3]
8/21/20232 minutes, 13 seconds
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Diasporas africaines en Afrique: en Égypte, les Soudanaises du Caire [1/3]

280 000 personnes ont fui le conflit soudanais vers l'Égypte, selon les derniers chiffres communiqués par le Haut-Commissariat aux réfugiés. Beaucoup s'installent dans les quartiers en périphérie du Caire, en espèrant y trouver l'aide de leurs compatriotes arrivés là depuis des années. Parmi les réfugiés, une majorité de femmes, rentrées dans le pays, seules avec leurs enfants. Au nord de la mégapole, celles qui ont fui la guerre, il y a quelques semaines, se retrouvent dans un petit salon de beauté du quartier d'Aïn Shams. Quelques banquettes installées dans une petite pièce sans fenêtres, des accessoires de coiffure accrochés au mur, le modeste salon de beauté d’Aziza est devenu un point de repère pour ses compatriotes soudanaises. Elles se retrouvent entre « sœurs », et tentent d'oublier, le temps d'une coiffure ou d'un tatouage au henné, la douleur de la guerre et de la migration forcée.« Ici, c’est un salon soudanais, on fait du henné, des épilations, des coiffures rastas… à la soudanaise ! c’est mieux que n’importe quel autre travail, je me sens un peu comme au Soudan », explique Aziza l’esthéticienne qui dessine quelques fleurs au henné sur la cheville de Mariam, une jeune cliente.  Elle est arrivée en Égypte en juin après avoir fui la guerre au Soudan : « Le Soudan c’est comme ma mère, l’Égypte, disons que c’est une tante, mais je suis bien ici au salon, entre femmes, je fais du henné pour me sentir encore femme, oublier un peu les soucis et le stress. » Mais très vite, ses pensées vont à sa famille restée au pays : « Mes frères m’ont contactée hier de Khartoum, le réseau téléphonique est très mauvais et il y a d’importants raids aériens. Je suis là, mais mon cœur n’est pas serein, j’ai laissé mes parents et mes frères là-bas. »Le salon devient un lieu d’entraideLes clientes du salon sont toutes dans le même cas, arrivées ici, il y a quelques mois sans leur mari. Salma ne s’en sort plus financièrement : « Mon mari n’a pas obtenu de visa d’entrée, pour d’autres les passeports étaient coincés dans les bureaux fermés. J’ai six enfants avec moi ici, je veux leur offrir une belle vie, mais je n’ai pas d’argent. »Alors le salon devient un lieu d’entraide. Les plus anciennes aident les nouvelles, si elles entendent parler d’un emploi ou d’un hébergement : « Je viens ici pour retrouver mes sœurs », lance l'une d'elle. « Elle vient demander de l’aide pour trouver un appartement », explique une autre.À quelques rues du salon, Alnoor dirige l’association Dajo d’aide à la communauté soudanaise : « La majorité de nouveaux arrivants depuis le 15 avril, ce sont des femmes qui ont laissé leur mari au Soudan. Avant le conflit aussi d’ailleurs, ajoute Alnoor. Ces mères de famille étaient aidées par leurs familles restées au pays, mais il n’y a plus de travail là-bas à cause du conflit. Cette catégorie de femmes souffre beaucoup du tarissement des ressources financières. »Son association va prochainement proposer des formations dédiées aux femmes en propos des   cours d’anglais, d’informatique, de coiffure et de tatouage au henné.À lire aussiGuerre au Soudan: comment au 5e mois la situation est devenue désastreuse et l’aide internationale insuffisante
8/20/20232 minutes, 17 seconds
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De mystérieux massacres à Goré, sud du Tchad: colère et crainte d’une escalade [2/2]

Au printemps dernier, près d’une centaine de personnes ont trouvé la mort dans une mystérieuse série de massacres qui ont touché les régions méridionales du Tchad. Des groupes armés bien organisés, au méthodes particulièrement cruelles mais dont l’identité exacte reste incertaine, ont semé la terreur dans plusieurs villages. Tout a commencé par l’attaque d’un campement peul par un groupe de rebelles tchadiens basé en Centrafrique voisine. Le drame a déclenché un cycle de représailles qui ravivent les tensions entre les communautés ainsi que la défiance entre des populations locales envers les autorités. Suite de l’enquête de notre correspondant au Tchad. De notre correspondant au Tchad,Parmi les survivants du massacre de Don victimes d’une razzia menée par de mystérieux cavaliers parlant arabe ou peul, la colère gronde. Notamment contre les autorités locales parfois, propriétaires de bétail et qu’ils accusent d’armer les éleveurs pour protéger leurs troupeaux.Claudine Nkoutou : « Ils ont tué mon mari, mes enfants, mes neveux et mes petits-enfants, toute ma famille. Je n’ai plus rien, pas même une bâche pour me protéger de la pluie. J’aurais préféré qu’ils me tuent avec les autres plutôt que de vivre comme ça. "Je veux que tu portes ma voix pour que le monde sache ce que j’ai subi". Les autorités ne disent rien, elles ne se soucient même pas de notre cas. »Ils s’estiment persécutés pour des raisons politiques car la zone est réputée favorable à l’opposition : « Les coupables sont toujours en liberté, s’insurge Janvier Bogota, survivant de Don. C’est pourquoi nous accusons les autorités d’être de mèche avec les éleveurs pour nous massacrer. Ils nous tuent en disant que nous sommes des bandits et des rebelles, mais c’est faux. Nous ne sommes que des pauvres agriculteurs, devenus réfugiés ».Pour le préfet de la Nya Pendé, Abdelkerim Tahir, Les coupables seraient issus d’un groupe rebelle tchadien mu par des ambitions politiques : « C’est un scénario qui a été joué par ces bandits sans foi ni loi qui veulent gouverner ce pays. Ils veulent créer des troubles – soit disant le gouvernement ne peut pas vous protéger. Ces personnes veulent rendre le Tchad invivable et ingouvernable et ce sont les mêmes bandits qui ont tué les éleveurs et qui sont venus au village pour perpétrer ce massacre. »Crainte de conflits entre éleveursL’armée tchadienne est entrée en Centrafrique pour détruire un camp de rebelles après l’attaque d’un campement peul qui a fait des dizaines de morts, dont des vieillards et des enfants.Cette communauté vit aujourd’hui dans la crainte des représailles, comme nous explique Ali Moussa, chef de ferrick : « Nous n’avons rien à voir avec ça, mais nous sommes victimes. Ceux qui ont massacré à Don sont venus d’ailleurs. C’est absurde que nous nous entretuions comme ça. Nous sommes des Tchadiens, et tous les Tchadiens sont égaux. Qu’on arrête de dire que le Sud, c’est pour les sudistes et le Nord pour les nordistes, ça n’apportera rien de bon »Avec la fin de la saison des pluies et le début de la transhumance, les analystes craignent que les conflits entre éleveurs et agriculteurs ainsi que les échéances politiques au Tchad n’exacerbent les tensions. À écouter aussiDe mystérieux massacres à Goré, sud du Tchad: une attaque durant la messe [1/2]
8/19/20232 minutes, 15 seconds
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De mystérieux massacres à Goré, sud du Tchad: une attaque durant la messe [1/2]

Au printemps 2023, près d’une centaine de personnes ont trouvé la mort dans une mystérieuse série de massacres qui ont touché les régions méridionales du Tchad. Des groupes armés bien organisés, aux méthodes particulièrement cruelles, mais dont l’identité exacte reste incertaine, ont semé la terreur dans plusieurs villages. Tout a commencé par l’attaque d’un campement peul par un groupe de rebelles tchadiens basé en Centrafrique voisine. Le drame a déclenché un cycle de représailles qui ravivent les tensions entre les communautés ainsi que la défiance entre des populations locales envers les autorités. Enquête de notre correspondant au Tchad.  À lire aussiTchad: incompréhension dans le sud-ouest du pays où les violences se poursuivent
8/18/20232 minutes, 31 seconds
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Gabon: des barrières électriques pour éloigner les éléphants des plantations

Au Gabon, le conflit humain-éléphant dure depuis des années. Les éléphants s’approchent trop des villages, dévastent les champs, cassent des maisons, attaquant même parfois les habitants. Les populations concernées accusent les hommes politiques de protéger ces animaux au détriment des humains. Pour résoudre ce conflit, le gouvernement indemnise les victimes, et s’est lancé dans un vaste programme de construction de barrières électriques pour sécuriser les plantations des villageois. Sur la route de Cocobeach, dans le village Nouayon, certains ont déjà bénéficié de ces barrières. À lire aussiGabon: coup de filet dans un réseau de trafiquants d'ivoire
8/17/20232 minutes, 23 seconds
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Les séries télés qui ont fait le buzz [4/4]: la série marocaine «L'Maktoub»

Ce feuilleton diffusé depuis deux ans, juste après la rupture du jeûne, pendant le ramadan, a rassemblé près de 10 millions de téléspectateurs chaque soir. L’Maktoub (en français, « le destin ») raconte l’histoire de Hind, une jeune femme issue d’une famille populaire dont la maman est une Cheikha, des chanteuses et danseuses marocaines souvent vues comme des artistes aux mœurs légères, libres et honnies par la société. La jeune Hind croise le chemin d’un homme bourgeois et fortuné qui souhaite l’épouser, mais les enfants de ce dernier s’y opposent. La série a fait un carton au Maroc. De notre correspondante à Rabbat,Un Marocain sur quatre s’est pressé devant son petit écran dès les premières notes du générique de la série L’Maktoub, et cela, tous les soirs pendant les 30 jours du ramadan. Une histoire de famille, d’héritage, d’inceste, de coups bas et de vengeances entre des personnages issus de deux mondes aux antipodes. D’un côté une lignée bourgeoise et fortunée, de l'autre, une famille populaire et pauvre. C’est ce qui a retenu l’attention de Dounia et l’a poussée à regarder.« Ça fait partie des meilleures séries que j'ai regardées sur la télévision marocaine, explique la téléspectatrice. Mais au début, la population marocaine l'a critiquée parce qu'on ne dit pas Cheikha. Mais après, on a aimé l'histoire qui donnait une autre vision sur les Cheikha marocaines. Ça dit qu'elles ne sont pas de mauvaises femmes. »L’un des personnages centraux est celui de Halima, une Cheikha. C'est une danseuse et chanteuse populaire qui élève sa fille seule. Bien qu’elles fassent partie du patrimoine populaire marocain, les Cheikha souffrent d’une mauvaise réputation dans une société marocaine conservatrice qui attache à celles qui exercent ce métier une image de femmes aux mœurs légères travaillant dans des cabarets fréquentés par des hommes alcoolisés.L’actrice Meryem Zaïmi, qui joue le rôle de Batoul, l’une des principales rivales de l’héroïne de la série, sentait que le feuilleton allait réussir à parler aux téléspectateurs sans pour autant prédire un tel succès. « Quand on était en tournage, on s'attendait à ce que la série soit bien, mais on ne s'attendait pas à ce succès, raconte Meryem Zaïmi. C'est énorme ! La série L'Maktoub a vraiment cartonné, que ce soit pour la première saison ou pour la deuxième. Et aussi, ça a ouvert d'autres horizons dans la télé marocaine. »Pour le moment, l’équipe de la série ne garantit pas la réalisation d’une troisième saison, mais pour son réalisateur et ses acteurs, l’après L’Maktoub s’annonce prometteur.
8/16/20232 minutes, 7 seconds
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Les séries télés qui ont fait le buzz [3/4]: «Un homme à marier»

Qui, en Côte d'Ivoire, ne connaît pas Un homme à marier ? La série produite et incarnée par Konnie Touré suit les mésaventures amoureuses d'une femme trentenaire qui cherche à se marier. La première saison de 20 épisodes a été distribuée par TV d'Orange, puis par LifeTV et TV5 Monde. Outre son succès commercial en Côte d'Ivoire, elle était présente cette année en compétition au Fespaco. Reportage. De notre correspondante à Abidjan,« Je regarde ça souvent, soit à la maison, soit au travail ici. J'aime l'histoire de Konnie, et j'aime l'humour. » Adrienne Ama Appiah, employée dans un petit salon de coiffure aux Deux-Plateaux, est une fan inconditionnelle de la série Un homme à marier, qui passe souvent sur la télévision de la boutique. Son épisode préféré ? « Le fils à maman ».« Sa maman ne voulait pas que son fils soit avec [le personnage joué par] Konnie Touré, parce qu'elle aimait son fils, développe Adrienne. Si Konnie prenait son fils, elle allait perdre son fils. J'ai beaucoup aimé. Et puis ça faisait rire ! La manière dont elle se comportait avec son fils, tout ça, ça me faisait rire. »L'humour, principal ingrédient du succès de la sérieLe format est inspiré des télénovelas, avec des épisodes d'une demi-heure diffusés tous les jours. Mais le réalisateur Jean-Jules Porquet, également acteur dans la série, a voulu adapter le contenu aux attentes des téléspectateurs ivoiriens. En commençant par l'humour.« Les gens ici aiment bien rigoler, explique le réalisateur. On a tellement de problèmes, quand on rit, ça permet de déstresser un peu… Ce sont des stéréotypes. On joue là-dessus. C'est un peu ce qui se passe ici. On se base sur ce qu'il y a ici, et puis on développe. On pousse les personnages à fond, de telle sorte à faire rigoler les gens. »Les 20 épisodes portent chacun le nom d'un stéréotype masculin : « Le vendeur d'illusions », « Le gigolo », « Le playboy »... Le secret de sa réussite : un équilibre entre les références ivoiriennes et des thématiques universelles, comme l'injonction faite aux femmes de se marier jeunes.Un scénario « à l'Ivoirienne »« Ce film, on l'a fait à l'Ivoirienne, comme on dit, explique Nastou Traoré, second rôle et coscénariste de la série. Mais on a fait de sorte que ça puisse passer un peu partout. Tout le monde se sent concerné par la série, parce que c'est l'histoire de tout le monde… Même si tu ne l'as pas vécue, tu as une cousine ou une amie qui vit cette histoire. Donc ce sont des choses de tous les jours, de notre société et tout. Ce qui fait que facilement, les gens s'y retrouvent. C'est ça qui fait le succès de cette série ! »Après la première saison, Konnie Touré s'est mariée. Une seconde saison est désormais en préparation, et cette fois, les rôles seront inversés : ce sera au tour d'un protagoniste masculin de chercher « une femme à marier ».
8/15/20232 minutes, 40 seconds
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Les séries télés qui ont fait le buzz [2/4]: «Country Queen», une production kényane

Country Queen, une série kényane sortie en 2022, raconte l’histoire d’Akisa, une organisatrice d’évènements qui vit à Nairobi. Lorsque son père tombe malade, elle retourne dans son village natal. Elle le découvre déchiré entre ceux qui luttent contre l’exploitation de leurs terres par une compagnie minière et ceux qui veulent en tirer profit. Mêlant drames amoureux et familiaux, corruption et conflits fonciers, la série rend compte des multiples expériences de la vie au Kenya. De notre correspondante à Nairobi,« Voleurs, expropriateurs de terres. » Dès le premier épisode de Country Queen, le ton est donné. Un individu interrompt un évènement organisé par la compagnie minière, accusant l’entreprise d’avoir volé des terres. Quelques minutes plus tôt, les spectateurs découvraient un triangle amoureux. L’audience le comprend vite : Country Queen mélange drame et politique.« Les télénovelas sont très populaires au Kenya, explique Vincent Mbaya, le réalisateur de la série. L’idée, c'était d’attirer l’audience grâce à des éléments de "soap" pour ensuite amener des problématiques plus profondes. Une des premières choses que le téléspectateur découvre, c'est le triangle amoureux, ce qui le captive, puis, au fil des épisodes, la série évoque des sujets plus graves. C’était l’objectif voulu : toucher à plusieurs thèmes pour inciter l’audience à réfléchir. » Les six épisodes balaient de multiples thématiques : les conflits autour des terres, l’espoir d’une vie meilleure dans la capitale, la place des femmes dans la société, la corruption et surtout l’exploitation des plus pauvres par de grandes entreprises. À l’image d’une des scènes, dans laquelle un professeur à la retraite tente d’expliquer les théories de Karl Marx à des jeunes des rues. « Le capitalisme exploite les pauvres au profit des riches », dénonce l'enseignant, avant de définir la bourgeoisie et le prolétariat. « Que peut-on faire ? », s’interroge l’un des jeunes. « Rien, lui répond un autre. Si tu essaies de faire quelque chose, tu vas être battu par la police. »Les dialogues font alterner anglais, swahili ou kamba, une des multiples langues du Kenya. Car si la série est diffusée sur une plateforme internationale, elle a été pensée pour une audience kényane. « Nous nous sommes baladés dans plusieurs régions avec mon équipe et nous avons demandé aux habitants ce qu’ils voulaient regarder, explique Kamau wa Ndung’u, le producteur. Ils nous disaient "nous voulons plus d’histoires du pays". Car la plupart des productions télévisées sont en zone urbaine, tout est très glamour avec de grosses voitures, des grandes maisons... Les Kényans veulent des séries auxquelles ils peuvent s’identifier. Et les retours ont été vraiment positifs ! » Sur les réseaux sociaux, les fans s’impatientent : quand vont-ils pouvoir regarder la saison 2 ? L’histoire est déjà là, mais il faut trouver du budget, explique Kamau wa Ndung’u.► Country Queen, disponible sur Netflix au Kenya et sur Arte en France (titre français : Pour l’or de Tsilanga).
8/14/20232 minutes, 9 seconds
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Les séries télés qui ont fait le buzz [1/4]: Yizo Yizo de retour sur Netflix

En Afrique du Sud, une série télé phare des années 2000 refait actuellement surface dans les foyers. Depuis avril, la plateforme Netflix diffuse les trois saisons de Yizo Yizo, réalisée par Angus Gibson et Teboho Mahlatsi, et dont l'histoire dépeint la vie dans les écoles défavorisées juste après l'effondrement de l'apartheid et la naissance de la démocratie. Créée, à l'époque, en collaboration avec le ministère de l'Éducation, cette série est désormais devenue un objet de la pop-culture des townships. L'histoire suit la vie d'adolescents qui terminent leurs études au sein du lycée fictif de Supatsela, dans un township de Johannesburg. Une façon d'aborder de nombreux sujets de société, comme les châtiments corporels, le harcèlement, les viols, ou encore les problèmes de santé mentale. « C'était la première fois qu'on voyait quelque chose comme ça à la télé, où on pouvait s'identifier, car ces images, on pouvait les voir dans la rue, se remémore Hlonolo, fan de la première heure qui aime se replonger dans cette série culte. Ça me rappelle bien des souvenirs, c'était la meilleure chose à la télé à l'époque. »Après de longues recherches, les créateurs de Yizo Yizo se sont servis d"histoires vraies recueillies dans les écoles des townships pour donner le plus de réalisme possible à leur série. « Après la fin de l'apartheid, ceux qui le pouvaient ont envoyé leurs enfants étudier hors des townships, explique Angus Gibson, l'un des coréalisateurs. Ces parents qui avaient les moyens ont donc arrêté de soutenir les écoles locales qui ont vu leurs infrastructures et tout le reste se dégrader. L'idée de la série était de lancer une conversation autour de cette crise dans les townships. Très régulièrement, on me parle encore de cette œuvre. Ça a, d'une certaine façon, touché une corde sensible dans le pays, et cela continue. »La série avait choqué lors de sa diffusion pour son récit cru et au sein de l'ANC, certains l'ont accusé de pervertir la jeunesse qui s'identifiait aux mauvais personnages. « Elle a été créée à une époque pleine d'espoir, analyse Siven Maslamoney qui supervisait les programmes éducatifs des chaînes de la SABC au moment de sa diffusion. Mais si l'Afrique du Sud était alors célébrée, il y avait derrière cela d'énormes problèmes à régler. Je pense que les plus âgés ont été blessés de voir des personnes noires représentées sous leur mauvais jour. Nous avons été convoqués devant un gouvernement local, puis le Parlement national. Une partie du succès de la série est justement d'avoir provoqué un débat autour de ce que l'on doit montrer ou non à la télé. »Lerato, 21 ans, était trop jeune pour regarder Yizo-Yizo à l'époque, mais elle se rattrape désormais avec la rediffusion. « J'ai longtemps entendu des gens en parler, mais je ne l'ai vu que récemment, raconte la jeune fille. C'est bien, cela reflète comment c'était à cette période. Et c'est toujours très suivi, les gens utilisent encore des surnoms de la série, car quand c'est diffusé, ils se rassemblent et la regardent ensemble. »Les choses ont changé au sein des écoles, mais certains sujets abordés, comme la question des violences faites aux jeunes femmes ou l'attrait pour les gangs, restent encore d'actualité.
8/13/20232 minutes, 26 seconds
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Dans l’univers des super héros africains [3/3]: Mody, un manga sénégalais

À Dakar, le dessinateur Seydina Sow a créé la série de bandes dessinées Cayor, à mi-chemin entre manga et légendes sénégalaises. Son héros : Mody, un petit prince doté de superpouvoirs. Ce style de BD novateur se fait doucement sa place dans les librairies de la ville et permet aux lecteurs de s’identifier aux personnages. De notre correspondante à Dakar,La série de bandes dessinées Cayor se déroule dans le royaume du même nom, qui a vraiment existé au Sénégal et qui suit le petit Mody, le fils du roi. Son père est trahi et Mody va développer des pouvoirs pour se battre et récupérer le royaume.« Ce que j'aime le plus, c'est dessiner des combats parce que je peux me lâcher complètement » se confie Seydina Sow, 34 ans, l’auteur de Cayor. Il a appris à dessiner seul, inspiré par les albums de Dragon Ball ou Lucky Luke. Il a très vite voulu créer des héros africains. « Tout ce que l'on consomme ici nous vient du Japon avec les mangas, de l'Europe avec la BD franco-belge ou des États-Unis avec les comics. Ce sont toujours des super-héros qui ne sont pas de chez nous », analyse Seydina.Cayor a vite trouvé son public. Ulysse, 11 ans, est un grand fan de la BD. Il a converti son père, Mach Houd. Nous les retrouvons en pleine lecture du troisième tome. Le trait est inspiré du manga, mais Cayor est peuplé de personnages du folklore sénégalais, comme le magicien Kous Kondrong. La BD reprend aussi des évènements historiques. « C'est un mélange entre une œuvre d'imagination et des histoires vraies, observe Mach Houd. C'est une façon originale de connaître un peu mieux l'histoire du Cayor. » Ulysse, lui, a accroché avec le personnage de Mody. « Au début, il se fait harceler, il est égoïste et au fil de l'histoire, il devient de plus en plus mature », raconte le jeune lecteur.Souleymane Gueye est libraire. Il dirige également Saraba, une maison d’édition. Il vend désormais des exemplaires dans sa librairie. « J'ai eu un coup de cœur, explique l'éditeur. Il y avait un nouveau souffle. Peut-être qu'avec les petits succès qu'il va planter, ça va permettre aux maisons d'édition de prendre un peu plus de risques et aux autres illustrateurs de se mouiller un peu plus. » Pour l’instant, Seydina est auto édité, mais en discussion avec Souleymane pour ses projets dont une BD inspirée du célèbre footballeur sénégalais Sadio Mané.
8/12/20232 minutes, 19 seconds
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Dans l’univers des super héros africains [2/3]: au Kenya, Super Sema l’héroïne futuriste

Super Sema c’est une super héroïne africaine, âgée d’une dizaine d’années. Le dessin animé qui porte son nom suit ses aventures aux côtés de ses amis. La série est disponible sur YouTube en plusieurs langues, dont l’anglais et le français. Super Sema utilise les sciences et la technologie pour résoudre des problèmes autour d’elle. De notre correspondante à Nairobi,« Une fille qui va changer le monde ». C’est ainsi que Super Sema est présentée dans le générique du dessin animé. On la voit danser, tout sourire, en tenue de super héroïne. Son prénom, Sema veut dire (« Parle ») en Swahili. Un message pour encourager les enfants à utiliser leur voix. Le personnage a été pensé à Nairobi par le studio d’animation Kukua. Magdalyne Kanjejo est en charge de la communication. Elle nous fait découvrir les lieux : « Ici, c'est notre salle d’enregistrement. Les comédiens qui prêtent leur voix viennent ici. Ils reçoivent leurs instructions du directeur du son qui est là à côté dans la salle du son. C’est dans cette pièce que nous visionnons la version finale des épisodes. »À chaque épisode, Super Sema « technovate ». Elle résout des problèmes grâce aux sciences ou à la technologie. Accompagnée de son frère jumeau et d’une chèvre, elle sauve des animaux, vient en aide à son grand-père et les défend contre le robot Tobor. « Nous voulions montrer aux enfants qu’ils n’ont pas besoin de pouvoirs magiques pour changer le monde, explique Magdalyne Kanjejo. Sema utilise ce qu’elle a autour d’elle. Par exemple, si elle est confrontée à un problème électrique, elle fait ses recherches et découvre qu’elle peut créer de l’énergie en recyclant des déchets. L’idée, c'est d’encourager l’innovation et la créativité chez les enfants. », ajoute la chargée de communication.Une héroïne qui ressemble à toutes les petites fillesUn des murs du studio est recouvert de portraits de femmes célèbres. Oprah Winfrey, Lupita Nyong’o, Wangari Maathai. Mettre en avant des modèles féminins inspirants, c’est une des idées derrière Super Sema.« Dans le secteur de l’animation, il y a un manque réel de personnages de super héros noirs, constate Magdalyne Kanjejo. Nous voulions montrer, surtout aux petites filles noires, que les personnes qui leur ressemblent peuvent être des super héros. Ces symboles sont très importants pour les enfants. C’était essentiel pour nous de pouvoir combler ce manque de représentation et diversité du secteur, d’autant plus à travers un super héros africain. Les habitants d’Afrique de l’Est reconnaissent par exemple leurs petites épiceries dans la série. Je pense que ça plaît à beaucoup sur le continent. »Les épisodes de Super Sema sont disponibles sur YouTube, ainsi que des chansons et des vidéos éducatives. Car de la poupée Super Sema aux kits d’activités pour enfants : c’est tout un univers qui s’est créé autour de la super héroïne.
8/11/20232 minutes, 13 seconds
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Dans l’univers des super héros africains [1/3]: en Afrique du Sud, Nelson Mandela héros d'un comic book

Quand un héros de la nation inspire un jeune super-héros. C’est l’histoire que propose le comic book, Young Nelson (« Le jeune Nelson »). Vous aurez reconnu la référence à Nelson Mandela le premier président noir d’Afrique du Sud. Dans le comic book, les qualités de l’ancien chef d’État deviennent des supers pouvoirs dont hérite un jeune homme qui devra s’en servir pour affronter les problèmes de l’Afrique du Sud. Rencontre des deux auteurs du comic book dans leur ville à Rustenberg, deux frères qui veulent donner espoir à la jeunesse de leur pays. De notre envoyé spécial à Rustbenurg,Rustenburg, dans le nord du pays, ne ressemble ni à Gotham City, ni à Metropolis, mais cette ville moyenne sans gratte-ciel abrite bien un super-héros : le jeune Nelson : « En rentrant d’un entretien d’embauche, Nelson tombe sur une femme qui se fait braquer. Comme il fait de la boxe, il intervient et empêche les criminels de commettre le vol. » C’est la première bonne action de ce jeune homme dont l’histoire est ici racontée par Phemelo Dibodu co-auteur avec son frère Omphile du comic book Young Nelson  (« Le Jeune Nelson »). « C’est une histoire de super-héros qui s’inspire de la vie de Nelson Mandela dont les qualités sont transmises comme des pouvoirs à un jeune individu qui fait face aux défis contemporains de notre nation. »Ce jeune garçon du nom de Thabo deviendra Le Jeune Nelson après avoir donné de l’argent à une vieille mendiante dans la rue. Cet acte de générosité va le transformer durablement. « Ah ça fait mal, mon poignet est douloureux, finit de lire Phemelo. Et voilà, on a la première image de Nelson qui devient quelqu’un de spécial… Mon héros préféré, c'est Captain America. J’adore l’idée du drapeau américain qui affronte les défis qui se dressent sur son chemin. On essaie aussi de fusionner l’esprit de patriotisme et d’héroïsme. Ça peut inspirer les jeunes d’avoir un personnage africain qui est dans l’action. »S'identifier à un héros de la nation rajeuniDans la bibliothèque de Rustenburg où nous rencontrons Phemelo, le visiteur est accueilli par une étagère remplie de livres sur Nelson Mandela. Cette année marque les dix ans de sa disparition. Un comic book sur ce héros de la nation permettrait de maintenir un lien entre l’histoire du pays et la jeune génération, selon Brian Mako, bibliothécaire : « Je pense qu’ils le voient comme un héros, mais ils savent peu de choses sur lui. Une version rajeunie de Nelson Mandela permettrait aux jeunes de s’identifier. Un Nelson qui joue à la Xbox ou à la PlayStation… qui vit comme eux. »Commencée en 2018, comic book Le Jeune Nelson existe en deux épisodes. Un troisième est en préparation, car toute l’histoire de ce super-héros est encore à écrire.
8/10/20232 minutes, 14 seconds
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Centrafrique: l'âne, une richesse inestimable pour les habitants de Birao (3/3)

La vie est bien meilleure pour ceux qui possèdent un ou plusieurs ânes à Birao. Cet animal est synonyme de grande richesse pour les habitants de cette ville située au nord-est de la Centrafrique où 80% de la population a des ânes. En plus d'être au cœur du fonctionnement des fermes et entreprises familiales, ils sont d'excellents animaux de compagnie.  De notre correspondant de retour de Birao Lorsqu’un âne brait, c’est qu’il a soif. Mais dans cette région désertique, il doit encore parcourir 15 km pour se désaltérer en ville. Indifférent au sable dans lequel ses sabots s’enfoncent, le corps tendu et le regard féroce, un âne rencontré sur notre chemin a déjà parcouru 10 km sans se reposer.Il transporte sur son dos un sac de manioc, des fagots, des régimes de banane, un bidon d'huile de palme et un petit garçon de 9 ans qui ne peut pas parcourir cette distance à pied. Une charge estimée à 500 kg selon Brice, son propriétaire.« J’ai acheté mes deux ânes à 50 et 60 000 francs CFA (entre 70 et 95 euros). Depuis cinq ans, ils m’aident à puiser de l’eau, à transporter mes récoltes ainsi que les membres de ma famille lorsqu’ils partent en voyage. Ils sont résistants et rarement fatigués. »« Sans lui, je ne peux rien faire »Ici, au pied de la colline de Golgota à l'entrée de Birao, nous croisons un âne qui refuse de bouger. Il est attelé à un chariot lourdement chargé et il porte deux personnes sur son dos, dont Abigaëlle.« Ça fait dix ans que j’ai acheté cet âne et je connais ses caprices. S’il ne veut pas avancer, je lui donne quelques coups de bâton et il repart. Il transporte nos récoltes et il nous transporte aussi. Sans lui, je ne peux rien faire. »À écouter aussiL'âne, au service de l'humanité depuis 7 000 ansLes ânes, cible d'un réseau de braconniersSous le soleil ou en temps de pluie, dans les champs ou dans les rues de Birao, l'âne est aussi le premier animal de compagnie à Birao. La tradition interdit d’ailleurs sa consommation.« À Birao, l’âne est très important pour les populations pauvres.  À l’origine, nos parents achetaient les ânes au Soudan », rappelle Martin Djamouss, un chef coutumier. « Si tu le soignes et qu’il mange bien, il peut vivre au-delà de dix ans. Il mange le mile, l’arachide, le haricot ou encore les herbes. S’il meurt, on l’enterre dignement. Ici, on ne mange jamais les ânes. »Selon une étude de la préfecture de Birao, 80 % des habitants possèdent un ou deux ânes. Mais avec le conflit au Soudan, les ânes sont devenus la cible d’un réseau de braconniers.À lire aussiLes ânes menacés d'extinction au Kenya
8/9/20232 minutes, 10 seconds
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Éthiopie: la population locale s'implique dans la préservation des églises de Lalibela

Lalibela, petite ville de 25 000 habitants située à 680 km au nord d’Addis-Abeba, au cœur des hauts plateaux, abrite un joyau du patrimoine mondial : onze églises taillées dans la roche au XIIIᵉ siècle, que la France veut aider à préserver grâce au projet « Sustainable Lalibela ». Le projet a été suspendu pendant la guerre et la prise de la ville par le Front de Libération du Tigré pendant cinq mois en 2021. Depuis, les travaux ont repris en impliquant et formant la population locale. De notre correspondante à Addis-Abeba, Clotilde HazardPrès deux ans de guerre, les échafaudages ont repris leur place autour des églises monolithes de Lalibela. Il y a urgence, ces monuments façonnés dans une pierre poreuse, sont vulnérables aux infiltrations d’eau et menacent de s’écrouler. Ambachew est tailleur de pierre, il s’occupe des travaux de réparation. « Il y avait un espace qui s’était ouvert alors, on l’a rebouché. Après l’avoir bien nettoyé, on l’a reconstruit avec des pierres. On a dû le couvrir de mortier et le lisser. On essaye toujours d’avoir le même résultat que l’ancien. Comme vous pouvez le voir, il y avait beaucoup de fissures et on les a réparées. »Ambachew a aussi participé à la construction de trois ponts en pierre et des contreforts pour valoriser le site. Il fait partie des 32 artisans formés dans le cadre du projet financé par la France. Cette coopération franco-éthiopienne a pour but la conservation et la restauration de ce lieu de pélérinage chers aux orthodoxes, grâce à un budget de plus de cinq millions d’euros. Antoine Garric, tailleur de pierre en charge de la formation, enseigne de nouvelles techniques à ses élèves dont la sculpture de détail pour orner les ponts en pierre : « Ça reste de la taille de pierre, car tout est géométrique. C’est la première fois qu’il fait ça. On est parti d’un dessin, c’est un relevé d’une des fenêtres des églises. Il a tout fait, découper le gabarit, le poser sur la pierre, le tracer, et ensuite le tailler », détaille Antoine Garric également chargé du programme d’intervention d’urgence.Transmettre aux générations futuresDes centaines d’habitants travaillent sur le chantier pour effectuer la manutention des pierres. Après l’épidémie de Covid et la guerre, ces emplois sont bienvenus dans la ville en crise comme nous explique Dereb Mantesenut, qui habite à Lalibela : « Le travail est bien, j’espère que ça va continuer, car beaucoup de personnes n’ont pas de travail ici. J’espère qu’elles auront aussi la chance de travailler avec nous. »Pour Kidanemariam Woldegiorgis, responsable du projet, le but est de donner aux habitants les moyens de gérer leur patrimoine de manière autonome : « Nous avons formé plus de 130 personnes à la conservation des manuscrits, comment les préserver, les restaurer, les digitaliser et les transmettre aux générations futures. »Tous les manuscrits vont être archivés dans un nouveau centre de ressources numériques. À terme, les habitants pourront ainsi prendre soin de leur héritage religieux encore bien vivant.Pour en savoir plus sustanable Lalibela
8/8/20232 minutes, 14 seconds
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Centrafrique: la saison des chenilles «Makongo», très appréciées des consommateurs, bat son plein

Chaque été, en juillet et en août, la saison des chenilles modifie les habitudes alimentaires des Centrafricains. Ces insectes, appelés localement makongos, apparaissent dans les forêts de la Lobaye, au sud-ouest du pays. C’est une ressource consommée dans toute la République centrafricaine, pour son goût unique et ses valeurs nutritives.  À l'aide d'instruments traditionnels, les fixeurs réveillent les habitants de ce campement et leur donnent le top du départ. À 4 heures du matin, les ramasseurs se divisent en deux groupes de cinq personnes. Armés de machettes, certains se fraient un chemin entre les arbres, les feuilles et les plantes pour faciliter la cueillette. D'autres, munis de paniers, de récipients et de sacs, ramassent les makongos qui traînent partout au sol.André, l'un des ramasseurs, explique le mécanisme de la cueillette : « Pour aller à la cueillette, on ne va pas au hasard. Les gens se rassemblent, ils prennent le rendez-vous et puis ils y vont. Ils font des petites huttes et puis c'est dans ces huttes qu'ils vont rester pour aller chercher les arbres où se trouvent les chenilles. Il suffit de trouver les chenilles dans les arbres en train de bouffer les feuilles. Et puis tu peux les cueillir. C'est une cueillette quoi. » Pour ramasser ces insectes, il faut bien connaître la forêt et faire preuve d'agilité. Eunice qui consomme les chenilles depuis 20 ans, assiste pour la première fois au ramassage : « Ça fait partie de mes aliments préférés. C'est une alimentation qui est saisonnière, donc pendant les chenilles, on peut en manger 5 jours sur 7, pour ne pas dire tous les jours. On prépare ça de différentes manières. Parfois, on les fait juste avec de l’huile, de l'oignon, quelques ingrédients. Ou parfois, on ajoute même de l'omelette ou même les feuilles de gnetum. Yabanda, c'est, c'est comme ça qu'on l'appelle. » À lire aussiCentrafrique: la cueillette des chenilles fait vivre la région de la LobayeLes makongos regorgent des vertus nutritives, Stephane Bria en sait quelque chose : « J'aime les chenilles parce que c'est très riche, parce qu'elles possèdent de la vitamine A, de la vitamine D et de la vitamine E. C'est aussi très riche au calcium et en fer.  Je peux même en manger  7 jours sur 7. Un paquet à 500 francs (76 centimes d'euros), mais pour nous, toute la famille, vous savez que nous sommes dans une famille africaine, chez nous, il y a beaucoup de personnes, donc pour manger ça convenablement, il faudrait que nous en payions pour 3 000 ou bien pour 3 500 (environ 5 euros). » En Centrafrique, la saison des chenilles dure deux mois. Tous les commerçants se ravitaillent dans cette immense forêt avant d'alimenter les marchés de la capitale et ceux des autres villes du pays. 
8/7/20232 minutes, 18 seconds
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Tunisie: la mode s'invite au site archéologique de Dougga

En Tunisie, la 47ᵉ édition du festival de musique de Dougga se clôture ce lundi 7 août. Cette année, le site archéologique et le festival ont aussi accueilli un défilé de mode de créateurs tunisiens intitulé « Facettes de Dougga ». Il rend hommage à un des sites romains les mieux conservés en Afrique du Nord et classé au patrimoine mondial de l’Unesco. Ce site de 70 hectares a été traversé par une histoire plurielle : libyque, punique, numide, romano-africaine et byzantine. Une histoire reprise dans la thématique du défilé qui s’est déroulé dans le cadre du projet Creative Tunisia, financé par l’union européenne. Le projet crée des ponts entre designers, patrimoine et artisanat local. Entre les pierres, pour certaines vieilles de 17 siècles et avec une vue imprenable sur les montagnes et les champs de Dougga, une région agricole du nord-ouest tunisien, c’est l’effervescence quelques heures avant le défilé. Pour Abir Azzi, responsable développement du cluster mode au sein du projet Créative Tunisia, faire un défilé dans cet ancien site romain était un pari risqué : « On a choisi Dougga parce qu’on voulait décentraliser la mode. On a l’habitude de voir des défilés de mode à Carthage, dans la capitale, dans des hôtels connus, mais aussi voir un défilé de mode dans un site au nord-ouest, dans des conditions un peu difficiles d’accès, c’était un challenge qu’on voulait mettre en place. »La dizaine de créateurs tunisiens présents se sont inspirés du site et de son histoire pour leur collection. C’est le cas de Hedi Ben Mami, créateur de la marque de prêt-à-porter Benma : « Je m’inspire beaucoup de la civilisation punique carthaginoise donc ça fait déjà partie de mon ADN. C’est donc tombé pile-poil. J'ai choisi une pièce qui rappelle un peu les armures antiques justement, mais je l’ai encore adapté, j’ai poussé l’inspiration plus loin pour vraiment créer un look qui s’adapte parfaitement au lieu. J'ai un souvenir bien précis avec Dougga parce que j’étais venu assez jeune, à 8 ans, et j’ai vraiment été émerveillé par les lieux, j’ai même imaginé des scènes de films. »À lire aussiEn Tunisie, l’économie créative et culturelle séduit de plus en plus les mécènes tunisiensLa majorité des créateurs travaillent aussi avec le savoir-faire des artisans tunisiens puisque le projet Creative Tunisia vise à renforcer la chaîne de valeurs entre l’artisanat tunisien et les designers. Latifa Hizem est créatrice de la marque Naksha Handcrafted : « Toutes les coiffes ont été faites par le cluster de Gabès, donc elles m’ont fait des coiffes sur mesure. En fait, Creative Tunisia nous permet d’avoir une ouverture aussi bien à l’internationale que sur la Tunisie et aussi ça crée des synergies entre les différents créateurs et les différents artisans. »Au coucher de soleil, sur fond de musique électro, les modèles défilent et leurs silhouettes se découpent dans les ruines sur un podium érigé au milieu de Dar Lecheb, vestige d’un ancien sanctuaire, un hommage vibrant à l’histoire millénaire de la Tunisie.
8/6/20232 minutes, 29 seconds
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Soudan du Sud: après vingt ans de guerre au Darfour, l’épreuve de l’exil pour une famille de chrétiens soudanais [3/3]

Suite et fin de notre série de reportages au camp de Gorom, près de la capitale sud-soudanaise, Juba, où des milliers de Soudanais ont trouvé refuge. Ils ont fui les combats qui continuent de faire rage à Khartoum et au Darfour, cette région de l’ouest du Soudan, depuis mi-avril. Parmi ces réfugiés, il y a la famille d’Ahmed Adam Mohamed, un pasteur protestant de 49 ans, originaire d’El Fasher au Darfour. Avec son épouse et leurs enfants, ils témoignent de cette guerre qui dure, pour eux, depuis 20 ans. Et de leur difficile exil vers le Soudan du Sud.  De notre envoyée spéciale au camp de GoromLorsque Ahmed Adam Mohamed, sa femme Kawsar, leurs cinq enfants et sept autres neveux et nièces sont arrivés au camp de Gorom, un réfugié déjà installé a eu pitié d’eux. Il leur a laissé sa tente, le temps que la famille s’enregistre. Mais les semaines passent, et l’aide humanitaire se fait attendre.Ahmed ne connaît que trop bien cette vie de déplacés :« Il y a de quoi être triste, car nous vivons dans les camps d’El Fasher depuis vingt ans. » Leur fuite vers le Soudan du Sud est le dernier chapitre d’une histoire dont Ahmed porte les marques sur son corps. « L’attaque qui nous a poussés à fuir notre village a eu lieu le 15 août 2003. Ils ont mis le feu au village, tué des civils, massacré des enfants, violé les femmes et pillé ce que nous possédions. »Ahmed soulève sa chemise et montre l’énorme cicatrice sur son ventre, et les deux doigts qu’il a perdus, à la main gauche. Ce sont les séquelles d’une attaque à laquelle il a miraculeusement survécu en 2005.« Ici, nous ne pouvons rien faire, nous sommes coupés du monde »Il dénonce l’hypocrisie du gouvernement soudanais, et notamment du général Burhan qui, se souvient-il, « a lui-même brûlé des villages du Darfour ». « Tout ça, c’est l’œuvre du gouvernement. Même s’ils utilisent les tribus arabes, ce terme de "Janjawid ", l’armée a longtemps voulu se cacher derrière, comme lorsque les mêmes milices arabes étaient envoyées pour attaquer le Soudan du Sud. L’armée envoie les milices attaquer, et reste à l’arrière avec ses véhicules, mais ils travaillent ensemble et les milices font partie du gouvernement. »Le conflit actuel et l’arrivée de la violence à Khartoum, la capitale, n’étonnent pas Ahmed. C’est pour lui la confirmation de l’existence d’un projet de création d’un nouveau « royaume arabe » au Soudan.Son bébé endormi dans ses bras, Kawsar, sa femme, tente tout de même de se projeter : « Si la situation s’améliore, il n’y a pas de meilleur endroit que notre pays. Ici, nous sommes coupés du monde, nous ne pouvons rien faire, nous ne pouvons pas travailler. Mais, si nous rentrons chez nous, nous pourrons nous débrouiller. Ce qui me préoccupe le plus, c’est d’arriver à remettre les enfants à l’école. La situation est de plus en plus difficile. Nous nous inquiétons pour l’avenir de ces enfants. »Elle est bien consciente de la difficulté supplémentaire qui leur fait face : leur conversion au christianisme leur a attiré de gros problèmes chez eux au Darfour, et son mari, Ahmed, a fait l’objet d’une tentative d’assassinat. Pour elle, la famille n’a désormais « nulle part où aller ».À lire aussiSoudan du Sud: portrait d'un activiste soudanais torturé sous El Béchir [2/3]
8/5/20232 minutes, 20 seconds
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Soudan du sud: portrait d'un activiste soudanais torturé sous El Béchir [2/3]

La suite de notre série de reportages auprès des réfugiés soudanais du camp de Gorom, près de la capitale sud-soudanaise, Juba.  À 40 ans, Jaffar est un homme dont la tragique histoire personnelle, illustre celle du Soudan. Militant de la société civile depuis 20 ans, il a été torturé par le régime d’Omar el-Béchir. Des violences dont il garde d’importantes séquelles physiques et psychologiques. Participant très actif de la révolution soudanaise qui a fait tomber le dictateur en 2019, il est aujourd’hui en exil comme plus d’un demi-million de Soudanais.  De notre envoyée spéciale dans le camp de GoromLe dos légèrement voûté, les traits tirés, Jaffar pose sur ses genoux les deux gros dossiers qu’il a réussi à emporter en fuyant Khartoum. Diplômes, certificats, contrats… C’est tout ce qui lui reste de son travail : « Avec cette ONG, nous défendions les droits humains, l’éducation, la promotion de la paix et la lutte contre les violences faites aux femmes. »Après le début de la guerre au Darfour en 2003, Jaffar développe des activités dans les camps de déplacés. C’est en 2007 que ses ennuis commencent. Accusé de soutenir les rebelles du Darfour, il est arrêté une première fois par les services de sécurité. « Après ça, j’ai été constamment harcelé et mis en prison, et je me suis échappé plusieurs fois en payant des gens pour m’aider. Quand j’ai réalisé que ça ne s’arrêterait pas, je me suis enfui en Libye. C’était en 2011, et je suis revenu au Soudan en 2015. »Jaffar se marie en 2016 et reprend ses activités au Darfour, mais les services de sécurité sont toujours après lui. Sa femme est détenue pendant cinq jours et violée par des membres de la sécurité. Il est arrêté pour la cinquième fois une nuit de 2017. Il témoigne :« Cette fois-là, les abus ont été très différents. Ils m’ont torturé physiquement et psychologiquement. Ils m'ont frappé de partout, sur la tête et sur tout le corps. »Les services de sécurité veulent que Jaffar collabore, en infiltrant un des groupes rebelles du Darfour. C’est en vendant sa maison qu’il parvient à payer une somme suffisante pour qu’on le laisse tranquille. Mais c’est alors qu’il réalise l’ampleur des séquelles. « En 2017, ma femme et moi avons consulté un docteur. Il m’a demandé ce qui m’était arrivé. J’ai expliqué que j’avais été arrêté et torturé plusieurs fois. Les résultats des examens sont revenus négatifs. »Le médecin lui annonce qu’il ne peut pas avoir d’enfant. Lorsque des combats ont éclaté mi-avril à Khartoum, Jaffar est parti en premier pour le Soudan du Sud. C’est une fois arrivé à Juba qu’il apprend que son père est mort suite au bombardement de leur maison. Il se dit aujourd’hui être « un homme brisé » : « J’ai de gros troubles psychologiques. Pourtant, c’est mon travail de faire du soutien psychosocial, mais là, c'est moi qui ai besoin d’aide. Par moment, je perds la mémoire. J’ai aussi des cauchemars et des insomnies. C’est très difficile. »Sa femme a pu le rejoindre. Ensemble au camp de Gorom, ils tentent de se reconstruire, mais attendent toujours de recevoir de l’aide humanitaire.À lire aussiSoudan du Sud: au camp de Gorom, l'inquiétude des réfugiés soudanais pour leurs proches [1/3]
8/4/20232 minutes, 22 seconds
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Soudan du Sud: au camp de Gorom, l'inquiétude des réfugiés soudanais pour leurs proches [1/3]

Depuis le début du conflit au Soudan entre Forces armées soudanaises et paramilitaires des Forces de soutien rapide (FSR), plus de trois millions de Soudanais ont été forcés de fuir. Plus d’un demi-million d’entre eux se sont réfugiés dans les pays limitrophes, notamment au Soudan du Sud. Dans le camp de Gorom, près de la capitale, Juba, les réfugiés soudanais vivent dans des conditions rudes du fait du manque d’assistance humanitaire. Des difficultés matérielles qui s’ajoutent aux traumatismes des combats et à l’angoisse pour les proches restés au Soudan. Premier volet d’une série de trois reportages. Assise à l’ombre de son abri, Amani Rashid Mohamed ne cache pas son inquiétude. La mère de famille a fui Khartoum avec son fils de 21 ans et sa fillette de cinq ans. Mais, avant de passer la frontière sud-soudanaise, son fils a été retenu à un point de contrôle par l’armée soudanaise. Elle a dû continuer son voyage, sans lui, jusqu’au camp de Gorom : « Chaque jour, je vais là où il y a du réseau pour voir s’il m’a envoyé un message. J’espère qu’il est toujours en vie. » Ce qui la préoccupe le plus, c’est qu’il a été recruté de force dans l’armée soudanaise et envoyé au combat : « Mon fils est étudiant, il n’a aucune formation militaire. J’ai peur, j’espère qu’on ne lui a pas fait de mal. J’aimerais que les organisations de droits de l’Homme m’aident à le retrouver. »Abdelaziz Osman Mohamed a, lui, fui à pied la ville d’al-Fasher, au Darfour. Depuis, il a complètement perdu contact avec le reste de sa famille : « Quand le conflit a démarré, les gens ont fui dans différentes directions. Beaucoup sont partis au Tchad. D'autres comme moi sont venus au Soudan du Sud. Jusqu’à maintenant, je n’ai aucune nouvelle de ma famille. Je ne sais pas où ils sont et s’ils sont toujours en vie. Leurs numéros de téléphone sont injoignables. J’ai demandé à la Croix-Rouge s’ils peuvent retrouver l’un d’entre eux et me tenir au courant. »« Je n'ai pas eu de nouvelles de ma famille pendant deux mois »Pour Selwa, une étudiante ayant fui Khartoum au début du conflit et réfugiée au camp de Gorom, les semaines passées sans nouvelles de sa famille ont été très éprouvantes. Originaire d’El-Geneina, à l’ouest du Darfour, sa famille est d’ethnie Masalit. Elle était sur place lorsque les milices arabes, les janjawids, et les FSR ont lancé des attaques visant cette communauté :« Le réseau a été coupé dans notre région quelques jours après le début du conflit. Je n’ai pas eu de nouvelles de ma famille pendant deux mois. Ce n’est que lorsqu’ils sont arrivés au Tchad qu’ils ont pu me téléphoner. Ma sœur m’a appelée pour me dire qu’ils avaient fui et qu’ils avaient pu passer la frontière, et qu’ils sont dans un camp de réfugiés à Adré. Ces deux mois ont été horribles. Ça a été la pire période de ma vie. Je n’arrêtais pas d’entendre qu’il y avait un génocide en cours, et je savais que ma famille était là-bas, mais je ne pouvais rien faire. Je ne savais pas où ils étaient ni ce qui leur arrivait. C’était très dur, je n’arrive même pas à décrire ça. Une fois qu’ils ont pu m’appeler, ils m’ont dit comment ils allaient et ce qui leur est arrivé. »Alors, Selwa apprend avec soulagement que tous les membres de sa famille ont survécu, mais que leur maison a été brûlée par les FSR. Un autre réfugié témoigne, lui, avoir perdu 28 membres de sa parentèle dans les attaques perpétrées par les FSR à El-Geneina.À lire aussiSoudan du Sud: au camp de Gorom, des réfugiés soudanais désœuvrés
8/3/20232 minutes, 29 seconds
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République démocratique du Congo: les quartiers de Kolwezi grignotés par l'exploitation du cobalt

C'est une ville de plus d’un demi-million d’habitants dans le sud-est du pays, entourée de mines industrielles. Chaque jour, l’extraction se développe, les mines s’étendent débordant sur les quartiers résidentiels, que les habitants sont obligés de quitter. Reportage dans le quartier de Gécamines centre, construit il y a 80 ans, pour les employés de la société congolaise des mines. « Ils avancent tous les jours », se lamente Séraphin, un habitant du quartier Gécamines centre depuis plus de 20 ans. Sa maison est à moins de 50 mètres de l’imposant mur de béton qui sépare le quartier d’une mine de cobalt, exploitée par une société chinoise. Avec la mine qui s’étend, Séraphin voit son quartier se réduire. Il sait qu’il va bientôt devoir partir. « Les miniers ont apparemment plus de droits que nous autres, ils sont du côté du gouvernement et c’est lui qui décide. Nous, on n’a rien à dire. La délocalisation, ça veut dire : perdre ses habitudes, ses voisins, la proximité de tout ce qui vous entoure… C’est toute votre vie. »Un peu plus loin, la police fait sortir les habitants de leur maison. Une femme quitte précipitamment son domicile. Il est midi et tous les jours la compagnie minière fait exploser de la dynamite dans la mine. Toutes les maisons sont fissurées, déplore-t-elle : « Ça arrive tous les jours. Aujourd’hui, ils nous font sortir des maisons, parce que les détonations vont être plus fortes. J’ai des fissures partout dans ma maison, j’ai même failli perdre ma télévision. Oui, on va devoir partir, mais on ne sait pas encore quand. » À lire aussiMines en RDC: Kinshasa veut renégocier le «contrat du siècle» avec PékinIndemnisations insuffisantesPlusieurs dizaines de maisons ont déjà été détruites ces derniers mois. Leurs propriétaires sont partis. Indemnisées par la compagnie minière. Mais ces indemnisations sont insuffisantes pour se reloger, précise Sylvain Muleka, à la tête d’un comité d’habitants qui refusent ces indemnisations et demandent à être relogés. « Nous sommes obligés de partir, mais pour aller où ? Le prix du terrain et le coût de la vie ne cessent de croître, on ne peut pas avoir de maison. Nous, ce que l’on veut, c’est être réinstallé quelque part. » Mais où reloger ces milliers d’habitants ? Kolwezi est entourée de mines. Il n’y a plus de place, précise maitre Josué Kashal, du Centre d’Aide juridico-judiciaire : « Dans notre législation, il est prévu que lorsque vous délocalisez les communautés, vous devez les reloger. Mais en pratique, la majorité des entreprises ne le font pas. Elles se limitent seulement à leur donner de faibles indemnités et les personnes doivent se débrouiller, déplore l’avocat. La ville de Kolwezi est entourée de concessions et d’entreprises industrielles, c’est une ville en voie de disparition. »Tous accusent les autorités de Kinshasa où sont délimités les cadastres des concessions minières aux dépens de la population.À lire aussiRDC: exportation record d’or vers les Émirats arabes unis en seulement six mois
8/2/20232 minutes, 29 seconds
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Cameroun: des points d’eau pour apaiser les tensions entre Arabes Choas et Mousgoum

Dans la région de l'extrême nord du Cameroun, le conflit opposant les Arabes Choas aux Mousgoum, a fait plusieurs dizaines de morts, des centaines de blessés et environ 100 000 déplacés entre 2021 et 2022. À l'origine du conflit, la difficulté d'accès à l'eau et à ses ressources. Dans la localité de Blabine, dans le Logone-Birni, les deux communautés vivent à moins d'un kilomètre l'une de l'autre. Le comité de la Croix-Rouge a construit des points d'eau dans l'espoir d'apaiser les tensions. Un air de musique trouble le silence de ce petit village d'éleveurs, assis sous un arbre un groupe d'hommes sieste, plus loin des femmes vaquent à leur occupations, signe que la  vie reprend à Blabline. Il y a quelques mois, cette localité du Logone-Birni, avait été détruite, dans un conflit entre Arabes Choas et Mousgoum. Mahamat Ojuru, éleveur, a récupéré sa case après plusieurs mois d'exil : « Le conflit était violent. J'avais pris la fuite pour sauver mes bêtes. Je suis revenu ici pour mes enfants, nous sommes habitués à vivre ici. La construction d'un point d'eau ici a aussi pesé. »L'accès à l'eau et à ses ressources est à l'origine de ce conflit. Traditionnellement, les Mousgoum font de la culture maraîchère le long du Logone, fleuve dans lequel ils pêchent aussi du poisson, rendant le fleuve inaccessible par zones, aux éleveurs arabes chaos réputés nomades. Face à la désertification et la rareté des pâturages, ils veulent aussi exploiter les ressources du Logone. François est un jeune pêcheur Mousgoum : « À Oulomza, les arabes sont entrés avec les bœufs dans les champs des Mousgoum pour manger des oignons. C'est comme ça que le conflit a commencé. Il y a eu 4 ou 5 morts des deux côtés. »Calmer les tensionsIci à Blabine les deux communautés vivent à moins d'un kilomètre de l'autre. Pour apaiser les tensions, des points d'eau potable pour hommes et animaux créés par la Croix-Rouge internationale, limitent le déplacement des personnes et des bêtes. Mariamou, mère aux foyer, témoigne : « L'eau a calmé les tensions. Aujourd'hui c'est la nourriture pour nos bêtes qui pose problème. Avec les Mousgoum, on n'a pas de problème, si on se rencontre dans la rue on se dit bonjour sans soucis. »Pour faire fonctionner les points d'eau, un règlement a été établi. Le Blama du village Blabine, une sorte de chef traditionnel est chargé de veiller au respect de cette organisation : « Les femmes et les enfants s'occupent du lavage tous les 15 jours. Toutes les communautés ont accès à l'eau. Grâce à cela on a évité de passer par les champs des agriculteurs. »Pour le Blama, d'une certaine façon, l'eau a ramené la paix dans sa localité. Ici à Blabine, même si on observe un peu de méfiance en discutant avec les populations, les deux communautés semblent avoir trouvé un compromis grâce à ces points d'eau construits dans le village.Dans le Logone-Birni, le conflit opposant les Arabes Choas aux Mousgoum a fait plusieurs dizaines de morts, des centaines de blessés et environ 100 000 déplacés.
8/2/20232 minutes, 5 seconds
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Cameroun: Gomboya Talaf, seule femme éleveuse de gros bétails dans le Logone-et-Chari

Dans le bassin du Lac Tchad, l'eau est une denrée rare, les éleveurs doivent parcourir des dizaines de kilomètres pour abreuver et nourrir leurs troupeaux.  Une transhumance qui n'est pas sans conséquences, pour les animaux et les humains. Ces dernières années, l'accès à l'eau a été à l'origine de plusieurs conflits entres les agriculteurs et les éleveurs, voire éleveuses comme Gomboya Talaf, seule femme éleveuse de gros bétails dans le Logone-et-Chari. De notre envoyé spécial au village de Doukmo,La voix frêle de Gomboya Talaf rythme le déplacement de ses bêtes. Son voile la protège du soleil ardent, dans sa main, un bâton pour orienter son bétail. À 75 ans, elle est à la tête d'un cheptel de plus de 70 bovins. Ici à Doukmo dans le Logone-et-Chari, elle est un exemple pour les femmes. « C'est une femme et elle est capable d'élever des bœufs, c'est pour cela que les femmes la regardent avec étonnement ».Cet après-midi, Gomboya Talaf vient faire boire ses bêtes, dans cet abreuvoir nouvellement construit par le Comité international de la Croix-Rouge  à moins de deux kilomètres de sa case familiale. Un point d'eau qui change tout, pour elle. Il y a quelques semaines encore, la septuagénaire et ses collègues éleveurs avaient parcouru des dizaines de kilomètres sur cette terre aride à la recherche de points d'eaux.« Quand il n’y avait pas d'eau, nos bêtes étaient tout le temps malades, nous allions chercher l'eau loin d'ici et il arrivait que nos bœufs meurent de soif sur la route. Aujourd'hui nos bêtes se portent mieux, nous sommes à l'abri des problèmes d'eau ».« Grâce à cette eau, il n’y a plus de problème »Après plus de 50 ans de pratique, cette mère de 11 enfants a été témoin de conflits sur les rives du Logone où la rareté de l'eau a créé des tensions dans plusieurs villages entre des éleveurs prêts à tout pour étancher la soif de leurs troupeaux et des agriculteurs jaloux de leurs plantes.« Nous allions vers le fleuve pour faire boire nos bêtes et il arrivait qu'au passage elles piétinent ou mangent les cultures des agriculteurs, ce qui a engendré de nombreux conflits. Maintenant avec l'eau, nous n'avons plus à traverser les champs avec nos bœufs. Grâce à cette eau, il n’y a plus de problème. »Des abreuvoirs comme celui-ci sont de plus en plus construits dans cette zone sahélienne du Cameroun. L'idée étant de réduire les déplacements des éleveurs vers les cours d'eau. « On a donc décidé de faire un forage pastoral qui réduirait de façon considérable les tensions entre éleveurs et agriculteurs. Ils ont donc mis en place un système de collecte de fonds, et ces fonds collectés, c'est pour l'entretien des ouvrages », explique Jean-Marie Noutong, ingénieur en service au Comité international de la Croix-Rouge.Pour Gomboya Talaf, c'est le prix du repos pour la femme éleveuse qui n’a plus toute la force nécessaire pour faire des longues distances, avec le risque d'affronter des agriculteurs. L'un des conflits les plus meurtriers liés à l'accès à l’eau a opposé les Arabes choas aux Musgums dans le Logono Birni, faisant plusieurs morts et des centaines de blessés graves. Au moins six villages ont été incendiés.
7/31/20232 minutes, 23 seconds
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Cameroun: l'eau potable de retour dans la localité de Makary, dans le nord du pays

L’état du système d'approvisionnement en eau potable est préoccupant dans certaines localités de l'Extrême-Nord du Cameroun où l'eau est une denrée rare, du fait notamment de l'avancée du désert. Sa réhabilitation est donc plus que nécessaire. Les infrastructures existantes comme les puits et les forages sont souvent pollués, et sont la cause de plusieurs maladies hydriques. À Makary dans le Logone-et-Chari, il arrive que les populations passent des mois sans eau courante. Après plusieurs mois, l'eau coule enfin à Makary, un petit village enclavé du Logone-et-Chari, dans le bassin du lac Tchad. Devant son robinet, au quartier Galmé, Bakary Chimalma, un chef de famille de 50 ans, est ravi de voir couler le précieux liquide : « L'eau coule normalement la nuit comme le jour. Avec le groupe, on avait des sérieux problèmes. Des fois, le groupe était en panne à cause de la batterie ou soit c'est le carburant qui manquait et le groupe ne fonctionnait pas. »Le village n'étant pas alimenté en électricité, la station de production d'eau utilisait un groupe électrogène, souvent en panne, parfois pendant plusieurs mois. Pour y remédier, le Comité international de la Croix-Rouge (CICR) a installé une nouvelle pompe alimentée par des panneaux solaires. Haman Mohamadou est délégué de la région de l'extrême nord pour Camwater, la société camerounaise de distribution d'eau : « Ça résout le casse-tête qu'on a pour le fonctionnement du groupe électrogène. En fait, le carburant est acheté à Kousseri et nous trouvons un moyen pour l'acheminer ici à Makary. Aujourd'hui, nous pompons de l'eau gratuitement. »À lire aussiCameroun: avec la future centrale hydro-électrique de Nachtigal, d’importantes retombées économiques attenduesTrès coûteuxLes premières familles bénéficiaires du retour de l'eau potable trouvent cependant que son coût est élevé. Pour certaines de ces familles, payer plus de 10 000 francs CFA par mois, environ 15 euros, est difficilement supportable. La plupart des habitants de la région vivent avec moins de 500 francs CFA par jour, soit moins d'un euro : « Ça doit baisser ! Avant, c'était le carburant qu'ils utilisaient, maintenant, il y a les panneaux solaires donc ils économisent le carburant. Avant ça coutait combien ? Nous n'avons jamais dépassé 5 000 francs. Il y a des camarades qui ont payé 15 000 francs. »Pour ces villageois, c'est parfois le prix à payer pour une meilleure santé, car le retour de l'eau potable signifie aussi une diminution des maladies hydriques. C’est ce qu’a constaté Liman Adam, secrétaire de l'hôpital local : « C'est visible sur nos résultats. On a souvent beaucoup de cas de fièvres typhoïdes, de schistosomiase. Ces derniers mois, cela a considérablement baissé. Actuellement, il y a de l'eau potable 24 heures sur 24. Les populations ravitaillent moins d'eau de forage, de sources ou encore de puits, souvent dangereux pour la santé. »Actuellement, près de 100 familles sont approvisionnées en eau potable à Makary. Un début certes, mais c’est loin d’être satisfaisant dans une localité quasi désertique où plus de 300 ménages n'ont pas accès à l'eau potable.À lire aussiCameroun: Yaoundé en manque d'eau potable
7/31/20232 minutes, 20 seconds
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Conditions de vie, violences, racisme: l’État tunisien reste indifférent à la la situation des migrants subsahariens

En Tunisie, le sort réservé aux migrants subsahariens ne s’améliore pas, trois semaines après la vague de violences et de déplacements forcés qui les ont touchés dans la ville de Sfax dans l’est du pays, après la mort d’un Tunisien lors d’une altercation avec des migrants. Des gardes-frontières libyens ont partagé des photos de migrants déshydratés, abandonnés dans le désert, selon eux, par les autorités tunisiennes. La photo d’une Ivoirienne et de sa fille, mortes de déshydratation, a créé la polémique, mais sur le plan humanitaire, l’État tunisien réagit peu selon les associations présentes sur le terrain. De notre correspondante à Tunis,À Bab Jebli, l’un des ronds-points du centre-ville de Sfax, près de 200 migrants subsahariens vivent toujours dans la rue depuis plus de trois semaines après avoir été expulsés de leur maison. Ils sont nourris par des passants et l’association du Croissant-Rouge tunisien. Une situation plus que précaire, comme en témoigne Ibrahim Konaté originaire de Côte d’Ivoire.« Ce n’est pas la police qui nous a délogés, mais la population. Il y avait des groupes de bandits qui tombaient sur les Blacks pour nous voler et c’est pour cela que le bailleur a décidé de nous chasser de la maison… Pour pas que les gens tombent sur nous chez lui. Ils arrêtent de s’occuper de nous à 100%. Même la mairie qui venait ici pour nettoyer chaque matin ne vient plus, ils ont tout coupé, tu vois comme la rue est sale actuellement », explique Ibrahim.Face aux fortes chaleurs, les migrants tentent tant bien que mal de trouver des solutions. « On va souvent à la mosquée pour essayer de se laver, rester un peu et ensuite retourner », poursuit Ibrahim.Mariam, une Ivoirienne de 32 ans, migrante installée à Sfax depuis neuf ans n’a pas été chassée de son logement. Elle tente de venir chaque jour aider, comme elle peut, les femmes avec des enfants présents sur place en leur apportant à manger... « Oui de la nourriture, de l’eau à boire, c’est tout. Voir des gens dans la rue, qui ne savent pas où aller, qui n’ont pas de quoi manger, c’est un peu compliqué. Ça fait vraiment pitié. Il faut les soutenir, donner à manger… »« On n’a pas d’interlocuteur »À ces migrants s’ajoute la présence de 426 Soudanais dans un parc juste en face de Bab Jebli, ils vivent également sur place depuis trois mois, bien qu’ils soient inscrits comme réfugiés auprès du Haut-commissariat des Nations unies en Tunisie. L’ONG ne répond à nos demandes d’interviews. Pour l’Association des femmes démocrates à Sfax, cette situation devient intenable pour la société civile qui se sent abandonnée par l’État. « On n’a pas d’interlocuteur, ni de gouverneur et l’administration aussi ne veut pas parler aux ONG », détaille Naama Nsiri, l'avocate et présidente de la section régionale. Le gouvernement tunisien et la présidence nient les mauvais traitements infligés aux migrants Subshariens. À lire aussiTunisie: le Croissant-Rouge inquiet face à la situation des migrants ramenés de la frontièreDans le sud tunisien, la situation est également grave. Près de 650 migrants ont été récupérés du désert par le Croissant-Rouge tunisien et dispatchés dans divers foyers d’hébergements, mais d’autres n’ont pas pu être sauvés à temps, comme en témoignent les images provenant de Libye. Au moins cinq corps auraient été découverts côté libyen depuis le 19 juillet et 140 personnes seraient toujours coincées près du poste frontalier de Ras Jedir.Quant à ceux qui avaient été transportés de force côté frontière algérienne, certains ont été récupérés par les gardes-frontières algériens tandis que d’autres ont été transférés par le Croissant-Rouge dans des villages à proximité. L’Association des femmes démocrates fait également état de 292 migrants arrêtés et emprisonnés à Sfax pour « franchissement illégal des frontières » depuis le 1er juillet. Près de 1 600 migrants expulsés de leur logementSelon l’ONG Human Rights Watch, ce sont près de 1 600 migrants qui ont été expulsés de leur domicile, dont près de 700 déplacés de force et laissés à l’abandon vers des régions frontalières depuis le début du mois.Le 26 juillet, l’ONG Médecins du Monde avec treize autres organisations a publié un communiqué exprimant « leur profonde préoccupation face à l’évolution de la situation des personnes migrantes en Tunisie depuis quelques mois et notamment l’exacerbation récente des discriminations et des violences à leur encontre. » Elles exhortent les autorités tunisiennes « à faciliter l’accès des organisations de la Société civile nationale et internationale aux zones dans lesquelles se trouvent les personnes déplacées par les forces de l’ordre lors des opérations du mois de juillet 2023, en rappelant que ces personnes se trouvent dans une situation de grande vulnérabilité les exposant à des risques multiples notamment en matière de santé physique et mentale. »Alors que la Tunisie est fortement critiquée pour sa gestion de la crise migratoire dans le pays, la présidence a signé un partenariat économique avec l’Union européenne qui comprend une aide de 105 millions d’euros pour lutter contre « la migration irrégulière ».À lire aussiTunisie: dans le désert, les migrants subsahariens refoulés errent dans des conditions terribles
7/29/20232 minutes, 26 seconds
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Maurice: le plastique à usage unique disparaît progressivement

Après des décennies de campagnes peu fructueuses contre l’usage du plastique à Maurice, les autorités reviennent avec un projet qui a l’air d’être plus consistant. Depuis janvier 2021, une liste de dix produits plastiques est interdite dans l’île. L’impact n’est pas encore pleinement mesurable, mais il semble qu’un mouvement anti-plastique soit enfin en marche dans une île où, tous les ans, 70 000 tonnes de plastiques se retrouvent dans les centres d’enfouissements de déchets.  De notre envoyé spécial à Port-Louis, Maurice produit 540 000 tonnes de déchets par an dont 14 % sont constitués de produits plastiques. Après une très longue période de laisser-aller, l’île a adopté en janvier 2021 un plan d’élimination graduelle de ces matières polluantes. Les premières observations sont encourageantes pour le ministre de l’Environnement, de la gestion des déchets et du changement climatique, Kavy Ramano : « Cette pollution a sensiblement diminué, surtout au niveau des fast-foods, etc. L’application de notre politique anti-pollution plastique continue. » Depuis deux ans et demi, dix produits grand public sont interdits, dont des couverts en plastique, les sacs plastiques et les emballages alimentaires. Maurice a cherché en premier lieu à convaincre les fabricants. « Très souvent, constate Kavy Ramano, dans cette société de consommation que nous sommes en train de vivre, c’est la question de rentabilité qui est l’enjeu majeur de toute entreprise, mais il faut que la mentalité change au niveau des entreprises et qu’elles considèrent aussi cette question de recyclabilité. »De nouveaux réflexes technologiques Nous sommes chez PIM Limited, une usine de produits plastiques installée dans la zone portuaire. Équipée d’immenses entonnoirs et de mélangeurs notamment, elle a adopté les dernières technologies de soufflage et d’injection de plastique. Cette entreprise historique, vielle de 52 ans, a fait le pari du tout recyclable depuis 2016. Ici, insiste son directeur général Eric Corson, on pense au recyclage dès la conception d’un produit : « 80 % de l’impact environnemental sera décidé au moment de la conception du produit. Nous engageons dès le départ des discussions avec nos clients, nous lui prodiguons des conseils, des conseils d’éco-conception. Cela peut aller par exemple de la dimension d’une bouteille, de l’épaisseur d’un plastique, comme de la hauteur d’une bouteille. Plus la bouteille est haute, plus la dimension du carton d’emballage est importante. Si on arrive à optimiser tout cela, cela fait moins de déchets plastiques et de carton. »Devenu un défenseur d’un usage plus réfléchi du plastique, le patron de PIM a fait peindre sur une toute façade de son usine sur fond des couleurs du drapeau mauricien le slogan « Repenser le plastique dans un monde qui change ».  Investir pour recycler davantageCependant, Maurice assiste à l’apparition de nouveaux composants dans les emballages plastiques importés. Cela représente un défi constant pour les recycleurs. DKD limitée, une entreprise installée dans le village de l’Avenir, recycle jusqu'à 42 tonnes de plastiques par mois. Son directeur, Herwin Coret, a dû chercher de nouveaux moyens : « Il y a beaucoup de plastique à Maurice. On voit qu’il y a d’autres types de plastiques qui font leur apparition sur notre marché. C’est pour cela que cette année-ci, on a décidé d’investir massivement, pour pouvoir recycler d’autres types de plastiques qui rentrent à Maurice actuellement. » Les opérateurs économiques de Maurice ont appel au service du cabinet réunionnais Qualitropic. Outre sa spécialisation dans la bioéconomie tropicale et ses conseils scientifiques, cette société met en réseau des acteurs régionaux pour les aider à trouver des produits communs transformables. À lire aussiMaurice: Pamplemousses, un village marqué par l'histoire de l'esclavage
7/28/20232 minutes, 19 seconds
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Tchad: avec les élèves de la nouvelle réforme de la formation professionnelle

Au Tchad, le gouvernement, avec l’appui de la Banque mondiale, cherche à modifier le contenu des enseignements professionnels et techniques, jugés trop théoriques. Il souhaite qu'ils soient mieux adaptés à certains métiers, comme ceux de la menuiserie, de la maçonnerie, de la coiffure ou encore de l’électricité. Reportage dans un de ces centres de formation.  À lire aussiAu Tchad, la guerre à travers les yeux des enfants [1/2]
7/27/20232 minutes, 8 seconds
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Au Tchad, la guerre à travers les yeux des enfants [2/2]

Second et dernier volet de notre série de reportages consacrée à la guerre au Soudan, vu à travers les regards des plus jeunes. Après les enfants perdus et l’extériorisation par le dessin hier, notre envoyé spécial à la frontière tchado-soudanaise, Carol Valade nous emmène à la rencontre de ces adolescents qui, par le sport, le chant ou la poésie, tentent de surmonter le traumatisme de la guerre. De notre envoyé spécial à la frontière tchado-soudanaise,Entre les tentes du Haut-Commissariat des réfugiés (HCR) et les camions d’aide alimentaire du Programme alimentaire mondial (PAM), le championnat bat son plein. Un adolescent s’improvise commentateur de foot à l’aide d’un mégaphone prêté par la Croix-Rouge. Mahamat Salahdine, animateur de la Croix-Rouge tchadienne : « Vous voyez cet enfant ? Son père a été tué devant lui ou bien égorgé. Donc, il a besoin de se dégager de ses soucis. Vous voyez, là, les enfants jouent, donc il est en train d'oublier - un peu - ce qu’il s’est passé. » Des activités pour occuper les enfants...Volleyball, corde à sauter... On pourrait presque s’imaginer dans une cour de récréation. Donaig Le Du, chargée de communication à l’Unicef. Elle explique qu’occuper ces enfants avec des activités est primordial : « Ces enfants-là ont vécu des choses extrêmement traumatisantes. C'est clair qu'on a besoin de les aider à extérioriser ça, à se changer les idées, tout simplement. Et puis, c'est important aussi pour tous ces enfants d'avoir un cadre, d'avoir quelque chose à faire dans la journée. D'avoir, en se couchant le soir, hâte de pouvoir faire quelque chose le lendemain. » ...et les aider à extérioriserÀ l’ombre d’un grand arbre, ces adolescents, assis en cercle, déclament des poèmes. Puis, entonnent ces chants traditionnels emprunts de nostalgie, qui racontent la beauté perdue du Darfour. Mouna Ahmat Abdrahman, lycéenne et réfugiée, se rappelle : « Cette chanson, je l’ai apprise à l’école. Je la chantais souvent à ma meilleure amie, mais elle est restée derrière, là-bas. Alors quand je chante, je pense à elle et je ne l’oublie pas. » Là-bas, au Soudan, plus de 13 millions et demi d’enfants ont urgemment besoin d’une aide humanitaire, « vitale », selon l’Unicef.  À lire aussiAu Tchad, la guerre à travers les yeux des enfants [1/2]
7/26/20232 minutes, 18 seconds
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Au Tchad, la guerre à travers les yeux des enfants [1/2]

Après avoir été au chevet des blessés de guerres pris en charge par l’ONG MSF, rencontre avec la famille Ahmat dont les blessures sont plus intimes, pas forcément visibles à l’œil nu. Voici leur quotidien avec un père qui souffre d’amnésie provoquée par le traumatisme de la guerre et a oublié le décès de son fils. De notre envoyé spécial à la frontière tchado-soudanaise,Dans les bras d’une infirmière, une petite fille de quelques mois, trouvée au bord de la route avec un mot indiquant le nom de son village et celui de son père. Les volontaires de la Croix-Rouge tentent de réunifier les familles des enfants perdus. Pour beaucoup, leurs parents sont morts, d’autres ont été abandonnés. Ils ont suivi le premier adulte jusqu’ici. Atteyip Dab, agent dit « protection de l’enfance », décrit l'état dans lequel ces enfants sont retrouvés : « Les enfants qu'on trouve sont tellement désespérés. Ils sont séparés de leurs parents, ne savent pas quoi faire, jusqu'à ce qu'ils trouvent leur famille. »Au centre de transit d’Ombellia, l’espace « ami des enfants », tenu par l’Unicef, est plein à craquer. Des enfants de tous les âges dessinent ou font de la pâte à modeler. Mahamat Salahdine, animateur de la Croix-Rouge : « Ce qu’ils ont vu chez eux, lors des conflits, quand la guerre était là, les enfants l’ont dans la tête. C’est pour ça que nous sommes là pour doucement leur faire oublier ça. »À lire aussiLes enfants face à la guerre en UkraineDes dessins comme témoignages de la guerre Donaig Le Du, chargée de communication pour l’Unicef : « Il y a des enfants qui dessinent des fleurs, d’autres qui dessinent des maisons, probablement les maisons qu'ils ont perdues. Et puis il y a des enfants qui dessinent des choses extrêmement violentes comme les attaques dont ils ont été victimes. J'ai vu des hélicoptères, j'ai vu des pick-ups avec des hommes en armes dessus, j'ai vu des dessins de balles qui pleuvaient... C'est important pour ces enfants de pouvoir exprimer ce qu'ils ont vécu, de pouvoir le sortir. »Selon l’Unicef, plus de 330 enfants auraient été tués et près de 2 000 autres blessés depuis le début de la guerre. Plusieurs millions d’entre eux sont encore en danger. À lire aussiAu Tchad, avec les blessés de guerre soudanais dans un hôpital de MSF [1/2]
7/25/20232 minutes, 20 seconds
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Au Tchad, les blessures psychologiques des victimes de guerre soudanaises [2/2]

Après avoir été au chevet des blessés de guerres pris en charge par l’ONG MSF, rencontre avec la famille Ahmat dont les blessures sont plus intimes, pas forcément visibles à l’œil nu. Voici leur quotidien avec un père qui souffre d’amnésie provoquée par le traumatisme de la guerre et a oublié le décès de son fils. Au lycée d’Adré, il n’y a plus un centimètre d’espace disponible. On dort à 10 familles par salle de classe et les conditions d’hygiène sont déplorables. Anane Kamis Ahmat surveille d’un œil inquiet le plafond qui menace de s’écrouler sur sa famille.« À El Geneina, nous avions trouvé refuge dans une école, mais elle a été bombardée, les cinq enfants de ma sœur ont été tués. Pendant notre fuite, des hommes armés nous tiraient dessus depuis leurs véhicules, mon fils de deux ans a pris une balle à l’arrière du crâne. Je l’ai porté sur mon dos durant 30km pour l’enterrer ici au Tchad. »Chaque jour, Anane traverse le camp pour apporter un plat de mil à son mari Abdallah, hospitalisé. Ne supportant pas d’être inactif, il s’enfuyait constamment. Les médecins l’ont détaché depuis qu’il suit un traitement : « Avant, je souffrais énormément, mais on m’a donné des médicaments et maintenant Dieu merci ça va beaucoup mieux. »Le regard vide, mâchonnant péniblement, Abdallah souffre de dissociation et d’amnésie provoqués par le stress post-traumatique. Son cerveau a comme effacé la mort de son fils. Un peu à l’écart, Anane nous explique : « Il a commencé à se rappeler certaines choses, mais pas de la guerre. Il demande des nouvelles de son fils, il me demande est-ce-que le petit a déjeuné ? Je n’ose pas lui dire la vérité. Parfois, il demande "où sommes-nous" ? »Omar Mohammed Omar, l’un des rares psychiatres du camp, la reçoit sous une petite tente blanche montée par l’ONG International Rescue Committee, à l’origine de la cellule de soutien : « Ce n’est pas un cas isolé, ce genre de troubles est lié au choc provoqué par la guerre et la fuite, à la peur d’être tué. Avant de fuir, ils vivaient à El Geneina dans une grande maison, puis d’un coup un matin, tu te retrouves dans un endroit comme ça, sans rien. L’impact psychologique est terrible. Je crois qu’il a vu ce qu’il n’aurait pas dû voir, les morts, les blessés, le corps de son fils. Et c’est ce qui a provoqué son état. » Abdallah Amat a de la chance d’être suivi. L’épilepsie, la psychose, la dépression, sont les pathologies les plus communes parmi les réfugiés, mais faute de diagnostic, la plupart d’entre eux souffre en silence.À lire aussiAu Tchad, avec les blessés de guerre soudanais dans un hôpital de MSF [1/2]
7/24/20232 minutes, 26 seconds
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Au Tchad, avec les blessés de guerre soudanais dans un hôpital de MSF [1/2]

Premier volet de notre série de reportages consacrés aux victimes de la guerre au Soudan à la frontière tchado-soudanaise. À l’Hôpital d’Adré où l’ONG Médecins sans frontières prend en charge les blessés les plus graves, victimes de balles ou d’obus. Dans la plus grande tente surnommée « Golgotha » par les patients qui attendent leur tour pour passer au bloc.« Salam, le médecin est passé ce matin, il a vu tous les patients ? » Le docteur Serge Kouadio slalome entre les membres plâtrés des blessés couchés au sol : « ce sont des patients avec des blessures qui sont très douloureuses, on leur donne des antalgiques pour mieux supporter la douleur ».Au plus fort de la crise, à la mi-juin, ils recevaient jusqu'à 350 blessés graves par jour, le docteur Yves Manzi Muzimana : « Quand je suis arrivé, la situation était catastrophique. Il y avait des patients partout, on a dû augmenter la capacité d’accueil on avait 200 patients par jour ».Sur place, impossible d’être soigné car il n’y a plus de médecins ni de médicaments, la quasi-totalité des structures sanitaires sont détruites, explique ce patient sous couvert d’anonymat : « Ce sont les milices arabes qui nous ont tirés dessus pendant qu’on fuyait. J’ai été pris en charge à l’hôpital d'El Geneina, mais il a été bombardé et détruit, alors ma famille m’a porté jusqu’ici. »  À lire aussiConflit au Soudan: «La catastrophe est peut être d'une plus grande ampleur» dans la région d'el-Geneina« À El Geneina c’est l’enfer, tout le monde essaie de fuir »La quasi-totalité des blessés vient d’El Geneina, capitale du Darfour occidental. Et sont des civils de la communauté massalit comme Abdelkarim Hachimi : « À El Geneina c’est l’enfer, tout le monde essaie de fuir. Cette guerre pour le pouvoir a détruit nos vies. J’aimerais rentrer chez moi mais vu le chaos qui règne là-bas, je ne pense pas que ce sera possible. Ne nous oubliez pas, nous, le peuple soudanais. Nous traversons une période très sombre et il se passe des choses très graves. La responsabilité incombe entièrement aux forces du général Hemedti et aux milices arabes qui sont leurs alliées. »Docteur Serge Kouadio, responsable d'activités médicales MSF France : « C’est vrai physiquement, ils sont traumatisés, mas en même temps sur le plan psychologique aussi ce sont des patients qu’il faut pouvoir rassurer et tout ça. On essaie d’être aux petits soins pour que moralement, ils reviennent à la vie. »Plus d’un millier de personnes ont trouvé la mort à El Geneina depuis le début du conflit. Des chiffres qui pourraient être largement sous-estimés.À lire aussiGuerre au Soudan: les sept pays frontaliers se réunissent au Caire pour trouver une solution
7/23/20232 minutes, 12 seconds
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Centrafrique: le taxi-brousse, toujours indispensable

En Centrafrique, les taxis-brousse jouent un rôle très important dans le transport des marchandises et des personnes entre Bangui et les villages périphériques du nord de la capitale. Ces voitures vétustes, que l’on appelle localement « wôrô-wôrô », vont dans des villages éloignés, à travers des pistes difficiles à pratiquer. Malgré les accidents et les tracasseries routières, les taxis-brousse restent indispensables, car ils facilitent la circulation des biens et des personnes dans un pays qui manque de moyens de transport. 
7/22/20232 minutes, 17 seconds
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Cameroun: l'intense vie nocturne à Bamenda, une époque révolue

Avant 2017, Bamenda, la capitale de la région du Nord-Ouest du Cameroun, était non seulement un pôle économique, mais aussi une ville où la vie nocturne était intense. Snacks, bars, boîtes de nuit, il y en avait beaucoup. Mais depuis que les revendications séparatistes ont pris une tournure violente d'affrontements entre groupes armés et forces gouvernementales dans la région, Bamenda la nuit n'est plus que l'ombre d'elle-même, c’est ce que disent ceux qui l'ont connue. Reportage d’Alphonse Tebeck, traduction d’Amélie Tulet. Il est 22 heures au rond-point de l'hôpital dans l'arrondissement de Bamenda 2. Seules quelques motos circulent encore. Les rues sont quasiment désertes. Avant 2017, pourtant, le quartier était connu pour ses snacks et ses bars. Mais depuis, tout a fermé. Rencontré quelques heures plus tôt, Richard se souvient d'une époque qui lui semble maintenant révolue. « Je sors le soir quand je suis à Douala, à Bafoussam, à Yaoundé, mais quand je suis à Bamenda, à six heures le soir, je suis à la maison. Il y a trop d'insécurité. J'ai simplement peur de l'obscurité maintenant ici. Quand je suis invité à un événement, si c'est après six heures, je n'y vais même pas. La nuit, c'est fini », dit-il.C'est à deux kilomètres au nord du rond-point de l'hôpital, à Ntarikon Che Street, que début mai, le journaliste, Anye Nde Nso a été abattu devant un bar où il animait une soirée. Dans un autre quartier, celui de Oldchurch, Jérôme, 40 ans, est propriétaire d'un snack. Comme d'autres établissements, il ne fait plus recette. « On est passé de neuf salariés à zéro, on était plus capable de les payer. Le propriétaire, moi, je lui dois plusieurs mois de loyers, je n'arrive pas à payer. En 2016, Bamenda c'était du 24h sur 24. Certains lieux étaient ouverts, 24h sur 24. Personne n'avait peur, mais depuis cette crise, tout a changé, nous ne savons plus quoi faire, nous sommes déprimés », raconte-t-il.« Nous ne pouvons pas sacrifier notre jeunesse à cause de la guerre »Mais d'autres quartiers reprennent des couleurs, à « Mobile Nkwen » dans la commune de Bamenda 3, malgré les risques, là, la vie nocturne reprend progressivement. Sederik a la trentaine, il partage plusieurs bouteilles avec des amis. « Nous ne pouvons pas sacrifier notre jeunesse à cause de la guerre. Dans certaines communautés, des mesures ont été prises même par des chefs de quartier pour que les gens soient un peu tranquilles le soir pour se voir. S'il faut avoir peur la nuit, il faut avoir peur aussi le jour. Des banques ont été attaquées en plein jour. Il y a eu aussi plein d'enlèvements ont eu lieu la journée. Ce n'est pas que la nuit qui n'est pas sûre, même le jour, ce n'est pas sûr. Nous devons vivre avec et nous adapter. Par exemple, le soir, nous ne nous déplaçons pas en transports en commun, nous prenons nos voitures, nous ne nous garons pas devant les bars, nous nous garons plus loin, pour que les gens ne sachent pas qui vous êtes, quelle voiture vous avez, pour ne pas être une cible », explique-t-il.La future troisième phase du Programme présidentiel de reconstruction et de développement prévoit sur le papier un appui aux retours des investissements dans le secteur privé. Mais des acteurs de la société civile des régions anglophones du Cameroun estiment que parler de reconstruction est prématuré tant que les violences sont toujours en cours.À lire aussiCameroun: au centre DDR de Bamenda, les ex-combattants séparatistes attendent leur retour à la vie civile
7/21/20232 minutes, 14 seconds
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Influences russes en Afrique [5/5]: des influenceurs francophones très actifs

Dernier épisode de notre série consacrée aux influences russes en Afrique. Ce vendredi, nous nous intéressons aux influenceurs, comme Nathalie Yamb, Franklin Niamsy ou Kémi Seba. Des millions d'abonnés sur les réseaux sociaux où ils partagent leur haine contre l'Occident. Depuis quelques années, ces personnalités encensent aussi Moscou et sa politique de conquête menée en Afrique. Kemi Seba aurait même noué un partenariat avec le patron du groupe paramilitaire Wagner. Kemi Seba aurait touché plus de 400 000 € de Prigojine pour renforcer son influence en Afrique. En avril 2023, sur Youtube, l'intéressé confirme un partenariat avec les Russes. « "Kemi Seba a travaillé avec Prigojine"…  Je suis obligé de rigoler. Je l'ai dit devant des millions de gens en Afrique francophone en 2019 ou en 2020, je ne sais plus. Sans aucun tabou, il veut nous soutenir parce qu'ils savent qu'on a les mêmes adversaires.  Pousser, faire reculer l'Occident. Si on veut parler avec Wagner, on parle avec Wagner si on veut parler avec la Russie, on parle avec la Russie. Il y a quoi ? »En Afrique, ces dernières années, au fil des guerres et des coups d'État, des gouvernements pro-russes ont pris le pouvoir. En République centrafricaine, au Mali, les mercenaires de Wagner occupent aujourd'hui le terrain, demain peut-être au Burkina Faso. À Bobigny, ce jour-là, Kemi Seba assure même y avoir joué un rôle : « Vous avez vu qu’au Mali ça a bougé, on y a grandement contribué. »Et menace directement les autres alliés de la France, comme le président ivoirien : « Bientôt Alassane Ouattara… »  Ou encore celui du Sénégal : « bientôt Macky Sall. Je vais dans quelques jours en Russie. »Ce lien que Moscou a noué avec Kemi Seba comme avec d'autres influenceurs, n'est pas le fruit du hasard. En Afrique, la stratégie de la conquête russe repose sur deux piliers portés par Evgueni Prigojine, la sécurité avec la milice armée Wagner et l'information, ou plutôt la désinformation.  C'est là qu'interviennent ces influenceurs. En une dizaine d'années, ils ont réussi à convertir une partie de l'opinion africaine au bien-fondé de l'arrivée de Moscou dans le pré carré français.« En Afrique de l'Ouest, les gens avaient cette image extrêmement péjorative de la Russie comme un pays où lorsqu'on a la peau noire, on risque sa vie. Et en l'espace de quelques années, l'image de la Russie a complètement changé », explique Kevin Limonier, spécialiste du cyberespace russophone.« Les Russes sont venus se fixer sur un certain nombre de malaises de mal-être des sociétés africaines qu'ils ont réussi de manière strictement opportuniste à amplifier. Et c'est à partir de ce moment-là que l'on va avoir un certain nombre de personnes, des gens comme Kemi Seba qui vont surfer sur cette image positive que la Russie avait réussi à se construire sur les réseaux sociaux pour y rajouter du récit géopolitique, c'est-à-dire l'idée de dire que la Russie est la dernière grande puissance anticoloniale. C'est ça le récit tel qu'il a été construit.  »Extrait du Grand Reportage consacré à ce sujet, diffusé ce vendredi 21 juillet 2023 sur notre antenne à 13h10 et 21h40 heure de Paris et sur l’application Pure radio à partir de 13h30. Notre dossierInfluences russes en Afrique► Sur France 24 Du KGB de Khrouchtchev à Poutine, les profondes racines de l’influence russe en Afrique KGB en Afrique : éclairage sur le modus operandi d’une URSS en quête d’influence
7/20/20232 minutes, 34 seconds
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Influences russes en Afrique [4/5]: Quand la Russie se sert des traditions et des valeurs familiales

« Vos traditions et vos valeurs doivent être respectées », c’est en résumé le message porté par les Russes en Afrique pour contrer ce qu’ils désignent comme l’Occident décadent. La Russie s’apprête ainsi à développer plusieurs projets humanitaires pour aider les plus démunis et notamment les enfants sur le continent. Plusieurs annonces devraient être faites dans ce sens lors du sommet Russie-Afrique qui se tient la semaine prochaine, les 27 et 28 juillet, à Saint-Pétersbourg. À la tête de ce vaste chantier, Maria Lvova-Belova, la Commissaire russe à l’enfance. Le nom de cette blonde de 39 ans à la douceur trompeuse a fait le tour de la presse internationale en mars dernier lorsque la Cour pénale internationale a émis un mandat d’arrêt à son encontre ainsi qu’à l’encontre de Vladimir Poutine. Motifs invoqués contre elle : « Crimes de guerre présumés de déportation illégale d’enfants de territoires occupés ukrainiens vers la Fédération de la Russie. »Déjà en février dernier, lors de sa rencontre avec Vladimir Poutine, Maria Lvova-Belova exposait au président russe sa volonté de développer des activités humanitaires en Afrique. « Dans le cadre de notre stratégie de partenariat avec des pays africains, je voudrais demander votre bénédiction pour faire de l’aide humanitaire, pour mener une mission humanitaire en Afrique. Il y a beaucoup de besoins liés notamment à la vaccination, aux soins, à l’éducation », plaide la commissaire à l’enfance qui annonce alors la couleur : « Lors du sommet Russie-Afrique, nous consacrerons toute une session à la défense des droits des enfants. »À écouter aussiInfluences russes en Afrique [1/5]: l’héritage soviétiqueAvec la bénédiction de l’Église orthodoxe« Allez-y », l’encourage alors Vladimir Poutine. Si Maria Lvova-Belova demande au président russe littéralement une bénédiction pour mener son projet en Afrique, c’est par conviction. Profondément pieuse, femme de prêtre et mère de cinq enfants, sans compter ceux nombreux qu’elle a sous sa tutelle, elle a récemment rencontré le chef de l’Église orthodoxe russe pour lui parler de son travail, notamment en Afrique.Le patriarche Cyril a, lui aussi, béni son engagement en Afrique. Il devrait d’ailleurs être présent au sommet de Saint-Pétersbourg.À écouter aussiInfluences russes en Afrique [2/5]: Centrafrique, un laboratoire pour les mercenaires russesFamille et traditions, deux piliers du soft power russePour Maxime Matoussevitch, historien et spécialiste de l’Afrique à l’université Seton Hall du New Jersey, la promotion des valeurs traditionnelles fait partie du soft power russe sur le continent africain. « Lorsque l’on observe ce que la Russie peut offrir à l’Afrique, il n’y a pas grand-chose, mais le peu qui existe est important. Ils exportent des armes : 50% des armes arrivant sur le continent proviennent de la Russie. Pour le reste, ce n’est pas vraiment de l’idéologie, ce sont des idées moralisatrices : la préservation des valeurs traditionnelles, la conception traditionnelle du genre. »À écouter aussiInfluences russes en Afrique [3/5]: Madagascar, l’élection présidentielle de 2018 infiltréePour ce chercheur d’origine russe, le mandat d’arrêt de la CPI ne devrait pas entraver le travail de la commissaire russe en Afrique. « Il se peut que cela gêne quelques chefs d’État africains, mais ce mandat d’arrêt, c'est surtout une confirmation supplémentaire que la Russie s’oppose véritablement à l’Occident. »Au programme du sommet de Saint-Pétersbourg, disponible en ligne, une session est bien prévue pour évoquer, entre autres, « les pseudo-valeurs artificielles et contre-nature qui sont activement imposées » par l’Occident.Sur France 24Du KGB de Khrouchtchev à Poutine, les profondes racines de l’influence russe en Afrique
7/19/20232 minutes, 32 seconds
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Influences russes en Afrique [3/5]: Madagascar, l’élection présidentielle de 2018 infiltrée

Madagascar est le premier pays d’Afrique pour lequel l’ingérence électorale russe a pu être documentée puis prouvée. Lors de l’élection présidentielle de 2018, entre six et neuf candidats sur les trente-six qui briguaient la magistrature suprême ont bénéficié de l’aide de mystérieux stratèges de Moscou. Un mode opératoire méthodique et bien rodé, dans l’un des pays les plus pauvres du monde, mais où le coût d’une campagne électorale est, dit-on, parmi les plus élevés de la planète, du fait d’une loi électorale permissive qui ne prévoit aucun plafonnement et autorise les financements étrangers. La correspondante de RFI à Madagascar revient sur cette élection présidentielle « truquée » avec la journaliste d’investigation qui a démontré l’influence russe dans un documentaire diffusé en avril 2019 sur la BBC. De notre correspondante à Antananarivo,« Je ne savais pas qui les envoyait, mais ce que je savais, c'est que c’étaient des Russes et qu’ils venaient ici pour me soutenir ! Donc moi, je n’ai pas cherché midi à 14h ». Pasteur Mailhol est l’un des premiers candidats de l’élection présidentielle malgache de 2018 à reconnaître, face à la journaliste d’investigation Gaëlle Borgia, avoir bénéficié de l’aide des Russes.Dans son documentaire intitulé Madagascar, la Russie aurait-elle manipulé la présidentielle ?, la journaliste franco-malgache révèle la manière dont les hommes de Wagner s’y sont pris pour influencer le scrutin. « Durant notre enquête, on a pu identifier une demi-douzaine de candidats à la présidentielle malgache qui ont été approchés par des Russes. Ces derniers se présentaient comme des stratèges électoraux. Ils disaient avoir une expérience dans des élections en Afrique », raconte Gaëlle Borgia.Très vite, les dizaines de Russes entrés sur le territoire grâce à un visa touristique, proposent une aide logistique et financière. Omer Beriziky, ancien Premier ministre et candidat à l’élection, relate dans le documentaire, les échanges initiaux qu’il a eus avec ses interlocuteurs : « Ils m’ont demandé si j'étais prêt à ouvrir la diplomatie malgache vers d’autres horizons. J’ai dit bien évidemment ! Et ils m’ont dit : on va vous aider. Question de Gaëlle Borgia : Et votre budget arrêté avec les Russes s’élevait à combien à peu près ? Réponse : Un peu moins de 2 millions de dollars ».À écouter aussiInfluences russes en Afrique [1/5]: l’héritage soviétique« Les Russes promettaient de grosses sommes »« Ce que l’on sait, précise la journaliste d’investigation, c’est que pour cette ingérence électorale à Madagascar, les Russes promettaient de grosses sommes. Des promesses qu’ils n’ont pas toujours honorées. Ils avaient un gros budget pour imprimer un journal gratuit diffusé en dehors de la capitale où étaient publiés des articles en faveur des candidats qu’ils soutenaient. Et ça, c'étaient des milliers d’impressions hebdomadaires ».Progressivement, les généreux financeurs intègrent les équipes de leurs différents poulains.Au cœur des états-majors de campagne« Petit à petit, ils sont même devenus des cadres de campagne électorale malgache. Et selon les témoignages qu’on a eus, les membres des équipes électorales malgaches ont fini par être sous leurs ordres », précise la journalisteExtrait du documentaire : « C’était comme si c'étaient eux qui décidaient ce que nous devions faire et on devait s’exécuter. J’avais l’impression que nous étions plus des prestataires plutôt que l’équipe de campagne du candidat ». Quant à la contrepartie, les négociateurs sont clairs sur celle-ci : « Si un des candidats se retrouvait au second tour, eh bien les perdants soutenus par les Russes devraient soutenir ce candidat vainqueur. »À écouter aussiInfluences russes en Afrique [2/5]: Centrafrique, un laboratoire pour les mercenaires russesAlors, Andry Rajoelina, l’actuel président, doit-il sa victoire aux Russes ?« On sait que les Russes l’ont approché au moment du second tour – ils ont d’ailleurs changé leur fusil d’épaule puisque au départ, ils pensaient plutôt soutenir le président sortant Hery Rajaonarimampianina –, on sait qu’après son élection, des Russes ont rencontré les ministres du gouvernement malgache, de manière secrète. Mais aujourd’hui, c’est difficile de prouver qu’Andry Rajoelina a eu une aide russe pour parvenir à gagner l’élection présidentielle », explique Gaëlle Borgia.Quant aux prochaines élections prévues en fin d’année, des sources viennent de nous informer que plusieurs membres chargés de l’ingérence électorale sont en train de quitter l’Île. La fin d’une stratégie russe en terre malagasy ? Ou le début d’un nouveau chapitre ?À lire aussiDe l'héritage soviétique aux réseaux sociaux, comment la Russie s’est implantée en Afrique
7/18/20232 minutes, 29 seconds
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Influences russes en Afrique [2/5]: Centrafrique, un laboratoire pour les mercenaires russes

Nous sommes fin 2017. Profitant du départ des militaires français, la Russie prend pied en Centrafrique. Le groupe paramilitaire Wagner intervient pour protéger le régime fragilisé du président Faustin-Archange Touadéra et fait rapidement de ce pays sa chasse gardée, même si le récent coup de force d'Evgueni Prigojine contre Moscou pourrait rebattre les cartes. Retour sur cette implantation des Russes en Centrafrique. Dans son discours du 13 juillet 2016, devant les officiers français réunis à l'hôtel de Brienne à la veille de la Fête nationale, le président François Hollande annonce la fin de l’intervention militaire française en Centrafrique. « Nous avons pu conjurer le risque de désagrégation de ce pays. Ce succès nous conduit à passer le relais à la communauté internationale et aux autorités centrafricaines », annonce le chef de l’État, qui précise : « En octobre prochain, Jean-Yves Le Drian, le ministre de la Défense, se rendra donc en Centrafrique pour prononcer officiellement la fin de l'opération Sangaris ».L'annonce du retrait militaire français est une opportunité pour Moscou qui veut accroître son influence en Afrique. Dès 2017, le Kremlin propose à Bangui une offre sécuritaire complète, rappelle Thierry Vircoulon, chercheur à l'Institut français des relations internationales (Ifri). « La question des livraisons d'armes a été la porte d'entrée pour Moscou, puisque la Centrafrique était sous un embargo de l'ONU ».« Une très mauvaise appréciation de la politique russe par Paris »Pour que les Forces armées centrafricaines (FACA) reçoivent des armes, il fallait en effet un accord du Conseil de sécurité. « C'est là que la Russie est intervenue et a obtenu, en tant que membre du Conseil de sécurité, une exemption pour cette livraison d'armes », explique le chercheur qui souligne qu’avec cette livraison d’armes, s’est logiquement posée la question de la formation. « Les instructeurs de Wagner sont alors arrivés. C'était un package : armes et formation ».L'arrivée des Russes en Centrafrique est d'autant plus simple qu'en 2018, Paris, dans le cadre de son architecture de sécurité, plaide pour tendre la main à Moscou. « Il y a eu une très mauvaise appréciation de la politique russe », explique Thierry Vircoulon pour qui « il est clair que la diplomatie française voulait maintenir un espace de dialogue avec le pouvoir russe, sans réaliser que le pouvoir russe, lui, n'était pas intéressé par le dialogue ». Le chercheur rappelle que Paris était aussi engagé à l’époque au Mali avec l’opération Barkhane, et ne voulait pas, par conséquent, avoir la charge de deux missions en même temps. Pour Thierry Vircoulon, la France « a en fait sacrifié, il faut le dire, la Centrafrique à l'opération au Mali ».À écouter aussiInfluences russes en Afrique [1/5]: l’héritage soviétiqueWagner n’a pas rempli son contrat de pacifier la CentrafriqueCinq ans après leur arrivée, les Russes ont transformé la Centrafrique en une chasse gardée économique, sans remplir complètement le contrat sécuritaire initialement proposé.« Ils ne l’ont rempli que partiellement », précise Thierry Vircoulon, « dans la mesure où, avec le déploiement par le groupe paramilitaire Wagner de 1 500 hommes, ils ne sont parvenus à sécuriser que la capitale Bangui et un certain nombre de chefs-lieux de province ». Le chercheur reconnaît que les mercenaires de Wagner sont également parvenus à former et équiper certains bataillons de l'armée centrafricaine. « Mais ils ne sont pas parvenus à pacifier la Centrafrique et à faire en sorte que les groupes armés qui sont dans la brousse soient complètement défaits et disparaissent », souligne-t-il. Depuis la fin 2021, les mercenaires de Wagner sont en effet harcelés par un certain nombre de ces groupes armés loin dans la brousse.Le groupe Wagner se maintiendra-t-il en Centrafrique ou le président Faustin-Archange Touadéra cherchera-t-il d'autres soutiens ? À quelques jours du 2e sommet Russie-Afrique de Saint-Pétersbourg, toutes les options sont sur la table.À lire aussiDe l'héritage soviétique aux réseaux sociaux, comment la Russie s’est implantée en Afrique
7/17/20232 minutes, 32 seconds
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Influences russes en Afrique [1/5]: l’héritage soviétique

C’est un voyage dans le temps que vous propose de faire le premier épisode de notre série Influences russes en Afrique. Nous sommes en URSS, avec la guerre froide pour décor. Nikita Khrouchtchev, Premier secrétaire du Comité central du Parti communiste de l’Union soviétique puis Président du Conseil des ministres de l’URSS, comprend très vite que pour contrer le bloc occidental, il a tout intérêt à rallier à sa cause des pays africains en lutte pour leur indépendance. L’argumentaire développé par Nikita Khrouchtchev dès la fin des années 1950 est aujourd’hui recyclé par Moscou.   Dans un discours d'août 1961, le leader soviétique Nikita Khrouchtchev dénonce les actions des puissances dites impérialistes en Afrique. « Ce sont elles qui ont organisé la répression sanglante des patriotes du Congo, elles qui ont tué le héros national Patrice Lumumba », accuse-t-il.  C'est sous sa direction que l'URSS va lancer de multiples coopérations avec le continent. Ventes massives d'armes et formations militaires, envoi de coopérants, développement de projets d'infrastructures, bourses d'études, les initiatives sont diverses et nombreuses. Des milliers d'étudiants fréquenteront ainsi les universités soviétiques.  « En immersion avec les étudiants soviétiques » Si pour certains d’entre eux, l'expérience est rude, entre violence et racisme, ce n'est pas le cas pour l'ingénieur congolais Louis-Patrice Ngagnon, envoyé à Kiev dans les années 1970. « Nous avons reçu une très, très bonne formation. C'était vraiment une relation de coopération gagnant-gagnant, dans la mesure où nous partions d'ici dans les conditions les plus favorables, parce que tout était à notre portée », se souvient-il au micro de RFI. « Il n'y avait pas de séparation. On est entré en immersion avec les étudiants soviétiques, on a fait toutes nos études ensemble », insiste Louis-Patrice Ngagnon. L’ingénieur congolais estime que cette expérience a permis à sa génération de former la suivante au pays. Mais s'ils repartent avec des compétences certaines, tous ces étudiants ne deviendront pas une avant-garde communiste, comme l'espérait Moscou. La plupart des pays nouvellement indépendants feront d’ailleurs jouer la concurrence entre les deux blocs, comme le rappelle Tatiana Smirnova, anthropologue au centre FrancoPaix à l'université du Québec à Montréal.  Des relations complexes avec l’URSS  « Il faut souligner que les relations entre les pays du continent et l’URSS étaient très complexes, au-delà de l’image de cette confrontation entre deux blocs, entre deux grands Frères cherchant à secourir les pauvres pays oppressés », souligne la chercheure. Selon elle, les pays du continent ne se sont pas contentés de rester « à la périphérie », au contraire, ils ont eux-mêmes été actifs. « Les dirigeants jouaient plus ou moins la carte de ces blocs opposés en fonction des opportunités de moment », explique Tatiana Smirnova qui pointe l’exemple du Nigeria, « un pays qui, à l’époque, jouait très bien entre ces deux blocs ». À partir des années 1980, l'URSS s'écroule. L'intérêt pour le continent s'érode. La nouvelle Russie en sera largement absente jusqu'au retour opéré ces dernières années avec un discours recyclant le narratif soviétique. « La Russie libératrice de l'impérialisme occidental ; ce récit se construit sans aucun doute sur le passé soviétique », relève Tatiana Smirnova qui précise toutefois « qu’on ne peut pas dire que les relations actuelles se construisent à partir du réseau des anciens diplômés » des universités soviétiques. Un récit qui aujourd’hui trouve écho dans une partie de l'opinion publique africaine, frustrée par l’échec des processus démocratiques inaboutis engagés à la sortie de la guerre froide.   À lire aussiDe l'héritage soviétique aux réseaux sociaux, comment la Russie s’est implantée en Afrique
7/16/20232 minutes, 33 seconds
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Musique: quand la rumba congolaise fait vibrer le Sénégal

La communauté congolaise, des deux Congo, est très présente au Sénégal. Parmi elle, de nombreux musiciens talentueux qui se produisent dans des bars de la capitale pour faire découvrir la rumba congolaise, inscrite depuis 2021 au patrimoine immatériel de l’Unesco. Et ils mettent l’ambiance dans la capitale sénégalaise.
7/15/20232 minutes, 22 seconds
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RDC: la prison de Kasombo, un mémorial sacré pour la communauté Kimbanguiste

C’est à la prison de Kasombo que fut détenu pendant 30 ans, Simon Kimbangu, un chef religieux arrêté en 1920 au Bas Congo pour sa lutte contre les inégalités et injustices sociales de la période coloniale. Kasombo est la plus ancienne maison carcérale construite à Lubumbashi à l’époque coloniale. Depuis 1980, le site est est géré par la communauté Kimbanguiste. Visite d'un lieu considéré comme sacré par les fidèles de l'Église Kimbanguiste en RDC : la prison de Kasombo. Située non loin de l’hôpital Sendwe, la prison de Kasombo couvre un espace de plus de 100 mètres carrés. Elle compte des bureaux, des pavillons et un jardin. « La c’était le bureau du directeur de la prison, indique Christophe Mukombo, inspecteur provincial de l’église Kimbanguiste. À notre droite, c’est ici ou il y avait la cuisine. Ce bâtiment-là servait de magasin de la prison. Tous les bâtiments que vous voyez, sont tels que nous les avons trouvés. »À la place centrale de la prison se trouve un socle et à quelques mètres, est érigé un puits d’eau aujourd’hui vide. Ce sont des lieux symboliques. « C'est ici que les prisonniers venaient pour le mot du matin, explique Christophe Mukombo qui guide les visiteurs. C'est ici où l'on fouettait les prisonniers. C'est ici que Simon Kimbangu recevait chaque jour 120 coups de fouet. Ils le fouettent et le mettent ici, dans ce puits d'eau, plein. Cette eau devrait être salée. »Plus loin, un mur sépare les pavillons et les cachots. Il y en a une dizaine. Simon Kimbangu, arrêté et condamné à mort pour sa résistance, a passé 30 ans dans cette prison. « Il luttait contre les injustices d'abord commises par l'homme contre son semblable, et surtout des injustices commises par l'homme blanc contre l'homme noir, raconte le guide. À l'époque coloniale, nous avons été chosifiés. Donc, son combat était que chacun soit libre chez lui. »Lieu de recueillementChaque jour, une dizaine d’adeptes de Simon Kimbangu viennent se recueillir ici. D’autres, des volontaires, sont là pour maintenir la propreté des lieux. « Nous sommes venus pour balayer, explique Jacquie Lunda, une mère venue avec sa famille. Nous enlevons la mauvaise herbe, car c’est ici que Simon Kimbangu a souffert pour l’homme noir. L’espace doit être propre. »Quelques curieux visitent aussi cette prison. « C'est parmi les lieux qui sont vraiment intéressants, importants pour notre histoire en tant que Noirs, affirme Higelin Mutomb, un artiste comédien. Mais c'est aussi un symbole pour des gens qui se sont vraiment battus pour la liberté de l'homme noir, spirituellement et physiquement. »La prison de Kasombo est un patrimoine universel qui mérite d’être encore plus valorisé auprès du grand public, assure l’inspecteur de l’Église Kimbanguiste.
7/14/20232 minutes, 17 seconds
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Les élèves africains des grandes écoles militaires sont à l'honneur lors de ce 14-Juillet

Polytechnique, Saint-Cyr, l'École de l'Air... Les élèves africains des grandes écoles militaires sont à l'honneur lors de ce 14-Juillet. RFI est allé à leur rencontre alors qu'ils se préparent à défiler sur l'avenue des Champs-Élysées.
7/13/20232 minutes, 15 seconds
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Tchad: sans espoir de retour, les réfugiés centrafricains tentent de se prendre en charge (2/2)

Depuis le début de la guerre au Soudan voisin, le Tchad est devenu le pays d’Afrique qui accueille le plus grand nombre de réfugiés sur son sol par rapport à sa population. Entouré de pays en crise, Ndjamena vient d’adopter une loi particulièrement progressive, citée par l’ONU comme un modèle en matière d’asile. Le Tchad accueille 750 000 réfugiés sur son sol, soit plus de 4% de sa population. Ils sont majoritairement Soudanais, mais aussi Camerounais et Centrafricains. Ces derniers sont regroupés dans des camps au sud non loin de la frontière. Certains s’y trouvent depuis déjà 20 ans et tentent de se prendre en charge pour pallier la raréfaction de l’aide humanitaire. De notre envoyé spécial à Goré, Cela fait bientôt 20 ans que Bellarmé Bemdjita a quitté la Centrafrique pour les camps de réfugiés de Goré, au Tchad. Fuyant les affrontements meurtriers qui opposaient alors les troupes du président Patassé à celles du Général Bozizé. Il a vu l’aide humanitaire diminuer au fil du temps. Tandis que l’insécurité persiste dans son pays. « Nuit et jour, il y a des coups de fusil qui sont passés par là. Donc, les réfugiés ne veulent même pas traverser et repartir dans leur pays d’origine. Au début, il y a une prise en charge totale, et maintenant comme il y a trop de réfugiés, il n’y a pas l’enveloppe qui peut quand même couvrir tous les réfugiés. Donc maintenant, ce sont les réfugiés eux-mêmes qui se prennent en charge, en cultivant de la terre pour avoir accès à la nourriture. »Se prendre en charge comme le fait Nestor Mouadoum arrivé lui aussi en 2003 et qui dans sa parcelle cultive des arachides. Le Tchad, régulièrement cité par l’ONU comme un modèle en matière d’asile a fourni des terres aux réfugiés. Problème, les sols s’épuisent au fil du temps et les rendements baissent : « Ça fait 20 ans que je travaille ces deux mêmes hectares. Au départ ça marchait très bien, mais aujourd’hui la terre s’est appauvrie et je ne gagne pratiquement plus rien.  Avant sur un hectare, on pouvait récolter 30 à 33 sacs. Aujourd’hui, c’est à peine si on s’en sort avec 8 sacs », explique-t-il.Par conséquent, l’insécurité alimentaire menace. Dans certaines zones le taux de malnutrition atteint les 42% selon le Programme alimentaire mondial qui manque cruellement de financement, depuis le début de la crise au Soudan. « Il ne faut pas oublier le sud du Tchad, bien que la tension soit braquée à l’est. Le Programme alimentaire mondial aurait besoin de 182 millions de dollars, d’urgence, sur les six prochains mois afin de continuer cette assistance alimentaire au niveau des réfugiés, ainsi que des populations vulnérables. Si on ne les reçoit pas, on est obligé d’arrêter l’assistance » indique Zomamisoa Rafeno, cheffe du PAM à Goré.Un sondage réalisé par le HCR, indique que près de la moitié des réfugiés centrafricains ne souhaite pas rentrer dans leur pays d’origine, même s’il retrouve la stabilité. À lire aussiTchad: les réfugiés centrafricains craignent d’être oubliés (1/2)
7/12/20232 minutes, 21 seconds
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Tchad: les réfugiés centrafricains craignent d’être oubliés (1/2)

Entouré de pays en crise, le Tchad vient d’adopter une loi particulièrement progressive et cité par l’ONU comme un modèle en matière d’asile. Un modèle toutefois menacé par l’afflux exponentiel de réfugiés soudanais. Les humanitaires lancent un appel à l’aide pour soutenir les autorités de Ndjamena et ne pas abandonner les 600 000 autres réfugiés déjà présents dans le pays, comme des Camerounais fuyant les exactions de Boko Haram à l’ouest, mais aussi plus de 120 000 Centrafricains au sud. De notre envoyé spécial à Goré,Elasko Sirikizi est couturier, père de quatre enfants. Depuis dix ans la guerre civile déchire son pays, la Centrafrique. Il a perdu l'usage de ses jambes après cinq années d’errance dans la brousse. C’est sa femme l’a transporté jusqu’ici  sur son dos. « Même en venant là, on a essayé de forcer madame, on a violé madame... À chaque fois […] elle se rappelle des faits. C'est moi qui la console à chaque fois », explique-t-il. Il survit grâce à sa machine à coudre qu’il loue 5 000 francs CFA par mois, l’équivalent de 7,50 euros.  « La seule activité du quotidien qui me donne à manger, c'est [uniquement la couture]. Maintenant c’est comme ça. Les gens vont tous vaquer à leurs travaux champêtres parce qu'il pleut, donc il n’y a pas de clients. […] On gère seulement la galère, c'est comme si on est doué pour ça... », ajoute-t-il. « Je dois me débrouiller... »Elasko Sirikizi poursuit : « Le marché, c'est à presque 800 mètres... Je ne peux pas me déplacer un km, je ne peux pas. Donc là où je suis là, c'est comme si j’étais prisonnier de la vie », se désole-t-il.Un marché construit au fil des ans par d’autres réfugiés comme Amadou Yago, un boutiquier qui a fui les raids de la Séléka en 2014. « Dieu merci, ici, je suis en sécurité. Mais bien sûr, je pense toujours à mon pays, on ne peut jamais oublier le pays où l’on est né. Mais jusqu’ici la Centrafrique n’est pas stable, donc je dois me débrouiller ici en vendant les quelques produits que vous voyez. »Un appel pour une aide internationale pour le TchadFaute de retour possible, le HCR tente de soutenir les réfugiés dans leurs activités. Mais depuis le début de la crise au Soudan et l’afflux massif de réfugiés vers le Tchad, les humanitaires ont redirigé vers l’est l’essentiel de leurs moyens matériels financiers et humains.« Si on ne veut pas qu'une crise humanitaire majeure survienne au Tchad, en plus de la crise humanitaire et sécuritaire qui se déroule au Soudan, c'est maintenant, vraiment maintenant, qu'une aide importante de la communauté internationale pour le Tchad et pour les organisations humanitaires est nécessaire », martèle Jérôme Merlin, chargé des opérations au Tchad pour le Haut Commissariat aux réfugiés.Les réfugiés centrafricains regardent avec inquiétude vers leur pays où se prépare un référendum constitutionnel controversé qui devrait permettre au président de briguer un troisième mandat et pourrait entraîner de nouvelles violences selon l’ONU.
7/11/20232 minutes, 17 seconds
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Centrafrique: les camps de réfugiés soudanais délocalisés à Birao (2/3)

En Centrafrique, plus de 10 600 réfugiés soudanais se sont réfugiés à Am-Dafock, ville frontalière située dans le nord-est du pays depuis le début du conflit au Soudan. Alors que les combats s’approchent dangereusement de la frontière, le Haut Commissariat des Nations unies pour les réfugiés (HCR) a réinstallé plus de 1 000 d'entre eux à 65 km, notamment dans la ville de Birao. Les opérations se poursuivent compte tenu du nombre des demandeurs d’asile qui augmente de jour en jour. L’autorisation a été donnée il y a un mois par le gouvernement centrafricain. De notre envoyé spécial à Birao,Assis sur une natte à côté de son abri, une simple bâche, Hallasan se tient le menton et secoue la tête. Ce fermier de 75 ans a perdu sa plantation de riz et une centaine de bœufs dans le village soudanais de Yala.Sa femme est décédée le 28 mai, victime d’éclats d'obus qui se sont abattus sur sa concession. Il est venu se mettre à l'abri ici à Birao, seul avec ses quatre enfants. « Je traverse un moment très difficile avec mes enfants. J’ai été obligé de fuir parce que j’ai tout perdu. Heureusement le HCR nous a recueillis et nous a mis en sécurité à Birao. On nous donne à manger : des haricots mélangés au riz. Nous avons besoins de nattes et de couvertures, c’est tout ce qui nous manque pour l’instant. »Ce camp des réfugiés d'une superficie de 100 hectares a été baptisé Corsy en langue locale Cara, ce qui signifie bienvenue en français. Ces quatre dernières semaines, le HCR et les autorités locales ont réussi à installer plus de 1 000 réfugiés. « Nos frères soudanais ont subi beaucoup de choses. Le gouvernement s'organise pour essayer de voir quelles [sont les] possibilités pour ces demandeurs d'asile », explique David Margoé, le secrétaire général de la préfecture de Birao.À écouter aussiCentrafrique: la situation sécuritaire à Birao (1/3)Une prise en charge jusqu'à la fin du conflitLes habitants de Birao ont accueilli à bras ouverts ces Soudanais en détresse. Ils pourront rester à Birao jusqu’à la fin du conflit avant de pouvoir regagner leur pays.« À la prise en charge faite dès leur arrivée, ils reçoivent un kit composé de nattes, bâches, couvertures, sceaux... », indique Anicet Polycarpe Ngaïdono, technicien au HCR. « Tous les articles nécessaires pour leur survie ici sur le site. Et par la suite, ils reçoivent des vivres de la part du PAM. Il y a des latrines et des douches qui sont construites tout autour du camp pour permettre aux réfugiés d'avoir des lieux d'aisance. »Tous les réfugiés enregistrés sont des civils. La sécurité du camp est assurée par les forces de sécurité intérieure centrafricaine. Alors que les combats se poursuivent au Soudan, d'autres abris sont en construction pour anticiper l’arrivée d’autres vagues de réfugiés.
7/10/20232 minutes, 13 seconds
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Centrafrique: la situation sécuritaire à Birao (1/3)

En Centrafrique, les habitants de la Vakaga, préfecture située au nord-est du pays, font face ces derniers mois à une recrudescence des violences et de l'insécurité. Chassés de Birao par l’armée nationale et ses alliés en 2020, des hommes armés opèrent désormais par petits groupes et en mode coupeurs de routes. Il est risqué de circuler au-delà de 20 km de Birao sans être escorté par des forces loyalistes et des soldats onusiens. Commerçants, cultivateurs et même les agents de l'État se font régulièrement braquer. De notre envoyé spécial à Birao,Tout au long des 12 km de route qui mène à l'aérodrome de Birao, les habitants vivent comme dans une prison à ciel ouvert. Les quelques commerçants que nous croisons, marchent d’un pas pressé… la peur au ventre. Les hommes armés sont partout dans la brousse, ils peuvent surgir à tout moment pour commettre leurs exactions.« J’ai été braqué ici, il y a deux semaines », explique Israël, un commerçant. « Un autre commerçant a aussi été dépouillé de ses marchandises il y a trois jours. Tous les jours, on tombe dans les filets de ces malfrats. Ils nous prennent des sommes d'argent, des marchandises et ils nous violent aussi. Si tu veux t'opposer à eux, ils te torturent et te tuent. On est en danger de mort, mais on n'a pas le choix. » Pas de pistes précisesQuelques mètres plus loin, nous pénétrons dans une forêt dense. Il y règne un silence de mort. Il n'y a pas de pistes précises, mais les agriculteurs, commerçants et passants cheminent entre les arbres, les hautes herbes et traversent des mares d'eau avec des ânes surchargés de marchandises.« Le conflit soudanais nous a causé beaucoup de problèmes », raconte Hilaire, un agriculteur. « C’est la période des récoltes. Je dois ravitailler la ville avec le manioc, l’igname, l’arachide, le maïs et des légumes. Si je reste à la maison, les gens vont mourir de faim. Je suis obligé de prendre les risques. C’est pourquoi je demande au gouvernement de voler à notre secours. » Les autorités locales garantes de la sécuritéLes forces armées centrafricaines sont en sous-effectif et n'ont pas les moyens de faire des patrouilles dans les villages périphériques. Pour l'instant, les autorités locales se contentent de garantir la sécurité qui règne à Birao-Centre. « Dans la ville de Birao, il y a la sécurité. Vous allez trouver les FACA, [...], et la force Minusca qui est présente dans la ville », assure David Margoé, le secrétaire général de la préfecture de Birao. Ces trois derniers mois, la frontière centrafricano-soudanaise est devenue poreuse, ce qui favorise la circulation des armes et des bandits dans la Vakaga. Les hommes armés dictent leurs lois... La circulation des biens et des personnes est gravement menacée. 
7/9/20232 minutes, 9 seconds
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Guinée: Djibril Tamsir Niane, des archives pour l'histoire ouest-africaine (3/3)

Troisième et dernier volet de notre série sur Djibril Tamsir Niane, historien guinéen qui fut l'un des plus grands spécialistes du Moyen-Âge ouest-africain. Une journée d'étude lui a été consacrée récemment au laboratoire LAM (Les Afriques dans le Monde) à Bordeaux, alors que ses archives font l'objet d'un important travail de classement et de numérisation. C'est justement à ses archives que nous nous intéressons aujourd'hui. Elles illustrent parfaitement l'importance, pour l'écriture de l'histoire africaine, des documents conservés par les grandes figures intellectuelles du continent.
7/8/20232 minutes, 15 seconds
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Guinée: Djibril Tamsir Niane, l'œuvre d'un historien majeur (2/3)

Suite de notre série sur Djibril Tamsir Niane, cet historien guinéen qui a été l'un des plus grands spécialistes du Moyen-Âge ouest-africain. Une journée d'étude lui a été consacrée récemment au laboratoire LAM (Les Afriques dans le Monde) à Bordeaux, alors que ses archives font l'objet d'un important travail de classement et de numérisation. Dans ce deuxième volet, nous nous intéressons justement aux recherches de Djibril Tamsir Niane et à son apport à l'histoire africaine. 
7/7/20232 minutes, 14 seconds
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Guinée: Djibril Tamsir Niane, le parcours de l'homme [1/3]

Djibril Tamsir Niane, intellectuel guinéen aujourd'hui décédé, a été l'un des plus grands spécialistes du Moyen-Âge ouest-africain. Une journée d'étude lui a été consacrée récemment au laboratoire LAM (Les Afriques dans le Monde) à Bordeaux, alors que ses archives font l'objet d'un important travail de classement et de numérisation. Dans ce premier volet d'une série en trois épisodes, nous revenons sur le parcours de l'homme. Un parcours marqué par l'enthousiasme des indépendances et la désillusion de l'expérience carcérale sous Sékou Touré.
7/6/20232 minutes, 13 seconds
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Sierra Leone: la kush, cette drogue, stigmate de la pauvreté des jeunes

En Sierra Leone, le président réélu Julius Maada Bio va devoir composer avec la pauvreté endémique, l’inflation à 43% et le haut chômage des jeunes, estimé à 70% de cette population… Sur ce terreau, une nouvelle drogue prospère, qui fait des ravages parmi les moins de 39 ans [la fourchette qu’ils prennent pour les « jeunes » est jusqu’à 39 et non pas 35] : la kush, un mélange très nocif de cannabis de synthèse et de produits chimiques. Avec notre envoyée spéciale à Freetown, Marine JeanninDans le vacarme de la station service de Lumley se croisent tous les taxis, moto-taxis et tricycles de ce quartier prisé des touristes. Ici, les fumeurs de kush tentent de se faire discrets. Ils savent que leur présence n’est que tolérée… et que les passants ont vite appris à les repérer. « Les jeunes qui prennent de la kush ici, ils ont les pieds gonflés, ils sont toujours sales, ils ne prennent pas soin d’eux, et ils se comportent comme s’ils étaient fous », énumère un conducteur de moto-taxi.Ce sont dans l’immense majorité des jeunes hommes ou des adolescents, qui travaillent ici comme « batoman », dit-on en krio. Ce sont eux qui aident les taxis à trouver des clients, et vice versa… En échange de leurs services, ils reçoivent quelques billets froissés… Qui disparaissent tout aussi vite. Le prix d’une dose ? « 5 000 leones », la monnaie locale, soit 23 centimes d’euros. Une bande d’amis s’est rassemblée. Tous veulent témoigner. Le premier a 21 ans, porte un T-shirt vert à l’effigie du président réélu Julius Maada Bio. Pas par conviction, mais « parce qu’il n’a pas d’autre vêtement », précise-t-il. Il fume de la kush depuis ses 16 ans. « Mes frères et moi, on prend tous de la kush. Regardez comme on est maigres ! Quand on fume de la kush, on ne fait plus rien. On ne dort plus, on ne mange plus, on ne travaille plus. On reste juste debout dans la rue avec la tête qui ballote. »« On souffre trop, dans ce pays, et c’est pour ça qu’on fume de la kush »Avec toujours, la même motivation : oublier l’espace d’une demi-heure, le temps que durent ses effets, la dureté de leurs conditions de vie. « On souffre trop, dans ce pays, et c’est pour ça qu’on fume de la kush. Le gouvernement ne s’occupe pas des jeunes. On dort à la rue, il n’y a pas d’emploi, rien à manger. Tout est devenu si cher ! Même le garri [la semoule de manioc] coûte cher, maintenant ! » L’un de ses amis lui coupe la parole pour crier : « Si j’avais un travail, je vous promets que je ne fumerais plus jamais de kush ! Si seulement j’avais un travail ! »La kush est arrivée sur le marché sierra-léonais en 2018, mais c’est pendant la pandémie de Covid-19 que sa popularité a explosé… en corrélation directe avec l’aggravation de la pauvreté. « Nos jeunes se droguent parce qu’ils n’ont plus d’espoirs, explique Alhassan Jalloh, chef de programme à la Foundation for Rural and Urban Transformation (FoRUT). Ils n’ont plus d’options. S’ils fument de la kush, c’est pour tomber dans un sommeil profond. (il a un rire nerveux) L’intérêt de cette drogue, c’est qu’elle les détache totalement d’une réalité qu’ils ne supportent pas. »Il n’existe pas de statistiques nationales sur l’usage de kush… Mais 90% des hommes admis aux urgences psychiatriques de Freetown sont des consommateurs. La substance est extrêmement nocive à la fois pour la santé mentale, et pour la santé tout court, disent les experts… Avec un risque d’overdose élevée, en particulier parce qu’on ignore sa composition, explique Ibrahim Kargbo, de l’Agence nationale de lutte contre la drogue. « C’est du cannabis de synthèse qui est mélangé avec différents produits chimiques ou médicamenteux, comme du Tramadol. On connaît bien les effets du cannabis naturel, mais la kush est une nouvelle substance psychoactive. Avant, les Sierra-Léonais fumaient du cannabis d’importation. Mais la kush contemporaine est préparée localement, sous différentes formes. C’est ce qui la rend aussi dangereuse. »La police sierra-léonaise a conscience de l’ampleur du problème. Plusieurs cargaisons de kush ont déjà été saisies sur le port Elizabeth II... Mais pour le moment, les enquêtes sont au point mort. Et l’identité des cartels qui inondent le marché reste un mystère.
7/5/20232 minutes, 16 seconds
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Ouganda: les anciens kidnappés des ADF se rappellent [3/3]

Suite et fin de notre série en Ouganda, où le massacre attribué au groupe armé des ADF, la nuit du 16 juin, dans une école de la ville de Mpondwe, a réveillé de vieux souvenirs. 43 morts et des élèves enlevés et emmenés en RDC par les rebelles, toujours recherchés par les forces de l'ordre. Dans cette région aux alentours du Rwenzori, où les ADF menaient de nombreuses opérations dans les années 1990, certains survivants des attaques de l'époque racontent. De notre envoyée spéciale à Rwenzori,Au petit matin, après l’attaque menée par de présumés ADF à Mpondwe, Biira Medress était en train de se préparer quand son frère l’a appelé pour lui apprendre la nouvelle. « Il m’a dit, Medress, est-ce que tu sais ce qu’il s’est passé ? Je lui ai dit que non, puis il m’a raconté qu’ils avaient tués des élèves à la machette. Alors je lui ai dit que j’étais en train de préparer ma fille pour l’école, il m’a demandé de ne pas prendre le risque, de rester à l’intérieur et de fermer les portes. Depuis, je n’ai pas pu trouver le sommeil, parce que je pensais à ce qui m’étais arrivée quand j’ai été enlevée », explique-t-elle.Kidnappée en 1999, quand elle était encore adolescente, la mère de famille a passé plusieurs mois à travailler comme domestique dans un camp du groupe armé avant de s’échapper. Comme elle, à l’époque, beaucoup d’enfants ougandais de la région du Rwenzori étaient enlevés par les ADF. C’était le cas d’Edson Bomenze. « Ils avaient des uniformes comme ceux de l’armée. Ils m’ont entouré et m’ont emmené au Congo. Les ADF voulaient que nous, les civils, portions leurs bagages pour qu’ils puissent marcher… Ça a duré jusqu’à ce que les UPDF (l’armée ougandaise) nous retrouvent. Nous sommes quelques-uns à avoir survécu », raconte-t-il.Une région appauvrie par les conflitsLe commerçant de 53 ans a passé trois semaines en 1999 parmi les ADF. Comme beaucoup d’anciens kidnappés, l’attaque du 16 juin dernier avec un bilan de 43 morts l’a surpris par la violence des assaillants. « Les ADF d’avant attaquaient surtout les casernes militaires, cette fois c’est les institutions civiles et les populations. S’ils disent vouloir combattre le gouvernement, ils devraient attaquer des combattants, pas des civils, des enfants dans une école », dit-il.La région ougandaise du Rwenzori a jusqu’au début des années 2000 été marquée par la présence de plusieurs groupes armés, dont les ADF et les NALU avant eux. Des groupes qui recrutaient à l’époque largement dans cette région éloignée de la capitale, appauvrie par les conflits. « Toutes ces choses ont amené une grande pauvreté. Nos jeunes garçons n’ont rien du tout, ils n’ont pas de travail, ils peuvent facilement être recrutés par ces rebelles. Donc nous avons peur que si ces choses continuent, elles amèneront notre jeunesse dans la mauvaise direction », indique l’ancien Premier ministre du royaume du Rwenzururu, Gad Mbayahi.Le 30 juin, deux semaines après le massacre, le Royaume-Uni a mis à jour ses conseils de sécurité en Ouganda, affirmant que des « terroristes étaient très susceptibles d’essayer de mener des attaques » dans le pays.
7/5/20232 minutes, 15 seconds
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Ouganda: à Kanyatsi, ancien passage des ADF vers l'Ouganda, la population se mobilise [2/3]

En Ouganda, les mesures de sécurité ont été renforcées après l’attaque d’une école secondaire par de présumés ADF, le 16 juin dernier à Mpondwe, à proximité de la frontière avec la RDC. Pour les habitants, le drame a fait ressurgir de difficiles souvenirs des années 1990, lorsque le groupe rebelle, à l’origine ougandais, mais basé depuis plus d’une vingtaine d’années dans l’est de la RDC, menait des attaques dans la région ougandaise des montagnes du Rwenzori. Dans le village de Kanyatsi, au cœur de la chaîne de montagnes et passage historique des ADF, la population se mobilise pour se protéger. De notre envoyée spéciale à Kanyatsi,Surplombant la rivière Tako, Edson Njike, l’un des habitants de Kanyatsi, contemple la vallée défrichée par la communauté depuis l’attaque attribuée aux ADF à Mpondwe, à une dizaine de kilomètres de son village, le 16 juin dernier.« À la vue des abords de notre rivière, nous avons pensé que notre sécurité n’était pas garantie. Les hautes herbes pouvaient servir de cachettes pour les rebelles. C’est pour ça que nous avons décidé de les couper. »La rivière marque la frontière, très poreuse dans cette région montagneuse du Rwenzori, entre l’Ouganda et la RDC. Pour le maire de Kanyatsi, Kule Milton, l’attaque de Mpondwe a réveillé de nombreux mauvais souvenirs.« Pour entrer, ces groupes passent toujours dans notre zone, depuis 1989. Nous avons perdu des habitants, et ce qui s’est passé récemment, on s’attendait à ce que ça se passe aussi ici. Tout le monde avait peur. Certains ont même commencé à dormir ailleurs. Mais nous avons mis en place des mesures dans la communauté, maintenant, ils sont revenus à la normale. »Un village déjà ciblé par le passéDans le passé, plusieurs groupes rebelles attaquaient fréquemment le village : la mémoire de neuf responsables locaux tués en 1990 par l’insurrection NALU, avant leur ralliement aux ADF, reste dans les esprits. Les ADF avaient également occupé le village pendant plus d’une semaine en 1996, avant d’être délogés par les militaires ougandais. Désormais, face-à-face et séparés par la rivière, les habitants des deux côtés de la frontière communiquent toute information sécuritaire. À Kanyatsi, si les déploiements des forces de l’ordre ont été renforcés, des patrouilles sont aussi organisées par les habitants.« Ils ont organisé des groupes dans certaines zones pour monter la garde. Ici, nous prenons des précautions et nous avons intensifié la sécurité. Les personnes que nous ne connaissons pas, nous les arrêtons. Nous avons même commencé à fermer tôt, vers 20 ou 21h. On ferme les bars pour que la sécurité puisse se déplacer et voir la zone le mieux possible. »Le défrichage de la rivière doit désormais continuer dans d’autres villages du Rwenzori, afin d’éviter que le groupe rebelle ne reprenne ses routes historiques.
7/3/20232 minutes, 12 seconds
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Ouganda: face à la menace des ADF, la frontière avec la RDC placée sous sécurité renforcée [1/3]

En Ouganda, le massacre attribué aux ADF de 43 personnes le 16 juin dernier dans l’école secondaire de Mpondwe, à seulement quelques kilomètres de la frontière avec la RDC, a marqué la région, depuis de longues années épargnée par ces attaques. Depuis, les opérations de sécurité se sont multipliées pour éviter de nouveaux assauts par le groupe rebelle qui a prêté allégeance à l’État islamique en 2019. De notre correspondante à Kampala,À quelques mètres du poste de Mpondwe, Evelyn Kimadi se prépare comme tous les jours à traverser la frontière vers Kasindi, en RDC, pour vendre son stock de bananes plantains. Après l’attaque de l’école secondaire par de présumés ADF, elle a attendu plusieurs jours avant de recommencer à travailler.« Le commerce a repris, mais pas au même niveau qu’avant. Ces jours-ci, la règle est de revenir de ce côté à 18 heures. Avant, quand on allait en RDC, on se sentait en sécurité. Mais maintenant, on a peur », affirme-t-elle.De nouveaux déploiements de police et de militaires sont venus renforcer la sécurité autour de la frontière. Saiti Bwambale transporte lui aussi tous les jours des marchandises en RDC. Selon lui, depuis le massacre, les contrôles des commerçants ont été renforcés : « Nous traversons, mais la sécurité a été durcie, parce que même si on nous connaît, on nous demande nos papiers, qui on est, où est-ce que nous allons. »Multiplication des réunions des responsables de huit circonscriptions à proximité de la frontière, enregistrement des visiteurs inconnus dans les différents villages, arrestations d’au moins une vingtaine de personnes, dont le directeur de l’école attaquée ainsi que le professeur principal, depuis libérés sous caution. Faire remonter les informationsSelon le lieutenant Mate Magwara, l’un des responsables sécuritaires de la zone, des leçons ont été tirées après le drame, notamment pour le renforcement de la protection des établissements scolaires. « Par exemple, nous assurons que le partage des informations des résidents aux organes de sécurité soit plus rapide, et qu’une école, au lieu d’avoir un seul garde, puisse en avoir trois ou quatre, pour que le processus de secours et d’alerte, soit renforcé. »La participation des populations dans le renforcement de la sécurité est primordiale pour faire remonter toute information, explique Sunday Peter Kakule, à la tête du groupe qui rassemble les leaders de huit circonscriptions, alors que les enquêteurs s’interrogent sur les liens locaux du groupe armé. Mais selon lui, il faut aller encore plus loin.« Nous proposons aussi que, comme nous sommes à la frontière avec la RDC, nous, les leaders locaux et les équipes de sécurité, nous tenions des réunions transfrontalières. En échangeant, nous obtiendrons des informations. Ce que nous voulons voir, c’est notre commerce transfrontalier renforcé, sans aucune perturbation », assure-t-il.Le 11 juin, moins d’une semaine avant le massacre de l’école de Lhubirira, de présumés ADF avaient déjà perpétré une première attaque à Kasindi en RDC, juste de l’autre côté de la frontière.
7/2/20232 minutes, 30 seconds
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«Révolutionnaires», l'histoire du Congo vue par Hassim Tall Boukambou

C’est la fin d’un travail de mémoire de longue haleine. Le réalisateur, documentariste et archiviste congolais Hassim Tall Boukambou vient de présenter au public le troisième et dernier volet du film Révolutionnaires. Ce film qui s’appuie sur de nombreuses images d’archives, raconte l’histoire politique du Congo entre 1966 et la conférence nationale de 1991.
7/1/20232 minutes, 18 seconds
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Maroc: un forum sur la migration pour réfléchir au phénomène dans la région

Au Maroc, un an après le massacre de Melilla, où près de 30 migrants ont été tués et 70 autres sont encore portés disparus en tentant de passer la frontière entre le royaume et l’Espagne, la ville voisine de Nador a accueilli le Forum social maghrébin des migrations. Un grand rassemblement d’ONG, de chercheurs et de militants des droits de l’homme pour penser la migration dans la région. Mais, alors que le nombre de morts ne cesse de s’accroître dans les eaux de la Méditerranée, les participants pointent du doigt les politiques de l’Union européenne et des pays d’Afrique du Nord.
6/30/20231 minute, 58 seconds
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Côte d'Ivoire: à Abidjan, les cosplayeurs rêvent de mangas africains

En Côte d’Ivoire, les adeptes de cette pratique, qui consiste à jouer le rôle d’un personnage de fiction en adoptant son caractère et sa tenue, sont de plus en plus nombreux. Ces fans de mangas, de dessins animés et de jeux vidéos, principalement asiatiques ou états-uniens, souhaiteraient également voir émerger de grandes figures héroïques africaines. De notre correspondant à Abidjan,La petite remise située dans le quartier d’Angré ressemble à une caverne d’Ali Baba pour ces amateurs de cosplay. On y trouve des katanas, des casquettes, ou encore des bijoux à la symbolique bien précise. Si le cosplay a déjà une longue histoire en Asie ou en Europe, il s’est développé plus récemment en Côte d’Ivoire. Ses adeptes sont parfois la cible de moqueries ou de commentaires négatifs, explique Magalie Bah, l’organisatrice de l’Ivoire Cosplay Festival, le premier du genre en Côte d’Ivoire.« C'était pour montrer aux gens qu'on avait la possibilité d'être ce qu'on veut. C'est notre passion. Donc, si on a envie de se déguiser en un personnage, je ne vois pas pourquoi d'autres personnes vont venir nous juger pour dire “ça ne se fait pas, ça pour les enfants, etc.” Moi, je dis que ce n’est pas que pour les enfants parce qu'il y a beaucoup de réalités dans les mangas, ils nous apprennent beaucoup de choses […] de la détermination et la confiance en soi. Moi, je pense que c'est un exemple à suivre. » Parmi les inconditionnels, beaucoup d’anonymes – de diverses classes sociales jurent les membres du groupe – mais aussi des figures plus connues. Kidzy s’est déjà un fait un nom dans le milieu du rap ivoire, elle est aussi férue de manga. Avec sa longue veste noire et ses bottes qui montent jusqu’au genou, elle est habillée sur le modèle de Sano Manjiro, le personnage principal de Tokyo Revengers.À lire aussiPourquoi le manga japonais séduit la planète entièreFusion de la culture manga et la culture africaineFan de culture nippone, elle rêve toutefois de découvrir des animations africaines. « Si les Africains en général décident de se lancer dans l'animation, ça serait très intéressant qu'ils décident de faire, par exemple, un manga qui représente nos héros africains, Soundiata KeIta, Soumaoro Kanté. S'il décidait de faire un truc comme ça, je pense qu'on oublierait complètement les mangas pour se concentrer sur ça. »À ses côtés, Serge Dali : avec son bomber jaune canari, il est grimé en Naruto, le célèbre héros de manga. Il rappelle que la fusion entre l’animation asiatique et africaine connaît ses prémices avec le succès de Djossi Heroes de Nandy Diabaté, un film d’animation où les vendeurs de rue abidjanais deviennent des super héros. « C'est en ce sens-là qu’Ivoire Cosplay Festival veut créer une grande communauté de personnes fans de cosplay qui pourront donner la force à la fusion du manga et de la culture africaine. »Une dizaine de boutiques spécialisées dans le cosplay ont ouvert leurs portes ces dernières années en Côte d’Ivoire. Elles sont le plus souvent tenues par des passionnés.À écouter aussiAvez-vous succombé à la Manga mania?
6/29/20232 minutes, 21 seconds
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Sénégal: les Palor, défenseurs de leur langue menacée

Au Sénégal, une trentaine de langues minoritaires sont menacées de disparaître, dont le palor ; cette langue parlée par 5 à 10 000 locuteurs éparpillés dans plusieurs villages de la région de Thiès, à 50 kilomètres de Dakar. Rencontre auprès de la communauté qui se bat pour que sa langue résiste. 
6/28/20232 minutes, 28 seconds
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Belgique: «Résolution-Métis», où en est-on 5 ans après ?

En 2018, la Chambre des représentants belge a adopté à l’unanimité une résolution sur les Métis de la colonisation. Onze demandes y étaient formulées au gouvernement fédéral concernant des réparations morales et administratives pour la ségrégation et la politique d’enlèvement dont ont été victimes les Métis d’Afrique centrale. Excuses officielles, recouvrement, des actes de naissance manquants, accès aux archives, où en est-on cinq ans après ? De notre correspondante à Bruxelles,En 2019, Charles Michel, alors Premier ministre, reconnaît officiellement la ségrégation ciblée et la politique d’enlèvement forcé dont les Métis ont été victimes sous l’administration coloniale. Il leur présente les excuses du gouvernement, ainsi qu’à leurs familles.Des excuses accueillies avec soulagement par Eveline Schmit, Mmétisse née au Rwanda dans les années 1950. « J’ai été extrêmement touchée par ces aveux, ces excuses. Mais là où cela m’a touché le plus, c’est la partie sur nos mères. Parce qu’enlever des enfants de bas âge à leur mère, cela doit occasionner beaucoup de souffrance. »À lire aussiBelgique : « Métis », le projet de recherche pour retrouver ses originesL’importance des actes de naissanceParmi les autres demandes de réparation, la délivrance d’actes de naissance aux Métis vivant dans un vide juridique depuis leur placement dans des institutions religieuses en Afrique centrale, et pour certains leur envoi en Europe avec un statut d’orphelin. Une dizaine d’actes ont été délivrés jusqu’ici, principalement en région flamande.Une avancée importante selon François d’Adesky, cofondateur de l’association métis de Belgique. « La moyenne d’âge des Métis, c’est 75 ans. Si vous n’avez pas d’acte de naissance, ça cause des problèmes : vous ne pouvez pas vous marier si vous n’avez pas d’acte de naissance. Et si vous avez des héritiers, le notaire n’ouvre pas la succession s’il n’y a pas d’acte de naissance. Et puis, sur le plan psychologique, ne pas avoir d’acte de naissance veut dire que vous avez été un fantôme toute votre existence ! » À lire aussiLa longue lutte des métis de Belgique à la recherche de leurs originesLe besoin d’une « assistance psychologique »Accès facilité aux archives, nouvelle recherche historique sur la question. François d’Adesky estime que la quasi-totalité des demandes est en cours de réalisation, à l’exception de l’érection d’une stèle commémorative sur cette partie de l’histoire coloniale belge.De son côté, Assumani Budagwa, citoyen belge d’origine congolaise, auteur d’un ouvrage de référence sur les Métis, considère que le processus traîne et ne va pas assez loin. « Il y a des Métis qui souffrent psychologiquement de cette ségrégation encore aujourd’hui. Ils ont besoin d’assistance psychologique. Que fait-on pour eux ? Sur la réparation pour les mères encore en vie : aucun effort n’a été fait pour rechercher les mères. Le point sur l’enseignement de l’histoire... Il n’y a rien de concret qui est fait ! »Reste la question polémique des réparations financières, non prévues par la résolution, mais déjà demandées par cinq femmes métisses. Restent également les revendications des associations de Métis restés en Afrique qui demandent la nationalité belge.
6/27/20232 minutes, 24 seconds
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La longue lutte des métis de Belgique à la recherche de leurs origines [2/3]

En 2019, la Belgique a présenté ses excuses aux métis de la colonisation belge pour la ségrégation ciblée et la politique d’enlèvements forcés dont ils ont été victimes. Des milliers d’enfants métis non reconnus par leur père blanc ont été enlevés à leur mère africaine et placés à l’écart de la population dans des institutions religieuses. Depuis, un projet aux archives de l’État leur permet de tenter de faire la lumière sur leur histoire familiale. Mais, de nombreux métis avaient déjà entrepris des recherches depuis bien longtemps et par leurs propres moyens. C’est le cas d’Éveline Schmit.  Sur son téléphone portable, Éveline Schmit fait défiler les photos et les vidéos de sa famille maternelle. Sa demi-sœur, ses oncles et tantes rencontrés pour la première fois, au Rwanda et en Tanzanie l’année dernière. Et, un cliché en noir et blanc de sa mère décédée, qu’elle n’a pas pu retrouver à temps. « Maintenant, quand je pense à ma mère, je la vois, confie Éveline. Ma sœur m'a raconté comment elle était. Quand elle avait un peu bu et qu'elle était avec des voisins, elle disait qu'elle avait un enfant muzungu en Europe. »Muzungu, soit l’étranger, le blanc, le clair… Éveline est née au Rwanda au début des années 50, d’une mère rwandaise et d’un père luxembourgeois employé par l’administration coloniale belge. À l’âge de deux ans, elle est arrachée à sa mère parce qu'elle est métisse. Elle est placée dans une mission protestante à des dizaines de kilomètres de là, dans la région du Kivu dans l’est de la RDC. À l’approche des indépendances, elle est évacuée vers la Belgique, comme quelques centaines d’autres enfants métis, sans véritable autorisation de leur mère. Placée dans un orphelinat à Bruxelles, la fillette est ensuite adoptée par une Américaine et envoyée aux États-Unis.Sur ses papiers, ses origines sont délibérément brouillées. « On m'avait caché une première fois en m'envoyant dans le Kivu, puis une deuxième fois en m'envoyant en Europe, et une troisième fois aux États-Unis, reprend Éveline. Alors, je me suis dit que j'étais perdue et que personne de ma famille n'allait jamais me retrouver. » Ce sont finalement ses voyages répétés au Rwanda et l’aide d’associations de métis, comme Métis du Monde qui lui ont permis, après une vie de recherche, de trouver sa famille à plus de 70 ans.Les archives de l’État, très administratives et surtout fragmentaires, ne lui ont été d’aucune aide. Et, elle aurait aimé que la Belgique en fasse davantage. « Ce que la Belgique aurait pu faire, c'est d'aller eux-mêmes dans les archives pour trouver les membres de notre famille. Nous payer le voyage pour aller les rencontrer et payer des cours pour que je puisse apprendre ma langue maternelle. »Certains métis envoyés en Belgique à la fin des années 50 n’ont pas eu la chance d’Evelyne. Désormais âgés, ils risquent de ne jamais connaître leur famille africaine.À lire aussiBelgique: «Métis», le projet de recherche pour retrouver ses origines [1/3]
6/26/20232 minutes, 27 seconds
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Belgique: «Métis», le projet de recherche pour retrouver ses origines [1/3]

En Belgique, les archives de l’État aident les métis nés pendant la colonisation en Afrique centrale à retrouver leurs racines. Depuis 2019, un projet de recherche, soutenu par le gouvernement, permet aux métis et à leurs descendants de faire la lumière sur leurs origines.  À lire aussiSérie: «Exterminez toutes ces brutes», la colonisation racontée du côté des opprimés
6/25/20232 minutes, 15 seconds
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Centrafrique: les dangers de la «pêche au cocktail toxique»

En Centrafrique, certains pêcheurs ont décidé d’abandonner les techniques classiques et d’attraper le poisson avec des substances toxiques. Ils composent un mélange avec des feuilles, des fruits spécifiques et sauvages de la forêt. Les poissons étouffent et meurent. Les pêcheurs n'ont plus qu'à plonger pour les collecter. Mais cette pratique pose de multiples problèmes : elle a des conséquences néfastes pour l’environnement, mais aussi pour les pêcheurs et les consommateurs. De notre envoyé spécial à Bangui,En plein milieu de la rivière Oubangui, nous croisons l'équipe de Gaël, qui fait la pêche avec une pirogue de 12 mètres. Après avoir délimité la zone de pêche sur un rayon de 30 mètres, l’équipe verse des produits toxiques de fabrication traditionnelle fabriqués. Puis deux d'entre eux sautent dans l'eau. Sébastien, le chef de file, explique cette méthode : « La qualité de cette pêche, nous l’avons hérité de nos ancêtres. Il faut d’abord délimiter la zone de pêche avant de répandre le produit toxique que nous avons préparé dans des bouteilles. Pour obtenir ce produit, nous utilisons des fruits sauvages et des feuilles toxiques que nous composons dans la forêt. Rien que l’odeur peut étouffer les poissons. Nous versons enfin le produit dans l’eau et quoi qu'il en soit, les poissons vont le consommer. S’ils s’étouffent et meurent, les pêcheurs n’ont plus que sauter dans l’eau pour les ramasser. »Si ce système permet aux pêcheurs d’obtenir des poissons avec peu d’efforts, les consommateurs, eux, se plaignent de cette pratique. Eude, qui a récemment mangé des poissons attrapés avec ces potions, témoigne : « Je partais au marché, je me procure des poissons frais que j'avais acheté. Une fois les poissons mangés, j'ai commencé à avoir des malaises et tout a fini par la diarrhée. J'étais obligé de me rendre à l'hôpital pour des soins. En tout cas, c'est un danger sur le plan sanitaire. » Des produits toxiques aux effets négatifs multiplesFace à ce danger public, les médecins tirent la sonnette d'alarme. Jean Amede Mandjeka est nutritionniste : « La pêche est une pratique noble parce que vous recherchez du poisson pour la consommation humaine principalement. Je trouve que ce n'est pas raisonnable de pouvoir utiliser un produit toxique pour attraper un produit alimentaire parce qu'une des premières conséquences est la mort. Ça peut passer par de l'étourdissement, ça peut être aussi des infections au niveau respiratoire, puisqu’on consomme le produit, ça peut être lié à ça. Ça peut aussi entraîner des troubles psychiques, ça peut atteindre les muqueuses, ça peut aussi atteindre une partie de l'œil et rendre aveugle. C'est possible ! Ou alors, créer des perturbations de la vue. »Selon le délégué des pêcheurs du port Sao situé dans le 7e arrondissement de Bangui, une dizaine d'entre eux sont devenus aveugles après avoir pratiqué ce type de pêche. À lire aussiLes produits toxiques
6/24/20232 minutes, 11 seconds
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Centrafrique: l'addiction des jeunes banguissois au «Manga» [1/3]

À Bangui, de plus en plus de jeunes de 15 à 30 ans consomment le tabac broyé pour se guérir de la grippe, la sinusite ou de la morsure d’un serpent. Appelé la prise à sniffer ou encore le « Manga », en langue nationale Sango, ce produit est fabriqué à base de feuilles du tabac, de bicarbonate de sodium et de natron. Fortement addictif pour les jeunes, on le retrouve sur tous les marchés de la capitale à 50 francs CFA. Mais sa consommation est néfaste pour la santé.  À lire aussiJeunes et addictions: conseils pour arrêter ou pour aider un proche
6/22/20232 minutes, 13 seconds
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Côte d’Ivoire: des stations météo dans chaque région pour anticiper les événements climatiques extrêmes

Le sommet pour un nouveau pacte financier mondial s’ouvre à Paris aujourd’hui. Il entend apporter des réponses aux difficultés de financement que rencontrent les pays du Sud, notamment dans la lutte contre le réchauffement climatique. Alors que l’aide au développement est l’objet de vives critiques, les pays riches souhaitent revoir les mécanismes de financement pour les pays qui en ont le plus besoin. La Sodexam, l’agence météorologique ivoirienne, se dote de nouveaux outils pour permettre aux populations de mieux se préparer aux épisodes pluvieux intenses ou de sécheresses.
6/21/20232 minutes, 24 seconds
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Tunisie: les oliviers millénaires, joyaux du patrimoine tunisien

En Tunisie, les oliviers millénaires font la fierté des habitants dans le nord et le sud du pays. Mais difficile de réellement mesurer l’âge de ces arbres dont la longévité est surtout associée à des histoires, du patrimoine et quelques légendes. Dans un pays où l’arbre est sacré, car l’huile d’olive représente 40 % des exportations agro-alimentaires, les oliviers millénaires sont aussi un moyen de sensibiliser à la protection de l’environnement et au patrimoine. De notre correspondante à Tunis,Il est impossible de manquer l’olivier millénaire d’Echraf, un hameau au nord-est de la Tunisie. Sa présence fait la fierté du village et l’arbre en grandeur nature est imposant… Son âge est de 2500 ans d’après une datation effectuée par l’institut français du monde de l’olivier.Selon Mohamed Ayed, membre de l’association qui protège l’arbre, il fait l’objet de nombreuses croyances. « Selon aussi le mythe, ils disaient que les Berbères ou la population originale de cet endroit-là, l’un de leurs dieux fait la prière aux arbres, donc ils respectent beaucoup l’arbre. Après, cette tradition a été transmise d’une génération à une autre. »Protégé par les saintsDes mausolées de saints ont été également construits près des oliviers millénaires et centenaires de la région, explique Abdallah Getari, 84 ans et instituteur à la retraite. « Il y a le marabout ici du saint Salah près de l’olivier d’Echraf, donc personne n’ose toucher à l’olivier, car on estime que sa longévité a été protégée par les saints ».Wahida, 52 ans et styliste modéliste, est venue prendre des photos de l’arbre. « Il est splendide. J’en ai parlé déjà à des amis en France, j’ai envoyé des photos et je trouve que c’est important de le faire connaître, ça fait partie de la valeur du patrimoine, je pense. »Des branches étendues sur 2 000 mètres carrésDans le sud tunisien, à Tataouine, un autre olivier, en plein milieu du désert, près d’un village berbère, aurait près de 900 ans, selon les récits des historiens. Ses branches s’étendent sur 2 000 mètres carrés et il est sacré, comme l’explique Redouane Herrer, un commerçant.« Quand j'étais jeune, je me souviens que pendant la saison des olives, nous allions ramasser les olives et nous les mettions dans de grandes cuves pour les faire macérer pendant 20 à 25 jours. Parfois, nous construisions même une tente ou un abri pour rester sur place. C’est très important pour nous d’entretenir l’arbre, même pendant le mois de ramadan. » Symbole de résilienceSelon Kamel Gargouri, professeur à l’institut national de l’olivier, si ces arbres sont difficiles à dater avec exactitude faute de pouvoir couper leur tronc, leur valeur reste très importante sur le plan écologique. « Ces oliviers très vieux renferment le patrimoine génétique originel de l’olivier cultivé en plus de l’olivier sauvage. Ils retiennent le sol, ils sont un lieu d’ancrage et de diversité biologique dans diverses régions, surtout dans les régions arides. »Les oliviers sont connus pour leur résilience. Il en existe plus d’une soixantaine de variétés en Tunisie qui est le troisième plus gros producteur d’huile d’olive au monde
6/20/20232 minutes, 29 seconds
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Rwanda: dans le district de Rubavu, la vie des déplacés, plus d'un mois après les inondations

Au début du mois de mai, des pluies torrentielles ont provoqué inondations et glissements de terrain dans plusieurs provinces du Rwanda. Des intempéries mortelles, avec 135 décès enregistrés et plusieurs milliers de déplacés climatiques. Un mois et demi plus tard, reportage dans le district de Rubavu, à l'extrême ouest du pays, frontalier avec la RDC, l'un des districts les plus touchés par les inondations. De notre envoyée spéciale à Rubavu,Dans la nuit du 2 au 3 mai dernier, Angelique Mukashima a été réveillée par la montée des eaux, qui ont envahi sa maison en quelques minutes. « J’ai dit à mon mari qu’on était attaqué par le Sebeya. En arrivant au salon, l’eau m’arrivait au cou. On a dû passer par la fenêtre, et la maison s'est détruite quand on est sorti », raconte Angelique Mukashima.Toutes les affaires de la jeune mère ont été détruites. Après quelques semaines dans un camp temporaire, la famille a trouvé, grâce à une aide financière pour les déplacés, une nouvelle maison, en hauteur, protégées de la rivière Sebeya, pour recommencer une nouvelle vie. « Avant les inondations, je n’avais pas de travail régulier. Maintenant, je vais continuer de chercher du travail, surtout que ma nouvelle maison est au bord de la route. Alors, je vais continuer et chercher du travail », poursuit-elle.► À lire aussi : Inondations au Rwanda: les infrastructures durement impactéesDes logements qu'il reste à évacuerDans le district de Rubavu, plus de 1 500 maisons ont été endommagées par les inondations. D’autres habitations en zones à risque, trop proches de la dangereuse rivière Sebeya, doivent encore être évacuées. C’est le cas dans le secteur de Nyundo, de la maison de Donatille Mukankusi, à quelques mètres à peine du cours d’eau.« Là où il y a une croix, on ne va plus pouvoir y habiter, même si nous n’avons pas encore trouvé le moyen de partir. Le problème que nous avons, nous qui habitons ici, si on quitte nos activités, elles vont revenir à qui ? Nous sommes là, nous attendons la réponse qu’on va nous donner », se demande Donatille Mukankusi.► À écouter aussi : Rwanda: à Rubavu, les cultures de thé impactées par les inondationsPrès de 6 000 maisons détruites au RwandaDans son quartier, la grande majorité des maisons sont désormais marquées d’une croix rouge, et les habitants attendent de savoir où ils seront relogés. À la fermeture des camps de déplacés, début juin, les autorités avaient annoncé à la presse locale avoir identifié trois sites dans le district où seront construites de nouvelles résidences pour les personnes affectées par les inondations.« Si c’est vraiment nécessaire de quitter cet endroit à cause des catastrophes, il vaut mieux ça que de mourir ici, et dans ce cas, nous pouvons partir. Mais si l'on peut aménager la rivière, pour qu’il n’y ait plus de risque pour la population, ce serait mieux, on pourrait rester », espère Donatille Mukankusi.Au total, dans tout le pays, presque 6000 maisons ont été détruites, en particulier dans les provinces de l’ouest, du nord et du sud du pays.
6/19/20232 minutes, 9 seconds
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Congo: le réseau routier de Pointe-Noire ne cesse de se dégrader

Pointe-Noire a beau être la capitale économique du Congo-Brazzaville où coule l’or noir, mais son réseau routier, lui, a pris un coup de vieux dans plusieurs quartiers. Il ne cesse aussi de se dégrader au grand dam des usagers et des automobilistes qui demandent sa réhabilitation. Les autorités promettent de s’y atteler en cette période marquée notamment par l’absence de pluies. De notre envoyé spécial à Pointe-Noire, Nous sommes juste en face de la paroisse Saint-François d’Assise de Tié-Tié, le troisième arrondissement de Pointe-Noire. Sur la terrasse d’un minibar, Alain est sur le point de finir une bouteille de bière de 50 centilitres.Ce chef de famille de 66 ans vit en France depuis quatre décennies. Il est revenu passer ses vacances à Pointe-Noire. Il est troublé par l’état des routes. « Vraiment, je suis déçu, parce que 63 ans après l’indépendance, on voit encore de telles choses, c’est vraiment désolant. Surtout pour nous qui vivons à l’étranger, quand on revient, on croit normalement retrouver un pays moderne, mais c’est plus que catastrophique », déplore-t-il.Le spectre éloigné de « Ponton la Belle »Plusieurs mètres plus loin, nous retrouvons Eric, un ancien footballeur, reconverti en chauffeur de taxi. À force d’affronter les béants nids de poule, sa voiture a perdu son éclat. Il est dépassé. « Tu ne peux pas rouler à la quatrième vitesse, tu ne peux pas. Devant là-bas, il y a des gros trous. Quand il pleut, c'est vraiment compliqué », décrit-il visiblement en colère.Germain est un ingénieur et géomètre de formation, mais sans emploi. Il se débrouille à faire du transfert électronique du crédit. Son petit kiosque peint en jaune se tient sur une route bien défoncée.« La voie est tellement inaccessible, abîmée et dégradée. Il y a de l’argent (dans les caisses de l’État) disponible. Je ne sais pas si nos frères politiciens regardent tous ces paramètres. Auparavant, on disait “Ponton la Belle” [surnom de Pointe-Noire, NDLR], mais aujourd’hui ce n’est plus le cas », dit-il, désabusé.Une dotation de 1,5 milliard de francs CFA reçue du gouvernement pour les travauxÀ la montée du quartier Mongo Kamba, à la sortie nord de la ville, la voie s’est rétrécie, en plus des creux. Géria, 32 ans, habite la zone et lance un appel au secours, notamment à la première maire de cette cité centenaire. « On dit que c’est la maman qui balaie la maison. On veut voir notre maire balayer la ville de Pointe-Noire. Donc, c’est notre souhait aujourd’hui », rappelle-t-elle.La municipalité affirme avoir reçu du gouvernement une aide financière pour mener les travaux de réaménagement des routes dégradées. Louis Gabriel Missatou est le premier vice-président du Conseil municipal.« C’est une enveloppe ou allocation spéciale de 1,5 milliard de francs CFA destinés aux travaux. Notre priorité est d’utiliser un levier très important, de bonifier cette somme et de faire des travaux supérieurs au montant qu’on a reçu. Donc, faire des travaux qui vont impacter dans la ville de Pointe-Noire », annonce-t-il.Le phénomène des nids de poule à Pointe-Noire n’est pas loin de celui de Brazzaville.
6/18/20232 minutes, 18 seconds
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Kenya: «Watatu», une pièce de théâtre pour lutter contre la radicalisation

Du théâtre interactif pour lutter contre la radicalisation religieuse sur la côte est du Kenya, à majorité musulmane. C’est le pari de l’ONG Safe avec sa pièce Watatu, (« Trio », en swahili). L’idée est née en 2013, dans le sillage de la campagne pour la présidentielle, sur fond de tension montante entre communautés chrétiennes et musulmanes. Depuis, le projet s’étoffe et va de succès en succès. De notre correspondante à Nairobi,« Je vous demande de faire attention aux trois personnages principaux et je vous demande s’ils avaient pu agir autrement. » D’emblée, le public est donc mis à contribution. Non pas réduit au rôle de spectateur, mais invité à réfléchir au drame qui va se jouer sur scène.L’histoire est celle de Yusuf, un jeune musulman au chômage qui se radicalise au sein d’un groupe extrémiste dans la ville portuaire de Mombasa.Dans cette scène, sa sœur le surprend en train de visionner des vidéos suspectes. Tout au long de la pièce, la famille tente de le ramener sur le droit chemin. On appelle à la rescousse son oncle, seule figure paternelle. Mais Youssouf passe à l’acte, dans un geste tragique et désespéré.Des histoires inspirées par ce qui se passe dans les communautésÀ la fin de la représentation, le public est invité à venir sur le plateau pour rejouer certaines scènes et tenter de changer l’issue de l’histoire. L’occasion à la fois de s’exprimer leur ressenti face à la radicalisation, mais aussi par le biais du théâtre, de trouver en eux des solutions.« Les histoires sur lesquelles nous travaillons avec Safe sont directement inspirées de ce qui se passe dans les communautés », explique David Kalume, de l’ONG Safe, l’un des piliers du projet. « En nous emparant de ces histoires pour les mettre sur scène, nous permettons à la communauté de se regarder... et de se demander : que pouvons-nous faire ? Allons-nous dans la bonne ou dans la mauvaise direction ? »Puis il poursuit : « Je pense que donc que l’art amène les gens à prendre les bonnes décisions. L’art et seulement l’art qui permet de “répéter” sa vie. Car sur scène, on peut voir les choses avec recul, faire des projections, et imaginer ce qui va arriver. »La méthode est inspirée du théâtre-forum du Brésilien Augusto Boal. L’ONG Safe utilise ce même procéder pour venir en aide à des communautés confrontées au sida ou aux mutilations.
6/17/20232 minutes, 14 seconds
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Santé mentale en Afrique du Sud: dépasser le tabou par l'expression [3/3]

Suite et fin de notre série sur les traumatismes en Afrique du Sud et leur impact sur la santé mentale des habitants.Selon différentes études, malgré des risques dus à la violence et aux inégalités dans le pays, et un fort taux de suicide, plus de trois-quarts des Sud-Africains ne reçoivent pas d’aide ou de traitement lorsqu’ils font face à des problèmes de santé mentale. Un écart dû à un manque d’accès aux soins, mais aussi à une stigmatisation des troubles mentaux et un tabou qui persiste. De notre envoyée spéciale à Johannesbourg,Mbali Tshabalala, artiste de 35 ans, fait partie d’un collectif, installé dans un immeuble du centre-ville de Johannesbourg : « Bienvenue au studio ! ». Suite à la mort violente de son frère, en 2015, Mbali a souffert de troubles anxieux et de dépression. Mais autour d’elle, c’est l’incompréhension : « Certaines personnes ignorent encore beaucoup de choses autour de la santé mentale. Quelqu’un m’a dit à l’époque que par rapport à nos parents qui ont pu survivre à l’apartheid, pour nous, la dépression ne représente rien. Au sein de la communauté noire, en particulier, c’est considéré comme une maladie de personnes blanches. Ou sinon on imagine qu’on vous a jeté un mauvais sort ou que vous êtes possédé et qu’il faut vous exorciser. »Des idées reçues qui bâillonnent la parole Devenue artiste en 2019, la jeune femme se met à allier ses créations à sa réflexion sur la santé mentale, et tente d’ouvrir le dialogue : « C’est le premier ensemble d’œuvres que j’ai créés autour du sujet. J’ai utilisé beaucoup de lignes neurographiques, et ici, il y a toutes ces silhouettes de mon corps. J’ai senti qu’il était important d’exprimer ce que je ressentais puis de voir si d’autres pensaient pareil ou étaient dans le même état que moi. »► À écouter aussi : Santé mentale en Afrique du Sud: les Freedom Fighters évoquent les traumatismes de l'apartheid [1/3]Le sujet de la santé mentale est encore plus tabou du côté des hommes, comme l’a observé Kgaugelo Habyane : il est le créateur de Manned Up Conversations, un podcast pour échanger autour des questions de masculinité, et il supervise également un groupe de soutien : « L’idée que les hommes ne parlent pas, ou voient la parole comme un signe de faiblesse est lié au concept de vulnérabilité, avec la peur de devoir partager tous ses états d’âme avec un inconnu. Sans compter qu’il n’y a pas vraiment beaucoup d’hommes qui ont fait de la vulnérabilité un modèle. »Un manque de psychologues pour la population Des initiatives voient le jour pour tenter de démocratiser l’accès aux soins et contourner la stigmatisation. Le psychologue Zamo Mbele supervise l’application Panda Health, qui permet aux Sud-Africains de demander de l’aide en ligne : « Les pratiques religieuses, et celles qui consistent à aller chercher de l’aide auprès de guérisseurs traditionnels ou de sangomas, montrent qu’il existe des pratiques psychothérapiques avec lesquelles les peuples indigènes du continent étaient déjà en lien. Il faut donc bien comprendre que le monde intérieur de chaque être humain, peu importe sa race ou sa culture, mérite de l’attention. »Outre la stigmatisation, le manque de professionnels est aussi un problème pour faciliter l’accès aux soins, en particulier dans les régions plus rurales qui ne comptent qu’une poignée de psychologues dans le secteur public pour des millions d’habitants.► À écouter aussi : Santé mentale en Afrique du Sud: l’impact de la criminalité sur la santé mentale [2/3]
6/16/20232 minutes, 28 seconds
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Santé mentale en Afrique du Sud: l’impact de la criminalité sur la santé mentale [2/3]

Suite de notre série sur la violence et les traumatismes en Afrique du Sud, qui laissent des marques sur la santé mentale des habitants. Dans ce deuxième volet, focus sur l’impact de la criminalité sur les niveaux de stress et d’anxiété. Alors que l’Afrique du Sud enregistre en moyenne trois meurtres toutes les heures, et que plus d’une centaine de plaintes pour viol sont déposées par jour, le pays se classe souvent parmi les plus dangereux au monde. Et les victimes de crimes ont parfois besoin d’aide pour surmonter le traumatisme.  En 2022, la journaliste sud-africaine Heidi Giokos a été attaquée chez elle, en pleine nuit, par un cambrioleur. Encore sous accompagnement psychologique aujourd’hui, elle ressent toujours les conséquences de cette agression : « À un certain moment, je n’avais pas mes vêtements sur moi, et mes mains étaient attachées dans mon dos. Il s’est levé pour enlever son pantalon, et c’est là que je me suis enfuie. Je me suis levée, j’ai commencé à courir, j’ai réussi à atteindre l’entrée, à soulever le loquet du portail et à m’enfuir. Il allait sans aucun doute me violer, et ensuite probablement me tuer. Tout cela a encore de lourdes conséquences sur ma santé mentale : je suis toujours en alerte, toujours inquiète, à vivre sans cesse dans la peur. Je n’ai pas passé une bonne nuit de sommeil depuis un an. Bizarrement, je me réveille encore vers 2 heures du matin, l’heure à laquelle tout s’est passé. C’est très difficile de surmonter quelque chose comme ça ».« On vit tout le temps dans la peur »Un témoignage bien trop familier pour beaucoup de Sud-africains. Gugu Rantjie habite, elle, à Soweto, et elle a récemment échappé à une attaque dans son quartier de voleurs armés de couteaux : « Comme c’est assez commun, j’essaye de continuer comme si rien ne s’était passé. La seule chose que j’ai changée, c’est que je n’emprunte plus jamais cette route. C’est vraiment stressant, car on est censé se sentir en sécurité au sein de sa communauté, et maintenant ce n’est plus le cas. Donc, on vit tout le temps dans la peur, et ça me fait beaucoup réfléchir sur le futur de mes enfants, et sur l’endroit où je vis », dit-elle.Pour répondre à la détresse de certaines victimes, des groupes de soutien ont été mis en place, en collaboration avec la police. Sheralee Bosman est à la tête d’une équipe d’une vingtaine de personnes, qui quadrille un quartier au sud de la ville : « On les aide à intégrer ce qui vient de leur arriver. Mais je pense que souvent les gens ont peur d’être stigmatisés. Ils pensent que s’ils demandent de l’aide c’est qu’ils ont un problème ou qu’ils sont faibles. Et cela concerne surtout les hommes », explique-t-elle.Pourtant, une expérience traumatisante qui n’est pas surmontée peut, selon les personnes, avoir des conséquences sur le long terme, selon Gaudence Uwizeye, du Centre pour l’étude de la violence et de la réconciliation (CSVR) : « Un incident violent, ça nous affecte physiquement, mentalement et même dans notre comportement. Du côté des victimes, vous êtes déprimé, vous êtes stressés, on est rejeté, vous avez la peur qui vous enferme dans votre maison ».La violence et ses conséquences sur la santé mentale peuvent aussi se cacher derrière des portes closes, puisque au moins une Sud-africaine sur cinq a déjà été victime de violences conjugales.>> À lire aussi : Santé mentale en Afrique du Sud: les Freedom Fighters évoquent les traumatismes de l'apartheid [1/3]
6/15/20232 minutes, 21 seconds
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Santé mentale en Afrique du Sud: les Freedom Fighters évoquent les traumatismes de l'apartheid [1/3]

En Afrique du Sud, la violence et les traumatismes qu’a connus le pays continuent d’avoir un impact sur la santé mentale des habitants. La parole est donnée aux anciens combattants pour la liberté, qui se sont battus contre le système ségrégationniste de l’apartheid. Ils ont été victimes de nombreuses violations des droits de l’Homme avant d’obtenir victoire dans les années 1990 avec la chute du régime. Lors de la transition démocratique, l’accent a été mis sur la volonté de tourner la page et les traumatismes vécus ont bien souvent été enfouis. Unjinee Poonan avait 19 ans lorsqu’elle a été arrêtée, en 1977, pour avoir organisé des manifestations étudiantes lors de la mort de Steve Biko. Et bien des années plus tard, il lui est encore douloureux de décrire ses semaines en détention. « On m’a battue, sur tout le corps, avec un tuyau dont on avait rendu le bout pointu. Je n’arrivais plus à manger, les toilettes n’étaient jamais nettoyées, et les couvertures se trouvaient à même le sol. Après la première nuit, j’étais couverte de poux, qui grouillaient sur ma tête et mon corps, et je pense que cela faisait partie de la torture psychologique ».Unjinee a ensuite dû partir en exil, au Botswana, pour ne revenir en Afrique du Sud que 13 ans plus tard. Elle a pu, par la suite suivre une thérapie, mais garde aujourd’hui encore, des cicatrices. « Encore aujourd’hui, tout est toujours présent dans ma tête. Je n’y pense pas tout le temps, mais c’est parfois réveillé par certains détails. Il y a des choses qui me sont arrivées et que je ne pourrai jamais raconter. Même si j’ai beaucoup travaillé sur tout cela, et que je suis sous traitement médical, certaines choses restent cachées », dit-elle.Dick Mokoena était lui du côté militaire : il a rejoint le combat contre le régime lorsqu’il était adolescent, puis, contraint à l’exil, il est devenu instructeur sur le front angolais. En 1992, de retour en Afrique du Sud, il a été confronté aux violences politiques qui ont mené à un massacre dans son township de Boipatong. « Durant cet affrontement, ils m’ont tiré dessus avec leurs fusils. Maintenant, les flashbacks sont parfois douloureux et il m’arrive de me réveiller en pleine nuit. Mais je pense que la religion m’a aidé. Beaucoup de mes collègues, eux, souffrent toujours, on appelle cela les troubles du stress post-traumatique, et certains se tournent vers l’alcool », raconte-t-il.« On ne peut pas s’attendre à ce que des êtres humains si abîmés fonctionnent normalement »Pour Marjorie Jobson, directrice de l’organisation de soutien aux victimes Khulumani, le pays n’a pas accordé suffisamment d’importance à la santé mentale des combattants anti-apartheid après 1994. « Tout le monde a été forcé à aller de l’avant, et ce pays est désormais dans l’état où il est parce qu’on n’a jamais compris à quel point les blessures sont profondes, ainsi que l’humiliation subie. On ne peut pas s’attendre à ce que des êtres humains si abîmés fonctionnent normalement ».Quelques interventions ont bien été mises en place par le gouvernement, mais à une échelle encore modeste et principalement pour les anciens militaires.
6/14/20232 minutes, 16 seconds
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Les incertitudes et les projets des Sud-Soudanais de retour au pays après avoir fui la guerre au Soudan [3/3]

Au Soudan du Sud, les rapatriés du Soudan font face à des difficultés une fois passée la frontière. Ils sont plus de 90 000 à avoir fui les affrontements qui ravagent notamment la capitale, Khartoum, depuis le 15 avril. Et dans leur grande majorité, ils sont aujourd’hui coincés près de la frontière, dans la petite ville de Renk, les moyens de transport étant insuffisants pour continuer leur voyage. Ils étudiaient ou travaillaient au Soudan, certains ont vécu là-bas pendant des années, des décennies... Leurs vies se sont effondrées d’un coup. Leur retour très chaotique au Soudan du Sud est comme un nouveau départ, ils tentent de se projeter dans l’avenir en faisant fi des incertitudes et crainte. Avec ses enfants et petits-enfants, Okony Yor, 75 ans, a marché une bonne partie de la route depuis Khartoum. Assis sous un abri de fortune dans la chaleur infernale du port de Renk, près du Nil, rentrer dans son village d’origine, Kodok, ne l’inquiète pas : « Je veux retourner chez moi à Kodok. Je veux cultiver. Je vais préparer mon champ et quand les pluies viendront, je planterai. J’espère que les ONG pourront m’aider, mais c’est mon projet de toute façon. Je n’ai pas peur des conflits car d’autres villageois sont toujours au village. Je vais être avec eux, on va rester ensemble ».Elizabeth Mayik, 63 ans, a passé près de 10 ans à Khartoum. En attente elle aussi de prendre un bateau pour Malakal, elle tente de se projeter : « Ça fait presque dix ans que j’ai quitté Malakal sans y retourner. Une fois sur place, je pourrai me rendre compte de la situation, j’aurai les idées claires et je saurai quoi faire. Donc si je vois que la sécurité est correcte, je vais tout de suite construire un abri sur le terrain que je possède. Je n’ai pas peur de la guerre au Soudan du Sud. Je suis contente d’être de retour dans mon pays. C’est Dieu qui nous a fait revenir aussi vite et a fait que nous ne sommes pas morts en route ».Bien sûr, beaucoup espèrent que la guerre s’arrête au Soudan, pour pouvoir éventuellement y retourner… Des pensées que partage Peter Gatkuoth, 51 ans, qui avait fui les violences à Malakal en 2014 : « Beaucoup de Sud-Soudanais pensent à retourner au Soudan. Si la situation s’améliore, tout le monde va y retourner. Parce que là-bas, vous pouvez vivre confortablement, il y a du travail… Ici, tout ce qui nous a forcés à fuir est toujours pareil, rien n’a changé. C’est notre crainte. Nous prions juste que les choses changent et que nous n’ayons pas à fuir à nouveau. Nous sommes prêts à rester dans notre pays pour contribuer à son développement et pour améliorer la situation ».Pour faciliter l’installation des rapatriés dans leurs régions d’origine, les autorités et l’ONU vont leur fournir des rations alimentaires, et d’autres équipements de base pour construire des abris. Des milliers d’entre eux affluent vers les différents camps de déplacés du pays, à Malakal mais aussi à Juba, faute de solution alternative.
6/13/20232 minutes, 23 seconds
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Ces Sud-Soudanais ayant fui le Soudan avec de lourdes conditions médicales [2/3]

Depuis le début des combats au Soudan mi-avril, plus de 90 000 Sud-Soudanais ont pris la fuite vers leur pays natal. Parmi eux se trouvent des personnes qui étaient à Khartoum pour des soins médicaux partis en catastrophe sans terminer leurs traitements. D’autres ont été blessés dans les combats et n’ont reçu aucun soin. Aujourd’hui arrivés dans la petite ville sud-soudanaise de Renk, près de la frontière, ils espèrent pouvoir être soignés ici ou lorsqu’ils seront rentrés dans leur région d’origine. De notre envoyée spéciale à Renk,Les cheveux grisonnants et l’allure frêle, Mawut Deng, 59 ans, campe dans l’enceinte d’un bâtiment public de Renk, comme des centaines d’autres rapatriés du Soudan. Éprouvé par le voyage depuis Khartoum, le manque de nourriture ici à Renk continue de l’affaiblir, d’autant plus qu’il était dans la capitale soudanaise pour se soigner : « Je suis allé à Khartoum en janvier, car j’étais très malade. C’est là-bas qu’ils m’ont diagnostiqué du diabète et de la tension. Malheureusement, je n’avais pas terminé mon traitement quand la guerre a éclaté. »Pour quitter Khartoum, il a réussi à monter dans l’un des camions affrétés par des volontaires depuis Juba pour aider les Sud-Soudanais à fuir la guerre au Soudan. Maintenant bloqué à Renk, il attend désespérément un vol de l’ONU pour rentrer chez lui, à Aweil : « En arrivant ici à cause de la guerre, je me suis rendu compte qu’il y a plein d’autres gens qui sont dans la même situation que moi, qui sont très malades. Ce sont eux qui devraient être prioritaires pour être transportés vers leurs régions d’origines. »► À écouter aussi : Les vies brisées des Sud-Soudanais ayant fui Khartoum en guerre« Je devais être opérée le jour où les combats ont commencé... »Installée sous un arbre dans la rue, la situation ne pourrait être pire pour Arek Piol Malou, une femme de 30 ans, touchée par une balle perdue dans la capitale soudanaise : « J’étais à Khartoum quand la guerre a éclaté. Je dormais lorsque j’ai reçu une balle dans le bas de mon dos. Je n’ai aucune idée d’où elle venait ou qui l’a tirée. C’était le troisième jour des combats. J’ai attendu quelques jours, mais quand la guerre a empiré, j’ai voulu qu’on tente de revenir au Soudan du Sud avec mes enfants. On s’est débrouillés pour venir ici. Ils m’ont aidée, ils m’ont portée. Ça fait trois semaines qu’on est là, mais je n’ai toujours pas vu de médecin. La balle est toujours à l’intérieur. Je ne sais pas quoi faire, j’angoisse, ma blessure ne guérit pas. »Elle aussi incapable de se déplacer sans l’aide de ses enfants, Monica Bol, 50 ans, était à Khartoum pour une opération de la jambe : « Je devais être opérée le jour où les combats ont commencé. Les jours suivants, les accès à l’hôpital ont été bloqués, les routes ont été fermées. Et de lourds combats ont eu lieu près de l’hôpital. Donc je n’ai pas pu y aller. Avec mes enfants, on a été obligés de fuir. Je n’ai pas été opérée et ma jambe me fait mal. J’espère pouvoir être opérée rapidement, une fois arrivée à Juba. »Alors que la réponse humanitaire continue de s’organiser à Renk, des cliniques mobiles pourraient être déployées afin de répondre aux immenses besoins des rapatriés, dispersés un peu partout dans la ville.► À écouter aussi : Les vies suspendues des Sud-Soudanais réchappés de la guerre au Soudan
6/12/20232 minutes, 30 seconds
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Les vies brisées des Sud-Soudanais ayant fui Khartoum en guerre [1/3]

Le Soudan du Sud a pris son indépendance du Soudan en 2011. Mais les liens entre les deux pays sont restés très forts. Plus de deux millions de Sud-Soudanais habitent toujours au Soudan, dont 800 000 réfugiés. Khartoum restait une destination privilégiée pour les Sud-Soudanais souhaitant chercher refuge, mais aussi travailler, étudier ou se soigner. Depuis que des combats ont éclaté le 15 avril, ils sont déjà plus de 90 000 à avoir pris la fuite, direction leur pays natal. Des retours prématurés, des projets brutalement interrompus…  De notre envoyée spéciale à Renk,À Renk, les rapatriés campent avec leurs bagages un peu partout : dans les mosquées, les églises, au bord des rues… S’abritant du soleil écrasant à l’ombre d’un arbre, Ngong Malong Ngor, 70 ans, n’en est pas à son premier aller-retour avec Khartoum, une ville indissociable de son histoire familiale :« J’ai vécu presque toute ma vie à Khartoum. Mes dix enfants sont nés là-bas. Par la suite, au moment de l’indépendance du Soudan du Sud, nous avons été très nombreux à être revenus au pays. Mais la situation n’était pas bonne au Soudan du Sud, les enfants n’ont pas trouvé de travail et ils sont rapidement revenus à Khartoum. Je les ai suivis ensuite. Maintenant, nous sommes tous de retour au Soudan du Sud à cause de la guerre à Khartoum. »► À lire aussi : «Allons-nous mourir ici ?»: au Soudan du Sud, la ville de Renk face au flux de réfugiés du SoudanFuir la guerreDes centaines de familles campent aussi au port de Renk, au bord du Nil, où des bateaux sans toit ni siège sont amarrés. Assise sur ses valises au bord du quai en plein cagnard avec ses enfants, Lisa Ruotken attend depuis des jours d’embarquer sur l’un d’eux, direction Malakal. Elle avait fui cette ville à cause des violences :« Nous sommes allés à Khartoum il y a quatre ans, pour fuir la guerre au Soudan du Sud. Maintenant qu’il y a la guerre au Soudan, nous sommes de retour. Nous voulons aller à Malakal. Cette guerre à Khartoum, ça a été très dur, c’était horrible. Avec ma famille, nous avons réussi à nous enfuir grâce à un camion qui nous a amenés jusqu’ici au Soudan du Sud. »« J'ai été séparée de mes enfants dans la panique »Un seau et une couverture donnés par le HCR, voilà tout ce que possède Catherine Dimitri, 40 ans, qui attend au centre de transit mis en place par les humanitaires, de pouvoir continuer son voyage jusqu’à Juba, sa ville natale. Elle a passé 35 ans au Soudan et travaillait dans une ONG. Suite aux combats, elle a quitté Khartoum en catastrophe avec ses deux petits-enfants, mais a dû quitter ses enfants : certains sont restés à Khartoum, d’autres ont fui avant elle.« C’est très difficile, car j’ai été séparée de mes enfants dans la panique. On a eu très peur. J’ai un de mes fils qui est venu au Soudan du Sud avant moi, mais je n’ai aucune nouvelle. Je suis vraiment triste. J’ai le cœur brisé, je me sens tiraillée entre ici et là-bas. Je veux savoir où est mon fils qui est parti avant moi, et que tous mes enfants soient réunis. »Chaque jour, près de 2 000 Sud-Soudanais passent la frontière avec le Soudan. L’ONU estime qu’ils seront 180 000 à être revenus au pays mi-juillet.
6/11/20232 minutes, 20 seconds
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Guinée: Camayenne Plage, le nouveau centre de loisirs de Conakry, prend forme

Pollution, embouteillage et manque d’espaces verts, Conakry est réputée pour ses conditions de vie difficiles. À cela, il faut ajouter l’absence ou presque de lieux de loisirs. Le sport, le foot par exemple, se pratique le plus souvent dans la rue et il existe très peu de terrains aménagés. Mais il y a du changement. Sous l’impulsion des autorités de la transition, un projet pilote vient de sortir de terre et pourrait préfigurer la création de nouveaux lieux de loisirs.  De notre correspondant à Conakry,Il y a toujours de l’animation à l’entrée. Les week-ends et les jours fériés, il est même difficile de se frayer un chemin devant le centre de loisirs Camayenne Plage. Nous y retrouvons le directeur général de l’Office national des loisirs, Mamadou Baïlo Barry.« La première phase est installée sur 1/2 hectare », indique-t-il. Les travaux se sont déroulés au mois de novembre et ont duré quelques semaines seulement. « Vous voyez, ce sable-là, tout ce sable a été importé de l’intérieur du pays. Il y a eu plus de 1 000 m³ de sable qu’on a importés pour mettre au niveau de cette plage-là parce qu'il y avait du sable, mais c’était sale », ajoute Mamadou Baïlo Barry.Aujourd’hui, l’espace est très bien entretenu. Des poubelles ont été placées un peu partout pour garder l’endroit propre. Au total, 280 000 euros ont été investis par l’État. « Vous avez ce jardin qu’on a fait, les toilettes publiques, le château d’eau pour être autonome en matière d’eau potable et il y a l’aire de jeux pour les enfants », décrit le directeur général de l’Office national des loisirs. Un espace artificiel pour contrer les promoteurs immobiliersIl y a aussi un terrain de basket, de beach-volley, de beach-soccer… La plage originelle a été entièrement modifiée. Une digue a été construite pour pouvoir remblayer et gagner en superficie.Le directeur des loisirs justifie cette artificialisation de l’espace. Il était important de marquer la présence de l’État ici, face à l’appétit des promoteurs immobiliers. « Aujourd’hui, c’est un endroit sauvé, parce que même après ce gouvernement, avec toutes les infrastructures qui sont posées à cet endroit-là, cet endroit est protégé. Il y aura plus d’autres choses ici qu’un espace de loisirs où les gens pourront s’exprimer et profiter de la vie, profiter de la mer, profiter de la plage. », insiste-t-il.Aboubacar a fait 6 kilomètres en voiture pour emmener Mohamed, son fils de deux ans, à la plage. « C’est une très bonne chose. Avec mon enfant, on est venu s’amuser et ça nous manque ça, surtout à Conakry, il n’y a pas beaucoup de points comme ça. »Cette plage, à laquelle on pouvait accéder librement, est désormais payante. Les plus de 15 ans comme Aboubacar doivent débourser l’équivalent d’un euro pour entrer. Camayenne Plage est un lieu fermé, entouré de grillage, et qui concentre de nombreuses activités. Ce modèle a été préféré à des infrastructures de proximité, intégrées à la ville. Ce projet pilote doit être dupliqué ailleurs dans le pays.
6/10/20232 minutes, 19 seconds
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Maroc: la place particulière du film documentaire dans le paysage cinématographique marocain

Au Maroc, la ville côtière du sud-ouest Agadir accueille pendant une semaine la 14e édition du Festival international du film documentaire, le Fidadoc. Du 5 au 10 juin, le public avait accès gratuitement aux projections officielles du festival. Pas moins de quatre films documentaires par jour et plus d’une dizaine de pays représentés. L’occasion de parler de la place particulière qu’occupe le film documentaire dans le paysage cinématographique marocain. Comme dans beaucoup de régions du continent, le cinéma au Maroc a commencé par le documentaire au moment des indépendances. Mais dans les années 1970, cette tradition disparaît et il faut attendre la fin des années 1980 pour que ce genre cinématographique revienne progressivement dans le pays à travers les cinéastes de la diaspora. C’est dans cette dynamique que s’inscrit la création du Fidadoc en 2008.Hicham Fallah, le directeur général et artistique du festival, nous explique l’idée de sa fondatrice Nouzha Drissi. « Le documentaire essaye de documenter la réalité, qui n'est pas forcément celle que le pouvoir veut voir. Donc, l'idée de Nouzha de créer ce festival était de replacer d'abord le cinéma documentaire sur grand écran parce que pour la plupart des gens, le documentaire, c'est la télévision, c'est ce qui passe à minuit, ce sont les séries sur les grottes, sur la Médina, etc. et le fait que le cinéma documentaire raconte une histoire, a des personnages, a une dramaturgie. Il fallait replacer ça dans l'esprit du public et, en parallèle, de relancer la production, de recréer un cadre pour encourager la production du cinéma documentaire au Maroc. » Une place de choixAujourd’hui, le film documentaire occupe une place de choix au Maroc… Beaucoup de cinéastes en font et pour inspirer la nouvelle génération, le Fidadoc organise La Ruche documentaire, une résidence artistique d’écriture de projets de films à laquelle Tessara Touvouna, étudiante à l’Essav, l’École supérieure des arts visuels de Marrakech, participe en tant qu’observatrice pour l’instant.« À l’Essav, on nous met dans le bain de la fiction et ici, on découvre un peu plus le documentaire. J'ai beaucoup d'idées d'un documentaire que je voudrais réaliser. Donc, je participerai à cette résidence. »Si le film documentaire se démocratise, un problème subsiste : celui de la peur de la caméra. Samy Sidali y a été confronté pour la réalisation de son film Petit taxi projeté lors de la cérémonie d’ouverture du festival. Un huis clos dans le taxi d’Ousama qui traverse Casablanca.Dépasser la peur de la caméraPour Samy Sidali, filmer les clients dans ce taxi n’a pas été chose facile. « Il y a beaucoup de gens qui ont vu le taxi s'arrêter avec une caméra qui repartaient, d'autres personnes qui montaient et qui ne voulaient absolument pas participer à la chose. Cette peur de la caméra vient du fait que les images qu'on est habitué à avoir peuvent faire du mal. Je pense que se réapproprier les images, est peut-être une bonne direction pour moins avoir peur de la caméra et de ce qu'elle peut faire. »Réussir à dépasser cette peur de l’image est donc l’un des défis encore à relever pour les réalisateurs de films documentaires au Maroc.
6/9/20232 minutes, 20 seconds
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RDC: en Ituri, le processus de désarmement des groupes armés ne convainc guère [3/3]

Le 17 avril, s’ouvrait dans la province le Programme de désarmement, démobilisation et relèvement communautaire et stabilisation, le PDDRCS. Les autorités nationales espèrent ainsi réduire la nuisance de la dizaine de groupes armés présents en Ituri. Certains ont déjà déposé les armes, mais l’essentiel des combattants sont restés sur le terrain et commettent toujours des exactions. De notre envoyée spéciale à Bunia,Ils sont environ une centaine à être passés sous la tente installée en brousse à une dizaine de kilomètres de Bunia la capitale régionale. Là-bas, les combattants ont déposé leurs armes scellées dans une malle en fer et répondu à des questions d’identification.C’est le cas de Suprême, le chef d’une des deux factions des F-PIC, les Forces patriotiques et intégrationnistes du Congo, qui s’exprime via son porte-parole. « Nous sommes fatigués de rester dans la brousse », déclare-t-il. « On se tue entre nous, nous, les frères. On menace toujours. On n'a pas trouvé de choses qui vont nous aider à aimer. On a détruit, même avec ce mouvement. »► À lire aussi : RDC: pour l'ONU, la spirale de violence en Ituri est liée à un vide sécuritaireLa reconnaissance des exactions commisesD’autres combattants, qui appartiennent à la Codeco, la Coopérative pour le développement du Congo, avaient déjà décidé de quitter la brousse avant la mise en place de ce programme. Le général autoproclamé d’une des factions de la Codeco, Songa Mbele, reconnaît les exactions commises.« Quand je suis entrée dans le mouvement, j’ai trouvé que les objectifs de ce mouvement ne correspondaient pas à sa vision », explique Songa Mbele. « Les chefs ont commencé à nous envoyer attaquer à la population, tué, pillé et pourtant ce mouvement était créé sous forme d’une église. Le nom même « Codeco » qui veut dire Coopérative pour le développement du Congo. »► À écouter aussi : RDC: à Djugu, peur et méfiance enracinées depuis longtemps entre Hema et Lendu« On n'a jamais vu d'actions... »Si ce programme doit favoriser un retour à la vie civile, certains espèrent tout de même une intégration dans l’armée, comme ce fut le cas pour d’autres anciens rebelles. Pour l’heure, les exactions continuent, rappelle Dieudonné Lossa, président de la société civile, malgré l’état de siège, le système sécuritaire spécial qui donne plus de pouvoir à l’armée.« Tous les moyens étaient mis à la disposition de l'état de siège, selon les dires des autorités de ce pays. Mais sur le terrain, on n'a jamais vu des actions, des opérations engagées contre les groupes armés sur le terrain », déplore Dieudonné Lossa. « Qu'est-ce qui peut nous convaincre que l'état de siège était venu justement résoudre ces problèmes ou bien mettre fin à l'existence des groupes armés ? »Selon Caritas, une ONG proche de l’Église catholique, depuis janvier, plus de 400 civils ont été tués en Ituri.► À écouter aussi : RDC: à Djugu, les structures sanitaires paralysées par les rivalités communautaires
6/8/20232 minutes, 12 seconds
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RDC: à Djugu, les structures sanitaires paralysées par les rivalités communautaires [2/3]

Depuis 2017, à Djugu, en Ituri, des exactions contre des populations civiles sont perpétrées par des milices dites d’autodéfense communautaire. Ce climat d’insécurité permanente perturbe tous les aspects de la vie, de l’économie locale jusqu'aux structures de santé. À l’entrée du centre de santé de Médecins sans Frontières dans le camp de déplacés de Rhoe, les patients se lavent les mains. La salle d’attente est pleine d’enfants. Ici, on prend en charge les jeunes de 0 à 15 ans, dont les principales pathologies sont liées aux mauvaises conditions de vie. « En premier lieu, nous avons les infections respiratoires, nous avons les maladies diarrhéiques qui sont aussi parmi les motifs de consultation. En plus de ça, nous avons aussi la malnutrition. Ce sont les trois principales maladies », explique Dr Faustin, pédiatre pour MSF.Si les enfants sont accueillis gratuitement, les adultes de la zone doivent trouver de quoi payer leurs soins. Pas simple quand les activités économiques, essentiellement agricoles, sont paralysées par les attaques de groupes armés. À une dizaine de kilomètres, l’hôpital de référence de Drodro, en zone Héma, a été plusieurs fois l’une des cibles de la Codeco, une milice qui dit défendre les Lendu. « Il y a tant de problèmes, constate James Semire, directeur par intérim de la structure. D’abord, sur le plan médical, nous ne parvenons pas à faire bien nos tâches. Sur le plan social, même si nous avons des partenaires, il y a quand même une part qui revient au patient. Même si c’est peu, ça aide un tout petit peu à faire fonctionner l’hôpital. Et là, tout est foutu. »« Tout peut arriver quand il y a des exactions »Partout, le salaire des soignants diminue. C’est le cas aussi de Daniel Pidjo Goba, l’infirmier titulaire d’un centre de santé en zone lendu. Les armoires des médicaments pour les adultes sont presque vides. Impossible de s’approvisionner à cause de l’insécurité. Certains malades refusent également de faire le déplacement jusqu’à la structure de référence de Drodro. « Ils ont vraiment des réticences parce qu’on ne peut pas aller là où il y a l’insécurité, parce que tout peut arriver quand il y a des exactions. À cause de ça, les familles ne préfèrent pas y aller, jusqu’à ce qu’il y ait du calme », dit-il.Dans le territoire de Djugu, ces exemples ne sont pas isolés. À cause du conflit, les villages Hema et Lendu, imbriqués, se renferment sur eux-mêmes.>> À lire aussi : RDC: à Djugu, peur et méfiance enracinées depuis longtemps entre Hema et Lendu [1/3]
6/7/20232 minutes, 22 seconds
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RDC: à Djugu, peur et méfiance enracinées depuis longtemps entre Hema et Lendu [1/3]

Ce mercredi et jusqu’à vendredi, RFI consacre plusieurs reportages à la situation dans le territoire de Djugu dans l’est de la RDC. Les rivalités entre communautés Hema et Lendu y sont anciennes. Mais depuis 2017, plusieurs cycles de violence ravagent à nouveau cette zone, où des milices dites d’autodéfense se sont créées. Y règne donc un climat de défiance où chaque communauté vit séparée.  De notre envoyée spéciale à Djugu,À Blukwa Mbi, un village Lendu, une jeune lessiveuse nettoie ses vêtements devant sa maisonnette. Sa famille est dans les parages, personne n’ose s’aventurer trop loin. Florestine est vendeuse, mais ne part plus au marché : « Ces derniers temps, c’est difficile de faire ça. Les jours où je ne pars pas au marché, je pars au champ et j’arrange avec ça les besoins familiaux. Mais le prix de la pomme de terre a baissé. Il n’y a pas non plus de clients pour les acheter. »Des conflits intéressés L’insécurité que décrit Florestine est liée à la présence de groupes armés. Notamment de la Codeco qui dit défendre la communauté Lendu et des Zaires qui disent défendre les Hema. Des nébuleuses dont les chefs restent inconnus, détaille Salomon Jibu, qui se présentent comme un porte-parole des Lendu de la zone : « Les gens qui se trouvent en armes sont derrière quelques-uns, qui cherchent leurs intérêts personnels. Des gens qui ont de l'argent. Ils ne veulent pas que cette affaire puisse prendre fin pour qu'ils puissent continuer à beaucoup gagner d'argent, voler l'or d'ici, etc. C'est ça le problème. »► À lire aussi : RDC: dans le territoire de Djugu, l'aide humanitaire insuffisante face à l'ampleur des besoinsÀ quelques kilomètres, dans le village hema voisin, une dizaine de personnes se sont regroupées devant le bureau de la chefferie. Jean de Dieu Mambo est l’un des responsables de la société civile locale : « Un enlèvement s'est fait à un demi-kilomètre de la chefferie. »La Monusco dissuasive Côté Hema, leurs attaques font régner la psychose. Nombreux sont ceux qui vivent retranchés dans des camps de déplacés, comme à Rhoe au pied d'une base des casques bleus de la Mission de maintien de la paix de l'ONU, la Monusco, où habite Willy : « Il y a des villages voisins sur notre site ici qui ont été attaqués aussi, mais on a quand même les Blancs de la Monusco ici proches de nous. Alors c'est avec leurs efforts qu'on résiste encore dans le site ici, parce que la Monusco, ils les craignent. »Plus d’un million et demi de personnes étaient déplacées fin mars 2023, selon Ocha, le bureau de la coordination des affaires humanitaires des Nations unies.► À lire aussi : Est de la RDC: dans le Masisi, le règne des hommes armés ou l’insécurité permanente
6/6/20232 minutes, 15 seconds
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Tunisie: «Barg Ellil», nouvelle traduction en français d’un conte anti-raciste

C’est un conte populaire écrit en 1961 par l’écrivain de langue arabe Béchir Khraïef. Barg Ellil est traduit en français par la professeure de littérature française Samia Kassab et publié un mois après la vague de racisme envers les migrants subsahariens suite à des propos du président Kaïs Saïed sur la migration irrégulière, le personnage de Barg Ellil, esclave noir au XVIe siècle, offre une réflexion sur le contexte actuel dans le pays. De notre correspondante à Tunis,Devant un parterre d’étudiants et de bibliophiles venus à la librairie culturel, Samia Kassab, traductrice du conte de Barg Ellil, décrit avec enthousiasme la modernité de ce personnage de fiction. Barg Ellil est un esclave noir victime de la traite négrière en 1534 et arrivé de Tombouctou à Tunis, « dans un monde de blancs » comme écrit le narrateur, une société hostile dans laquelle il subit le racisme mais vit également une passion amoureuse et beaucoup d’aventures« Et en fait c’est l’histoire d’un esclave qui lui aussi essaye, avec des éléments composites, de composer comme on compose un tableau sa propre vie à venir, malgré les points faibles, malgré les zones d’ombre. », explique Samia Kassab.Pour cette spécialiste de la littérature des Caraïbes et d’auteurs tels qu’Edouard Glissant et Patrick Chamoiseau, l’histoire de Barg Ellil reste méconnue dans le monde francophone…« Je me suis dit "mais ce livre extraordinaire, mais c’est fou, il y a plein de gens qui ne lisent pas l’arabe qui ne le connaissent pas". »Ce livre est extraordinaire, selon Samia Kassab, parce qu’aujourd’hui, le regard ironique de l’auteur de Barg Ellil sur le conservatisme, les dogmes ou encore le racisme résonnent encore dans l’actualité. « Tous les personnages, le Blanc galérien, le Noir esclave et la jeune femme blanche mariée qui est emmurée par son mari parce qu’il va en pèlerinage pendant trois mois, tous ces personnages se retrouvent en fait et c’est comme une sorte d’ode aux marginaux, aux subalternes, dont le statut ne leur permet pas de véritablement s’exprimer ou de trouver leur place dans une société qui est par ailleurs très discriminatoire. »La traduction a été publiée en mars dernier, un mois après que de nombreux migrants subsahariens aient été victimes d’agressions racistes et d’expulsions de leur domicile à la suite des propos de Kaïs Saïed sur la migration irrégulière… « Je pense que c’est une leçon que nous donne Béchir Khraïef de relativité. Relativiser notre bien-être et essayer d’avoir un peu d’empathie pour ces gens. »Cette thématique a marqué Ranim Ghezail étudiante de 24 ans en littérature et civilisations française : « ça nous permet de voir comment la littérature est contemporaine, elle ne meurt jamais. »Et le récit ne s'arrête pas à la dénonciation du racisme. Roman historique et d'apprentissage, il défend aussi d'autres thèmes tels que le féminisme et la liberté.   
6/5/20232 minutes, 24 seconds
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Côte d’Ivoire: l’expérience encore timide du recyclage des déchets plastiques

La journée mondiale de l’environnement est célébrée cette année en Côte d’Ivoire. L’accent est mis sur la sensibilisation autour des déchets plastiques. Abidjan, la capitale économique, compte quelques start-up qui ont mis en place un système de collecte auprès des habitants et de recyclage des déchets plastiques. De notre correspondante à Abidjan Ce matin, dans la commune de Yopougon, plusieurs femmes portent à bout de bras des grands sacs remplis de bouteilles en plastique vides. Eugénie Konan est responsable d’un site de collecte. Elle inspecte et pèse chaque sac, avant de déterminer la valeur des déchets :« Je vérifie. Ça c’est effectivement des matières que je recherche, je pèse… Ici, il y a deux kilos. On trie et puis on prend ce qui nous arrange, le reste, on le rend ».L’entreprise achète ses plastiques à 50 Francs CFA le kilo. C’est une source de motivation pour Bernadette, la cinquantaine, qui a fait de cette activité une profession : elle repère, collecte et trie chaque jour les déchets plastiques de son quartier. « Je me déplace moi-même, je collecte les déchets dans certains endroits comme les maquis, les restaurants etc. J’arrive à gérer mon quotidien et à éponger certaines dépenses », affirme Bernadette.Ces bouteilles en plastique sont ensuite compactées et acheminées sous forme de « balles de plastique » dans l’usine de Recyplast, une start-up créée en 2019. Chaque année, cette entreprise collecte 2 000 tonnes de déchets en plastique. Pierre Gagas est chargé de programme chez Recyplast : « Tous les plastiques qui arrivent à l’usine sont pesés puis broyés. Après ces étapes, on lave les déchets plastique et il y a une catégorie de plastique que l’on peut valoriser qui est transformée et vendue localement. Tous les autres plastiques de type PET, c’est-à-dire les bouteilles de soda, d’huile, sont broyés et vendus à l’export. »Au-delà de cette activité, cette entreprise tente, à son échelle, d’inculquer à travers la collecte de déchets plastique, une culture de la préservation de l’environnement auprès des populations. Pour Abdoul Karim Bakayoko, le responsable de l’approvisionnement, « au-delà de l’aspect financier, l’entrepreneur peut lui-même motiver les particuliers à ne plus jeter leurs déchets plastique, les motiver à trier pour les revendre. » Près de 400 000 tonnes de déchets plastique sont générées dans tout le pays chaque année. Et moins de 10% de ces déchets sont recyclés par de petites entreprises.► À lire aussi : Pollution plastique: les pays d'Afrique plaident pour un fonds d'aide et plus d'audace
6/4/20232 minutes, 23 seconds
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RDC: dans le Masisi, les groupes armés toujours plus présents [3/3]

Dans l’est de la RDC et précisément dans le territoire du Masisi, le départ annoncé des rebelles du M23 en avril n’est pourtant pas synonyme de fin du conflit. Les milices, déjà nombreuses dans la zone, sont désormais plus visibles qu’auparavant. Et cette présence inquiète les habitants. De notre envoyée spéciale de retour de Masisi, Tsegihumva et sa femme sont installés devant leur cabanon. Le couple a fui les affrontements entre groupes armés et militaires congolais et s’est réfugié dans ce village de Busihe en laissant derrière eux leur maison et leur récolte. « Nos vivres ont été pillés », explique Jacques Rozier. « Et puis les cultures à maturité dans nos champs ont été pillés par les hommes armés », ajoute son épouse. Des vols commis par des miliciens ou des forces gouvernementales qui ont appauvri ces agriculteurs.   À Masisi, les miliciens, auparavant combattus par l’armée congolaise, sont désormais visibles partout. Selon Human Rights Watch, certaines milices et militaires se sont alliés dernièrement pour repousser les rebelles du M23. Dans plusieurs localités du territoire, il n’est pas rare de croiser dans les rues ou au marché, des hommes armés, indique une autorité locale de Katalé qui n’a pas donné son nom : « Avant, c’était un peu calme, mais avec les derniers affrontements, les déplacés et la présence des hommes armés et des forces gouvernementales, ça a augmenté le niveau d’insécurité. » Plus de 1 000 vaches tuées ou volées Le nombre de pillages, braquages ou vols a explosé ces derniers mois, ajoute Téléphore Mithondeke, rapporteur de la société civile du territoire de Masisi : « Maintenant, il y a une prolifération de plusieurs groupes. On ne sait même plus qui chapeaute la sécurité dans cette région, ce qui paraît bizarre. Ça doit être éclairé. C'est pourquoi nous disons que cette région nécessite des mécanismes sécuritaires exceptionnels pour protéger à la fois la population et les gisements miniers, car c'est très important. Voilà pourquoi nous donnons notre voix à la mise en place de ce système sécuritaire bien défini pour que la population et les biens soient protégés. »Selon l’association des éleveurs du Nord-Kivu, plus de 10 000 vaches ont été tuées ou volées par des miliciens dans le Masisi et le territoire voisin, le Rutshuru, toujours partiellement occupé par les rebelles du M23. ► À lire aussi : RDC: l'accès à la terre l'un des enjeux du conflit dans le Masisi? [1/3]► À lire aussi : RDC: le Masisi, terre de déplacés [2/3]
6/3/20232 minutes, 6 seconds
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RDC: le Masisi, terre de déplacés [2/3]

En conflit depuis plus de 20 ans, l’insécurité est chronique dans le territoire du Masisi dans l’est de la RDC. Dernier conflit armé en date : celui lié à l’incursion des rebelles du M23 dans la zone début 2023. Aujourd'hui, les éléments du M23 semblent avoir disparu du Masisi, mais cette incursion a jeté sur les routes des milliers de familles fuyant les affrontements entre rebelles du M23, armée et milices. Dans les camps de déplacés, se côtoient anciens et nouveaux arrivants.
6/3/20232 minutes, 2 seconds
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RDC: l'accès à la terre l'un des enjeux du conflit dans le Masisi? [1/3]

Dans l’est de la RDC, le territoire de Masisi est réputé pour ses riches sous-sols en minerai et en espaces agricoles fertiles. L’accès à la terre est depuis l’indépendance source de conflits entre plusieurs communautés - les Hundés, les Hutus et les Tutsis. Des conflits qui impliquent bien souvent des milices dites d’autodéfense communautaires et l’armée. Et début 2023, la percée des rebelles du Mouvement du 23-Mars (M23) dans la zone a une nouvelle fois relancer les conflits fonciers locaux.  De notre envoyée spéciale à Masisi,Dans le Masisi, les rivières coulent et les paysages sont verdoyants. À flanc de collines, les champs se comptent par centaines. Les espaces cultivables n’y sont pourtant pas assez nombreux, explique Baniongu Kitobolo Jérôme, leader de la communauté Hundé du village de Nyabiondo. « Les gens ne trouvent vraiment pas à manger facilement puisqu'il y a un manque de champs et des conflits fonciers. Vraiment, ici, aujourd'hui, c'est tout un problème. Beaucoup de déplacés sont ici. Où est-ce qu'ils vont cultiver s'ils arrivent chez ses amis ? Ils demandent un petit champ. Ça amène des conflits. »Un système de spoliation ancienMais les conflits fonciers dans le territoire n’ont pas démarré avec l’afflux de déplacés fuyant les rebelles du Mouvement du 23-Mars (M23). Dans une école qui lui sert d’abri depuis qu’il a abandonné ses terres en février dernier, François Xavier décrit un système de spoliation ancien : « Ce sont les riches qui envahissent et les pauvres, qui n’avaient rien, ils leur donnaient des vaches ou bien de l'argent pour corrompre. Et puis vous leur donniez votre champ. Puis, vous évacuez : ils vous amènent des militaires, ils vous évacuent dans votre concession. C'est une réalité et encore jusqu'à présent. »Cercle vicieuxCar au conflit de classe et à l’accaparement des terres, s’ajoutent aussi la militarisation des rivalités depuis les années 1990 où des milices disent défendre les intérêts de leur propre communauté.Un cercle vicieux pour les populations civiles, rappelle Voltaire Batundi Sadiki, président de la société civile locale. « Auparavant, il y avait une très grande population qui était dans le cas de déplacé, s'ajoute encore ce calvaire qui vient de s'augmenter suite aux différents affrontements qui ont eu lieu depuis l'entrée des éléments du M23 dans le territoire de Masisi. Ça a vraiment accentué le chaos. »En mars dernier, 72 000 nouveaux déplacés ont été recensés dans le territoire par l’Organisation internationale pour les migrations. 
6/1/20232 minutes, 15 seconds
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Le défi de la Marocaine Meryem Belkihel: traverser l'Afrique à vélo

Depuis le mois de janvier, Meryem Belkihel traverse son continent du nord au sud, à la force de ses mollets, à vélo. Son objectif, c’est de finir sur le toit de l’Afrique, au sommet du Kilimandjaro. Elle s’est lancée un défi sportif, mais pas seulement. La Marocaine veut montrer que c’est possible pour une femme de voyager toute seule dans cette partie du monde, mais aussi rappeler à certains Maghrébins leur africanité. De notre correspondant à Conakry,Un pendentif en forme de bicyclette autour du cou et un bob en pagne sur la tête. On ne peut pas la rater. « Je m'appelle Meryem Belkihel, j'ai 27 ans, je suis une voyageuse marocaine », indique-t-elle. « Je suis en train de faire le tour d'Afrique à vélo. J’ai commencé du Maroc, après la Mauritanie, le Sénégal, la Gambie, la Guinée-Bissau. Et là, je suis en Guinée Conakry. »Un périple suivi sur les réseaux sociauxMeryem Belkihel est plus connue sous le pseudonyme Meghylost sur les réseaux sociaux où elle publie régulièrement des photos et des vidéos de son périple.Quand nous la rencontrons, elle a déjà pédalé sur 5 000 kilomètres. Une fine couche de poussière recouvre son vélo. « J’ai fait un petit nettoyage, mais ça va. Mais avant, c'était vraiment en mauvais état. J'ai essayé de faire quelques montagnes de la Guinée, donc je suis passée par des routes vraiment difficiles. Mais c'était bien, le vélo est bien et il aime l'aventure aussi. » Pas question pour elle d’utiliser un vélo électrique. « Non, c'est un vélo avec les jambes de Meryem », dit-elle en esquissant un sourire. Elle emporte avec elle tout l’équipement nécessaire à son voyage. « J'ai ici les gourdes d'eau sur l'avant et à arrière, j'ai trois sacs pour les vêtements, matériels de vélo et pour la tente, pour le matériel de camping... », énumère-t-elle.Combattre les préjugésC’est sa petite maison, glisse Meryem. Il lui arrive de l’installer au beau milieu de nulle part pour dormir. « En fait, l'un des buts de ce voyage, c'est de prouver que, en tant que femme marocaine africaine, je peux faire ça. »Des dizaines de milliers de Marocains suivent le compte Meghylost, la plupart l’encouragent, certains la critiquent et voilà ce qu’ils lui disent. « “Il ne faut pas faire ça, ils vont te violer, ils vont te harceler, tu vas revenir avec des enfants...” Je ne réponds pas, je bloque. »Son aventure bat en brèche les préjugés que certains Maghrébins peuvent avoir sur l’Afrique subsaharienne. « Il y a beaucoup de choses en commun et je sens qu'on appartient à ce continent. C'est la même chose, ça ne change pas du Maroc. Là, je sens vraiment que c'est la même chose, les Subsahariens, c'est la même hospitalité. »
5/31/20232 minutes, 15 seconds
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Nigeria: le camp de Muna, une réponse thérapeutique à la malnutrition infantile [3/3]

Le Programme alimentaire mondial (PAM) annonce des chiffres alarmants concernant le nord-est du Nigeria. 4,3 millions de personnes sont sous la menace de grave famine au plus fort de la période de soudure, à partir de juin et août 2023. Dans le camp informel de Muna, un lotissement de Maiduguri, une clinique accueille des enfants malnutris et leurs mamans sont accueillis et soignés.  De notre envoyé spécial à Maiduguri,À l’intérieur d’une petite salle de consultation, l’infirmière Awa Mena mesure le tour de bras de Maryam, à l’aide d’un bracelet. La toute petite fille, au visage émacié, s’agite à peine alors que sa maman est davantage soucieuse.Awa observe le bracelet, se redresse puis sourit à l’enfant effrayée, qui la fixe du regard. « Elle souffre de malnutrition aiguë. Elle a vraiment besoin de soins médicaux », explique-t-elle. « C’est pourquoi, en général, je demande aux parents s’il y a des antécédents médicaux dans la famille. Je dois savoir si eux-mêmes souffrent d’une pathologie particulière. Avec ces informations, je vais savoir quels traitements recommander ou vers quels services médicaux orienter. »► À écouter aussi : Nigeria: Iswap, source de l'insécurité alimentaire sur le bassin du lac TchadUn taux de guérison proche de 100 %Dans une autre pièce, Awa saisit, puis montre un sachet à la maman d’Awa. À base d’arachide, cet aliment thérapeutique est destiné aux enfants entre 6 mois et 5 ans. L’infirmière remet à la maman la quantité requise pour Maryam. Grâce à ce produit thérapeutique, le taux de guérison des enfants malnutris dans le campement informel de Muna est proche de 100 %.« On distribue la ration quotidienne à chaque enfant reconnu malnutri », indique Awa Mena. « Les parents suivent les règles. Ils nourrissent leur enfant avec ce produit thérapeutique. Leur mode de vie progresse aussi. Parce qu’on leur enseigne aussi l’hygiène de base personnelle. Au bout de deux semaines, on constate une sensible amélioration et d’autres choses. »Un flux de familles qui ne tarit pasSi la situation est encore sous contrôle, pourtant Awa Mena s’inquiète. La saison des pluies est imminente et le paludisme va malheureusement encore frapper beaucoup d’enfants déjà fragilisés. Surtout, le flux de nouvelles familles arrivant avec des problèmes de sous-alimentation sur le campement de Muna, ne tarit pas. « Ils viennent de leurs villages. Certains viennent de la brousse, d’autres viennent d’autres localités où ils avaient été relogés », poursuit l'infirmière. « Certains viennent ici parce qu’ils ont peu de parents. D’autres encore parce qu’ils ont été chassés de l’endroit où ils se trouvaient et qu’ils ne peuvent plus cultiver la terre. »► À écouter aussi : Nigeria: Iswap, le règne de la terreur sur le bassin du lac TchadLe nombre de ces enfants et adultes sous-alimentés pourrait encore exploser avec les aléas climatiques. Et surtout avec la lourde et insidieuse présence de l’Iswap sur le pourtour du lac Tchad, côté Nigeria.
5/30/20232 minutes, 13 seconds
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Nigeria: Iswap, source de l'insécurité alimentaire sur le bassin du lac Tchad [2/3]

Dans le nord-est du Nigeria, 4,3 millions de personnes risquent de souffrir d'une grave famine au plus fort de la période de soudure, entre juin et août 2023. La pêche et l'agriculture, les deux activités principales de cette zone, sont très perturbées avec les raids et razzias perpétrés par l'État islamique en Afrique de l'Ouest (Iswap).  De notre envoyé spécial à Monguno,Chaque jour, en moyenne 100 nouveaux déplacés internes passent le portail de cette grande cour. Olatunji Jeremiah supervise l'enregistrement des bénéficiaires à l'aide alimentaire. Il travaille auprès d’International Medical Corps, un des partenaires opérationnels du PAM. « Les gens ne sont pas libres d'aller sur leur champ. Aujourd’hui, ils ne sont pas encore libres de faire leur marché. Certains prennent parfois le risque d'aller cultiver quand même. Mais à la fin, vous entendrez qu'ils ont été tués ou kidnappés. Désormais, les gens préfèrent rester en sûreté là où ils sont. Puisqu'ils ne sont plus libres de se déplacer comme ils veulent ici près du lac Tchad. »Quatorze points de distributions alimentaires dans Monguno sont affiliés au PAM. Inna Ibrahim dispose d’une carte magnétique précieuse. Sa famille et elle sont bien éligibles à l'aide. Aujourd'hui, cette maman de sept enfants vient récupérer le soutien alimentaire. Ces deux dernières années, Inna et les siens ont dû fuir cinq localités différentes du jour au lendemain pour échapper aux ravages de l'Iswap. « Nous sommes arrivés au point où nous n’avions plus rien, on avait dépensé tout notre argent. C’est pour cela que nous sommes revenus dans un village proche de notre communauté. En fait, j'ai vécu dans un vrai calvaire avec ma famille avant de commencer à recevoir ce soutien alimentaire grâce à International Medical Corps. »Depuis un mois, Abubakar tente d'enregistrer sa famille sur les listes d’International Medical Corps. Natif de Monguno, ce forgeron est sans revenu. Plus personne ne fait fabriquer des outils pour défricher ou cultiver. « Nous nous couchons avec la faim. Et lorsque les enfants crient famine, nous leur donnons de l'eau chaude pour les aider à dormir. En tant qu'adultes, nous pouvons supporter la faim. En revanche c'est impossible pour les enfants. »► À lire et écouter aussi : Nigeria: Iswap, le règne de la terreur sur le bassin du lac Tchad [1/3]
5/29/20232 minutes, 15 seconds
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Nigeria: Iswap, le règne de la terreur sur le bassin du lac Tchad [1/3]

Dans le nord du Nigeria, 4,3 millions de personnes sont menacés d'une grave famine au plus fort de la période de soudure, entre juin et août 2023, selon le Programme alimentaire mondial. Reportage à Monguno, dans l'État de Borno, où l'insécurité chronique liée à l'État islamique en Afrique de l'Ouest (Iswap) empêche de nombreuses personnes de cultiver leurs terres ou de gagner un revenu. De notre envoyé spécial à Monguno, Abubakar Mohammed est fataliste. Ce trentenaire aux traits juvéniles est un témoin de quasi toutes les attaques majeures de l'Iswap à Monguno. En juin dernier, Abubakar s'est caché avec sa femme et ses enfants lorsque par vagues successives, durant plusieurs jours, ces insurgés du bassin du lac Tchad, véhiculés et lourdement armés, ont tenté d'occuper Monguno.  Les assaillants ont laissé derrière eux plusieurs dizaines de morts. Abubakar était également présent en mars, lors de la dernière tentative d'invasion de cette localité par l'Iswap. « Nous ne dépendons que de Dieu, lance-t-il. Avec la présence des militaires autour de nous, toujours pour notre protection, ces derniers nous encouragent à rester. Selon eux, nous sommes en sécurité. » Ici, évoquer à haute voix l'Iswap est risqué. Car de nombreux membres de ce groupe armé ont des proches et des informateurs vivant à Monguno et dans les environs. À première vue, la situation semble apaisée dans les rues de cette localité. Mais l'Iswap influence insidieusement les consciences de certains habitants. Labo est un déplacé de Baga, situé à quelques kilomètres de Monguno. Ce sexagénaire est le père de sept fils, tous pêcheurs sur le lac Tchad. « Les membres de l'Iswap ne tuent pas comme ça, témoigne Labo. Ils volent simplement vos produits, vos animaux, vos poissons... Et vous imposent de payer des taxes pour différentes choses. Ils interdisent de fumer ou boire, mais ils ne s'attaquent pas aux gens. En revanche, les hommes de Shekau, une fois qu'ils vous trouvent, ils vous tuent ». Habiba refuse de faire ce distingo entre les deux factions concurrentes. Couverte d'un voile intégral rose, cette jeune femme se souvient avec émotion d'un des raids des insurgés. C'était en juin 2020. Devant elle, son père est enlevé et son frère est tué pour avoir opposé une résistance. « Au moment de l'attaque, lorsque mon frère a été tué et mon père emmené, je me suis dit que je n'irais nulle part, se souvient Habiba. Je suis restée prostrée. J'aurais préféré mourir que de vivre cette vie, car ma mère aussi était malade. Elle a fait un malaise lors de l'incident à cause de sa maladie. Il a fallu verser de l'eau pour la ranimer. alors on l'a transportée dans une brouette avant qu'on ne s'échappe. » Et la présence importante et constante de véhicules militaires et de chars blindés dans les rues de Monguno témoigne de la menace permanente générée par l'Iswap.
5/28/20232 minutes, 14 seconds
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En Côte d'Ivoire, le festival Menstrues libres veut lever le tabou des menstruations

Le premier festival en Afrique de l’Ouest consacré à la santé menstruelle a lieu ce week-end à Abidjan. Financé par des ONG internationales, il a pour objectif de libérer la parole sur les menstruations et de changer le regard sur ce sujet encore tabou. De notre correspondante à Abidjan, « Quand tes règles vont venir, il ne faut pas crier “Ouh Maman, je suis blessée ! Y a le sang, y a le sang, je vais mourir !" Non, tu ne vas pas mourir. Toutes les femmes, elles saignent d’en bas. Tu as compris ? » Les explications de la bénévole font rire les écolières arrêtées devant le stand. Ici, pas de tabous…  Le festival s’appelle « Menstrues libres », son logo représente deux doigts tâchés de sang, dressés pour dessiner le V de la victoire. L’événement se veut à la fois militant, informatif et festif, explique sa coorganisatrice Salimatou Baldé, présidente de l’ONG Actuelles : « Tout à l’heure, on va commencer par une petite cérémonie d’ouverture, un panel. Ensuite, on va enchaîner avec un deuxième panel sur la menstruation en milieu carcéral, et comment pérenniser les actions. On fera une petite pause, et au retour, on fera des cercles de parole. Il y en a sur l’acceptation du corps, comment aborder les menstruations avec sa fille… Il y en a plusieurs comme ça qu’on va faire aujourd'hui. » ► À écouter aussi : Priorité santé – Les menstruations Informer pour lutter contre la peur Le festival vise d’abord un public jeune, des adolescentes et pré-adolescentes, mais aussi leurs parents et leurs proches. L’autre coorganisatrice, Amandine Yao, présidente de l’ONG Gouttes Rouge qui intervient en milieu scolaire, dit avoir voulu pallier un manque éducatif : « J’ai une histoire particulière avec les menstruations. En CM2, une amie a eu ses règles en classe et tout le monde s’est moqué d’elle. Depuis lors, je n’ai pas arrêté de me promener avec des serviettes. Et je crois que j’ai eu mes règles en 4e, donc je me suis promenée avec des serviettes longtemps ! Et j’avais vraiment cette peur, de me salir. Et je me suis dit : en tant que féministe, il faudrait que je fasse quelque chose. » L’ONG Equipop a réalisé en 2021 une étude sur les droits et la santé menstruels en Afrique de l’Ouest et du centre. Conclusion : il s’agit d’une porte d’entrée efficace pour aborder les questions liées à la santé sexuelle et reproductive. Mais les obstacles restent nombreux, rapporte Elise Fouillet d’Equipop : « Il y a d’abord la difficulté d’accès aux produits et aux services de santé menstruelle. Le deuxième obstacle, c’est la question des installations sanitaires qui ne sont pas forcément au point, notamment dans les écoles, les lycées, les universités, etc. Et le troisième point, c’est la question des tabous, des préjugés et de la vision très négative des menstrues qu’il peut y avoir, et qui font que les femmes et les filles qui ont leurs règles vivent de l’exclusion sociale, de la honte, des préjugés, ce qui peut mener à la déscolarisation de certaines jeunes filles ou à l’absentéisme scolaire. » Selon cette étude, en Afrique subsaharienne, 1 fille sur 10 ne va pas à l’école pendant ses règles. Ce qui correspond à près de 20% de temps scolaire perdu sur une année.
5/27/20232 minutes, 20 seconds
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Masseka Games, le pari du jeu vidéo 100% africain

Constatant le boom du jeu vidéo sur le continent africain, Teddy Kossoko, un entrepreneur centrafricain installé à Toulouse (sud-ouest de la France), a développé ses propres créations. Au-delà du jeu, l’intérêt revendiqué est la pédagogie. Un reportage de Gwendal Lavina. Créer des jeux vidéo africains. Voilà l’objectif de Teddy Kossoko lorsqu’il lance le studio Masseka Game en 2018. Et en cinq ans, le pari de cet entrepreneur centrafricain semble réussi. Ses deux premiers jeux, une adaptation mobile du Kissoro et un jeu de football dans la peau de George Weah, ont connu un franc succès. Plus de 30 000 téléchargements cumulés. « Le jeu a rempli son objectif initial, qui était de permettre au studio de voir le jour, mais aussi de donner une certaine visibilité sur la scène internationale », se félicite-t-il. Une visibilité primordiale pour Teddy Kossoko. Car le défi de Masseka Games est de mettre en valeur la culture africaine à travers des jeux qui ne s’adressent pas seulement aux utilisateurs du continent. « D’un point de vue visuel, c’est très africain. Les couleurs, les personnages, le décor, les environnements sont purement africains. Par contre, dans la jouabilité, on va faire en sorte que le joueur européen puisse retrouver des codes qu’il retrouve dans n’importe quel jeu dont il a l’habitude de jouer. Donc il ne va pas être totalement perdu », indique-t-il. Découvrir l'Afrique d'antan Une stratégie utilisée dans « La Légende de Mulu », la nouvelle création du studio. Si les graphismes font penser au jeu Minecraft, le joueur incarne ici une jeune fille chargée par son village de récupérer un trésor volé. « L’histoire de Mulu, c’est un mélange de l’histoire de l’Afrique. Ce sont les peuples autochtones qui existent aujourd’hui, mais qui sont martyrisés. En les mettant en avant grâce au jeu, on veut permettre de découvrir ces univers-là, de découvrir l’Afrique d’antan, et de pouvoir un peu voyager dans le temps », explique Teddy Kossoko. Et si ça fonctionne, c’est aussi qu’il y a un engagement de la part des utilisateurs. « Cette jeunesse est connectée, c’est une jeunesse digitale native, observe Mohamed Zoghlami, spécialiste des industries créatives africaines. Et donc ce qu’elle cherche, c’est se réapproprier sa narrative, son identité, et elle veut déconstruire ces représentations. Et les industries créatives numériques vont être son moyen d’expression, et ça, c'est très important ». « La Légende de Mulu » doit sortir courant juin. Quatre autres créations seront disponibles avant la fin de l’année. Avec la même ambition à chaque fois : permettre à la jeunesse africaine de découvrir en jouant la culture de ses ancêtres.
5/25/20232 minutes, 12 seconds
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OUA-UA: 60 ans de musique pour «l'urgence de passer à l'unité africaine»

Le 25 mai 1963, à Addis-Abeba naissait l’OUA, l’organisation de l’unité africaine devenue l’Union africaine en juillet 2002. 60 ans de sommet, des débats pour tenter d’unifier les États du continent, 60 ans de musique aussi. De Bob Marley à Didier Awadi, les artistes n’ont jamais cessé d’appeler à cette unité, signe de puissance politique et d’indépendance pour le continent africain. ► À lire aussi : OUA-UA: 25 mai 1963-25 mai 2023
5/24/20232 minutes, 32 seconds
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Togo: les défis de conservation du Koutammakou, un site entre tradition et modernité [2/2]

Les autorités du Togo veulent mieux mettre en valeur le Koutammakou, seul site du pays classé au patrimoine mondial de l'humanité par l'Unesco depuis 2004. Ce site habité, qui s'étend sur 50 000 hectares, se situe au nord-est de Kara et se prolonge au-delà de la frontière du Bénin. Ce « paysage culturel » se compose de maisons à tourelles en terre crue. Un projet d'un coût estimé à 3 milliards de francs CFA a été validé en février dernier. Ce trésor national fragile a besoin d'être mieux protégé pour ne pas perdre son label Unesco. Les autorités togolaises réfléchissent aussi aux solutions pour répondre aux envies de modernité des plus jeunes. De notre envoyée spéciale à Nadoba, Des femmes, des jeunes et des enfants s'affairent à l'ombre de grands arbres, près de leur takienta. Cette maison à tourelles en terre crue est l'emblème des Batammariba, « ceux qui façonnent la terre ». Un patrimoine que partagent jeunes et moins jeunes du site de Koutammakou. Koumiaka Baloulomé, 23 ans, fils de cultivateurs, étudie désormais à l'université de Kara, mais il reste très attaché à ses racines. Malgré tout, une partie des plus de 2 000 maisons traditionnelles réparties sur le site ne servent plus d'habitation. « Il y a des personnes qui y vivent, des vieilles personnes souvent. Les jeunes, eux, aspirent au modernisme », indiqueBatchatchilé Casimir, le conservateur du site. « À côté des sikiens [autre nom de la takienta, NDLR], il y a des maisons rectangulaires, modernes, en tôle ondulée. Les maisons modernes ne donnent pas trop de corvées de restauration chaque année. Et avant aussi, il n'y avait pas d'habits que les gens portaient. Donc, vous comprenez que dans les maisons traditionnelles, pour vivre dans [ces habitations], où est-ce qu'on va garder sa valise ? Ses vêtements ? » ► À lire aussi : Togo: les défis conservation du site du Koutammakou, un site fragile [1/2] Chercher des solutions pour faire perdurer le site Dans la capitale, l'envie de modernité des habitants du Koutammakou n'a pas échappé non plus à l'ancien conservateur du site. Natta N'Poh Labounamah, désormais à la direction du patrimoine culturel à Lomé en est convaincu : il faut chercher des solutions, pour que le site perdure. « Il y a de plus en plus d'habitants du Koutammakou qui sont allés à l'école et qui reviennent. Je veux dire par là qu'il y a de nouveaux besoins. Je crois que c'est tout à fait légitime. Le mal, c'est que ces constructions modernes, si on n'y prend pas garde, vont changer le paysage du site. Construire des habitats modernes, mais qui respectent au moins les contours, qui respectent aussi la couleur... Ce serait moins frappant. »  « C'est très important de préserver nos valeurs » Pour l'instant, les tourelles typiques de la takienta sont encore bien visibles sur le site de Koutammakou. Et de nombreux Batammariba ne conçoivent pas leur vie sans elle, qui abrite les ancêtres et dans laquelle ont lieu les cérémonies. « C'est très important de préserver nos valeurs. Sincèrement, j'ai un souci là-dessus parce qu'il y a certains jeunes qui trouvent qu'il faut abandonner nos valeurs culturelles, c'est ça qui me fait mal », déplore Koumiaka Baloulomé. Les acteurs de la préservation du patrimoine plaident pour une implication plus forte des communautés et élus locaux, pour que des réponses qui conviennent à tous puissent être trouvées et que le Koutammakou reste encore longtemps un site vivant.
5/23/20232 minutes, 31 seconds
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Togo: les défis conservation du site du Koutammakou, un site fragile [1/2]

Au Togo, les autorités veulent mettre en valeur le Koutammakou, seul site du pays classé au patrimoine mondial de l'Unesco depuis 2004. Un projet d'un coût estimé à 3 milliards de francs CFA a été validé en février dernier. Ce vaste « paysage culturel » habité, composé de maisons à tourelles en terre crue, se situe au nord-est de Kara et se prolonge au-delà de la frontière du Bénin. Un trésor national fragile qui pose de nombreux défis aux équipes de conservation.  De notre envoyée spéciale à Nadoba, Le conservateur du Koutammakou, Casimir Batchatchilé, nous emmène dans une takienta. Une maison à tourelles en terre crue, comme une petite forteresse, dans un paysage ponctué d'arbres, de mares et de bosquets sacrés. Celle-ci appartient à un natif de Nadoba surnommé L'Européen, 72 ans, qui nous reçoit à l'ombre d'un arbre devant la takienta qu'il a construite par tradition. « C'est une maison d'habitation à étages. C'est une forteresse de protection et c'est le temple aussi. C'est sa troisième fonction ça. Il y a des autels qui protègent. » Ce sont ces liens entre habitat et pratiques culturelles, qui font l'identité du site. Des traditions séculaires ; on estime que les Batammaribas, « ceux qui façonnent la terre », se sont établis là entre le 16e et le 18e siècles, sans doute en provenance du Burkina Faso. Une préservation primordiale Casimir Batchatchilé poursuit la visite du site, qui s'étend sur 50 000 hectares. Un site vivant, qui pose de nombreux défis de conservation. Alors que certaines maisons sont quasiment détruites, d'autres sont en construction, toujours à partir de matériaux locaux. « La terre, le bois, et puis la paille... Aujourd'hui, la paille est rare. Le bois se fait aussi rare, mais le site, c'est le paysage tout entier. Donc, le défi, c'est de travailler à préserver l'environnement. En 2018, il y a eu des pluies abondantes qui ont entraîné l'effondrement d'un grand nombre de sikiens [autre nom de la takienta, NDLR]. » Depuis, un projet a été lancé pour recenser les maisons, consigner les pratiques de construction, et créer un comité d'alerte. Car pour l'Unesco, comme pour les autorités et historiens togolais, sa préservation est primordiale. L'archéologue Angèle Aguigah était ministre de la Culture au moment de l'inscription du site au patrimoine mondial il y a près de 20 ans. « Le Koutammakou est un site majeur de l'Afrique parce qu'il est considéré comme l'ile de Gorée, comme les palais royaux d'Abomey, comme les tombeaux des Askia au Mali. Le Togo en est fier. » Plusieurs projets sont en cours, pour mieux valoriser le Koutammakou dont la réhabilitation d'une quarantaine de maisons, lancée début mars.
5/22/20232 minutes, 30 seconds
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Tunisie: Henri Tibi, chanteur juif tunisien symbole de La Goulette des années 1960

Après un succès retentissant à Tunis où il est depuis trois mois à l’affiche, le documentaire Je reviendrai là-bas du réalisateur tunisien Yassine Redissi est sorti à Paris depuis le 17 mai. Il fait revivre le chanteur bohème juif tunisien Henri Tibi, symbole de la diversité et de la mixité sociale du quartier de La Goulette dans les années 1960. Hommage posthume au chanteur qui est décédé en 2013, le film est aussi une ode à la tolérance et au vivre-ensemble. De notre correspondante à Tunis, C’est en écoutant cette chanson sur YouTube en 2011, juste après la révolution, que le jeune réalisateur Yassine Redissi s’interroge sur l’identité du chanteur. Un homme à la barbe bien fournie qui chante dans les rues de Besançon, une Tunisie d’autrefois. « Elle décrivait merveilleusement bien un été à Tunis dans les années 1960, 1970, c’était coloré, c’était jovial. C’était un personnage qui avait une discographie très riche sur l’amour de la Tunisie, sur l’exil, sur le patriotisme, sur la difficulté du départ, etc. » Le réalisateur décide de rendre hommage via un documentaire à cet artiste juif tunisien, méconnu, mais qui à lui seul incarne l’esprit de La Goulette, quartier de la banlieue nord de Tunis. Un quartier où se mélangeaient Maltais, Livournais, Français, Tunisiens, musulmans et juifs avant l’Indépendance du pays. Henri Tibi a photographié quotidiennement cette diversité en parallèle de son activité d’auteur-compositeur. « Donc ces 6 000 archives, il a fallu les numériser d’abord, puis les trier, puis choisir lesquelles seraient dans le film », explique le réalisateur. Au-delà du documentaire, Yassine a travaillé avec le jeune chanteur Slim Ben Ammar sur des initiatives qui visent à pérenniser la mémoire de l’artiste, comme ce concert organisé à l’Institut français. Parfum de nostalgie De nombreux jeunes sont présents dans le public, galvanisés par une nostalgie pour une période qu’ils n’ont pourtant pas connue, comme Nour Bey, 28 ans et juriste. « Je ne peux pas donner d’explication à cet intérêt en fait, sinon un intérêt véritablement identitaire ou une manière de vivre par procuration et aussi, à travers le film, les souvenirs qu’ont mes parents de leurs amis d’enfance juifs », pense-t-elle. Pour Slim Ben Ammar, le chanteur, les paroles d’Henri Tibi sont toujours actuelles : « Moi, ça me parle et aussi à tous mes camarades qui m’ont aidé à travailler cet album, et du coup, on a essayé de dépoussiérer ça. C’est ça la continuité, c’est qu’un film, ça ne meurt pas et que la musique aussi ne meurt pas. » Faute de public après l’indépendance du pays et le départ de nombreux juifs, Henri Tibi était parti finir sa vie en France, chantant à Besançon qu’il reviendrait un jour dans sa terre natale. 
5/21/20232 minutes, 15 seconds
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RDC: les maisons closes prolifèrent dans les camps faute d'appui alimentaire [2/2]

La situation des déplacés de guerre dans les camps installés dans et aux alentours de Goma est toujours aussi difficile. Fuyant les zones occupées par le M23, ces personnes vivent dans des conditions déshumanisantes et l’aide apportée par les agences onusiennes et des ONG n’est pas suffisante. Face à cette situation, des réseaux de prostitution prolifèrent dans ces camps qui voient exploser également le nombre de maisons closes. De notre correspondant de retour de Goma, Une bâche déployée, une natte à peine visible et quelques bouteilles de whisky vides. La journée, cette petite cabane au milieu du site de déplacés se transforme en maison close, pointe discrètement Théthé, qui est arrivée depuis trois mois. « Parfois, nous nous donnons nous même parce que les enfants passent la nuit affamée. Quand tu vois, là où il y a même un sérum contre la faim, tu te donnes pour les enfants, pour leur paix ». Cette prostitution à peine voilée touche également les mineures. Nina voit les adolescentes sortir de ces huttes quasiment toutes les nuits. « Il y a des cabanes ici à l’intérieur du camp où on exploite sexuellement les jeunes filles. Les mineures sont les plus exploitées. C’est à cause de la faim et du manque de travail », avance Nina. ► À écouter aussi : RDC: un «fil de discussion» sur Twitter contre la prostitution Pour lutter efficacement contre ce phénomène, Nina fait des propositions. « Aidez-nous, apportez-nous des activités génératrices de revenus pour les jeunes et pour les femmes. Cela va nous aider. Publiez aussi des offres d’emploi dans le camp pour les jeunes et les femmes déplacées qui ont étudié. Nous avons besoin de travailler », martèle-t-elle. Une prostitution alors que les violences sexuelles se multiplient dans les camps Bruno Lemarquis, le représentant spécial adjoint du secrétaire général des Nations unies, est conscient que l’aide seule ne suffira pas. « On n’appuie pas suffisamment la création des revenus, des petits emplois. C’est possible », concède-t-il. « Il y a des techniques qui existent et cela a été fait dans d’autres sites de déplacés. Ces techniques permettent d’avoir une petite agriculture rapide, en trois mois sur des minuscules lopins de terre, même à l’intérieur d’un pneu, on peut faire pousser des légumes. Il faut vraiment mettre l’accent sur ça pour ne pas uniquement compter sur la distribution ». Cette prostitution des jeunes filles des camps se déroule par ailleurs dans un contexte de multiplication des violences sexuelles. L'ONG Médecins sans frontières se dit assaillie par des victimes de plus en plus nombreuses. « Nos équipes médicales prennent en charge en moyenne 48 nouvelles victimes de violences sexuelles par jour sur les sites », explique Jason Rizzo, coordinateur d’urgences de l’ONG au Nord-Kivu. « C’est un nombre catastrophique, ce qui montre l’urgence médicale et humaine à laquelle nous faisons face ». ► À lire aussi : RDC: explosion des violences sexuelles dans les camps de déplacés du Nord-Kivu Dans ces conditions, l’ONU demande au gouvernement congolais de rendre disponibles d’autres espaces permettant une meilleure prise en charge de déplacés en attendant la pacification des territoires touchés par les violences.
5/20/20232 minutes, 17 seconds
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RDC: explosion des violences sexuelles dans les camps de déplacés du Nord-Kivu [1/2]

En à peine deux semaines, plus de 670 victimes de violences sexuelles ont été prises en charge par les équipes de Médecins Sans Frontières (MSF) dans et aux alentours du chef-lieu de la province du Nord-Kivu. Un pic rarement atteint. Ces victimes sont des déplacées installées dans différents sites, dont Eloime, Munigi, Lushagala, Kanyaruchinya, Rusayo et Bulengo, près de Goma. Comment expliquer cette explosion de cas ? Reportage à Bulengo.  De notre correspondant de retour de Goma,  Feza revient de la colline qui supplante le camp de déplacés. Le colis de bois de chauffe à ses pieds, elle reconnaît être chanceuse, elle n’est pas tombée entre les mains d’hommes armés. « À cause du manque, les femmes se rendent dans la forêt pour couper le bois de chauffe, explique-t-elle.  Malheureusement, il y a des groupes armés et les rebelles. Ils sont nombreux là-bas. Nous nous demandons souvent : sommes-nous toujours dans notre pays, le Congo, ou sommes-nous des étrangers ? ». Dans cette zone, les femmes vivent la peur dans le ventre. « À cause de la faim, je suis obligée d’aller dans la forêt, témoigne Amina. Malheureusement, c’est une zone que je ne connais pas. Nous allons souvent vers la cité de Saké. Et là-bas, quand ces gens te croisent, ils te prennent de force. Tu ne pourras même pas savoir qui sont ces gens. Ils te prennent, te bandent les yeux et te ligotent. Tu ne sauras pas qui t’a fait ça. Si tu as de la chance, on va te retrouver et t'emmener à l’hôpital » À lire aussi : RDC : une loi pour des réparations en faveur des victimes de viol Des viols au sein même des sites des déplacés Même à l’intérieur du camp, les femmes ne sont pas épargnées. À côté de sa fille de trois ans, Ange vit toutes les nuits dans l'inquiétude pour elle et sa fille. « Vous voyez où nous habitons, ce n’est qu’une moustiquaire, montre-t-elle. Il n'y a même pas de bâche, pas de porte. Les hommes de ce camp, ou même ceux de l’extérieur, peuvent entrer sans difficulté. Tu ne peux pas crier. Certains viennent avec un couteau, ou une machette, d'autres ont même des fusils ». Ange aurait aimé être entendue, protégée et croire en la justice, mais elle préfère se taire : « Tu ne peux même pas dénoncer ton agresseur parce qu’il peut te tuer. Il y en a même qui reviennent le lendemain pour te menacer de mort ». Préoccupé, Bruno Lemarquis, le représentant spécial adjoint du secrétaire général des Nations unies, attend également l’implication des autorités congolaises. « Il y a beaucoup de problèmes d’insécurité, relate-t-il. C’est toute la question du rôle de la police. Le gouverneur nous a expliqué les mesures qui sont en train d’être prises. On comprend les contraintes au niveau des effectifs, mais c’est un gros souci ». Entretemps, sur le terrain militaire, M23 et FARDC se regardent toujours en chiens de faïence. À lire aussi : RDC : le camp de Bulengo à Goma au bord de la saturation
5/19/20232 minutes, 9 seconds
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Côte d'Ivoire: contre l'excision, la reconversion des matrones

Comment lutter contre l’excision de manière pérenne ? Dans l’ouest de la Côte d'Ivoire, où près des 62% des femmes de 15 à 49 ans ont été excisées, une association mise depuis plusieurs années sur la reconversion des matrones. Souvent indexées, ces dernières se voient attribuées des rôles plus valorisants dans des métiers qu’elles maîtrisent déjà. De notre envoyée spéciale à Biankouma,  Dans son jardin, Chantal Lolé entretient une cinquantaine de plantes médicinales. « Ce sont des feuilles de Néré. Quand la plante pousse bien, j’enlève l’écorce, je la prépare. Je l’utilise chez la femme enceinte en cas de saignement. Et ça marche », explique-t-elle. Il y a là des plants de citronnelle, de coton, des corossoliers… Toutes ces plantes ont une fonction : soigner les maladies infantiles et atténuer les douleurs durant la grossesse des femmes enceintes. Chantal Lolé a choisi d’abandonner la pratique de l’excision pour se consacrer à la médecine traditionnelle. « Je me consacre à la santé des femmes enceintes et à leurs bébés. J’ai moi-même été excisée étant petite. Et ne veux pas que mes petits enfants soient excisés. En me consacrant à cette nouvelle activité, j’utilise mes connaissances pour les femmes enceintes. Et leurs maris sont reconnaissants : ils me remercient et m’offrent des cadeaux, ça ne m’était jamais arrivé avant ». ► À lire aussi : Excision: mieux informer les mères et leurs filles pour lutter contre cette mutilation Un nouveau rôle Même déclic pour Elisabeth Soumahoro, une femme d’âge mûr qui accompagne les femmes enceintes pendant leur grossesse. Elle les aide à accoucher. Elisabeth a inscrit dans un cahier les dizaines de naissances qu’elle accompagne depuis le début de l’année. « J’aime ce métier, car je donne la vie à des enfants. Avant, lorsque je pratiquais l’excision, on faisait des fêtes au village, on me donnait des repas. Mais je ne gagnais pratiquement pas d’argent. Aujourd’hui, j’accompagne les femmes pendant leurs grossesses. Elles se confient à moi. Il y a une confiance qui se crée entre nous. Et leurs maris me sont reconnaissants : ils me paient pour me récompenser. » Depuis une quinzaine d’années, l’association Aséza accompagne une centaine de matrones dans 18 villages. Elle les conseille dans leur reconversion, dans la médecine traditionnelle, ou bien comme accoucheuse. Une manière de conserver leurs connaissances tout en abandonnant l’excision.  ► À lire aussi : L'excision et les mutilations sexuelles en baisse en Afrique « Elles ne partageaient par leur savoir-faire, c'était caché. Il fallait y aller progressivement pour qu'elles comprennent qu’on ne venait pas leur arracher leurs connaissances, ou bien que ça n'allait pas les affaiblir. Ces femmes-là, elles veulent rester importantes aussi dans leur société. Pour les matrones, l'important n'est pas forcément les revenus, mais la notoriété. Si elles ont ça, elles pourront arrêter l'excision. Les plantes, ça fait partie aussi de la santé, ça permet aussi à des personnes d'être importantes. » Les matrones accompagnées par cette association bénéficient aussi d’un local, où elles peuvent faire leurs consultations et se réunir pour échanger leurs expériences. ► À lire aussi : Excision en Afrique: quand les hommes aussi veulent aussi en finir
5/18/20232 minutes, 33 seconds
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Au Gabon, le recours à la procréation médicalement assistée augmente

Il y a un an, le gouvernement gabonais a ouvert un service PMA dans le CHU Mère et Enfant de Libreville. Hésitants au départ, les couples stériles prennent d’assaut ce service dont les premières naissances ont convaincu ceux qui doutaient encore. Mais la PMA reste un sujet tabou, une honte d’avoir un bébé grâce à un laboratoire. Reportage au service PMA du CHU. Par Jeanne Ébori ► À lire aussi : Cameroun: adoption du projet de loi sur la procréation médicalement assistée
5/17/20232 minutes, 24 seconds
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Tchad: les «Aunties», l'émancipation par la musique

Elles sont neuf, sont tchadiennes et se nomment les « Aunties » (« les tanties », en anglais), car elles visent un public international. Le groupe de musique est le nouveau projet produit par la star tchadienne de l’électro Afrotronix. Sur des rythmes modernes, ces mamans de toutes générations chantent en langue sara – une ethnie du sud du Tchad – leur combat pour l’émancipation des femmes. La plupart ont un parcours difficile. Victimes d’un mari violent ou chassées de leur foyer, parfois privées de leurs enfants, elles surmontent les obstacles et s’affirment par la musique. Notre correspondant dans la région les a rencontrées au cours de leur résidence en banlieue de Ndjamena alors qu’elles mettent la touche finale à leur premier album et préparent une tournée. Leurs prochaines dates de concert au Cameroun : le 13 juin à l’Institut français à Douala et à l’esplanade du musée national de Yaoundé.
5/16/20232 minutes, 39 seconds
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Centrafrique: le mystère des accidents de la route sur la falaise de Kassango

La falaise de Kassango est réputée pour de très nombreux accidents de circulation ces 20 dernières années. Située à l'entrée de Boali, à 95 km au Nord-Ouest de Bangui, elle est impitoyable à l’endroit des véhicules de transports en commun et de tous les conducteurs imprudents. En 23 ans, selon la gendarmerie de Boali, les accidents ont fait près de mille victimes. Ces accidents sont provoqués parfois par la dégradation des routes, l'excès de vitesse, le manque d'entretien des véhicules, mais aussi des causes mystiques, selon certaines légendes. De notre correspondant à Bangui, Le jour se lève progressivement dans la falaise de Kassango. Il est 5h du matin et le ciel est orageux. « Comme vous le constatez, le degré du risque est élevé. La falaise de Kassango ne parle pas, tout simplement parce qu'il n'y a pas de lampadaire, ni de panneaux de signalisations. Les véhicules entrent, s'entremêlent et sortent à 500 m d'altitude avec tous les risques. »  C'est la voix de Justin Yalingou, secrétaire de la Fédération des transporteurs de l'Afrique Centrale. Avec lui, nous parcourons les 5 km de cette route au milieu des collines de 500 m d'altitude. Les premiers camions commencent à circuler à partir de 7h. La falaise de Kassango compte une dizaine de virages à couper le souffle. Chaque croisement est périlleux et chaque vue est époustouflante.  Signe de croix et prière De part et d'autres, on peut voir des carcasses de camions au fond des trous profonds. À chaque fois qu'il veut emprunter cette route, Pacôme De Sylva fait le signe de croix et récite sa prière. Il est chauffeur entre Bangui et le Cameroun. « La falaise de Kassango est très dangereuse. Je sais que les véhicules tombent ici pour plusieurs raisons », dit-il. « Mais les anciens qui habitent dans les environs nous racontent qu’il y a des fantômes dans cette falaise. Ces êtres surnaturels provoquent par moment des accidents afin de recueillir le sang des victimes. Je n’y crois pas trop, mais à chaque fois, je prie avant de traverser ces successions de virages en forme de S ». Chercher des solutions pour prévenir les accidents En novembre 2022, un bus de transport en commun s'est écrasé dans la falaise de Kassango. 42 personnes ont trouvé la mort sur les 70 passagers. Colette Malebanga fait partie des survivants. Amputée à la jambe gauche, elle raconte comment elle a vécu ce drame. « C’est en descendant la falaise de Kassango que les roues avant du bus ont éclaté », explique-t-elle. « Le véhicule a fait une chute vertigineuse pour se retrouver au fond du ravin. J’étais inerte, mais je pouvais entendre certaines victimes qui appelaient vainement au secours. J’ai perdu connaissance par la suite et je me suis réveillée à l’hôpital avec une jambe amputée ».  Comment prévenir les accidents dans la falaise de Kassango ? Justin Yalingou propose une solution : « Il faut sensibiliser les conducteurs, les camionneurs, sur les trajets. » Tous les jours, des centaines de véhicules, motos et piétons empruntent cette route. La plupart sont des camions de grandes lignes qui font la navette entre Bangui et le Cameroun.
5/15/20232 minutes, 17 seconds
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Afrique du Sud: la foire d'art contemporain veut réinvestir le centre de Johannesburg

Johannesburg sera bientôt la capitale de l'art contemporain, le temps d'un week-end. La plus grande ville d'Afrique du Sud accueillera la foire internationale d'art contemporain « RMB Latitudes » du 26 au 28 mai. En parallèle de cet événement, plusieurs studios d'artistes seront ouverts au public dans le centre de Johannesburg. Le cœur de cette métropole est devenu un repoussoir pour nombre de Sud-Africains, effrayés par la criminalité et la déliquescence des infrastructures. Cette initiative vise à redorer le blason de cet ancien Manhattan africain. De notre correspondant à Johannesburg, Le centre de Johannesburg a mauvaise réputation et c'est parfois justifié. « Je me suis fait voler dans le centre-ville... Je ne suis pas traumatisée, mais comme pour tout le monde ici, on est toujours un peu anxieux, peu importe qui vous êtes ou ce que vous faites. Mais vous finissez par apprendre à vivre avec et à voir le bon côté des choses », raconte Attiya Sayyed. C'est une blogueuse voyage et culture qui est arrivée à Johannesburg il y a moins de trois ans. Elle a réussi à surmonter cette mauvaise expérience. Selon elle, l'ouverture au public de studios d'artistes dans le centre-ville est une bonne étape pour apprivoiser la ville. « Maintenant, je vais régulièrement dans le quartier de Fordsburg par exemple. Mais la première fois, c'était grâce à Open Studios. En participant à cet événement, je me suis rendu compte que le quartier abritait des lieux et des restaurants qui m'intéressaient. Cette initiative vous permet d'explorer la ville. » Refuge d'artistes Nous visitons justement le quartier de Fordsburg. À l'angle d'une rue, un bâtiment défraichi construit en 1913 abrite un restaurant pakistanais au rez-de-chaussée. Et à l'étage, une résidence d'artiste, occupée notamment par Gordon Froud, heureux de pouvoir partager son amour du quartier. « Les gens sont toujours un peu effrayés par la ville, donc c'est super de les voir venir ici. On mettra quand même des agents de sécurité à l'entrée ! À partir du moment où les gens montent ici, ils n'en croient pas leurs yeux. Si bien qu'à la fin de la journée, il faut leur courir après avec un balai pour les faire partir ! » Signe de son succès, l'événement Open Studios est passé de 2 à 11 ateliers d'artistes qui seront ouverts pour le dernier week-end de mai. Si une partie des habitants de Johannesburg a déserté le centre-ville, les artistes y ont trouvé refuge, explique Sara Hallatt, directrice d'Open Studio. « Partout dans le monde, les artistes occupent des espaces où les loyers sont bas. Et le centre-ville de Johannesburg est très abordable. Si notre projet continue à grandir et que le centre-ville retrouve son lustre d'antan, j'espère que ces espaces seront préservés. » Le cœur de Johannesburg devrait encore échapper à la gentrification pour encore quelques années. Mais la venue d'un nouveau public, aisé et cultivé, pourrait modifier le regard que les habitants portent sur le centre-ville et encourager la municipalité à prendre soin de ce trésor abandonné.
5/14/20232 minutes, 15 seconds
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Côte d'Ivoire: l'artiste Julien Vignikin exposé à Abidjan avec «Interactions»

Originaire du Bénin, l’artiste plasticien Julien Vignikin a planté son chevalet en Bourgogne et expose tantôt en France, tantôt en Afrique. Il a choisi la Côte d’Ivoire pour sa première exposition solo sur le continent, « Interactions », qui présente une œuvre métissée et profondément inspirée de Jean-Michel Basquiat. De notre correspondante à Abidjan, « On voit une statuette primitive et, à droite, on voit une espèce de plâtre qui fait la pose de David dans la sculpture classique en Europe. Moi, je fais juste le lien entre les deux. En utilisant un code barre, et le Fa. Le Fa, qui est l’art divinatoire dans les pays de l’Ouest africain. » Relier les arts traditionnels ouest-africains et occidentaux, c’est le projet au cœur de l'œuvre de Julien Vignikin, exposé en ce moment à la galerie Amani d’Abidjan. Le peintre est né et a grandi au Bénin avant de partir vivre en France à l’âge de 10 ans et d’y faire ses études : les Beaux-Arts de Dijon, d’abord, puis du graphisme à Paris. Il reconnaît avoir eu « un parcours assez chaotique », avant de trouver sa voie : la peinture. Le plasticien vit et travaille désormais en Bourgogne, mais c’est vers son continent natal qu’il se tourne pour puiser l’inspiration. « En prenant de l’âge, je me suis rendu compte que quelque chose me manquait. C’est cette énergie que dégage l’Afrique qui m’a rappelé. En ce moment, je suis dans un travail de recherche plastique, technique, où je travaille sur des visages un peu masqués… C’est un peu un travail d’archéologue. » Un message à passer à travers les toiles En 2021, les toiles de Julien Vignikin impressionnent Léon N’Guetta, le directeur de la galerie Amani, lors d’une exposition collective à Abidjan consacrée à la scène contemporaine béninoise. « Par rapport aux autres, son écriture était beaucoup plus engagée. Plus… Je ne dirais pas “violente”, mais en tout cas il n’était pas là pour plaire à la galerie, et surtout il avait un message à passer. Les peintres qui ont des choses à dire, il n’y en a pas beaucoup, et dans ce sens, il m’a plu. Je pense que Vignikin, ce qu’il cherche lui-même, c’est un retour aux sources, du fait qu’il ait vécu longtemps en France, un retour vers ses origines. Et d’ailleurs, on le voit dans sa peinture actuelle. » Et le public, lui aussi, est conquis. « Pour moi, c’est une très belle découverte. Même si ces œuvres sont contemporaines, ça m’a rappelé l’art traditionnel africain. Un savoir-faire ancestral qui a perdu de sa valeur au fil des années. Et je trouve ça beau à voir qu’un Africain, justement, parvienne à garder nos mémoires. » L’exposition continuera à la galerie Amani jusqu’au 24 juin.
5/13/20232 minutes, 30 seconds
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Côte d'Ivoire: opération séduction des grands restaurants avec la «Abidjan restaurant week»

Tiramisu à la mangue, sushi, pâté au poivre de Tiassalé. Avis aux gourmands, en Côte d’Ivoire, la « Abidjan restaurant week » s’achève ce samedi soir 13 mai : tout au long de la semaine, des grandes tables de la capitale économique ont ouvert leurs portes au grand public, en proposant des formules attractives. Leur objectif : faire découvrir une cuisine du monde à petit prix. Ce festival témoigne aussi du dynamisme de la gastronomie abidjanaise.
5/12/20232 minutes, 16 seconds
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Sénégal: hommages pour les 50 ans de la mort d'Omar Blondin Diop

Au Sénégal, des cérémonies sont organisées depuis jeudi 11 mai et jusqu’à samedi, 50 ans après la mort d’Omar Blondin Diop. Cet intellectuel révolutionnaire, panafricaniste et figure du mouvement post soixante-huitard, est mort en détention le 11 mai 1973 sur l’île de Gorée, sous le régime de l’ancien président Léopold Sédar Senghor. Officiellement, c’était un suicide. Mais 50 ans après, la famille et les proches d’Omar Blondin Diop demandent une réouverture du dossier, et transmettent son héritage. De notre correspondante à Dakar, Récital de Coran sous un manguier dans la cour de la maison familiale en mémoire d’Omar Blondin Diop. Pour Dialo Diop, l’un de ses frères, ses idées, ses réflexions politiques restent plus que jamais d’actualité. « Le problème du néocolonialisme, sur le fait que les sociétés impérialistes colonialistes esclavagistes étaient elles-mêmes des sociétés aliénées, des sociétés à transformer exactement comme l'Afrique... On a l'impression qu'il parle du monde d'aujourd'hui », explique-t-il. « Omar avait un formidable appétit pour la vie » C’est au cimetière de Soumbédioune, face à la mer, qu’Omar Blondin Diop a été enterré après son décès en cellule dans la prison de Gorée, à l’âge de 26 ans. Alioune Sall, son ami et compagnon de route, est surnommé Paloma, son « nom de guerre ». Il se souvient de l’annonce de la mort de son camarade le 11 mai 1973. « J'étais en prison, j'avais été transféré de Gorée au camp pénal », se rappelle-t-il. Il n’a jamais cru à la thèse du suicide. « Je connais Omar, je sais qu'il avait un formidable appétit pour la vie, une combativité, une résistance », explique Alioune Sall. « Mais je crois que les idées qu'il incarnait faisaient peur, parce que c'étaient des idées de rupture, dans un contexte où le dirigeant sénégalais a pensé qu'au fond, c'est le passé des autres qui devait servir d'avenir au Sénégal. »  Le « Che Guevara africain » Né à Niamey, brillant étudiant du lycée Louis Le Grand puis de Normale Supérieure en France, Omar Blondin Diop est passé entre autres par la Syrie, l’Algérie, avant de s’installer Mali. C’est là qu’il a été arrêté en 1971 puis extradé à Dakar. Aguibou Diarra H. a fait le voyage depuis Bamako pour participer aux cérémonies. Il raconte : « C'était le temps de la révolution. La Garde rouge en Chine, Mai-68 en France, les Tupamaros, le Black Panther... Nous étions en contact avec tous ces mouvements. Oumar, c'est le “Che Guevara africain”. » Un nouvel écho pour une figure restée méconnue Cinquante ans plus tard, la figure d’Omar Blondin Diop reste méconnue au Sénégal comme dans la sous-région, mais trouve un nouvel écho, estime l’historien Florian Bobin qui travaille sur une biographie de l’intellectuel et militant.  « Depuis une dizaine d'années, c'est une mémoire qui ressurgit régulièrement dans le champ militant et artistique sénégalais. Mais au-delà de ça, il y a aussi un travail de diffusion à faire et puis [il faut] lever le tabou et rouvrir le dossier sur sa mort. » La famille et les proches se basent sur un fait nouveau : le témoignage, dans un documentaire, de Moustapha Touré, doyen des juges d’instruction à l’époque – aujourd’hui décédé –, qui remet en cause la thèse du suicide. 50 ans après, pour Dialo Diop et ses proches, le combat continue : « C'est un mur qu'on finira par faire tomber. C'est une question de temps. »
5/11/20232 minutes, 25 seconds
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Kenya: après l'horreur de la secte Mackenzie, l'encadrement des cultes fait débat

Au Kenya, 133 dépouilles ont été exhumées dans la forêt de Shakahola fin avril. Elles sont présumées être celles de fidèles d’une secte appelés à jeûner pour « rencontrer Jésus ». À sa tête, le pasteur autoproclamé Paul Mackenzie Nthenge, aujourd’hui en détention. Un autre pasteur, Ezekiel Odero, a aussi été arrêté avant d'être relâché contre le paiement d'une caution. Ces deux cas ravivent le débat autour de l’encadrement des cultes au Kenya.  Sur YouTube, n'importe qui peut regarder en direct Ezekiel Odero prêcher devant des centaines de fidèles. Très populaire, l'Église de ce télévangéliste n'est qu'une parmi des milliers au Kenya. Le pays, profondément religieux, connaît une prolifération des cultes. Un essor qui s’accompagne de quelques dérives, allant des abus financiers aux discours extrêmes.  « Il est difficile de lutter contre cette prolifération, car la Constitution de 2010 est très claire : le Kenya protège la liberté de culte et la liberté d’association, relève Stephen Akaranga est professeur en études religieuses à l’Université de Nairobi. Il faudrait en théorie que tous ces mouvements religieux soient mieux encadrée, mais dans ce contexte, qui va oser prendre des actions fermes à leur encontre ? »  ► À lire aussi : Massacre de Shakahola au Kenya: des autopsies révèlent des organes manquants sur certains des corps D'autres églises sous surveillance  D’après la loi kényane, les Églises doivent se déclarer auprès de l’État. Mais les contrôles manquent et les autorités n’arrivent pas à suivre les demandes. Plusieurs organismes religieux appellent l’État à leur déléguer la tâche. C’est notamment le cas du Conseil national des Églises au Kenya, une organisation qui regroupe plusieurs Églises chrétiennes. « C’est possible qu’il y ait d’autres Mackenzie, prévient le révérend Chris Kinyanjui, secrétaire général de l'organisation. Plusieurs pasteurs ont déjà été signalés. Il est donc temps de mettre en place un système d’autorégulation qui nous permettrait de surveiller toutes ces Églises. Nous sommes les mieux placés pour nous contrôler, nous savons qui sont les mauvais élèves et qui sont les bons. D’autres professions le font, les organisations religieuses peuvent mettre en place un système d’autodiscipline. Mais il faudrait pour cela que chaque Église soit rattachée à une organisation-mère. »  ► À écouter aussi : [Vos réactions] Kenya: des sectes sur la sellette Plusieurs tentatives d’imposer un encadrement plus strict ont été vivement contestées par le passé. Notamment par les organismes religieux, très influents au Kenya. « Il n’est pas possible de séparer le politique du religieux au Kenya, observe encore le révérend Chris Kinyanjui. Cela pose un vrai conflit d’intérêt, c’est certain, car la majorité de nos politiques font partie d’un mouvement religieux et entretiennent des relations proches avec certains leaders religieux. Mais il me semble que dans le contexte actuel, celui du massacre de Shakahola, il faut arriver à passer outre ces conflits d’intérêts. »  Le président William Ruto vient justement d’annoncer la mise en place d’un groupe de travail. Cette commission est chargée de formuler des pistes d’actions pour éviter les dérives sectaires de certains mouvements religieux.  ► À lire aussi : Kenya: le président William Ruto en visite officielle de deux jours en Israël
5/10/20232 minutes, 17 seconds
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Maurice: Pamplemousses, un village marqué par l'histoire de l'esclavage

Façonnées par les esclaves, les plantations sucrières de Maurice portent encore la mémoire de ce passé. Des routes, des édifices ainsi que des lieux caractéristiques de cette période émeuvent encore les habitants, notamment les descendants d’esclaves. Comme dans le village de Pamplemousses au nord de l’île. Comment vit-on dans une terre qui porte les traces de l’esclavage ? « Ici, si je ferme les yeux, je peux de dire comment c’était auparavant. » Eric Juliette, la soixantaine, vit à Pamplemousses, à l’époque chef-lieu du commerce des esclaves à Maurice. Ce district du nord regroupe 18 villages. Il porte pleinement les marques de l’esclavage, presque deux siècles après son abolition dans l’île. « Moi, ce qui est forte dans ma tête, c'est le bassin des esclaves. Les barons venaient ici, sur leurs carrosses, comme-si c’était une fête, et ils achetaient des esclaves ». Eric Juliette nous montre alors le marché des esclaves, un espace d’environ 10 m2 de pierres taillées où les hommes noirs étaient lavés comme des bêtes avant d’être vendus au marché d’à côté. Le même quartier abrite le cimetière où est enterré l’une des figures esclavagistes les plus connues de Maurice, Adrien d’Épinay, Christian Lodoïska, 70 ans, ancien ouvrier de la propriété sucrière du village, nous monte le lieu d’enterrement, de « ce marchand d’esclaves » pour reprendre ses mots. Dans sa famille, la tradition orale a transmis de nombreuses descriptions sur les pratiques de l’époque : « Dans les champs de cannes, quand le maître s’adressait à un surveillant, il ne se tenait jamais près de lui. Il va s’éloigner à 50, 100 mètres. Il fallait qu’il voie le surveillant courir, son chapeau sous le bras, pour venir à sa rencontre. C’était comme ça ». Pamplemousses abrite la troisième plus ancienne église de Maurice. L’église Saint-Francois-d’Assise est classée patrimoine national pour la qualité de son architecture et son histoire. Véronique Candahoo, jeune professeure d’éducation physique, ne peut s’empêcher d’être mélancolique : « Ça m’émeut de par mon origine, je suis une descendante d’esclave. Quand je regarde autour, je vois vraiment l’empreinte de ses esclaves. Et avec le temps qui est gris, on a l’impression qu’on est à l’époque. » Une époque qui a mis du temps pour se défaire de certaines pratiques. Kristel Sylva, 44 ans, se souvient des sièges numérotés de l’église durant son enfance : « Les bancs étaient numérotés, ils étaient pour les blancs uniquement. Même moi j’étais au courant de cela. Quand on venait à la messe, on restait à l’arrière, on n’avait pas accès là où c’était numéroté. » Une époque révolue.   Si les us et coutumes du passé négrier de Maurice se sont effacées, ses séquelles trainent encore dans de nombreux villages sucriers. Édition spéciale consacrée aux Mémoires de l’esclavage ce mercredi soir de 19h10 à 20h (17h10-18h TU).
5/9/20232 minutes, 23 seconds
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Centrafrique: la cueillette des champignons, un moyen de faire face à la hausse des prix de l'alimentation

Leur cueillette est devenue une source de revenus importante pour de nombreuses familles. Alors que la Centrafrique doit faire face depuis plusieurs mois à une hausse des prix des denrées alimentaires, les champignons arrivent à point nommé notamment pour les familles les plus démunies. Des champignons qui poussent en quantité dans les forêts de Boali, une ville située à une centaine de kilomètres au nord de Bangui.
5/8/20232 minutes, 17 seconds
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Tchad: la famille Abdallah, réfugiée soudanaise, rêve de paix

À l'extrême Est du Tchad, 20 000 à 30 000 Soudanais fuyant les combats se sont réfugiés, selon le Haut-Commissariat des Nations unies pour les réfugiés (HCR). Dès l’éclatement du conflit, Ndjamena a décidé de fermer sa frontière avec le Soudan, mais un corridor humanitaire reste ouvert pour laisser passer les civils, mais fuir reste extrêmement risqué, car les routes sont contrôlées par des milices. Reportage avec la famille Abdallah, dont le père Youssouf Abdallah rejoint sa femme, sa grand-mère et ses cinq enfants dans le village tchadien de Koufroun. De notre envoyé spécial à la frontière soudanaise,  Enfin ! Le Tchad et la sécurité… Youssouf Abdallah passe la douane avec un grand sourire, le pouce levé vers le ciel. Soulagé d’avoir traversé les quelques kilomètres de route, contrôlée par les Forces de soutien rapide (FSR) et leurs alliés, les sanguinaires milices janjaweeds.  Youssouf raconte son périple : « C’est pour chercher la sécurité qu’on vient s’installer ici au Tchad. Là-bas, c’est le chaos, les janjaweed sèment la terreur. On était en plein coeur des affrontements là-bas, on a vu les gens se tirer dessus. J’ai vu beaucoup des blessés et des morts aussi. Beaucoup. L’armée soudanaise ? Non… L’armée, elle, a pris la poudre d'escampette. Elle s’est réfugiée au Tchad… Même les policiers ont fui ! » ► À lire aussi : Soudan: une crise au cœur d'enjeux internationaux stratégiques Sauver un maximum d'affaires Il rejoint sa famille, déjà à l’abri. À l’arrière du pick-up, le peu d’affaires qu’il a pu sauver des pillages : « Des vêtements, une couverture, un lit, du bois pour le feu… Il ne nous manque plus qu’à trouver un peu d’ombre et on sera bien ! » C’est chose faite au pied de ce grand fromager. Le déchargement peut commencer : « Allez ! Allez ! Attrape ça par l’autre côté ! Non mais tiens le bien ! » Un seul regret : sa machine à coudre. Son outil de travail et seule source de revenus que Youssouf a dû laisser derrière lui, faute de place : « La, priorité, c’était d’évacuer les enfants. Le reste, peu importe. Mais si je trouve une occasion, je repartirai la chercher. » Avec lui, sa grand-mère octogénaire et malade, qui ne peut plus se déplacer. ► À lire aussi : Soudan: comment la rivalité entre deux puissants généraux a mené à un affrontement sanglant « Là-bas, c'est le chaos » Dans les zones de conflit, côté soudanais, plus de 70% des hôpitaux sont détruits. Pour la famille Abdallah, plus question de repartir : « Ils ont pris ma moto et tout mon argent. Pour le moment, pas question de repartir au Soudan. Là-bas, c’est le chaos, il n’y a plus d’État. Nous avons fui sans presque rien à manger. Juste un peu de Sorgho. » Une fois enregistrée par le HCR, la famille pourra bénéficier des distributions de vivres organisées par le Programme alimentaire mondial (PAM). Comme eux, dans les prochaines semaines, plus de 800 000 soudanais pourraient prendre la route de l’exil, selon l’ONU. ► À lire aussi : Soudan: «Nous ne sommes que des dommages collatéraux dans leur lutte pour le pouvoir»
5/7/20232 minutes, 14 seconds
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«Nous n'avions rien»: récits de Sud-Soudanais réchappés des combats

Après trois semaines d’affrontements au Soudan, plus de 32 500 personnes ont fui le pays vers le Soudan du Sud. Ce sont en majorité des Sud-Soudanais restés au Soudan après l’indépendance de leur pays en 2011, ou qui y étaient revenus pour fuir les conflits, pour travailler, pour étudier ou encore, pour obtenir des soins médicaux. Beaucoup sont aujourd’hui pris au piège des combats, notamment à Khartoum. Une initiative de citoyens s’est mise en place à Juba pour lever des fonds et faciliter le transport des Sud-Soudanais qui souhaitent rentrer dans leur pays. Deux avions financés par les autorités ont ainsi permis, mercredi 3 mai dernier, le retour de 150 personnes vulnérables.   Son nouveau-né dans les bras et ses deux autres enfants pendus à sa robe, Achol John attend que son mari vienne la chercher. Née à Khartoum, elle n’est venue au Soudan du Sud que pour son mariage en 2014. Elle était retournée dans la capitale soudanaise pour son accouchement, en fin d’année dernière : « La vie était agréable à Khartoum, on ne manquait de rien. Quand on a dû fuir, on a eu des problèmes sur la route, il y avait des combats, c’était dangereux. On a fait le trajet de Khartoum à Madani, puis de Madani à Renk. Ça a été très dur, nous n’avions rien, pas d’eau ni de nourriture. » Une fois passée la frontière sud-soudanaise, elle arrive à rejoindre l’aéroport de Paloch, mais reste coincée là-bas deux semaines : « Ça a été vraiment difficile, mais avec mes enfants, nous avons trouvé un endroit où dormir, et des gens du coin nous donnaient de la nourriture de temps en temps. » ► À lire aussi : «Ça s’est déclenché très vite»: rapatriés du Soudan, le périple des Ivoiriens pour fuir la guerre Des combats inattendus Assise près de sa valise, son enfant en bas âge dans les bras, Monica Chol s’inquiète de ce retour précipité à Juba. « Ces combats m’ont vraiment prise par surprise. Je vivais confortablement là-bas. Maintenant, j’essaie d’appeler des proches pour qu’on vienne me chercher, je ne sais pas comment me repérer à Juba pour aller à la maison familiale. Je ne suis pas venue ici depuis 2013 », raconte-t-elle. Marleen Anthony et sa mère, Theresa Andrea, attendent, elles aussi, qu'on vienne les chercher. Theresa est âgée et diabétique. Elle était à Khartoum pour des soins médicaux lorsque les combats ont éclaté. Sa fille Marleen souffle un peu après des semaines d'angoisse. « J’étais réellement inquiète à cause, de sa santé, je me demandais comment elle allait pouvoir tenir, mais quand je l’ai vue sortir de l’avion, j’ai été absolument soulagée. Le problème, c'est que nous avons encore ma sœur et ses trois enfants qui sont encore coincés à Paloch », confie la femme.  ► À lire aussi : Soudan: au Tchad, les réfugiés survivent dans des camps avec de l’aide humanitaire insuffisante « Il faut que la paix revienne » Sa mère, Theresa Andrea, connaît bien Khartoum. Elle ne s'attendait pas à cette guerre : « C’est la première fois que je vois ce genre de problèmes, des combats comme ça au Soudan. Il faudrait dialoguer pour faire la paix. Les victimes, ce sont tous ces jeunes hommes qui meurent en vain. Il faut que la paix revienne, mais les dirigeants sont butés, ils refusent d’entendre ce message. » L’initiative citoyenne qui a coordonné ces deux vols a enregistré des milliers d’autres demandes d’aide au retour de la part de Sud-Soudanais coincés à Khartoum. Les Nations unies ont, quant à elles, lancé, jeudi 4 mai, un appel pour un plan de réponse d’urgence d’un montant de 96 millions de dollars pour venir en aide aux personnes arrivées à la frontière. ► À lire aussi : Afflux de réfugiés au Soudan du Sud: comment éviter des concentrations de réfugiés à la frontière Nord
5/6/20232 minutes, 26 seconds
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L'affaire M'mah Sylla en Guinée [2/2]: l'Oprogem, ce service de police qui lutte contre les violences sexuelles

Des peines de prison entre 1 et 20 ans. Quatre médecins ont été condamnés à des peines exemplaires, le 4 avril dernier, au tribunal de Mafanco, à Conakry. Quatre médecins devenus les bourreaux de leur patiente, M’mah Sylla. Cette jeune Guinéenne de 25 ans que certains d’entre eux ont violée, avant de lui faire subir un avortement clandestin et de multiples opérations dans des cliniques de quartier insalubres. La jeune femme avait fini par succomber après plusieurs semaines de souffrances. M’mah Sylla devenait alors le symbole de ces violences sexuelles qui minent le pays et visent particulièrement les femmes. Quelles conséquences cette affaire a-t-elle eues sur ceux qui sont chargés de les combattre au quotidien ? Matthias Raynal a rencontré des acteurs de la police et de la justice. Voici son deuxième reportage, consacré à l’Oprogem, l'Office de protection du genre, de l'enfance et des mœurs. Le service de police chargé des affaires de violences sexuelles en Guinée. ►À écouter aussi : L'affaire M'mah Sylla en Guinée [1/2]: le volet judiciaire de la lutte contre les violences sexuelles
5/5/20232 minutes, 18 seconds
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L'affaire M'mah Sylla en Guinée [1/2]: le volet judiciaire de la lutte contre les violences sexuelles

Entre un et vingt ans de prison. Quatre médecins ont été condamnés à des peines exemplaires, le 4 avril dernier, au tribunal de Mafanco, à Conakry. Quatre médecins devenus les bourreaux de leur patiente, M’mah Sylla. Cette jeune Guinéenne de 25 ans que certains d’entre eux ont violée, avant de lui faire subir un avortement clandestin et de multiples opérations dans des cliniques de quartier insalubres. La jeune femme avait fini par succomber après plusieurs semaines de souffrances. M’mah Sylla devenait alors le symbole de ces violences sexuelles qui minent le pays et visent particulièrement les femmes. Quelles conséquences cette affaire a-t-elle eu sur ceux qui sont chargés de les combattre au quotidien? Matthias Raynal a rencontré des acteurs de la police et de la justice. Voici son premier reportage, consacré au volet judiciaire des affaires de violences sexuelles.
5/5/20232 minutes, 14 seconds
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Sénégal: la première édition de Dakar Séries, festival panafricain des séries

Au Sénégal se tient la première édition de Dakar Séries, le festival panafricain des séries. Au programme : compétition de séries courtes et longues, des ateliers d'acteurs, mais aussi de production, de financement, de pitchs...
5/3/20232 minutes, 19 seconds
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Congo-Brazzaville: face à l’autisme, la Case Dominique lutte contre la stigmatisation

Ils passent dans la société congolaise pour des sorciers. Les enfants autistes sont victimes d’énormes préjugés au Congo-Brazzaville. Depuis 1999, l’école de la Case Dominique, en plein cœur de Brazzaville, tente de changer la donne par l’éducation et la sensibilisation. Elle accueille cette année 350 élèves souffrant d’autisme et de trisomie. De notre correspondant à Brazzaville, Tôt ce matin, le soleil brille fort et la chaleur est suffocante. Dans une salle du premier niveau de l’école Case Dominique, Dudal Ndolo dispense un cours d'expression. « D’aucuns ont encore un problème de langage. On les aide à mieux articuler les mots », explique-t-il. À l’ombre de deux palmiers, des mamans attendent leurs enfants autistes qui doivent terminer le cours à 11 heures. Parmi elles, Coco, une mère de 45 ans qui nous explique pourquoi elle a conduit sa fille Edith, 12 ans, dans cette école inclusive. « Oui ! Parce qu’elle avait des difficultés à apprendre à l’école ordinaire. Elle n’apprenait pas très bien. Elle n’arrivait pas à assimiler les leçons. Voilà pourquoi j’ai pensé à l’emmener ici », témoigne-t-elle.  ► À lire aussi : Sensibilisation à l'autisme: quand on peut «être handicapé et travailler dans la publicité» Des progrès enregistrés À son inauguration en 1999, le Centre travaillait avec les enfants victimes des conflits armés, avant de se fixer sur l’orientation et la prise en charge des enfants autistes. Son directeur Dieumerci Nakavoua salue les performances enregistrées. « Nous avons un enfant autiste qui a commencé avec toutes les difficultés. Aujourd’hui, il se retrouve en France comme artiste peintre. Il y a des enfants qui émergent », affirme-t-il. La sœur Ida Pélagie Louvouandou, coordonnatrice de l’école, foulard vert bien noué sur sa tête, reconnaît qu’au Congo, les enfants autistes sont victimes de stigmatisation. « D’abord, on ne les comprend pas. Au niveau des préjugés, on pense que ces enfants sont des sorciers, on pense qu’ils sont envoûtés par tel ou tel. On pense qu’ils sont sous l’emprise d’un mauvais esprit qui les conduit et les anime à faire ceci ou cela. Aujourd’hui, malheureusement, il y a beaucoup de couples qui se séparent à cause de l’autisme », regrette-t-elle. ► À écouter aussi : Connaît-on les causes des troubles du spectre de l'autisme ? Des personnes encore rejetées Pour combattre ces nombreux préjugés, la Case Dominique mène des actions. « Depuis deux ans, nous avons opté pour une sensibilisation de masse : nous allons, de temps en temps, dans les rues avec nos feuillets, à la rencontre des gens pour leur parler et leur expliquer que l’autisme est un phénomène naturel qui existe et que nous devons accueillir avec beaucoup de respect », affirme la religieuse.  Selon la sœur Ida Pélagie, le discours n’est pas encore très bien perçu, car les enfants autistes sont encore rejetés dans les transports en commun, les bus notamment. Selon certains experts, le Congo-Brazzaville ne dispose pas de statistiques sur l’autisme.
5/2/20232 minutes, 24 seconds
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Ouganda: la communauté LGBTQ+ hébergée dans des refuges cachés vit dans la peur de représailles

En Ouganda, le président Yoweri Museveni a renvoyé devant le Parlement la proposition de loi anti-homosexualité votée par les députés le 21 mars dernier Dans la capitale Kampala, les membres de la communauté LGBTQ+ craignent, face à une montée des discours de haine, des violences encore plus récurrentes qu'auparavant. Reportage dans une maison d'accueil et église, refuge pour femmes transgenres pour la plupart chassées par leur famille. De notre correspondante à Kampala Tous les dimanches après-midi, Maria prépare en chantant la quinzaine de résidentes, femmes transgenres, dans l’une des chambres du refuge, avant le début de la messe célébrée dans l’enceinte de la maison. « On se maquille, on porte des perruques, puis on s’occupe des tenues. C’est un jour où on se retrouve, tous ensemble, pour prier, alors c’est une très belle journée. » Une à une, chacune des résidentes passent entre les mains expertes de Maria. De l’extérieur, les hauts murs qui entourent cette maison en périphérie de Kampala ne laissent rien apparaître aux passants. Le refuge idéal pour cette église cachée, réservée à la communauté LGBTQ+.  « Il y a beaucoup de haine qui met ma vie, en tant que femme transgenre, en danger. Nous sommes à une période où nous n’avons pas d’autre choix que de nous soutenir les uns les autres. C’est pour cette raison que nous nous réunissons pour de telles occasions. Mais à côté de ça, on a toujours en tête que ce n’est pas une garantie, que même dans un tel espace, nous ne serons pas attaqués. » Récemment, le refuge a changé d’emplacement, après l’agression dans la rue d’une des résidentes ; conduisant le propriétaire à découvrir l’identité de ses locataires et à les expulser. Pendant le service, les chants sont ponctués de prises de parole et de prières pour les membres de la communauté LGBTQ+ arrêtés ces derniers jours. Pour le pasteur de cette église inclusive, l’important est de créer un environnement sécurisé pour les pratiquants. «  La plupart d’entre nous viennent de familles chrétiennes, alors c’est très important pour nous de trouver un espace où on nous comprend. Qu’on soit gay, qu’on soit transgenre, qu’on soit lesbienne, c’est là où Dieu a placé notre force ». «  Les refuges sont vraiment à risque » Depuis le début des discussions sur la proposition de loi anti-homosexualité, les résidents redoublent de précaution. De nouvelles règles de sécurité ont été instauré par le responsable de la maison d’accueil. «  Les refuges sont vraiment à risque. Avant, on avait près de 70 personnes qui venaient pour l’église. Mais en ce moment, nous sommes très stricts. Par exemple, personne ne rentre après 18h, il n’y a qu’une personne, assez masculine, pour faire les courses, et même maintenant, on interdit aux résidents d’utiliser les sites de rencontre, parce que beaucoup d’homophobes se cachent sur ces sites ». Pour l’église et refuge LGBT, les yeux sont désormais rivés sur le Parlement, après la demande de révision de la proposition de loi par le président Yoweri Museveni. Avec un espoir : que le chef de l’État renonce à signer le texte de loi. largement dénoncé par le Haut-Commissaire aux droits humains de l’ONU et qu'il qualifie comme l’un des « pires au monde en son genre », prévoyant la peine de mort pour homosexualité aggravée, des sanctions pénales criminalisant les rapports homosexuels ou le simple fait de se revendiquer de la communauté LGBTQ+, mais aussi la non-dénonciation ou l’hébergement de personnes homosexuelles.
5/2/20232 minutes, 33 seconds
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Migrants: les garde-côtes tunisiens face à la multiplication des traversées

En Tunisie, les départs irréguliers vers l’Europe par la mer Méditerranée ne cessent d’augmenter. Alors que Tunis accentue les pressions pour une « solidarité » européenne, selon les mots du ministre tunisien des Affaires étrangères, afin de mieux lutter contre la migration irrégulière, les garde-côtes ont de plus en plus de mal à gérer cette crise. De notre envoyée spéciale à Sfax, C’est dans les eaux tunisiennes, à mi-chemin de l’Italie, que les garde-côtes tunisiens interceptent de jour comme de nuit des embarcations de migrants en situation irrégulière. Ce jour-là, à l’aube, la garde nationale maritime a déjà intercepté près de cinq embarcations avec à leur bord une quarantaine de migrants chacune. La majorité d'entre eux sont subsahariens. Alors que la mer est calme, les garde-côtes repèrent un autre bateau, en fer celui-là, et surchargé. Le moteur est en panne et les passagers ont des chambres à air en guise de gilet de sauvetage. Beaucoup ont perdu leur travail et leur logement après les propos polémiques du président Kaïs Saïed en février dernier. Pour ces migrants, se faire arrêter est ce qui pouvait leur arriver de pire. La plupart de ces migrants ne veulent pas monter dans le bateau des garde-côtes. Ils ne souhaitent pas non plus parler aux journalistes. Mais l’un d’eux à un message à faire passer : « C’est pas juste, c’est pas le problème de papiers ! C’est parce que nous sommes Noirs », lance-t-il. ► À lire aussi : Un mois après, les Guinéens rapatriés de Tunisie s'impatientent Le président Kaïs Saïed avait réclamé plus de contrôle sur l’immigration irrégulière en Tunisie sans toutefois parler de couleur de peau. Mais le resserrement sécuritaire qui a suivi a ciblé principalement les Subsahariens, avec de nombreux abus. Et ces derniers mois, les Subsahariens représentent le plus gros contingent des personnes interceptées en mer. Manque de moyens des autorités  Les garde-côtes ont saisi le moteur du bateau, mais les migrants refusent toujours de les accompagner. Ils finiront par céder une heure plus tard, leur embarcation menaçant de couler. Ces méthodes ont été dénoncées par l’ONG Alarm Phone, qui a récupéré des témoignages de migrants qui affirment que dans certains cas, la garde nationale les abandonne et laisse chavirer leur embarcation sans moteur. Ce que dément à Tunis le porte-parole de la garde nationale, Houssem Eddine Jebali : « Si ces ONG ont des preuves, je les encourage à porter plainte. Et qu’elles viennent nous voir aussi. Nous sommes prêts à faire une enquête en interne, et aussi avec le ministère de l’Intérieur et à tenir les concernés pour responsables. » Ce jour-là, les migrants seront ramenés au port de Sfax puis relâchés, car les autorités n’ont pas les moyens de les arrêter. Beaucoup disent qu’ils tenteront de nouveau la traversée dès qu’ils en auront l’occasion. La semaine du 24 avril, 51 embarcations de migrants ont été interceptées par les garde-côtes avec 1 242 personnes secourues, dont 1 207 migrants subsahariens, selon les chiffres de la garde nationale. Deux cent dix corps ont été repêchés en mer entre le 18 et 27 avril, après des naufrages, s’ajoutant à plus d’une centaine de morts et disparus depuis le début de l’année.  ► À lire aussi : Tunisie: comment l’Organisation internationale pour les migrations accompagne des investissements de la diaspora
5/1/20232 minutes, 26 seconds
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En Côte d’Ivoire, l’engouement pour le rap chrétien

KS Bloom s’est produit ce samedi 29 avril sur la scène du Femua. Il est aujourd’hui l’un des rappeurs les plus écoutés du pays. « Rap chrétien » ou « gospel urbain », le sous-genre a conquis la Côte d’Ivoire ces quatre dernières années. Son public, largement issu des églises évangéliques, est de plus en plus large. De notre correspondant à Abidjan, Marie-Anne Mayoli termine ses devoirs dans la cour de l’église baptiste missionnaire de Cocody Mermoz. À 18 ans, elle est fan du rappeur KS Bloom. « J'ai commencé à plus le connaître et à plus l'aimer avec sa chanson "Dieu n'échoue jamais", "Enfant de Dieu" », raconte-t-elle. « Enfant de Dieu » a enregistré 57 millions de vues sur YouTube. Les paroles louent la sagesse et la protection du Seigneur sur des rythmes afro dansant, entre rap et coupé-décalé. Grâce au rappeur, Marie-Anne peut conjuguer sa foi avec la musique. « À travers ses chansons aussi, il [KS Bloom] fait la promotion de Dieu. Avec cela, on peut plus s'agrandir encore dans notre foi avec le rap chrétien. » ► À lire aussi : La venue de Booba au Femua, un événement pour la Côte d'Ivoire et ses fans La jeune génération « en raffole » Hervé Gnagbé, le pasteur de cette petite église, confirme l’engouement des jeunes fidèles pour le rap chrétien. « Ils en raffolent... Ce n'est pas tout à fait notre style, mais bon, dès lors que ça plaît à nos jeunes. Et puis il faut dire que KS Bloom lui-même défend la cause de l'Évangile, donc ça nous va ! » Le « rap chrétien » ou plus largement « gospel urbain » est né dans les Églises évangéliques qui ont vu leur nombre monter en flèche ces dix dernières années en Côte d’Ivoire. Abidjan compterait au moins 4 000 lieus de cultes évangéliques. KS Bloom est issu de la communauté du Vase d’honneur.  Des églises qui s'ouvrent à d'autres horizons musicaux  Selon Tehui Yacé, responsable des acquisitions de contenus pour la plateforme Boom Play, ces Églises ont joué avec les codes musicaux modernes pour attirer plus de fidèles. « Elles ont eu, on va dire, l'intelligence d'ouvrir leur répertoire musical, c'est-à-dire les chants chrétiens, à des styles de musiques un peu plus modernes. On a vu des ateliers de rap, des groupes de rap autorisés à performer à l'église, des cultes avec même parfois du presque même du slam, des prestations, des prestations après le culte, où à chaque fois la communauté soutenait les artistes qui le faisaient, raconteTehui Yacé. Et ça commençait ainsi de bouche à oreille au sein de la communauté. Et ça dépassait après les frontières de la communauté. » Tehui Yacé, qui suit de près les tendances des stream sur la plate-forme Boomplay, affirme que le gospel urbain est désormais la musique la plus écoutée du pays en raison de la fidélité des auditeurs. Après KS Bloom, c’est la chanteuse Morijah qui affole désormais les compteurs.   ► À lire aussi : Safarel Obiang, Mc One, Oprah et Dre-a dans la Marmite du Femua 15
4/29/20232 minutes, 46 seconds
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Au Cameroun, l'ONG Caysti initie les jeunes filles aux métiers de la tech

Au Cameroun, plusieurs jeunes filles de Yaoundé et Douala ont été initiées aux technologies de l'information et de la communication (TIC). Cette semaine avait lieu la journée internationale des filles dans les TIC, et l'ONG camerounaise Caysti – qui a fait de cette question son cheval de bataille – a organisé des journées portes ouvertes dans le campus d'une école primaire de Yaoundé à cette occasion.
4/28/20232 minutes, 6 seconds
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Gabon: la Baie des Rois, une ville du futur au cœur de Libreville

Au Gabon, une nouvelle ville est en cours de construction à Libreville. Elle s’appelle la Baie des Rois. C’est une ville bâtie sur la mer grâce au sable récupéré en haute mer. La nouvelle ville sera à la fois une zone d’habitation, commerciale, culturelle avec une grande scène de spectacles en plein air, mais surtout écologique avec 400 à 600 arbres qui y seront plantés.
4/27/20232 minutes, 22 seconds
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Madagascar: la Fondation H se dote d'un nouvel espace d'exposition gratuit pour tous

Ce jeudi 27 avril, à deux pas de l'avenue de l’Indépendance, en plein cœur de la capitale Antananarivo, aura lieu l’inauguration du tout nouvel espace d’exposition de la Fondation H, ce centre d’art contemporain, créé en 2017, tourné vers le continent africain. Nichés au sein d’une magnifique bâtisse érigée il y a plus d’un siècle, les 2 000m² d’espaces, de salles, de volumes, de lieux de vie ont été pensés pour promouvoir la création, la réflexion et le dialogue entre les artistes, le public et le reste du monde. Avec une volonté martelée : la gratuité totale, pour tous. De notre correspondante à Antananarivo, « Vous voyez là-haut, sur le fronton, il y a ces trois inscriptions : “Direction des postes”, “Service régional” et “Bâtiment civil”, et ça, c'est des inscriptions en fait qu’on a retrouvées en grattant la brique originale. On est tombé sur ces inscriptions historiques comme sur des p’tits mystères... », raconte avec un brin d’émotion dans la voix, Margaux Huille, la directrice de la Fondation H. Les travaux de restauration du superbe bâtiment colonial des Postes, situé dans le quartier d’Ambatomena, auront duré deux ans. Deux ans de mystères résolus, et d’autres encore bien gardés, comme celle de son année de construction. Derrière cette façade en briques ocres et aux poutres en bois apparentes, se cache un parti pris audacieux, explique Margaux Huille, la directrice de la Fondation H : « L’enjeu d’une telle rénovation, c'était de retrouver l’enveloppe originelle du bâtiment, tout en le modernisant, pour nous permettre d’accueillir dans un bâtiment historique de plus de 100 ans, des espaces d’exposition aux standards muséaux internationaux. » ► À lire aussi : Madagascar: l’exposition photo «Esprit Revue Noire» plébiscitée et prolongée Une volonté d'être « l'espace le plus ouvert possible » Des pavés du trottoir qui se poursuivent jusque dans le centre d’art, aux portes vitrées en permanence ouvertes, tout dans ce lieu a été pensé comme une invitation à entrer, tel qu’on est. « C’est bon comme ça ? » « Oui, un peu à gauche… parfait. Super, on peut l’accrocher. » À quelques heures de l’inauguration, les équipes de la Fondation H procèdent aux derniers réglages. Suspendues sous un puits de lumière, dans l’immense salle que l’on surnomme « la cathédrale », les tissages monumentaux de Mme Zo, icône de la scène artistique malgache, impressionnent autant qu’ils bouleversent. « Un lieu comme celui-là, à première vue, il peut paraître un peu aride, un peu élitiste à plein d’égards, on en est bien conscients. Et c’est pour ça que toute la programmation, la mission de la Fondation H, c’est de renverser cette idée-là et d’être l’espace le plus ouvert possible. On est gratuit, on organise tous les matins des visites de scolaires toute l’année, on accueille tous les samedis des conférences et des événements gratuits pour le grand public, et tous les mercredis après-midis des ateliers pour les enfants, donc l’idée, c'est vraiment de construire un projet qui prenne le public par la main. » ► À lire aussi : À Madagascar, une exposition pour raconter les premières exploitations aurifères de l'île Célébrer « le génie malgache » Accompagner le public, mais évidemment aussi, explique Hassanein Hiridjee, fondateur et mécène de ce lieu, offrir un espace d’expression aux artistes nationaux. Célébrer « le génie malgache » en somme, en le confrontant aux regards des visiteurs, à l’exigence esthétique des collectionneurs. Mais surtout : « Se redonner de la fierté. Être fier de ce que l’on crée. Être fier de ce qui est fait par nos jeunes artistes. On sait toujours mieux où l’on va quand on sait d’où l’on vient. L’objectif, c’est de célébrer notre tradition, mais aussi de la projeter sur le monde extérieur. C’est de créer ces passerelles d’échange, des dialogues, entre les différentes civilisations. » Un lieu d’envergure, beau, vivant et unique en son genre, qui pourrait offrir le coup de projecteur tant espéré à la scène culturelle et artistique contemporaine malgache.
4/26/20232 minutes, 20 seconds
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Soudan du Sud: dans le Grand Pibor, la résilience des habitants face à la crise alimentaire [3/3]

Dans le Grand Pibor, les habitants survivent grâce à l'aide humanitaire, qui ne suffit pas. Dans ce contexte difficile et malgré l’insécurité, des projets à petite échelle, tournés vers la production alimentaire, se mettent en place. De notre envoyée spéciale dans le Grand Pibor, Agglutinées sous un grand arbre surplombant la rivière, des femmes de Pibor vendent des produits locaux pour survivre. Mary Nyani, une mère de famille, avoue que c’est insuffisant : « Je ne gagne pas assez pour nourrir ma famille. Je vends des noyaux de dattes, les gens mangent ça quand il n’y a rien d’autre. J’ai six enfants et mon mari est décédé. Je n’ai pas reçu de ration alimentaire récemment. Nous avons faim en permanence. »   Ailleurs dans le marché, avec d’autres femmes, Roda Rio tient un petit stand de vente de thé et de café. Elle vend aussi du parfum fait maison, et du pain qu’elle fabrique tous les jours. La journée est bien avancée, et il lui reste encore une grande bassine pleine de ces pains ronds et plats, protégés de la poussière par une bâche en plastique. Si elle n’écoule pas toute sa production, Roda Rio ne fera aucun profit : « Il y a des commerçants qui nous fournissent les ingrédients à crédit pour faire le pain. Moi, j’ai un marchand avec qui j’ai établi une relation de confiance, je le rembourse chaque jour en fin de journée. C’est grâce à ce système de prêt que notre activité fonctionne. » ► À écouter aussi : Au Soudan du Sud, les femmes enlevées du Grand Pibor Du bétail aux légumes « Nous vendons notre pain surtout le matin et l’après-midi. Mais vu l’heure qui avance, je ne pense pas arriver à tout vendre d'ici à la fin de la journée. Donc, je ne vais sans doute pas faire de profit, je ramènerai le pain restant à la maison pour le donner à manger aux enfants » On embarque sur un petit canoë pour traverser la rivière de Pibor. En cette fin de journée de mars, la rivière est encore basse. Des potagers ont été cultivés sur sa berge orientale. Un arrosoir dans chaque main, Kirika Lotong Ngandoyo Porluch puise l’eau de la rivière pour irriguer ses cultures. C’est une ONG qui a initié ce projet : « Mon job de cultivateur m’aide beaucoup, car nous manquons de nourriture ici à Pibor. Maintenant, nous avons au moins ces légumes. Avant, j’élevais du bétail, mais à cause des conflits avec les Dinka et les Nuer, mes vaches ont été volées. J’ai donc décidé de faire autre chose pour nourrir mes enfants, plutôt que de rester inactif. »  Pour cet agriculteur, il faudrait au moins investir dans des générateurs pour pouvoir irriguer de plus amples parcelles afin d’augmenter la production agricole. ► À écouter aussi : Soudan du Sud: pour contrer les mariages forcés, Mary Mali Maze veut faire changer les mentalités
4/25/20232 minutes, 18 seconds
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Soudan du Sud: pour contrer les mariages forcés, Mary Mali Maze veut faire changer les mentalités

Au Soudan du Sud, des conflits intercommunautaires secouent les régions du Jonglei et du Grand Pibor, dans l’est du pays. Au cœur de ces guerres sans fin, des vols de bétail, de femmes et d’enfants. Leur raison : la pauvreté rampante et un système de mariage basé sur le paiement d’une dot en bétail à la famille de l’épouse. Un système qui favorise les conflits, mais aussi les mariages précoces et forcés, quand la pauvreté pousse les familles à marier leurs filles pour survivre. Dans le Grand Pibor, si la majorité des filles semblent prises au piège, certaines parviennent à s’émanciper : continuer leur éducation, et épouser un homme qu’elles aiment. De notre envoyée spéciale dans le Grand Pibor, À Pibor, tout est calme, mais le paysage porte la marque des conflits. Des tranchées sont maintenues dans la ville en cas d’attaques, et la plupart des maisons sont de simples abris. Mary Mali Maze, la vingtaine, a fait sa scolarité en Ouganda et travaille aujourd’hui avec l’ONG Gredo à Pibor. Grâce à son salaire, elle construit une nouvelle maison pour sa famille, elle qui a bien failli être mariée très jeune, contre du bétail. « Mon père voulait qu’on aille toutes à l’école. Mais les frères de mon père ont fait pression sur lui pour qu’il marie ses filles, car ils voulaient récupérer les vaches qu’ils avaient données pour que mon père puisse épouser ma mère. Donc, mon père n’a pas eu le choix, il a dû marier mes deux grandes sœurs, mais a voulu que tous ses autres enfants aillent à l’école. » ► À écouter aussi : Soudan du Sud: les femmes du Grand Pibor prises au piège des conflits Monnaie d'échange Après la mort de son père en 2017, le frère de Mary souhaite se marier. Il tente alors de convaincre la famille de marier Mary pour obtenir de quoi payer la dot. Ce que la mère de Mary refuse. « Ma fille aînée a été mariée très jeune et elle s’est retrouvée dans une situation très difficile, elle a été maltraitée chez son mari. Ensuite, j'ai fait tout mon possible pour que mes autres filles aillent à l’école. Mais c’est rare chez nous, parce que quand une fille naît, les familles pensent immédiatement à la marier pour obtenir des vaches, de l’argent, de la nourriture… C’est ce qui se passe ici, à cause de la pauvreté et de la faim » « Ils m'ont frappée, ils ont voulu me forcer, mais j'ai résisté » Mary Marzak, une trentenaire joviale rencontrée au détour d’un chemin, a, elle aussi, échappé à un mariage forcé : « Les femmes Murle ne choisissent pas l’homme qu’elles épousent. Mais parfois, la femme ne va pas accepter le mari choisi par sa famille. C’est ce qui m’est arrivé. Ma famille m’avait donnée à quelqu’un, mais j’ai toujours refusé d’épouser cet homme, jusqu’à ce qu’ils me laissent aller avec mon amoureux. Bien sûr, ils m’ont frappée, ils ont voulu me forcer, mais j’ai résisté jusqu’à ce qu’ils abandonnent ! Mon copain est devenu mon mari et il a remboursé toutes les choses que l’autre avaient payées. Nous sommes maintenant ensemble et très heureux ! » Ces deux histoires restent cependant assez exceptionnelles, puisque l’ONU estime que 52% des filles sud-soudanaises sont mariées avant leurs 18 ans.
4/24/20232 minutes, 13 seconds
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Au Soudan du Sud, les femmes enlevées du Grand Pibor

Au Soudan du Sud, indépendant en 2011 et où une guerre civile avait éclaté en 2013, les conflits intercommunautaires continuent, malgré l’accord de paix de 2018. Dans les régions du Jonglei et du Grand Pibor, à l’est du pays, des enlèvements de masse accompagnent désormais les traditionnels raids de bétail. Lors de l’attaque de fin décembre 2022 perpétrée par les bergers originaires du Jonglei contre le Grand Pibor, 1 810 femmes et enfants ont été enlevés, selon des chiffres fournis par les autorités de la région. Les autorités de l’État du Jonglei ont fait en sorte de retrouver certains captifs, détenus dans différents comtés de cette zone de plus de 122 000 km². Des libérations obtenues contre de l’argent, selon plusieurs sources. Rencontre auprès de quelques-unes des 117 femmes revenues dans le Grand Pibor et réunies avec leurs familles. 
4/23/20232 minutes, 14 seconds
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Gabon: «Hello Ado», une nouvelle application pour la santé sexuelle des adolescents

Au Gabon, l’Unesco et les autorités gabonaises ont récemment lancé à toute pompe une application baptisée « Hello Ado », il s’agit d’une application conçue par l’Unesco au profit de plusieurs pays où la sexualité est taboue dans la société. Disponible sur le Google Play, « Hello Ado » facile à télécharger renseigne les adolescents sur les questions de santé sexuelle et de harcèlement en milieu scolaire. Elle concerne les adolescents de 12 à 24 ans. Des équipes, des spécialistes répondent de façon anonyme aux questions des jeunes. De notre correspondant à Libreville, L’application a été lancée dans une ambiance de carnaval. L’Unesco et la première dame du Gabon, Sylvia Bongo Ondimba ont invité Donz’er, l’artiste gabonais le plus adulé par les jeunes. Des dizaines des jeunes volontaires aident les élèves à télécharger l’application. Après quelques minutes, ces élèves de Première et Terminale du lycée national Léon Mba ont réussi à télécharger « Hello Ado » dans leur téléphone. « Je veux l'avoir pour pouvoir poser des questions que je ne me permets pas de poser à mes parents », dit une adolescente. Pas question pour elle de poser ce genre de questions à ses professeurs. « C'est gênant parce que ce sont des adultes » ajoute-t-elle. Pour une autre adolescente, l’application est importante pour elle. « C’est pour m’éveiller sur les violences en milieu scolaire, les grossesses précoces et VIH. »  « En classe, c'est vraiment difficile, il y a la honte de demander devant les autres alors que l'application, elle est anonyme et on pourra poser n'importe quelle question. » Pas question non plus de poser la question aux parents. La raison évoquée : « Il y a le facteur de la honte [...] C'est compliqué », soupire un jeune. Un sujet encore tabou dans les familles Au Gabon, le sexe est un sujet tabou dans les familles, quel que soit le niveau intellectuel. Pauline travaille au CHU de Libreville. « C'est quand même un peu honteux de parler de sexe à son enfant ou à son petit enfant. On est un peu pudique. Ce n’est pas dans notre tradition de parler de sexe aux enfants », explique-t-elle.  Eric Voli Bi, représentant de l’Unesco au Gabon, pense que l’application Hello Ado est la solution pour les jeunes d’Afrique centrale d’éviter le piège d’une sexualité non maîtrisée. « Cette application permet avec des mots maîtrisés de répondre ou d'apporter un certain nombre de réponses aux jeunes. Cette application permet également aux jeunes et aux parents surtout de pouvoir engager une discussion sur la question de la sexualité », souligne-t-il.  Après le lancement à Libreville, l’Unesco et le ministère de l’Éducation nationale vont organiser une campagne dans tout le pays pour inciter les jeunes de 12 à 24 ans à utiliser massivement l’application. 
4/22/20232 minutes, 23 seconds
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RDC: le kapokier centenaire, une identité de Lubumbashi

La mairie de Lubumbashi a lancé mi-avril la campagne d'élagage et d’abattage de vieux arbres dans la ville. Première cible, le kapokier du lycée Tuendelee, un arbre centenaire qui fait partie du patrimoine de la ville. La mairie justifie sa décision par le danger que présentait cet arbre, en partie sec. Mais certains habitants le défendent. De notre correspondante à Lubumbashi,  À l’entrée du lycée Tuendelee à Lubumbashi, trône un arbre vieux de 100 ans. C’est un kapokier d’environ 6 mètres de haut, pour 4 mètres de circonférence. « Il y a les hirondelles qui se posaient dessus, et les martins-pêcheurs qui allaient pêcher les poissons. Et donc parfois, vous trouviez des poissons frais en dessous de l'arbre. Et des gens ramassaient ces poissons pour les manger, raconte Monsieur Crispin, qui tient depuis 10 ans une librairie à quelques mètres du kapokier. Plusieurs fois, des chauves-souris s’y sont abritées. Ça crée de la fierté pour quelqu’un qui n’a pas vécu plus de 100 ans de voir un arbre qui dépasse son âge. » Le kapokier du lycée Tuendelee est devenu l’un des monuments vivants de la ville de Lubumbashi. Depuis 2006, il fait partie du patrimoine public, à la suite d’une mobilisation des habitants. « On a posé une plaque et on a entouré l'arbre de banderoles aux couleurs de la ville, explique Marcel Yabili, l’initiateur de la démarche. Sur la plaque était marqué "Patrimoine de la ville". Cet arbre a vu nos grands-parents et il verra nos petits-enfants. Il est classé et protégé. » ► À lire aussi : À Lubumbashi, l’urbanisme à l’origine de la diminution de la nappe phréatique La campagne d’élagage de la ville de Lubumbashi La branche principale du kapokier, de plus de 5 mètres, a été élaguée. Il ne lui reste désormais que quelques branches parsemées de feuilles vertes.  Ce qui énerve Godlive Mulombo, habitante des environs du lycée Tuendelee : « Ça m’énerve, parce qu’on va se retrouver dans une ville sans repères, et petit à petit on va perdre même l’histoire de Lubumbashi. » Le professeur Jean-Pierre Ndjibu, spécialiste en environnement, vient de visiter ce qui reste du kapokier. Il est choqué. « Ce sont des plantes qu'on ne détruit pas au hasard. Il aurait fallu qu’on trouve un mécanisme pour l’élaguer tout en gardant les branches, parce qu'en soit il ne présentait pas de risques. » Pour sa part, Alfred Mupanda, coordinateur du service urbain de l’environnement, assure que le kapokier centenaire reste protégé : « On ne va pas abattre cet arbre, nous voulons même conserver sa santé. Vous voyez, lorsque l’on élague, on donne la force à l’arbre de pouvoir rajeunir. » La plupart des habitants de Lubumbashi ne cachent pas leur attachement à cet arbre, qu’ils espèrent voir vivre encore très longtemps. ► À lire aussi : RDC: des ONG s'inquiètent de l'impact environnemental des activités minières
4/21/20232 minutes, 20 seconds
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Un mois après, les Guinéens rapatriés de Tunisie s'impatientent

La Guinée a été le premier pays à organiser le retour de ses ressortissants, victimes en Tunisie d'agressions et d'arrestations après un discours incendiaire du président Kaïs Saïed à l'égard des immigrés subsahariens. Conakry s’est engagé à les aider à se réinsérer dans la société. De notre correspondant à Conakry, À l’ombre d’un jacquier, c’est le branle-bas de combat à quelques heures de la rupture du jeûne. Les femmes s’activent en cuisine. Dans cette concession familiale, Amadou (un pseudonyme) a fait son retour, après sept ans d’absence. « Je suis revenu de Tunisie, j’ai quitté la galère. Je suis en bonne santé, je n’ai pas été agressé. On espère que le gouvernement nous vienne en aide. » Après un BTS de deux ans en commerce international, il a travaillé dans des cafés. Amadou était dans le troisième vol, celui qui a atterri à Conakry le 8 mars. « De l’aéroport, ils nous ont conduits à l’hôtel. On a passé la nuit et le lendemain, il y a l’OIM qui est venu sur les lieux. Ils nous ont inscrits, ils nous ont remis des cartes et depuis, on ne voit rien de clair. Si ça continue comme ça, je pense que ça risque de dégénérer parce que tout le monde n’a pas la même situation. » Il y a eu neuf vols jusqu’à présent qui ont permis de rapatrier 397 personnes. Ces derniers ont reçu une dotation de 300 dollars. Une somme qui ne permet pas de tenir longtemps. Il y a urgence, selon Amadou, certains sont en grandes difficultés : « Il y a beaucoup de personnes qui ne peuvent plus attendre et eux, ils ont besoin d’argent. Et il y en a d’autres qui n’ont pas d'endroit où dormir depuis qu’on est revenu ici. Donc c’est le calvaire en fait ». ► À lire aussi : Tunisie: les arrestations de migrants subsahariens en baisse, mais les demandes d'aide en hausse « Si je trouve un moyen, je repartirai » Les rapatriés ont créé l’Association des Guinéens victimes de racisme et de xénophobie en Tunisie, ainsi qu’un groupe WhatsApp qui réunit aujourd’hui plus de 200 membres. Parmi les femmes de la cour, il y a sa sœur, qui était une jeune fille quand Amadou est parti. Elle raconte les retrouvailles après toutes ces années. « Je ne m’y attendais pas. Ça a été une surprise pour moi. Personne ne s’y attendait, j’étais très contente. Il est revenu chez lui, Dieu merci, mais son moral, il ne l’a pas à 100% ». Ce départ précipité de Tunisie et ce nouveau déracinement ont laissé des traces. Amadou ne peut s’empêcher de penser, déjà, à retourner là-bas. « Si je trouve un moyen, je repartirai encore parce que je pense qu’en Tunisie, si tu as un bon travail là-bas, tu peux bien faire ta vie. Ce n’est pas comme l’Afrique subsaharienne. » Mais Amadou n’est pas tout à fait sûr de ce qu’il veut faire. Il donne une chance au processus de réintégration. Dans six mois, dit-il, il prendra sa décision. ► À lire aussi : Des dizaines de migrants noyés au large de la Tunisie dans de nouveaux naufrages
4/20/20232 minutes, 21 seconds
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Sénégal: à Pikine, une école de théâtre pour redonner espoir aux jeunes de banlieue

La voie classique pour les acteurs en devenir est l'École nationale des Arts, mais peu de structures privées existent au Sénégal. Babacar Siby, acteur, metteur en scène et coach de théâtre, a monté une école de théâtre, en banlieue de Dakar, pour améliorer l’accès au théâtre en permettant à des jeunes de tous les milieux de se former. De notre correspondante à Dakar, À l’étage de la mairie de quartier de Guinaw, un groupe de jeunes en vêtements de sport se roulent en boule sur le sol. Objectif : se relever avec souplesse. C’est une des méthodes de l’Académie de Théâtre de la banlieue pour apprendre à bien utiliser son corps sur scène. « Il y a beaucoup de choses dans cet exercice. Il y a l'écoute, mais aussi penser à la façon dont on va se lever. Et en même temps, il faut être à l'aise avec soi-même », développe Aïda Gueye, la formatrice. Aïda a été formée par le créateur de l’école, Babacar Siby, avant de devenir prof et de transmettre son savoir à son tour. « Il faut l'incarner, le personnage. On ne doit pas te voir toi, mais lui. » Les exercices et saynètes s’enchaînent pour la quinzaine d’étudiants en première et deuxième années. Wolof et français se mêlent. Babacar Siby, formé comme coach de théâtre en France, leur apprend les déplacements sur scène. Il est parti du constat que les écoles de théâtre existantes étaient trop élitistes : « Malheureusement, il n'y a qu'une seule école nationale, et il faut un niveau d'étude pour aller là-bas. Mais en banlieue, il y a beaucoup de compétences. Je me suis donc dit qu’il fallait créer cette école privée. »  Une deuxième chance pour certains jeunes. Sérigne Falou Touré, 21 ans, a pu améliorer son français grâce aux cours de théâtre. « Je ne suis jamais allé à l’école. C’est ici que j’ai commencé à parler et à écrire le français », confie-t-il. La formation sur trois ans est gratuite, et l’école est financée avec difficulté sur fonds propres. Les élèves ont pour la plupart un emploi à côté pour continuer à toucher un petit salaire. Falou fait de la sérigraphie. Elle et ses camarades regardent aussi du côté du septième art où les cachets sont plus importants. Bintou Diané est déjà prête à mettre plusieurs cordes à son arc. « Moi, je veux être actrice, écrivain, mais aussi scénariste, actrice. Je veux tout faire, je veux être polyvalente », professe-t-elle.  Babacar Siby rêve désormais d’un soutien financier, public ou privé, pour pouvoir héberger son école dans des locaux propres. ► Sur le même sujet : Top départ pour le Prix RFI Théâtre 2023
4/19/20232 minutes, 19 seconds
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À Madagascar, l'édition cherche à se réinventer

Le Salon du livre et des éditeurs est le rendez-vous de référence pour les spécialistes du livre et les amateurs de lecture qui attire chaque année de plus en plus de visiteurs. À Madagascar, le monde de l’édition est constitué d’une quinzaine de maisons principalement spécialisées dans la publication d’ouvrages religieux. Comment les jeunes éditeurs essaient-ils de percer dans ce milieu dominé par un type de littérature ? De notre correspondante à Antananarivo, Sur la quinzaine de stands de maisons d’éditions, seuls trois proposent autre chose que des livres religieux. C’est le cas de celui de Marie-Michèle Razafintsalama, la fondatrice des Éditions Jeunes Malgaches, également vice-présidente de l'Association des éditeurs de Madagascar. Elle a été la première, au début des années 2000, à se spécialiser en littérature jeunesse. Tout un défi. « On travaille avec beaucoup d’associations qui font la promotion de la lecture et c’est comme ça qu’on arrive à faire connaitre nos productions et à mettre le livre dans les mains des enfants, explique-t-elle. Et c’est très important, parce que la lecture n’est pas du tout dans les habitudes des enfants malgaches. Il ne suffit pas de produire, il faut trouver aussi le lecteur. » En 10 ans, l’éditrice a véritablement vu l’intérêt de la classe moyenne grandir pour le livre. De quoi encourager l’entrepreneuse à publier trois à quatre titres par an, malgré certains obstacles à contourner. « La difficulté, actuellement, c'est qu’il y a très peu de librairies sur l’île, même à Tana, qui achètent nos livres. Soi-disant c’est cher. Du coup, nos livres ne sont pas visibles pour la clientèle malgache alors qu’il y a des besoins. Alors, on travaille beaucoup sur Facebook pour faire connaitre nos livres et il y a beaucoup de gens qui achètent directement sur Facebook maintenant. » « Il y a des Malgaches qui veulent de beaux livres » Autre audacieux, Fano Razafimamonjiraibe, le fondateur de la toute jeune maison d’éditions Teny, créée fin 2021 et spécialisée dans l’édition de beaux livres jeunesse. Tour à tour économiste, graphiste, photographe, webmaster, cet amoureux des livres est parti d’un constat : « J’aime les livres, j’ai appris tous mes différents métiers dans les livres. J’étais membre du centre Albert Camus, aujourd’hui renommé Institut français, et c’est dans leur bibliothèque que j’ai emprunté tous les livres qui ont fait qui je suis actuellement. Je me suis alors rendu compte qu’il y avait des manques par rapport à tout ce qui concerne Madagascar, parce que toutes les éditions étaient des éditions étrangères. Et j’avais des envies particulières pour certaines thématiques qui n’étaient pas traitées dans ces livres. C’est ça qui a fait, de fil en aiguille, que j’ai créé la maison d’éditions Teny. On a commencé avec des livres tout cartonnés, illustrés par des auteurs malgaches, sur des thèmes qui touchent particulièrement les enfants malgaches, et en malgache. Ça n’existait pas à Madagascar, on est les premiers ! » Avec des livres vendus 25 à 50 fois plus chers que ceux des éditeurs de livres fascicules, Fano a été raillé par ses confrères, qui ne croyaient pas à son modèle économique. Pourtant, assure-t-il, « le marché existe. Il y a des Malgaches qui veulent des beaux livres. Ils sont prêts à mettre le prix. Mais ils veulent de la qualité. Je me suis rendu compte qu’il est plus facile de vendre un livre à 70 000 ariary (15€) que 70 livres à 1 000 ariary (0,20€) », plaisante-t-il. Un marché de niche, qui offre une bouffée d’air frais et de renouveau à l’édition du livre malgache. ► À lire aussi : Madagascar: succès grandissant du premier livre pour enfants sur la compréhension des émotions
4/18/20232 minutes, 21 seconds
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Tour d’horizon des danses traditionnelles de Côte d’Ivoire avec la compagnie Mien-Moh

La dernière création de la compagnie Mien-Moh se joue ces jours-ci à la Fabrique culturelle d’Abidjan. Un spectacle de danse traditionnelle qui passe en revue les différentes danses du pays et de la sous-région. De notre correspondante à Abidjan, Pas de décor ici, ni de fioritures : tout le spectacle est dans la musique, les danses et les costumes. La pièce montre le voyage initiatique d’un jeune homme qui quitte son village pour découvrir d’autres cultures sous la forme de différentes chorégraphies. Le percussionniste et responsable adjoint de la compagnie, Marius Lorou Bakou Bi, dit « Marco la Force tranquille », explique le titre du spectacle : Je reviens à ma tradition. « On veut montrer à tout le monde que ce qui est chez nous, c’est ce qui est pour nous. Donc, on ne peut pas laisser mourir la danse traditionnelle. On invite tout le monde à revenir à leurs traditions, c’est ce qu’on va montrer ce soir au public. » Le protagoniste visitera les États-Unis avec le hip-hop, l’Europe avec la danse contemporaine, le Mali… Mais il découvrira aussi les danses emblématiques des différentes régions de la Côte d’Ivoire. « Moi, personnellement, je voulais vraiment danser la danse traditionnelle », raconte Léa Himborouamin Dia, danseuse dans la compagnie Mien-Moh. « Parce que ce n’est pas tout le monde qui a le temps d’aller au village pour voir certaines danses. C’est pour ça que je me suis décidée à faire ça. Je fais pratiquement tout. Mandingue, gbégbé, alloukou… Tout, sauf [la danse] contemporaine et le coupé-décalé. Tout ce qui est traditionnel, je suis dedans. » Porter un message d'espoir pour toute la jeunesse ivoirienne Ce soir-là, la représentation fait salle comble. Les danseurs se donnent à fond, comme en transe, devant un parterre d’enfants surexcités et d’adultes médusés. Pour beaucoup de spectateurs, même Ivoiriens, c’est une première. « Non, je ne connaissais pas ! », s’exclame l’un d’eux, ravi. « J’étais vraiment épaté par le talent des artistes. C’était vraiment bien. » Derrière la performance artistique, la compagnie Mien-Moh veut porter un message d’espoir pour toute la jeunesse ivoirienne. En commençant par offrir une vie meilleure à ses propres danseurs. Chantal Gouanan Lédjê, directrice et chorégraphe de la compagnie, explique l’avoir fondée en 2016 en recrutant ses artistes parmi les orphelins et les enfants des rues. « Je voyais les enfants qui n’ont pas de parents, ni mère, ni père, qui traînent dans les rues. Je vois les jeunes gens qui voyagent pour aller se tuer dans l’eau, pour aller en Europe. Je me suis dit “Attends, on peut créer une compagnie et recruter ces jeunes, et à travers la danse, ils peuvent avoir une meilleure vie !” Aujourd’hui, avec les tournées qu’on fait, les petits moyens qu’on gagne, tous mes artistes que vous voyez, j’arrive à payer leur maison. On est une compagnie, mais on est une famille. » Une grande famille de 23 membres, dont les plus jeunes n’ont que 16 ans… Ses deux responsables, Chantal Lédjê et Marius Bakou Bi, sont d’ailleurs frère et sœur.
4/17/20232 minutes, 29 seconds
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Centrafrique: les rassemblements de jeunes autour du Kangoya

Le quartier Pétévo, dans le sixième arrondissement de Bangui, est un lieu où l’on se retrouve entre amis pour discuter autour d’un verre de vin de palme, communément appelé Kangoya. Ces rendez-vous sont devenus de véritables institutions.
4/16/20232 minutes, 11 seconds
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Afrique du Sud: le développement de l'éolien contrarie le désir d'expansion des réserves naturelles privées

En Afrique du Sud, le rêve d'expansion des réserves naturelles risque de se heurter au développement de projets d'énergies renouvelables. C'est en tout cas l'inquiétude d'un réseau de réserves privées qui s'oppose au développement de fermes éoliennes dans la région du Cap Oriental, à proximité du parc national des éléphants d'Addo. Ces réserves aimeraient abattre certaines de leurs clôtures pour étendre les espaces protégés. Mais l'arrivée d'éoliennes est vue comme un obstacle.  De notre correspondant à Johannesburg, Une nature sauvage à perte de vue, c'est déjà ce qu'offre la réserve privée de Shamwari. Mais en nous conduisant sur les hauteurs, John O'Brien, écologiste de la réserve, veut nous montrer que cette ambition est empêchée. « Regardez au loin, on peut voir un mat d'éolienne », indique John O'Brien. « Ici, on est dans la partie sud de la réserve, mais dès que vous montez en altitude, cette montagne là-bas, elle devient très visible. Et ils parlent de construire tout un tas de parcs éoliens sur cette montagne. Il n'y a quelques années, ils ont essayé de bâtir 500 éoliennes, sur ces terres près de la réserve. » Une vingtaine de projets éoliens sont en cours de développement dans la région et ils contrarient le rêve d'expansion des réserves privées. Elles se sont réunies sous l'association Indalo. Pour se défendre, mais aussi pour mieux coopérer et envisager d'abattre leurs clôtures communes. Objectif : faciliter la circulation des animaux. « Avec toutes les réserves Indalo, on envisage de tout fusionner, pour atteindre environ 120 000 hectares sans trop de difficultés », dit John O'Brien. Une menace pour les animaux ? Ce projet ressemble à ce qui a déjà été fait dans le nord du pays avec le parc Kruger. Des réserves privées se sont greffées au parc national public pour étendre la surface de cette aire protégée. Un mammifère, en particulier, profiterait de cet agrandissement : le rhinocéros, comme l'explique Rob Gradwell, directeur de la réserve Lalibela. « Les rhinocéros noirs ont besoin d'espace pour se déplacer, ils sont très territoriaux et ils écartent les jeunes. L'idée, c'est de soutenir la population dans ce corridor en leur permettant de se déplacer à toutes les extrémités. C'est un projet passionnant », souligne Rob Gradwell. Les éoliennes sont perçues par les réserves privées comme une menace pour les animaux, pour les paysages et pour l'intérêt touristique de la région. « Malheureusement, elles auront un impact désastreux sur l'écotourisme », prévient-il. « Si les éoliennes étaient érigées et que le tourisme s'effondrait avec, les gens chercheront une alternative pour l'exploitation de leurs terres et je pense que ce sera la fin des espèces sauvages. » Une bataille est en cours dans la province du Cap Oriental pour le partage des terres entre agriculture, énergie et écotourisme.
4/15/20232 minutes, 17 seconds
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Cap-Vert: Praia, dans les yeux d’Elida Almeida

Le reportage Afrique du jour nous emmène à Praia au Cap Vert où se tient ce week-end le prestigieux Kriol Jazz Festival, Dee Dee Bridgewater sera la tête d’affiche ce soir. Mais c’est avec une autre chanteuse que nous avons rendez-vous : Elida Almeida, la lauréate du prix Découvertes RFI 2015, vient de publier son dernier disque Di Lonji, « de loin » en créole. Native de l’île de Maio, Elida Almeida vit à Praia. Après la pandémie et alors que la crise économique est sévère dans l’archipel, la chanteuse nous fait découvrir et entendre sa ville, ses habitants, leurs galères comme leurs bonheurs.  Pour aller plus loin : La biographie et la discographie d'Elida Almeida sur RFI Musique.
4/14/20232 minutes, 14 seconds
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Tunisie: à Sfax, la résilience des étudiants subsahariens passe par le football

En Tunisie, après les propos polémiques de Kaïs Saïed le 21 février sur les migrants subsahariens, la situation est revenue au calme dans la ville de Sfax après des violences perpétrées contre les migrants et des expulsions de leur logement. Des tournois de football organisés par les associations étudiantes et des partenaires locaux tunisiens permettent de mettre de côté les angoisses et tensions de ces derniers mois. De notre envoyée spéciale à Sfax, Sur l’un des terrains du Club sportif sfaxien, le club de football de la ville, Félix, étudiant camerounais en marketing digital s’entraîne avec son équipe pour la Canuf, la Coupe d’Afrique des nations universitaire de football. L'évènement est organisé en partenariat avec le commissariat régional de la Jeunesse et des Sports de la ville. « Particulièrement, je connais beaucoup de personnes, pour la plupart grâce au foot, parce que j’ai joué avec eux ; on s’est rencontrés au stade et puis on a partagé quelque chose », explique-t-il. L’évènement sportif prévu initialement pour le mois de mars, avait été repoussé à une date ultérieure après les propos du président Kaïs Saïed. « Une bonne chose pour l'unité et la cohésion sociale » Les entraînements suspendus, la reprise est plus que symbolique pour Félix. « En ce qui concerne la situation des migrants actuellement, je crois que le foot est un sport qui ne va pas aider à régler le problème... mais contribuer à le résoudre parce qu’il permet de rassembler, de mettre des gens ensemble qui ne sont pas de la même culture et je pense que c’est une bonne chose pour l’unité et la cohésion sociale », souligne Félix. Cette mini CAN est l’occasion, selon Loïc Oyono, entrepreneur basé à Sfax et l’un des coachs de l’équipe, de faire preuve de résilience. « S’il y a quelque chose avec laquelle on peut bien se battre, c’est bien cela, c’est le football, et c’est bien qu’on se regroupe entre communautés et même avec la Tunisie, des gens avec lesquels on rit la plupart du temps ; parce qu’il faut le préciser, tout le monde ne suit pas ce mauvais vent. Il y a de bonnes personnes, de très bonnes personnes », insiste l'entrepreneur. ► À lire aussi : Tunisie: la vie en sursis des migrants à Sfax L'ombre de la crise migratoire plane malgré tout Quelques jours plus tard, le premier match d’entraînement a lieu entre Camerounais et Gabonais. Yvan, 24 ans, étudiant gabonais en gestion financière, a tenu le coup grâce au football pendant les semaines de tensions qui ont suivi les propos présidentiels. « Lors de cette crise, vraiment, c’était un peu difficile, mais lorsque vous avez des amis avec qui vous jouez parfois au foot, ça vous apporte du réconfort. » Le début de cette coupe est prévu après le mois de ramadan. Malgré cet aspect positif, l’actualité de la crise migratoire est toujours présente. La ville de Sfax est connue pour être une plaque tournante de la migration irrégulière avec ses 150 kilomètres de côtes. Elle voit une recrudescence des départs irréguliers vers l’Italie. Ronaldo, un jeune Camerounais de 16 ans, s’entraînait occasionnellement avec l’équipe estudiantine dans l’espoir de devenir un footballeur professionnel en Europe. Quelques jours après notre reportage, il est décédé dans un naufrage en tentant de traverser la Méditerranée.
4/14/20232 minutes, 19 seconds
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Abdulsalam El Haj préserve le patrimoine musical soudanais en le numérisant

Abdulsalam El Haj est un jeune mélomane et entrepreneur soudanais. Il s’est donné pour mission de numériser le patrimoine musical soudanais avec son projet baptisé « Tonjela » (« belle jeune fille » en nubien). De notre correspondante à Nairobi, Les rythmes et la voix de Mustafa Al Ataj, l’un des trésors de la musique soudanaise qu’Abdoulsalam s’efforce de préserver. Depuis le lycée, il écume brocantes, marchés aux puces et antiquaire de son pays à la recherche de vieilles cassettes comme celles-ci pour les numériser. « Au début, c'était un hobby, et puis c’est devenu une mission. Avec l’essor de la technologie MP3, j’ai compris que la cassette, c'était du passé. Je me suis dit pourquoi ne pas aller plus loin en numérisant ces cassettes et rendre accessible ce patrimoine aux producteurs, aux chercheurs, aux artistes, aux générations futures et pourquoi pas au monde entier. Que tout le monde puisse s’imprégner de l’univers musical soudanais ». Treize mille cassettes déjà, sauvées de l’extinction, dans le cadre de ce projet baptisé Tonjela, comme ce morceau de Mohamed Wardi, icône de la révolution soudanaise d’octobre 1964. Pour Absusalam, il s’agit autant de préserver les sons, que les messages que charrient cette musique, car de nombreux morceaux portent la trace de l’histoire du pays et de la résistance du peuple soudanais. « Musique et révolution, c’est une longue histoire au Soudan. La musique a toujours rythmé les révolutions. La plupart du temps, il s’agit de révoltes pacifiques. Les gens chantent et scandent leurs messages. À chaque manifestation, il y a de nouveaux chants de résistance qui deviennent alors des emblèmes de la révolution ». À terme, il espère lancer sa propre radio pour diffuser ce patrimoine qui résonne particulièrement aujourd’hui aux oreilles de la jeunesse révolutionnaire soudanaise d’aujourd’hui.
4/11/20232 minutes, 28 seconds
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Gabon: les difficultés d'approvisionnement font flamber les prix du manioc

Au Gabon, ouverture ce mardi des Assises nationales de la lutte contre la vie chère. Jusqu’à jeudi prochain, les délégués venus de tout le pays vont examiner en profondeur les causes de la flambée des prix pour apporter des solutions qui soulageraient le panier de la ménagère. La mission parait très difficile, car beaucoup de produits de base consommés au Gabon sont importés. C’est le cas du manioc dont les prix ont flambé depuis janvier dernier.
4/10/20232 minutes, 16 seconds
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Côte d'Ivoire: pour «Pâquinou», la ville de Daoukro célèbre la tradition et le partage

En Côte d’Ivoire, on célébrait tout ce week-end la fête de Pâques, surnommée « Pâquinou ». En marge de cette fête, à Daoukro, en pays baoulé, le Festival international de la culture et des arts de Daoukro (Ficad) est depuis 18 ans l’occasion de mettre l’accent sur les danses et mets traditionnels en voie de disparition. Pendant plusieurs jours, c’est un moment de retrouvailles.
4/9/20232 minutes, 21 seconds
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Sénégal: un centre de prise en charge d'enfants atteints de troubles de l'autisme et de trisomie

L’association Enfants Soleil a ouvert début mars un centre qui s'occupe d'enfants atteints de trouble du spectre de l’autisme, de trisomie 21 ou d’infirmité motrice cérébrale (IMC). Le centre de soins médicaux et paramédicaux offre des bilans psychomoteurs gratuits aux enfants et vise à les intégrer dans la société en faisant de la sensibilisation sur ces handicaps visibles ou invisibles, encore très stigmatisés au Sénégal. ► À lire aussi : Sénégal: la prise en charge des enfants des rues pendant la pandémie de coronavirus
4/8/20232 minutes, 20 seconds
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En Côte d’Ivoire, le processus de «certification» gagne les plantations d’hévéa

Afin de respecter les critères plus contraignants imposés par la législation européenne sur l’importation des matières premières, la certification - déjà très présente dans le cacao - pourrait se développer dans le secteur du caoutchouc ivoirien. L’ONG Forest Stewardship Council (FSC) a regroupé des acteurs du secteur à Grand-Bassam pour rappeler les grands principes de la certification FSC à l’aide d’un jeu de stratégie réaliste sur la chaîne de valeur.
4/7/20232 minutes, 22 seconds
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«220 logements», tranches de vies théâtrales sur fond de crises ivoiriennes

La pièce de théâtre intitulée 220 logements, produite par La Fabrique culturelle, est projeté ce soir et demain, à l’Institut français d’Abidjan. C’est une comédie musicale, qui décrit le quotidien d’un groupe d’habitants soudés, dans la commune d’Adjamé. Histoires d’amour, petites querelles. Le premier épisode se déroule de 1990 à 2000 et aborde les révoltes estudiantines et la mort du premier président Félix Houphouët Boigny. Le second épisode, que notre correspondante a suivi, suit le quotidien de ce petit groupe d’habitants, de 2000 à 2010. Une période marquée par plusieurs crises qui ont divisé le pays.  De notre correspondante à Abidjan, Autour du maquis Faro Faro de tonton Samy, les habitants de la cité « 220 logements » se retrouvent pour parler des nouvelles du pays. Ce soir-là, dans la nuit du 19 septembre 2002, une tentative de coup d’État éclate. Le pays est ensuite coupé en deux. Les habitants de cette petite cité racontent, à leur manière, les entraves vécues au quotidien.   Sylvain Baka joue le rôle du fonctionnaire. Généreux, il invite régulièrement ses voisins au maquis et conserve l’argent de son ministère chez lui. Car en temps de guerre, dit-il, les banques sont fermées.     « La guerre a fait des malheureux, mais lui, fonctionnaire qu'il était, tenait un bon poste. Il avait un budget, alors il s'est dit qu'il profite de cette situation pour garder le budget des constructions des hôpital, des écoles, que ce n’est pas lui qui a provoqué la guerre. Donc il s'est dit qu'il est “un dommage collatéral”, comme bien d'autres », explique Sylvain Baka. Lumière sur les difficultés du quotidien Pour Chantal Djédjé, auteure de cette pièce, il était important de mettre en avant les difficultés les habitants. « J'ai pris des événements qui impactaient directement sur la population, l'individu dans son quartier par exemple. La pénurie de nourriture, ça, on l'a vécu, plus de médicaments également dans les pharmacies... Donc mon choix a été guidé par ça : qu'est-ce qui a impacté directement sur la vie des gens au quotidien ? », explique-t-elle. Le rôle de la presse Tensions politiques, rejet de la présence française, scandale écologique, crise post-électorale en 2010… pendant près de deux heures, cette pièce montre comment une cité est totalement bouleversée par tous ces événements. Avec un outil, qui rythme l’histoire : les titres des journaux.  « La presse a joué un rôle très important dans la crise de 2000 à 2010, sur les informations sur la façon de traiter ces informations là et la psychose que ces informations ont créé », rappelle Souleymane Sow, le metteur en scène de cette pièce. « Donc c'était une histoire de la guerre aux informations. Elles étaient traitées en fonction de ce qui arrangé chaque partie, sachant que chaque journaux avait été lié à un parti politique bien précis. » 220 logements se referme sur une note d’espoir : celle d’une nouvelle période marquée par la reprise des activités et la question de la réconciliation.   
4/7/20232 minutes, 31 seconds
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Soudan du Sud: à Juba, le Centre pour la jeunesse menacé de disparition

Lieu historique et unique en son genre à Juba, le Centre pour la jeunesse et le développement social (Youth Centre for Social Development) a été construit en 1972, à la fin de la première guerre civile soudanaise. Mais les autorités ont récemment alloué près d'un tiers de l’espace à un entrepreneur privé pour la construction d'un nouveau complexe sportif, inauguré le 21 mars. Une nouvelle réalité qui témoigne de la menace grandissante de privatisation des espaces publics dédiés à la jeunesse dans la capitale du Soudan du Sud. De notre correspondante à Juba, Comme tous les jours en fin d’après-midi, les kickboxeurs, garçons et filles, sont venus s’entraîner. Leur coach Puro Okello Obob est un ancien professionnel. Il est convaincu du pouvoir du sport pour « dépasser le tribalisme et les divisions sociales », et donne des cours au Centre pour la jeunesse bénévolement depuis 2009 : « Vous ne pouvez pas faire de développement communautaire sans le sport. Le sport, c’est le meilleur terrain pour unir les gens », assure-t-il. En lieu et place du grand espace ouvert faisant face au préau dédié au kickboxing, un haut mur se dresse désormais, restreignant l’accès au nouveau complexe sportif. L’entraîneur ne cache pas sa déception : « Je suis totalement opposé à ce projet, parce que vous ne pouvez pas construire un mur d’enceinte à l’intérieur d’une structure existante. Cela n’a aucun sens ! », s'emporte Puro Okello Obob. « Ce lieu est ouvert à tous les jeunes, il a été construit pour unir les Sud-Soudanais revenant de la guerre. Et maintenant, le centre est divisé en deux ! » « Ce projet n'a rien à voir avec nous » Mawa Moses, un haltérophile habitué du Centre, est lui aussi opposé à la nouvelle structure : « Ce projet n’a rien à voir avec nous. C’est un terrain de foot commercial. Il faut payer pour y accéder. Nous, nous proposons des entraînements gratuits : la salle de sport, les cours de boxe, de kickboxing, de taekwondo et de karaté, tout est entièrement gratuit », dit-il. Le nouveau complexe sportif prive de fait le quartier d’un grand espace où mariages, festivals, performances de danses traditionnelles pouvaient avoir lieu. Stephen Ochalla, fondateur du groupe de musique et de danse Orupaap basé au sein du Centre pour la jeunesse depuis 2011, ne cache pas son amertume : « L’espace est maintenant réduit. Avant, jusqu’à 3 000 personnes pouvaient venir passer du bon temps ici, pour des expositions, des festivals, des danses traditionnelles… Mais tout ça maintenant, c’est fini... », souffle-t-il. L'inquiétude de voir le centre entièrement disparaitre Ketty Luka, une danseuse du groupe Orupaap, s’inquiète de l’avenir : « J’ai peur qu’à l’avenir, ils occupent tout l’espace du centre. Ce serait terrible. J’espère que cela n’arrivera pas. Car cela signerait l’arrêt de toutes les animations, et ce centre est le seul dans tout Juba à proposer ces activités. » Les autorités de l’État d’Equatoria Central, qui sont en charge du Centre pour la jeunesse, n’ont pas répondu à nos questions.
4/4/20232 minutes, 15 seconds
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Maroc: à la découverte du patrimoine architectural et culturel des quartiers historiques

La balade guidée se déroule de nuit à l’occasion de la troisième édition des Nocturnes du patrimoine de Casablanca organisées par l’association Casamémoire, qui milite pour la préservation du patrimoine architectural de la ville depuis 1995. Une expérience conviviale et culturelle qui permet aux participants de découvrir ou de redécouvrir la ville et ses ambiances un soir de ramadan.
4/3/20232 minutes, 21 seconds
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Au Rwanda, des réfugiés burundais partagés entre l'espoir et la crainte du retour au pays

Au Rwanda, le programme de rapatriement volontaire des réfugiés burundais suit son cours, quatre ans après sa mise en place. Mais un certain nombre d'entre eux s'inquiètent toujours de la situation sécuritaire dans leur pays. Reportage dans le camp de réfugiés de Mahama, le plus grand au Rwanda, dans le sud-est du pays. De notre envoyée spéciale, Dans sa petite maison au centre de Mahama, Geoffrey passe ses derniers jours dans le camp de réfugiés. Après huit ans d’exil, depuis la crise électorale de 2015 au Burundi, le jeune homme s’est inscrit pour le prochain convoi de rapatriement volontaire. « Je n'ai pas peur. Ce qui est nécessaire, c’est de revoir ma famille. Quelle que soit la situation là-bas, le plus important est de rester concentré sur ma famille que je n'ai pas pu voir pendant huit ans. Les malheurs existent. Même ici, on peut avoir des accidents. On doit croire que tout ira bien là-bas », espère Geoffrey. Quelques jours plus tard, le jeune Burundais est parti, avec une centaine d’autres réfugiés, dans le premier bus de rapatriement de l’année. Des rapatriements organisés au Rwanda depuis 2019, au début presque toutes les semaines avec plus de 30 000 retours, mais qui se sont largement réduits depuis. La peur du retour au pays En 2022, selon le Haut-Commissariat des Nations unies aux réfugiés, moins de 1 000 Burundais exilés au Rwanda sont repartis dans leur pays natal. Anita, résidente du camp de Mahama craint encore de rentrer : « J’ai une fille âgée de 8 ans. Elle ne connaît même pas l’image de son père resté au Burundi, car elle était trop petite quand on est arrivé ici. Pour moi, je ne peux même pas penser à repartir au Burundi. Je ne peux pas y retourner. J’ai décidé que je vivrai n’importe où le HCR m'enverra ». Une délégation du gouvernement burundais s’est rendue dans le camp en décembre dernier afin de convaincre leurs ressortissants de revenir au Burundi. Mais pour Pierre Niyiragira, secrétaire du comité des réfugiés de Mahama, les conditions ne sont pas encore réunies pour un retour apaisé : « Presque tous les réfugiés qui sont ici dans ce camp ne pensent pas que la raison de leur départ soit réglée dans leur pays natal. Ce sont des réfugiés qui ne se sentent pas encore à l’aise, qui ont toujours peur de retourner dans leur pays parce que ce qui les a fait fuir est encore là ». Selon le HCR, plus de 50 000 réfugiés burundais vivent encore au Rwanda.  ► À lire aussi : Burundi: les «putschistes» réfugiés à Kigali restent une épine dans les relations avec le Rwanda
4/2/20232 minutes, 16 seconds
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Les contes, sauvegarde du patrimoine oral au Sénégal

Au Sénégal, les contes et les histoires sont une richesse, qui se transmet de génération en génération, sous l’arbre à palabres ou dans les cours des maisons. Mais l’espace et le temps accordés aux contes se sont faits de plus en plus rares, leur existence a même semblé être menacée, il y a quelques années. Mais à Dakar, une structure se bat pour conserver ces histoires. De notre correspondante à Dakar, Calebasse à la main, la conteuse Oumy l’africaine est venue interpréter un conte sur le mariage forcé devant une centaine d’enfants. Elle est l’un des visages d’une jeune génération de griots. Pour sa consœur Yacine, ces histoires sont essentielles pour véhiculer des valeurs morales. « Toujours s'entraider, cultiver la solidarité, avoir de la patience, ne pas être jaloux, cultiver toujours la paix intérieure en soi », énumère-t-elle. Comme Oumy et Yacine, Moussa Kalamou était comédien avant de passer au conte. Mais le goût était là depuis longtemps. « Moi, j'aime le conte depuis que je suis petit. J’ai été élevé par ma grand-mère, c'est elle qui me racontait les histoires, j’ai grandi avec ça. En devenant artiste-comédien, je me suis dit “mais, attends, moi, j'ai quelque chose en moi ! » ► À lire aussi : «Contes populaires africains réinventés»: Netflix met six jeunes réalisateurs du continent en avant C’est la maison de l’oralité Kër Leyti de Dakar qui organise la représentation du jour. La structure qui existe depuis 2009 est très active : ses membres parcourent le pays pour récolter des contes. Mais leur rôle va plus loin. « C'est d'abord un travail de sensibilisation des communautés sur l'intérêt de sauvegarder ce qui reste en tant qu'élément du patrimoine immatériel avant que les possédants ne disparaissent du fait de leur âge », explique le professeur Massamba Gueye, créateur de Kër Leyti. Les contes sont enregistrés dans toutes les langues à l’aide de smartphone ou d’enregistreurs, et la mission continue de retour à Dakar. « Une fois que nous avons collecté ces contes-là, créer des podcasts, aller amener ces contes sur les réseaux sociaux pour permettre au public jeune d'en bénéficier », poursuit-il. La maison de l’oralité édite aussi des livres de contes illustrés et propose des formations pour les apprentis conteurs. Oumy en a suivi une : « J'ai été là-bas. On a des résidences pour bien apprendre le conte, après c'est ça qui m'a poussé à bien intégrer dans le métier du conte. Il faut apprendre à le faire parce que ce n'est pas un métier comme les autres métiers. » Pour que ce patrimoine oral continue à traverser les générations, le professeur Massène Sène, sémiologue, plaide pour que le conte ait sa place à l’école : « La transmission ne pourra être facile qu'avec les programmes scolaires. Il faut que les curriculars fassent de la place aux contes au même titre que les romans, que la poésie, c'est aussi simple que ça. C'est de la production littéraire. » Les enfants ce jour-là semblent déjà conquis.  ► Écouter le podcast : L'Afrique en contes
4/1/20232 minutes, 20 seconds
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En Afrique du Sud, de petits insectes contre le fléau de la jacinthe d'eau

Si ses fleurs violettes peuvent être agréables à l’œil, il ne faut pas s’y tromper : la jacinthe d’eau, plante invasive dans de nombreux pays et notamment en Afrique, est devenu un fléau des cours d’eau et des lacs. Certains pays tentent d’en tirer parti, en la transformant pour la valoriser, mais en Afrique du Sud, on parie sur un petit insecte pour tenter d’empêcher sa propagation. De notre correspondante, Julie Coetzee fait face à un tapis de plantes vert fougère qui recouvre une partie du lac d’Hartbeespoort. Dès que les températures remontent, la jacinthe d’eau se propage à la surface. Originaire d’Amérique latine, sa croissance très rapide la rend difficile à contrôler et à éradiquer. Un problème pour les activités touristiques, mais aussi pour l’écosystème, selon cette chercheuse du Centre pour le biocontrôle de l’université de Rhodes : « Les oiseaux ne peuvent pas accéder aux poissons. De plus, comme la lumière ne pénètre pas, les phytoplanctons, qui produisent de l’oxygène, ne peuvent pas le faire correctement. Donc on obtient un plan d’eau sans vie ». La jacinthe d’eau a fait son apparition dans les années 60 sur cette retenue artificielle. Les pouvoirs publics ont d’abord mis l’accent sur les herbicides pour la contrôler, mais cette stratégie a été arrêtée en 2017, pour désormais miser sur des insectes, qui, en Amérique latine, se nourrissaient de cette plante. Une intervention faite avec beaucoup de précautions, selon Julie Coetzee : « Nous devons d’abord tester ces insectes, de façon isolée, pour s’assurer qu’ils sont bien spécifiques à leur hôte : c’est-à-dire qu’ils peuvent se nourrir et compléter leur cycle de vie uniquement grâce à la plante visée ». La méthode, déjà testée aux États-Unis, consiste à introduire, entre autres, un petit insecte de la famille des Delphacidae à chaque printemps. Un adversaire redoutable pour cette plante invasive, selon la chercheuse Rosali Smith : « Voici les adultes, qui sautent un peu partout, ils font environ 2,5 millimètres. Ils vont aspirer toute l’eau sucrée que la jacinthe produit. Au printemps, les graines germent et la plante qui occupait 5% du lac va se déployer sur 40%. Nous relâchons alors les insectes responsables du biocontrôle, et on observe en général qu’ils réduisent à nouveau le taux d’occupation de la jacinthe à 5% ». Et pour que suffisamment d’insectes soient réintroduits chaque année, des riverains mettent la main à la pâte, en hébergeant sur leur propriété de petites serres d’élevage de Delphacidae, à l’image de Dries Botha, directeur des opérations d’un complexe résidentiel en bord du lac : « Au début, cette méthode nous semblait étrange, car on était habitué à l'ancienne façon de faire avec des herbicides, mais désormais, je suis l’ami de ces insectes, j’ai été convaincu ». Cependant, les chercheurs préviennent que ces insectes ne traitent que l’un des symptômes de la pollution des eaux, et des plantes invasives continueront à se développer tant que ce problème ne sera pas réglé.
3/31/20232 minutes, 19 seconds
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En Guinée, opération sauvetage pour la maison de Miriam Makeba

Érigée au sommet d’une colline du Fouta Djalon, la villa de Miriam Makeba domine Dalaba. Un collectif voudrait aujourd’hui sauver l’héritage de la chanteuse sud-africaine à Dalaba. La villa pourrait être rénovée.  « Ce tableau a été offert à Sekou Touré qui l’a offert à Myriam Makeba ». Très attentif aux explications de son guide, l’ambassadeur d’Afrique du Sud, Lekoa Solly Mollo, découvre, avec émotion, la maison de Miriam Makeba, construite sur le modèle de la case traditionnelle. « C’est un sentiment partagé à cause de l’état de ce bâtiment. Si l’on considère l’icône, l’héroïne qu’elle a été, l’importance de sa contribution pour l’humanité, que l’on voit à quel point on a été négligent et on l’a vite oubliée, tout cela nous donne un sentiment de culpabilité », confie-t-il. C’est ici que la chanteuse sud-africaine avait choisi de résider durant son exil en Guinée, entre 1969 et 1985. À l’époque, son activisme politique dérangeait en Occident. Engagée contre le racisme et l’apartheid, elle avait trouvé refuge au pays de Sékou Touré, ce compagnon de la révolution. La villa a été presque abandonnée depuis la mort de la chanteuse en 2008. Seuls les habitants se sont occupés de l’endroit, avec leurs moyens limités. Le 31 décembre était organisée une visite avec les autorités locales. « Je me sens vraiment triste. Mais je me sens aussi nostalgique et reconnecté à elle ici », explique Lekoa Solly Mollo. Un magnétisme puissant se dégage de ce lieu où les meubles tombent en poussière, grignotés par les termites, mais où rien n'a réellement changé.  ► À lire ou à écouter : Viva "Mama Afrika"! « Voir ce bijou valorisé » Un collectif vient d’être créé pour rénover la villa. « C’est un grand collectif, c’est vraiment un grand ensemble, ce sont les habitants de Dalaba, c’est l’ambassade de l’Afrique du Sud, c’est la fondation Miriam Makeba. Il y a un intérêt à voir ce bijou valorisé, il y a vraiment un intérêt patrimonial et touristique », souligne Fadia Diallo qui est architecte. « Au sein du collectif d’architectes, on est sur les études de restauration. On estime que ce n’est pas si alarmant que ça l’état de dégradation de la structure, ça tient encore ! », estime Fadi Diallo. À côté de lui, le gardien des lieux, Oumar Telli Diallo, 76 ans : « Elle était très sociable et à chaque fois qu’elle faisait des tournées à l’international, quand elle revenait, elle mobilisait tout le monde. Il y a même des gens des villages environnants qui venaient. Elle organisait des festins et parfois, elle revenait avec des présents. » ► À lire ou à écouter : Miriam Makeba, la «Mama Africa» qui passait d'une langue à l'autre
3/30/20232 minutes, 45 seconds
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Dix ans après, Maurice se souvient des pires inondations de son histoire

Habituée aux cyclones, Maurice doit désormais s’attendre à subir aussi des inondations, de plus en plus fréquentes dans l’île. Un événement symbolise l’apparition de ce nouveau phénomène provoqué par le réchauffement climatique. C’était il y a dix ans jour pour jour : le samedi 30 mars 2013, des inondations subites et violentes submergeaient une partie de la capitale, Port-Louis, engendrant la mort de onze personnes. L’île a tiré les leçons de ce douloureux épisode, en entreprenant depuis cette date de grands travaux d’évacuation de l’eau pluviale. De notre correspondant à Port-Louis, Ce samedi après-midi du 30 mars 2013, l’attention de cet habitant de Canal Dayot, Port-Louis, est attirée par une pluie violente accompagnée d’un grondement inhabituel. Bouck Pillay Vithylingum est pris de court par une crue subite du ruisseau qui traverse son quartier. « On dirait qu'à ce moment-là, l’eau était très en colère. Elle faisait un bruit et on entendait les rochers qui roulaient et secouaient les branches », se souvient-il. « Entre-temps, la montée des eaux. C'est arrivé là, à hauteur de presque deux mètres de haut ; bien plus, trois mètres ! » Ce photographe de presse de 78 ans, a assisté impuissant au déferlement de l’eau dans sa demeure et à la destruction de ses archives vieilles de quatre décennies. Bien que le ruisseau ait été agrandi, Bouck Pillay Vithylingum et ses voisins peinent à chasser leur mauvais souvenir. « Ils savent le danger qui guette les habitants. Ils sont sur le qui-vive malgré les travaux, en période de pluie toute la nuit, ils surveillent la rivière. » Des travaux en cours depuis dix ans Ailleurs dans le centre d’affaires de la capitale, également traumatisé par les inondations du 30 mars 2013, la mairie mène depuis dix ans de grands travaux de restauration des ruisseaux et des drains. Elle a aussi revu sa politique d’assainissement. « Le nettoyage se fait quasi quotidiennement avec l'arrivée des grosses pluies. Et puis nous avons sensibilisé les habitants afin qu'ils ne jettent plus les ordures dans les drains », explique Nahida Peerbaccus, cheffe inspectrice à la mairie de Port-Louis. Dans son plan anti-inondation, la mairie de Port-Louis s’attèle désormais à la partie la plus sensible des travaux. Le lord-maire, Mahfouz Moussa Cadersaib, annonce la démolition de certaines infrastructures privées et publiques. « On va procéder avec la démolition des structures qui se trouvent sur le ruisseau du Pouce. Là, pour l'instant, il y a cinq places qui sont concernées, on va démolir la première la semaine prochaine. Les travaux vont démarrer. » Sur la liste de démolition à entreprendre au cœur de la capitale, un fast-food d’une chaine internationale, des échoppes et des aires de stationnement construits sur des passages naturels des eaux pluviales.
3/29/20232 minutes, 1 second
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Guinée: le développement urbain menace les forêts classées de Labé

La Guinée dispose de nombreuses forêts classées qui datent le plus souvent de la période coloniale. Dès cette époque, il y avait eu une prise de conscience face à la dégradation du milieu naturel. Au Fouta-Djalon, dans cette région du centre du pays, les zones boisées se font rares désormais. Certaines se sont retrouvées, sous l’effet de l’étalement urbain, au cœur des villes. La préfecture de Labé est particulièrement concernée. Son chef-lieu est une ville moyenne dont le développement menace aujourd’hui d’engloutir des pans entiers de végétation.
3/29/20232 minutes, 12 seconds
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Madagascar: dans le sud-est du pays, la malnutrition aigüe frappe à l'abri des regards

Les populations de ces régions enclavées de l’île, abandonnées par les pouvoirs publics, subissent depuis un an une double peine : en l’espace d’une année, trois cyclones intenses (Batsirai, Emnati, Freddy) ont atterri dans leur zone, détruisant maisons et moyens de subsistance. 60 à 90% des superficies dédiées aux cultures vivrières et de rente ont été endommagées. Conséquence : les humanitaires estiment qu’un quart de la population du Sud-Est connaît actuellement une insécurité alimentaire aiguë. En d’autres termes, la vie de ces personnes est en péril parce qu’elles ne sont pas en mesure de s'alimenter correctement. 15 jours après le passage du cyclone Freddy, notre correspondante s’est rendue à l’hôpital du chef-lieu de la région Vatovavy, à Mananjary, où des enfants faméliques ont été admis en soins intensifs. De notre correspondante de retour de Mananjary, Dans une chambre de l’hôpital de Mananjary, trois bébés et leurs mamans. Dans les bras de sa mère, la minuscule Soaravo gémit. Pesant à peine 2 kilos, l’enfant ressemble à une prématurée. Pourtant, quand on demande son âge à Iavosoa, sa maman, elle nous révèle que la petite vient en fait d’avoir 10 mois. L’enfant est en situation de malnutrition aigüe sévère. Son pronostic vital est engagé. À son âge, son poids devrait être 4 à 6 fois plus élevé. Ces enfants sont ici depuis cinq jours. Ils ont été découverts à une cinquantaine de kilomètres de Mananjary, par l’équipe de Médecins du Monde, que coordonne Joachin Noterdaeme. « Ce sont des enfants qu’on a ramenés de notre exploration sur la RN 11, partie à l’ouest de Mahaela, Ambohitsara, qui est une zone très enclavée, très difficile d’accès », explique-t-il. « On est parti faire l’évaluation de cinq communes et des centres de santé, et on a rencontré ces cas de malnutrition aigüe sévère, qu’on a ramenés avec nous pour être pris en charge, ici au Créni, le Centre de réhabilitation et d’éducation nutritionnel intensif, un centre pour les enfants malnutris aigus, sévères, avec complications. Les centres de santé qu’on a visités sur le terrain n’étaient pas en capacité de faire une prise en charge, même si les complications ne sont pas forcément très graves pour ces cas-là, donc on a préféré les ramener ici à Mananjary. » ► À lire aussi : Madagascar: opération de lutte contre la malnutrition « La partie émergée de l'iceberg » Ici, les enfants et leur parent sont pris en charge par plusieurs ONG humanitaires, qui œuvrent en collaboration avec le ministère de la Santé. La petite Soaravo va rester deux mois en soins intensifs le temps de reprendre du poids. « Pourquoi ma fille est dans cet état ? Parce qu’on n’a pas assez de nourriture, là où on habite. J’ai eu la dysenterie. Je n’avais presque plus de lait, j’étais exténuée. Étant seule, sans parents ni mari, je n’ai pas pu me soigner. Et elle est tombée malade à son tour. Puis est arrivé le cyclone qui a ravagé notre hameau et détruit entièrement notre maison », explique Iavosoa, sa mère. ► À écouter aussi : Madagascar: retour à Ankilimarovahatsy, où la famine a tué neuf habitants entre juin et août 2020 Ces enfants, accueillis au centre, ne seraient que « la partie émergée de l’iceberg » affirment des médecins de l’hôpital. « En brousse, la situation nutritionnelle est catastrophique. Et même en ville, les cas inquiétants se multiplient » chuchotent-ils hors micro. L’ordre leur a été donné de ne pas en parler. Difficile pourtant de cacher la réalité. « C’est une situation d’urgence nutritionnelle, clairement », explique sans détours Jean-François Basse, le représentant de l’Unicef à Madagascar. « Nous avons vu que dernièrement les rapports sont de plus en plus alarmants, notamment sur la partie que nous venons de visiter, sur Ikongo. Mananjary et Manakara, toutes ces localités font aussi partie des zones où nous avons une urgence nutritionnelle. Nos équipes sont sur le terrain pour essayer de répondre à ces besoins-là. Mais il y a des insuffisances partout, honnêtement, il faut le reconnaître », souligne Jean-François Basse. Une situation alimentaire extrêmement inquiétante dans cette partie du Sud-Est qui conduit de plus en plus de familles désespérées, comme ont pu le confirmer nos confrères de France 24 dans leur récent reportage, à mettre en vente leurs enfants.
3/26/20232 minutes, 22 seconds
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Tunisie: une messe avec les migrants à Tunis pour apporter de l'apaisement

En Tunisie, les violences et les arrestations contre les migrants subsahariens ont diminué, un mois après les propos polémiques du président Kaïs Saïed. Après un retour au calme relatif, ceux qui ont choisi de rester en Tunisie tentent de reprendre leurs habitudes, malgré leurs conditions de vie précaires. La messe du dimanche, pour une partie de la communauté migrante catholique, apporte un apaisement. Du fait du modus vivendi entre l’Église et l’État en vigueur dans le pays depuis l’indépendance, les représentants cléricaux ne peuvent pas intervenir dans la politique, mais ils tentent d’aider comme ils peuvent les paroissiens en situation de détresse. De notre correspondante à Tunis, À l’église Saint-Cyprien de Carthage, Prisca Barachi, 23 ans, étudiante congolaise, savoure la messe du dimanche 19 mars, trois semaines après les propos du président Kaïs Saïed. Comme d’autres migrants subsahariens, elle a eu peur, face aux témoignages d’agressions et aux nouvelles de rapatriement de nombreux migrants dans leurs pays. « Venir à l’église, ça nous a permis de nous retrouver en communauté, de voir les autres et de savoir que ça va, que je peux compter sur des gens », explique Prisca Barachi. Justine, Ivoirienne de 40 ans, installée depuis dix ans en Tunisie, mais sans carte de séjour, n’a pas été expulsée de chez elle, car elle avait un contrat de location, mais elle a ressenti le changement dans le regard des gens. « Ça m’a cassé le moral franchement », souffle-t-elle. Justine n’est pas venue assister à la messe pendant deux semaines, par peur de se faire agresser en chemin. « On a dit “Dieu est partout”, donc on a écouté les messes en ligne, tranquille. C’est la première fois que je reviens après les évènements quoi. Le temps de laisser les choses se calmer, comme ça on sort plus librement quoi », ajoute-t-elle. À la question de savoir si cela lui a fait du bien de revenir, Justine répond : « Oui, ça nous a fait du bien, parce qu’en tant qu’enfant de Dieu, c’est la Bible, la parole de Dieu qui nous rend fort en fait. » Le temps de l'apaisement Pour le père Jawad, qui a officié la messe, le temps est à l’apaisement, surtout avec le début du mois de ramadan, une période de solidarité. « Il n’y a pas eu que de mauvaises choses. Il y a des Tunisiens qui étaient aussi très proches de nous, qui nous ont conseillés qui nous ont aidés. Il y a eu beaucoup de solidarité aussi », tient à signaler l'homme d'Église. À la cathédrale Saint-Paul, dans le centre-ville de Tunis, une grande partie de la communauté subsaharienne est également revenue. Un bon signe pour le père Sylvio qui dit compter entre 300 et 400 paroissiens subsahariens réguliers. « On a eu beaucoup de paroissiens qui ont subi des violences, bien-sûr et puis je me suis rendu dans les maisons où ils habitaient et j’ai vu de mes propres yeux tout ce qui leur était arrivé », déclare-t-il. Le père Sylvio tente de sensibiliser sur la problématique migratoire en Tunisie. « Là, nous avons aussi entamé des contacts avec des diocèses en Afrique pour expliquer la réalité. Leurs curés ou leurs évêques pourraient leur dire “sachez que là-bas, ce n’est pas un paradis non plus” », explique-t-il. Pour la fin de la période du carême, le père Sylvio va mettre à contribution les fidèles de la cathédrale pour aider les migrants qui sont encore dans une situation précaire face à la perte de leur logement ou de leur travail.
3/25/20232 minutes, 20 seconds
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Rwanda: la technologie pour adapter les pratiques agricoles face aux sécheresses

Face au problème de l’irrigation, certaines entreprises tentent de trouver des solutions pour les coopératives fermières afin d’optimiser les rendements agricoles et résister aux périodes de sécheresse, plus violentes à l’est du Rwanda. À Kagitumba, à l’extrême nord-est, région frontalière avec la Tanzanie et l’Ouganda, les agriculteurs utilisent désormais leur téléphone pour connaître les besoins en eau de leurs champs. De notre correspondante à Kigali,                                    Sur l’une des parcelles de la coopérative, Jean-Marie Birigirimana s’approche d’un des capteurs blancs installés dans le champ, téléphone à la main : « Ici, l’application BazaFarm nous montre que l’humidité est suffisante, la température est aussi suffisante ; donc on n’a aucun problème. Tous les paramètres sont au vert ». Durant cette saison, seuls quelques plants de légumes sont encore arrosés par des systèmes de pivot central. L’objectif des capteurs : apporter aux plus de 1 000 fermiers de la coopérative les moyens technologiques d’adapter quotidiennement l’irrigation aux besoins du sol afin d’optimiser les récoltes. « Avant qu’on nous amène ces infrastructures, la production de notre coopérative était basse, mais ces infrastructures nous ont permis d’augmenter les rendements, explique Jean-Marie Birigirimana. On faisait de l’agriculture traditionnelle, certains amenaient leurs vaches et chèvres dans le champ ; donc on ne connaissait rien de l’agriculture moderne. Mais maintenant, on a tellement augmenté la production qu’un agriculteur peut récolter entre 7 et 8 tonnes de maïs par hectare », se réjouit Jean-Marie Birigirimana. Un programme créé en 2020 Le programme a été installé en 2020 dans cette coopérative de l’extrême nord-est du pays, l’une des régions les plus affectées par la sécheresse au Rwanda. Wilson Ndayisaba, directeur technique de l’entreprise STES, à l’origine du projet. « Les fermiers peuvent visualiser les données sur l’interface destinée aux utilisateurs de notre application. De cette façon, ils peuvent voir quand irriguer et en quelle quantité. Nous avons formé environ 115 de ces fermiers sur comment utiliser l’application. Tous ne sont pas formés, on a surtout formé ceux qui ont des responsabilités dans le groupe ». Pour l’instant, seules deux coopératives bénéficient du programme dans le pays, mais l’entreprise espère étendre leur nombre dans les prochaines années. Au Rwanda, seuls 9,2% des foyers utilisent une forme d’irrigation pour l’agriculture. ► À lire aussi : Miracle ou mirage rwandais : faut-il croire aux bienfaits de la révolution verte ?
3/24/20232 minutes, 6 seconds
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La rééducation des enfants malnutris en Centrafrique [2/2]

En Centrafrique, la crise humanitaire continue de s’exacerber, comme l’a relevé l’ONU, selon qui plus de la moitié de la population du pays aura besoin d’aide cette année. Parmi les conséquences prévisibles, la malnutrition infantile. À Bangui, en plus d’une prise en charge médicale d’urgence, les enfants peuvent bénéficier d’une rééducation pour tenter d’en limiter les effets et stimuler leur autonomie. De notre correspondant à Bangui,  Sur de petits bancs de bois du CHRAM, le Centre de rééducation pour handicapés moteurs, dans le 4e arrondissement de la capitale, des mères attendent, leur enfant dans les bras, l’heure de la séance. Julienne, la maman de Privas, âgé de deux ans, vient de Damara une fois par semaine. « Mon fils avait beaucoup maigri, ses cheveux étaient devenus fins et étaient tombés, c’est un signe de malnutrition aiguë sévère. Donc, on nous a envoyé à l’hôpital de Begoua, puis là-bas, le médecin a constaté qu’il pouvait à peine se tenir assis, et on nous a référé ici. Depuis, on suit les séances de rééducation, on lui fait des massages avec la pommade baume des nerfs pour qu’il reprenne du tonus. » S’il ne parvient pas encore à se tenir debout seul, grâce aux séances, Privas commence à faire du quatre pattes et à se déplacer. Dans le box du centre, géré par la plateforme des confessions religieuses de Centrafrique, c’est sœur Grace qui est en charge des massages ce matin : elle frotte vigoureusement afin de stimuler le système musculaire et nerveux, « pour qu'il puisse avoir du tonus » explique la soignante. Après le massage, place aux exercices « de mobilisation, de posture, stationnement debout, et puis après, apprentissage de la marche ». Et pour sœur Grace, ce programme finit par faire ses preuves : « Cet enfant-là, avant, il n'était pas comme ça. Il était fatigué. Mais avec la séance et avec ce qu'il a mangé, il commence à avoir de la force. » « Que l'enfant soit autonome » Pour les nouveaux arrivants, passage par le bureau de sœur Martine. C’est elle qui gère les diagnostics et ajuste les séances selon les cas. Après un interrogatoire avec la mère, elle analyse le cas d'un enfant atteint d'une infirmité motrice cérébrale : « Je pose la question "Comment l'accouchement s'est passé ?", surtout dans le cas de son enfant. C'est un IMC - infirmité motrice cérébrale. Donc moi, je lui pose la question pour savoir est-ce que c'est à l'accouchement que ça s'est passé. Est-ce qu'à l'accouchement, s'il y a eu souffrance fœtale, parce qu'il y a un manque d'oxygène au niveau du cerveau, il y a une lésion au niveau du cerveau. Donc c'est pour savoir : est-ce que c'est à l'accouchement, ou bien est-ce que c'est après que l'enfant est tombé malade ? Parce que la crise de paludisme ou la méningite, aussi, peuvent amener l'enfant dans cet état. L'objectif, c'est qu'il acquiert son autonomie, c'est tout ce qu'on cherche. L'enfant gardera des séquelles, bien sûr. Mais au moins que l'enfant soit autonome. C'est le but de la rééducation. » Action contre la faim prend en charge 50 séances pour les enfants qui souffrent de retard de développement cérébral. Les amener à l’autonomie permettra de limiter l’ostracisme et de décharger les familles qui connaissent déjà de lourdes contraintes socio-économiques. ► À lire aussi : La prise en charge médicale des enfants malnutris en Centrafrique [1/2]
3/23/20232 minutes, 26 seconds
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La prise en charge médicale des enfants malnutris en Centrafrique [1/2]

En Centrafrique, la crise humanitaire continue de s’exacerber, comme l’a relevé l’ONU, selon qui plus de la moitié de la population du pays aura besoin d’aide cette année. Parmi les conséquences prévisibles, la malnutrition infantile. À Bangui, au centre hospitalier universitaire pédiatrique, une unité nutritionnelle thérapeutique soutenue par Action contre la faim prend en charge les enfants atteints de malnutrition aigüe sévère avec complications, c'est-à-dire en danger de mort.  De notre correspondant à Bangui,  Sur un des lits du service d’urgence du CHUPB, une petite fille de 14 mois tâche de dormir malgré sa sonde nasale et son cathéter, sous le regard de sa maman et sous la surveillance du Dr Jean-Pierre Muhimana : « C’est un enfant qui est venu de Maka avait des diarrhées et des vomissements et on l’a mis sous oxygène. On procède au « remplissage » pour corriger la déshydratation. Si l’enfant avait été pris en charge correctement à la maison, cet enfant devait peser au moins 8,2 kilos ». Dans le lit voisin, la petite Karine s’agite… sa maman est venue en urgence quand elle s’est retrouvée dans un état critique : « Je suis venue en raison des diarrhées et des vomissements de mon enfant. Après la prise en charge médicale, ça s’est stabilisé. Ma fille se porte mieux maintenant. On en est là parce que je n’ai pas de moyens, pas d’emploi ». En saison sèche, l’UNT n’affiche pas complet. C’est à partir du mois de mars que les 80 lits se remplissent de jeunes patients atteints de complications comme le paludisme, la tuberculose ou le sida. Une fois l’urgence médicale passée, une prise en charge psychologique des enfants et des parents est prévue par l’équipe du Dr Jean-Richard Youkou. « Il y a la salle de jeux pour ressouder les liens. Force est de constater que certains parents ne jouent pas avec leurs enfants et cela créée une division. Ça peut entrainer l’enfant vers la dépression. Cela nous permet de voir également la tonicité de l’enfant et éventuellement identifier un retard psychomoteur ». 70 000 enfants de moins de 5 ans menacés de malnutrition sévère La petite Esther va mieux, elle va être bientôt déchargée. Vanessa, sa maman, est venue écouter les conseils de l’équipe : « Mon enfant ne veut pas manger depuis toute petite. Ça l’a mis dans cet état de malnutrition. Heureusement, avec le traitement, elle reprend du poids. On m’a expliqué le protocole : du lait thérapeutique et de l’eau seulement pour le moment. Et puis on verra par la suite, je serai à l’écoute de ce que diront les médecins. J’ai reçu de bons conseils et je vais essayer de corriger mes erreurs pour qu’elle soit en meilleure santé ». Pour l’équipe du CHUPB, la priorité est désormais de structurer le soutien psycho-social, afin d'améliorer le suivi du protocole médical par les familles, et de limiter les hospitalisations répétées dans des états graves. 
3/21/20232 minutes, 20 seconds
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Côte d'Ivoire: Yamoussoukro, la belle endormie

Le 21 mars 1983, l’Assemblée nationale de Côte d’Ivoire, vote le transfert de la capitale à Yamoussoukro. Le président d’alors, Félix Houphouët-Boigny, voulait ainsi désengorger Abidjan qui, en 1983, comprenait déjà 20% de la population. Yamoussoukro bénéficie d’un plan d’urbanisme, d’un aménagement extensif. Mais 40 ans plus tard, l’objectif est loin d’être atteint.
3/20/20232 minutes, 24 seconds
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Sénégal: «Zéro Faute», une chronique radio éducative

Depuis une dizaine d’années, la journaliste Astou Mbène Thioub propose sur la radio privée RFM une chronique éducative dédiée à la langue française : Zéro Faute, à destination des enfants.  De notre correspondante à Dakar, Sa voix à la radio reflète bien son tempérament. Avec bienveillance et enthousiasme, Astou Mbène Thioub enregistre ce matin-là des chroniques avec des élèves de CM1 et CM2 à l’école « Mamadou et Bineta » de Dakar. La journaliste de 40 ans a deux passions : la langue et les enfants. « Les échecs, nous en connaissons tous. Moi, personnellement, j'en ai connu. J'ai pu me relever grâce aux livres, grâce à la langue et j'adore l'univers des enfants. C'est l'univers des adultes que je trouve très compliqué », explique-t-elle. « Cette émission me permet d'aller dans les écoles, partager un peu de lecture, quelques règles de grammaire, d'orthographe et de conjugaison » ajoute Astou Mbène Thioub. C'est un héritage de son père, le professeur Ibrahima Thioub, ancien recteur de l’Université Cheikh Anta Diop de Dakar. « Tous les samedis à 12 heures, papa me remettait un livre que je devais lui rendre le samedi suivant avec un résumé, les citations-clés, les mots les plus difficiles avec leur définition, synonymes, antonymes, paronymes... Tout ce qui tourne autour des mots », se souvient-elle. Support éducatif À son tour désormais de transmettre. La chronique Zéro Faute est diffusée juste avant le journal de 7h sur la radio RFM. « Ça apprend beaucoup de choses, surtout aux enfants qui ne peuvent pas aller à l'école », estime un élève. « C'est compliqué, parce que je parle plus français que wolof. Donc parfois, je mélange un peu les deux », explique une autre élève. Entre le français, langue officielle, et les langues nationales, pas toujours facile de s’y retrouver pour les élèves, souligne Djibril Ndiaye, directeur adjoint de l’école primaire Mamadou et Bineta. Pour lui, les émissions éducatives sont un support. « L'enfant apprend d'abord sa langue maternelle avant d'apprendre le français qui est une langue secondaire chez nous. Ce qui fait qu'il y a quelques interférences au niveau des langues. L'émission Zéro Faute est une manière d'accompagner ce que font les écoles dans le domaine de l'apprentissage de la langue française qui est la langue d'enseignement, mais qui est aussi un medium d'apprentissage » Pour Astou Mbène Thioub, il n’y a pas de « blocage » entre les langues nationales et le français. Pour elle, « cette diversité est une richesse ».
3/19/20232 minutes, 24 seconds
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Sénégal: à Dakar, une formation pour que les femmes se fassent une place dans le milieu du graffiti

Un collectif de street-artistes a proposé une formation 100% féminine début mars. Dans ce milieu encore très masculin, les femmes commencent à se faire une place. Pendant une semaine, les volontaires ont été formées aux techniques de dessin, mais aussi à l’entrepreneuriat pour tirer des revenus du graffiti. De notre correspondante à Dakar, Devant un grand mur blanc, recouvert de brouillons de graffitis colorés, une vingtaine de femmes tracent des grandes lettres, pinceaux et bombes à la main. Yanka est rappeuse et danseuse dans la vie. C’est la première fois qu’elle peint sur un mur et l’expérience est un peu intimidante. « Quand je dessinais au crayon, je faisais des ronds pour donner un peu de perspective, mais là, c'est un peu différent. Ce n'est pas la même chose, on va pratiquer », dit-elle, pleine de volonté. C’est la septième fois que la formation Passer'elle est organisée par le collectif de graffeurs et graffeuses Doxandem Squad. Parmi les participantes, Kiné Diop, 30 ans. Elle travaille comme agent de développement, et fait de la teinture en parallèle. Elle a sauté sur l’occasion. « J'aime dessiner, j'aime créer, j'aime bricoler... Je suis dégourdie ! (rires) C'est une opportunité pour moi de toujours parfaire mon expérience sur l'art. Pourquoi ne pas faire du graffiti sur des boubous, du tissu », lance-t-elle. Faire changer les mentalités Au programme, cours de lettrages, de dessin de visages… Mais c’est surtout pour les cours d’entrepreneuriat culturel que Yanka a choisi de suivre cette formation gratuite. « On a vu comment monter un projet, comment le structurer, comment faire un plan de financement, à qui faire appel pour les subventions, à quel organisme on peut faire appel au Sénégal pour avoir des aides ». Yanka accorde aussi de l'importance au développement personnel, « parce que pour aller toquer aux portes pour revendre son projet, il faut avoir confiance, être convaincue et être convaincante. » Le collectif n’a reçu qu’une trentaine de candidatures. Il existe encore quelques barrières dans les mentalités. « Ma famille n'était pas d'accord pour que j'intègre ce milieu », explique Neye Mareme Fall. À 20 ans, elle en est à sa deuxième formation de graffiti. « Ils croyaient que c'était un milieu désastreux, ils croyaient que les graffeurs fumaient de la drogue », ajoute t'elle. « Ce sont les clients qui viennent vers moi » Pourtant, on peut faire carrière dans le graffiti. C’est le cas d’Aïda, nom d’artiste Dasha, qui est venue encadrer les étudiantes. Diplômée des beaux-arts, elle est l’une des premières graffeuses du pays. « De mon côté, je n'ai jamais démarché de clients. Ce sont les clients qui viennent vers moi. » raconte Dasha. « J'ai travaillé avec l'ONU tout récemment. J'ai aussi des marchés qui sont privés. C'est quelque chose qui paie, parce que c'est connu actuellement. Surtout au Sénégal », souligne-t-elle. Le projet de fin de formation des apprenties graffeuses : une grande fresque qui représente une reine traditionnelle, une lingère, à côté d’une ingénieure d’aujourd’hui. Pour montrer que tout est possible pour les femmes.
3/19/20232 minutes, 18 seconds
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Madagascar: l’alliance française d’Antananarivo, premier centre d'examen de langue française au monde

Selon l’Académie Malagasy, moins de 16% de la population de cette ancienne colonie française parlerait aujourd’hui français. Si à l’échelle du pays, de moins en moins de jeunes parlent donc la langue de Molière, ils sont cependant chaque année plus nombreux à s’inscrire à l’examen « Delf/Dalf » de français, organisé par les Alliances françaises du pays. Avec un objectif : obtenir le précieux diplôme, émis par le ministère de l’Éducation nationale français et reconnu internationalement pour poursuivre leurs études à l’étranger. Reportage en pleine session d’examen à l’Alliance française d’Antananarivo, le plus gros centre d’examen Delf/Dalf du monde qui a accueilli l’an dernier 7 700 candidats, avec notre correspondante Sarah Tétaud « Je réitère, j’insiste. Est-ce que tout le monde a bien émargé ? C’est très important sinon votre examen ne sera pas validé » rappelle un surveillant au micro. Ce jour-là, à l’Alliance française d’Antananarivo, ils sont 1 200 candidats concentrés, prêts à en découdre avec l’épreuve orale collective. Devant sa table, Célia, 20 ans, est étudiante en psychologie : « J’aimerais continuer mes études à l’étranger, il me faut le diplôme B2 minimum. » De l’autre côté de l’allée, Tefinanao, 22 ans, étudie la gestion : « C’est nécessaire pour les dossiers, pour certaines universités, dans les pays francophones. » Deux rangées devant, Floriniaina, 54 ans, fait presque figure d’exception : « Si je suis là aujourd’hui, pour passer l’examen, c’est parce que je suis enseignante au collège secondaire. Je veux augmenter le salaire et l’échelon. » Si l’examen attire pas mal de fonctionnaires, qui peuvent, en cas d’obtention du diplôme, bénéficier d’une modification dans leur avancement de carrière, les candidats du jour sont, pour plus de 50%, des étudiants. De quoi réjouir Patrick Bosdure, le conseiller de coopération et d’action culturelle de l’Ambassade de France à Madagascar, venu observer le déroulement de l’examen : « La priorité, c’est bien évidemment l’attractivité de notre enseignement supérieur et de faire en sorte que la plupart d’entre eux puissent partir en France, étudier, soit en sciences humaines, ou en sciences dures, mais surtout partir en France, puis revenir ici à Madagascar avec une formation à la française, pour commencer une carrière pro. Non, ce n’est pas encourager la fuite des cerveaux, puisqu’ils doivent revenir ! » Ce diplôme de langue française, rappelle Patrick Bosdure, ne facilite pas l’obtention d’un visa, mais seulement l’inscription à l’université. Toutefois, selon lui, les étudiants de la Grande Île ont la cote : « Les Malgaches qui partent étudier en France réussissent généralement très bien. Donc, ils bénéficient d’une excellente réputation dans notre système d’enseignement supérieur, donc leur candidature est très largement vue de façon très favorable. » Chaque année, 1 000 nouveaux étudiants malgaches arrivent en France. Jean-Patrice Rakoto Ramiarantsoa, professeur de français à l’Alliance française depuis 10  ans, se plaît à penser que certains des 4 500 étudiants actuellement présents dans l’Hexagone sont passés par sa classe : « Ils sont conscients qu’on a vraiment besoin de la langue française aujourd’hui. » Mais après cinq décennies marquées par des changements de politiques vis-à-vis de l’apprentissage et de la place du français dans la société, même réhabilité aujourd’hui, il demeure, 130 ans après son arrivée sur l’île, une langue de l'élite.
3/18/20232 minutes, 23 seconds
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Côte d'Ivoire: l'aire marine protégée de Grand-Bereby, une coquille vide ? [2/2]

La première aire marine protégée de Côte d’Ivoire a été créé officiellement en juillet 2022 dans le but de protéger la biodiversité de la baie de Grand-Bereby où l’on trouve un récif corallien et plusieurs espèces protégées comme la tortue marine, le requin marteau ou la raie-guitare. Mais en l’absence de décrets d’application, aucune sanction ne peut être prise contre les responsables des pêches irresponsables et irrespectueuses des communautés locales. La police maritime se cantonne à des actions de « sensibilisation ». Légalement, rien n'empêche les chalutiers de pénétrer dans l’aire marine. De notre correspondant à Abidjan, Dans le petit bureau de l’ONG Conservation des Espèces Marines, des affiches célébrant la création de l’aire marine protégée habillent les murs. Pour son président, Alexandre Dah, la réserve doit maintenant se doter rapidement d’un plan et d’un organe de gestion. « Tant que ce n'est pas mis en place, on navigue un peu dans un flou, pour tout le reste de la population ici à Grand-Bereby et pour ceux qui viennent d’ailleurs, ils voient l’aire marine protégée sur un papier. Ils se disent qu’ils ne voient pas concrètement qui gère, ce qui est fait... », dit Alexandre Dah. À ce jour, en l’absence de décrets application, les chalutiers, accusés de pratiques irresponsables, sont toujours légalement autorisés à pénétrer dans la réserve « Ils font de la surpêche, ils détruisent les fonds marins », dit José Gomez, co-fondateur de l’ONG. ► À lire aussi : Côte d'Ivoire: À Grand-Bereby, la lutte contre la pêche irresponsable s'organise Une pêche encore trop proche de l'aire marine protégée Selon les chiffres de l’organisation, 8 chalutiers ont été arraisonnés au cours de l’année passée. Problème : les textes ne permettent pas d’infliger une amende ou une sanction aux responsables de ces bateaux. « Malheureusement, l’interdiction de pêcher n’a pas encore été prise en compte par le ministère de la Pêche et des Ressources halieutiques, qui continue de délivrer aux chalutiers des licences qui leur permettent de pêcher à partir de 3 miles nautiques n’importe où dans les eaux ivoiriennes y compris dans l’aire marine protégée de Grand-Bereby », regrette José Gomez. Trois miles nautiques, soit un peu plus de 5 km. L’ONG demande que cette limite soit repoussée à 22 kilomètres, et réclame une interdiction totale de la pêche au chalut au sein de l’aire marine protégée. Pour un meilleur contrôle des pêcheurs artisanaux Selon le plan de gestion en cours de rédaction, les pêcheurs artisanaux doivent également être mieux contrôlés. Leur nombre a fortement augmenté ces dernières années. On compte environ 150 pirogues avec ou sans moteur à Grand-Bereby. Ata Koffi Yao, le chef des pêcheurs fanti, appelle lui-même à l’interdiction des filets en nylon. « Franchement, les filets en nylon, gâtent l'eau. Ça pourrit et ça éloigne le poisson. En tant que chef, je veux qu'on enlève ces filets et qu'on diminue le prix du filet en coton pour permettre aux pêcheurs de pêcher avec le coton », souhaite-t-il. Sans subvention ou aide à la production, les pêcheurs pourraient difficilement se séparer de leur filet en nylon, moins cher et plus robuste que les filets en coton. « Avant, avec les filets en coton, le travail était bon, mais maintenant, ce n'est plus trop ça. C'est cher. C'est pour ça que nous tous, on utilise le nylon », explique Koffi, pêcheur en pirogue. En cas de respect d’un plan de gestion précis et détaillé de l’aire marine protégée, les défenseurs de l’environnement espèrent que la population de poisson cesse de diminuer, voire augmente, d'ici à deux ou trois ans.
3/16/20232 minutes, 23 seconds
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Côte d'Ivoire: À Grand-Bereby, la lutte contre la pêche irresponsable s'organise (1/2)

Ces dernières années, la présence de chalutiers « chinois » près des côtes de Grand-Bereby irrite les quelque 2 000 pêcheurs de la zone. La mise à disposition d’une vedette de patrouille à la police maritime par une ONG de protection de l’environnement aurait permis de réduire leurs incursions. Ces bateaux accusés de surpêche et pratiques irresponsables continuent toutefois de pénétrer dans la première aire marine ivoirienne protégée, au large. Le reportage de François Hume-Ferkatadji. La vedette file à vive allure sur une mer calme et azur. À son bord, le lieutenant Guivé, chef de la police maritime de Grand-Bereby, équipé d’un fusil kalachnikov rouillée en tout point. Il salue la mise à disposition de ce bâteau : « C'est important parce que l'aire marine protégée a été créée. Donc il fallait un matériel de mobilité pour pouvoir contrôler et surveiller la mer. Parce que, lorsque les Chinois viennent, vous voyez qu’ils râclent tout le poisson. Donc, il y a une aire dans laquelle ils ne doivent pas pêcher. » La première aire marine protégée de Côte d’Ivoire a été créé en juillet 2022 et fait la taille d’un département. Le bateau de la police maritime permet la surveillance d'une infime partie de cette espace : de 5 à 10 kilomètres des côtes maximum. « Heureusement pour nous, il n'y a plus de bateaux qui viennent, poursuit le lieutenant Guivé. Parce qu'avant on pouvait se retrouver avec 5 bateaux, 6 bateaux, 7 bateaux. Mais maintenant, quand on y va, on ne les voit pas non plus ». Les bateaux de pêche s’éloignent désormais des côtes ou se reportent sur les zones de Tabaoulé ou Sassandra. Pour protéger la baie, la collaboration des pêcheurs artisanaux est essentielle. Koffi, pêcheur d’origine ghanéenne, s’autorise un temps de repos sur la plage après une nuit en mer : « Avant les pêches en bateau nous fatiguait beaucoup. Maintenant, avec la police maritime, j’ai leur numéro. Donc, si je vois les chalutiers quelque part, je les appelle, ils sont là et ils n'ont qu'à venir. Grâce à ça, les bateaux se sont un peu éloignés. Mais, souvent, ils se cachent pour venir voler dans l'endroit où c'est interdit d’aller pêcher. » À Grand-Bereby, la population de poisson diminue drastiquement Pour les pêcheurs, les chalutiers « chinois » représentent la principale menace. Mais d'autres éléments viennent troubler leur activité.  Les tortues marines et les dauphins déchirent leurs filets. Devant nos yeux, deux dauphins tentent de pénétrer dans un grand filet, qu’une quinzaine de pêcheurs remontent à la force des bras. L’ONG CEM (Conservation des espèces marines) a mis en place un système de compensation pour les pêcheurs, contre la promesse de ne pas tuer ces espèces protégées. Mais à Grand-Bereby, le constat est toujours le même : la population de poisson diminue drastiquement. Les défenseurs de l’environnement demandent désormais la publication de décrets d’application pour réglementer plus précisément la pêche et l’aire marine protégée.
3/16/20232 minutes, 33 seconds